La lignée des EUZET de Martinique (suite 2).
Une rare carte postale de Rivière-Pilote,
sa place du marché avec les omnibus "Ford" qui attendent leurs passagers
Un remarquable dessin de l'éruption de la Montagne Pelée
(Supplément littéraire illustré du Petit Parisien, n° du 08.06.1902)
Le contexte, entre 1832 et 1860, à Rivière-Pilote
L'objectif de cette page est de replacer les personnes et les familles dans leur contexte, géographique,
historique, sociologique, économique, etc. La documentation déjà réunie sur la région de
Rivière-Pilote n'est, hélas, pas très abondante et celle qui existe est souvent imprécise.
Nous n'avons pas trouvé grand chose dans les livres sur la situation en 1848, par exemple, que ce soit du
côté des blancs, des mulâtres ou des noirs, à part l'affaire du curé Germain
MARCHÉSI. De même, "l'Histoire des communes" indique pour la fin du XVIIIe siècle, que quatorze
sucreries produisent du sucre blanc, et une seule, du sucre brut. Nous aimerions connaître les noms et les lieux de
ces quinze sucreries. Autre exemple, si l'insurrection de 1870 est mieux connue, en particulier grâce à
l'article de Gilbert PAGO qui est bien documenté, nous serons obligé de recourir aux mêmes sources,
aux Archives nationales, pour retrouver les noms qui ne sont pas tous cités dans son étude, qui est, par ailleurs,
très intéressante. Autre article très utile, celui de l'abbé Bernard DAVID qui a
étudié les registres paroissiaux, le registres des libres et celui des esclaves de Rivière-Pilote.
C'est une étude statistique très fine mais nous aimerions l'enrichir avec les noms et les situations des
intéressés. Un seul exemple, il indique que pour 10 libres seulement (7 hommes et 3 femmes) on peut
déterminer la date d'affranchissement. Il donne les dates (entre 1783 et 1819) mais pas les noms. Les
découvertes les plus innovantes passent par le dépouillement des registres notariaux qui sont, pour la
plupart microfilmés aux Archives nationales. Comme le constatait déjà l'abbé Bernard DAVID, c'est le moyen de savoir
à qui appartenaient les esclaves (ils devaient changer souvent de maîtres, du moins les femmes, à chaque fois qu'une
propriété était vendue)
Les affranchissements de 1833, à Rivière-Pilote
Un travail de recensement de tous les affranchissements est actuellement en cours. La chercheure Nathalie BUHOURS photographie, dans la Gazette officielle
de la Martinique, les arrêtés collectifs. Voici, par exemple, en ce qui concerne Rivière-Pilote, le résultat obtenu pour
l'année 1833 (quelques adaptations d'orthographe ont été faites : enfants au lieu d'enfans, métisse au lieu de
métive, mulâtre au lieu de mulatre, mulâtresse au lieu de mulatresse, René au lieu de Réné) :
Les habitations, en 1848, à Rivière-Pilote
A/ L'habitation Fougainville
La société créée entre les propriétaires de "l'habitation sucrerie dite Fougainville, sise à la Rivière
Pilote, et divers cultivateurs" est du 4 septembre 1848.
B/ L'habitation Saint Pons
La société créée entre le propriétaire de "l'habitation sucrerie dite Saint Pons, sise en la commune de la
Rivière Pilote, et divers cultivateurs" est du 8 août 1848.
C/ L'habitation Lescouët
Cette société est calquée sur celui de Saint Pons, ce qui est expliqué dès l'introduction : "(...) pour laquelle ils
[les contractants] ont admis les mêmes bases et les mêmes conditions que celles de la société formée entre madame veuve
DUPLESSIS et divers cultivateurs pour l'exploitation de l'habitation sucrerie dite Saint Pons (...)". La référence à Saint Pons est
également reprise dans les articles (en fait, c'est pratiquement un "copier-coller" Saint Pons- Lescouët).
D/ L'habitation Allou Wanceslas
La société créée entre Charles Louis Philippe Marguerite ALLOU WANCESLAS et divers cultivateurs, pour l'habitation "sucrerie,
cafeirie et vivrière" en la commune de la Rivière Pilote (où il réside), date du 26 mars 1849.
E/ L'habitation de Mauny
La société créée entre François Joseph Ferdinand de MAUNY et divers cultivateurs, pour l'exploitation de l'habitation
sucrerie de Mauny, en la commune de la Rivière Pilote, date du 28 septembre 1849.
F/ Analyse comparée des cinq sociétés : Fougainville (F), Saint Pons (S), Lescouët (L), Allou Wanceslas (A) et
de Mauny (M)
a) Analyse article par article
b) Analyse d'ensemble
Quatre quartiers de Rivière-Pilote (1840-1960)
Un livre a permis d'y voir plus clair pour la période de l'après 1848, en particulier pour
Rivière-Pilote. Il s'agit de l'ouvrage de Christine CHIVALLON : "Espace et identité à la Martinique",
qui a le sous-titre suivant : "Paysannerie des mornes et reconquêtes collectives 1840-1960 (CNRS Éditions,
Paris, 1998).
L'abbé Bernard DAVID, à la suite de cette observation écrit : "Un seul cas nous paraît pouvoir
être tiré d'une façon quasi-certaine de l'examen des registres paroissiaux : de 1803 à
1811 nous
trouvons un propriétaire, M. DÉCASSE, qui possédait certainement une habitation importante puisque, au
cours de ces huit ans, nous relevons sous son nom 9 mères créoles et 28 Africains nouvellement
arrivés ; en 1811, il disparaît entièrement tandis qu'apparaît M. ROUXEL de LESCOUET dont
l'exploitation est, elle-aussi, importante, vu le nombre de mères et d'Africains. Au cours des premières
années de ROUXEL, 5 mères créoles de même nom que celles de M. DÉCASSE font baptiser
des enfants et l'une d'elles peut être identifiée avec certitude car elle est mariée". L'intuition de l'abbé Bernard
DAVID était pertinente, puisque c'est bien Georges ROUXEL de LESCOUËT qui a acheté l'habitation des DÉCASSE, en 1812
(voir les détails de cet acte dans la suite 1)
L'étude des registres paroissiaux demande du temps mais il est vite possible de se rendre compte de ce qui en fait
l'originalité et celle-ci varie selon les époques et les lieux. Ainsi, les registres paroissiaux de
Rivière-Pilote sont très riches en ce qui concerne les affranchissements, par exemple pour la période
1832-1835, avec non seulement l'enregistrement d'affranchissements individuels mais aussi des arrêtés
d'affranchissements collectifs qui donnent toutes les références, dates, nom de celui ou celle qui affranchit
et de celui ou celle qui est bénéficiaire de l'affranchissement. Il y a là un éclairage
particulièrement intéressant pour l'état des mentalités. Il serait intéressant,
par exemple, de lister le nom de ceux qui affranchissent et, inversement, de ceux dont on ne voit jamais le nom. Une
lecture rapide des années 1832-1835 ne semble pas faire apparaître des LESCOUET ou des LA MAUNY. Par contre,
il semble qu'il y ait beaucoup de petits propriétaires, pas forcément blancs d'ailleurs. Inversement, les
registres paroissiaux de Rivière-Pilote, pour la même période, ne donnent presque jamais le lieu
précis de naissance, ce qui ne permet pas de connaître le nom des habitations. Celui-ci n'est indiqué
qu'en cas de décès dans la commune de quelqu'un habitant à l'extérieur. Par exemple, le 17
septembre 1832, une personne domiciliée à Saint Pierre meurt "sur l'habitation de M. Charles Henri MARTIN".
Au Marin, la pratique du curé est différente en 1860. Nous avons noté les lieux de naissance dans la
commune du Marin et la surprise fut grande de trouver autant d'habitations (voir ci-dessous). En dehors des naissances dans
les demeures sur les habitations, certaines se font dans leur demeure "sise en ce bourg", avec, rarement, un nom de rue.
Nous avons aussi noté des naissances dans des demeures "sises à la campagne". Enfin, certains lieux-dits
apparaissent parfois : Au Pérou, au Cap, au Fond Gens Libres, au Morne Rouge, au Morne Malheureux, au Morne Courbaril,
au Morne Gommier, au Morne Sulpice, à la Dénos, à la Vierge. Les habitations notées lors de ce sondage donnent une
idée du morcellement de la propriété, en 1860. Si certaines habitations appartiennent incontestablement à des propriétaires blancs (ainsi pour
l'habitation Debuc, car, en 1860, nous avons aussi noté le décès d'André DEBUC, médecin,
né à Bordeaux), d'autres ont des dénominations (Agnès, Eliette, Adolphe) qui laissent penser
que mulâtres ou noirs ont déjà pris leur place. Enfin, il y a rarement l'indication d'habitations
de communes voisines (l'habitation des Grottes, de la commune Sainte Anne, par exemple). Voici donc la liste de 35
habitations, au Marin, en 1860. Ce n'est qu'un premier relevé, non exhaustif (un simple coup d'oeil à la
carte IGN 4503 MT TOP 25 montre à la fois la persistance de certains noms et une plus grande richesse encore des
lieux-dits), et dont la graphie des noms demanderait certainement à être vérifiée :
Ablama ; Adolphe ; Agnès ; Balata ; Baude ; Bellevue ; Biron ; Cédalise ; Debuc ; Désétages ;
Duprey ; Eliette ; Exnée ? ; Fernay ; Fleurineau ; Fleury ; Fournier ; Grand Fond ; Grande savane ; Hédul ;
Hervé ; Jansol ; Joseph Fragille ; Le repos ; Macabore ; Massel ; Mondésir ; Nérée ;
Noé Sommier ; Pascal ; Rivière ; Saintville Pélage ; Suffrin ; Veuve Boisseudes ; Veuve Rémy
1 Marie-Josèphe-Zélime, capresse de 31 ans, sans profession, ses enfants : Louis-Charles, de 10 ans, Marie-Joséphine,
de 8 ans, Marie-Julie, de 4 ans, mulâtre et mulâtresses créoles, libres de fait, par sieur Charles Alexandre.
2 Rosette dite Lapoule, négresse de 51 ans, cultivant la terre, ses enfants : Louisa, de 12 ans, Mondésir, de 7
ans, capre et capresse créoles, libres de fait, par sieur Jean-Baptiste Josapha.
3 Marguerite dite Juliette, capresse créole de 22 ans, couturière, libre de fait, par le même.
4 Ernest, mulâtre créole de 15 ans, charpentier, libre de fait, par sieur Joseph Linval fils.
5 Jeanne-Rose, négresse créole de 41 ans, cultivant la terre, libre de fait, par sieur René-Nicolas Lavau.
6 Félicie dite Félie, de 24 ans, cultivant la terre, sa fille Reine dite Arrissia, d'1 an, mulâtresses
créoles, libres de fait, par le même.
7 Rose-Madelaine dite Acélie, mulâtresse créole de 21 ans, cultivant la terre, libre de fait, par le même.
8 Rosette, mulâtresse créole de 69 ans, cultivant la terre, libre de fait, par sieur Athanase.
9 Jeanne, de 24 ans, cultivant la terre, son fils Séverin, de 4 ans, nègre et négresse créoles, libres de fait,
par le même.
10 Denise, de 28 ans, couturière, ses enfants : Mélanie, de 7 ans, Amédée, de 5 ans, Montout,
de 2 ans, Emile d'1 an, métis et métisses créoles, libres de fait, par sieur Henri Saint-Amour.
11 Franchine, métisse créole de 69 ans, sans profession, libre de fait, par dame Elisabeth Joseph Linval.
12 Louise, mulâtresse créole de 8 ans, libre de fait, par la même.
13 Anne, de 41 ans, cultivant la terre, ses enfants : Anne-Rose dite Malvina, de 16 ans, Marie-Catherine, de 9 ans,
Marie-Luce, de 5 ans, capresses créoles, libres de fait, par sieur Joseph Linval fils.
14 Virginie, mulâtresse créole de 17 ans, couturière, libre de fait, par le même.
15 Justine, capresse créole de 11 ans, couturière, libre de fait, par sieur Rodolphe Rampart.
16 Amélia, capresse créole de 8 ans, couturière, libre de fait, par dame Anne Emélie.
17 Polixène, capresse créole de 23 ans, couturière, libre de fait, par dame veuve Charles Cérambe.
18 Jeannine, de 26 ans, couturière, ses enfants : Francis, de 5 ans, Marie-Louise, de 3 ans, Elise, d'1 an, capre et
capresses créoles, libres de fait, par sieur Elie Basile.
19 Catherine, capresse de 44 ans, cultivant la terre, son fils Léo, mûlatre de 10 ans, créoles, libres de fait, par sieur
Marcel Henri.
20 Monlouis, mulâtre créole de 45 ans, cultivant la terre, libre de fait, par le même.
21 Elisabeth-Barbe, métisse créole de 27 ans, liberté étrangère, autorisée par le Procureur du Roi
22 Joseph, mulâtre créole de 35 ans, marin, libre de fait, par sieur Michel Montet.
23 Joseph-Lowenski, mulâtre créole de 22 ans, charpentier, libre de fait, par dame veuve Ch.er Latour.
24 Eloïse, négresse créole de 50 ans, blanchisseuse, esclave, par dame Marie-Louise Avrillette.
25 Rémy, mulâtre créole de 24 ans, libre de fait, par dame Marie-Catherine Laville.
25 Rosette, de 66 ans, cultivant la terre ; ses enfants : Marie-Josèphe, de 15 ans, Alphonsine, de 7 ans, capresses
créoles, libres de fait, par dame veuve Benquet.
[à noter, ci-dessus, l'erreur de numérotation : 25 au lieu de 26]
26 Jeannette, de 63 ans, cultivant la terre, ses enfants : Chérubin, de 13 ans, Zélimar, de 15 ans, Anatole, de
11 ans, Zélima, de 8 ans, capres et capresses créoles, libres de fait, par sieur Chassolle Dessablon.
27 Césaire, nègre créole de 46 ans, cultivant la terre, libre de fait, par sieur Ducanet Desormaux.
28 Rosiette, mulâtresse créole de 55 ans, cultivant la terre, libre de fait, par le même.
29 Marie, de 45 ans, cultivant la terre ; ses enfants : Amélia, de 15 ans, Henry, de 10 ans, Anatorie, de 7 ans,
Anaïs, de 6 ans, Richemond, de 5 ans, Desemond, de 4 ans, Anna, de 3 ans, mulâtres et mulâtresses créoles, libres
de fait, par le même.
30 Marie-Marthe, de 41 ans, cultivant la terre ; ses enfants : Amélaîde, de 9 ans, Charlery, de 7 ans, Sydney,
d'1 an, nègres et négresses créoles, libres de fait, par sieur Allou Desrameaux.
31 Eloïse, négresse créole de 36 ans, cultivant la terre, libre de fait, par le même.
32 Chérubin, capre créole de 15 ans, charpentier, libre de fait, par le même.
33 Thérésine, mulâtresse créole de 20 ans, cultivant la terre, libre de fait, par sieur Chansolle Dessablons.
34 Annette, négresse de 32 ans, couturière ; ses enfants : Charles, de 15 ans, Ste-Marie dit Rosemin, de 14 ans,
Salomon dit Rosemont, de 13 ans, mulâtres, créoles libres de fait, par sieur Larintrie d'Abadie.
35 Cornélie, de 35 ans, cultivant la terre ; ses enfants : Moise, de 6 ans, Anneville, de 3 ans, Rose-Adélaide,
de 2 ans, Dufrenie, de 3 mois, mulâtres et mulâtresses créoles, libres de fait, par sieur Jean-Louis Lambert.
36 Mérope, mulâtresse créole de 20 ans, couturière, libre de fait, par le même.
37 Virginie, mulâtresse créole de 18 ans, couturière, libre de fait, par le même.
38 Alexandre, nègre créole de 52 ans, cultivant la terre, libre de fait, par sieur Gabriel Chansolle.
[39 : ce numéro a été omis]
40 Pierre-Philippe-Monrose, de 37 ans, ses enfants : Pierre-Augustin-Nicolas et Pierre-Augustin-Fonrose, jumeaux de 16 ans,
mulâtres créoles, charpentiers, libres de fait, par sieur Pierre Montet.
41 Eugène, mulâtre créole de 30 ans, charpentier, libre de fait, par sieur Réné Quantin.
42 Betzy dite Elisabeth, de 60 ans, sa fille Marie, de 10 ans, mulâtresses créoles, couturières, libres de fait,
par dlle Adélaïde Maillet.
43 Marie-Sainte-Jeanne-Rose dite Eliette, cultivant la terre, ses enfants : Alexandrine, de 12 ans, Louis-Philippe, de 10 ans,
Catherine-Rose, de 8 ans, Elisabeth, de 4 ans, Marie-Josèphe, de 2 ans, mulâtre et mulâtresses créoles,
libres de fait, par sieur Louis René Corail.
44 Louisia, de 29 ans, cultivant la terre, ses enfants : Lauzéa, de 12 ans, Césaire, de 9 ans, mulâtre et
mulâtresses créoles, libres de fait, par le même.
45 Joseph, mulâtre créole de 30 ans, cultivant la terre, libre de fait par dame Madelonnette.
46 Charlery dit Céleri, mulâtre créole de 24 ans, cultivant la terre, libre de fait, par la même.
47 Elise, capresse créole de 13 ans, couturière, libre de fait, par dame Félicité.
48 Charlotte-Louise, métisse créole de 4 ans, libre de fait, par dlle Sylvie, sa mère.
49 Eugène, mulâtre créole de 18 ans, maçon, libre de fait, par sieur Léandre Arzaste.
50 Francillette, capresse créole de 25 ans, cultivant la terre, libre de fait, par sieur Michel Adenet.
51 Marie-Anne-Zulima, mulâtre créole de 7 ans, libre de fait, par le même.
52 Anne-Françoise-Ethélène, mulâtresse créole de 7 ans, libre de fait, par le même.
53 Jeanne-Rénélise-Lisina, mulâtresse créole de 3 ans, libre de fait, par le même.
54 François-Adolphe-Optat-Emile, mulâtre créole de 6 mois, libre de fait, par le même.
55 Emelie, mulâtresse créole de 50 ans, blanchisseuse, libre de fait, par le même.
56 Philippe et Philibert, mulâtres jumeaux de 8 mois, créoles, libres de fait, par dlle Céphise, leur
mère.
57 Reine, de 16 ans, couturière, sa fille Rose, de 20 mois, mulâtresses créoles, libres de fait, par sieur
René Corail.
58 Antoinette, de 32 ans, cultivant la terre, ses enfants : Antoine-Eudariste, de 12 ans, Lucile dite Amélie, de 3 ans,
Marie-Sainte dite Marie-Jeanne, de 10 ans, nègre et négresses créoles, libres de fait, par le même.
59 Bibianne, de 31 ans, cultivant la terre, ses enfants : Alexis, de 12 ans, Louis, de 10 ans, Louisia, de 4 ans,
Agathe, de 2 ans, Jean-Marie, d'1 mois, nègres et négresses créoles, libres de fait, par le même.
60 Marie-Sainte, négresse africaine de 62 ans, cultivant la terre, libre de fait, par sieur Césaire René fils.
61 Louis, capre créole de 8 ans, sans profession, libre de fait, par le même.
62 Louis, mulâtre créole de 55 ans, charpentier, libre de fait, par sieur Allou Sainte-Rose Daniel.
63 Léandre, mulâtre créole de 18 ans, maçon, libre de fait, par sieur Léandre Arzaste.
64 Marie-Victoire-Alphonsine, mulâtresse créole de 5 ans, libre de fait, par dlle Marie-Victoire Zulma, sa mère.
65 Annette-Julien-François, mulâtresse créole de 28 ans, cultivant la terre, libre de fait, par dame Pétronille
dite Virginie.
66 Joséphine dite Assée, négresse créole de 56 ans, cultivant la terre, libre de fait, par sieur Charles
Borromée.
67 Maurile dite Rosélie, mulâtresse créole de 9 ans, libre de fait, par le même.
68 Marie-Luce, négresse créole de 62 ans, cultivant la terre, libre de fait, par sieur Césaire René
fils.
69 Philippe, nègre créole de 79 ans, cultivant la terre, libre de fait, par sieur Jean-Philippe Augustin.
70 Lise, capresse créole de 30 ans, cultivant la terre, libre de fait, par sieur Pierre Pyrrhus.
71 Gilles-Jullien, mulâtre créole de 30 ans, charpentier, libre de fait, par sieur Jean-Baptiste Privat.
72 Alexandrine dite Femme, mulâtresse créole de 41 ans, couturière, libre de fait, par sieur Jean d'Abadie.
73 Antoine, nègre créole de 15 ans, charpentier, libre de fait, par sieur René Corail.
74 Charlery-Théotiste, mulâtre créole de 30 ans, cultivant la terre, libre de fait, par sieur Jean-Baptiste Josapha
75 Joseph, capre créole de 26 ans, charpentier, libre de fait, par le même.
76 Jean-Baptiste dit Sully, capre créole de 24 ans, maçon, libre de fait, par le même.
77 Marie-Louise, de 28 ans, couturière, ses enfants : Cléry, de 6 ans, Honnorine, de 5 ans, métis et
métisses créoles, libres de fait, par le même.
78 Rose dite Evelina, métisse créole de 13 ans, couturière, libre de fait, par sieur Gravier Monplaisir.
79 Jean dit Monnélie, mulâtre créole de 23 ans, charpentier, libre de fait, par sieur Louis Pomponne.
80 Louis-Dorval, mulâtre créole de 22 ans, maçon, libre de fait, par le même.
81 Charles-Joseph, métis créole de 30 ans, charpentier, libre de fait, par le même.
82 Louis dit Fanor, nègre créole de 42 ans, cultivant la terre, libre de fait, par le même.
83 Alexandrine dite Sollo, mulâtresse créole de 15 ans, couturière, libre de fait, par le même.
84 Sylvestre, nègre créole de 17 ans, charpentier, libre de fait, par sieur Pierre-Louis Joseph.
85 Céleste, négresse Ibo de 67 ans, blanchisseuse, libre de fait, par sieur Pierre Caribert.
86 Esther, de 28 ans, cultivant la terre, ses enfants : Alexandrine, de 8 ans, Joséphine, de 7 ans, Charles, de 4 ans,
Lucia, de 2 ans, nègres et négresses créoles, libres de fait, par sieur Pierre Pirrhus.
87 Edmond, mulâtre créole de 31 ans, charpentier, libre de fait, par dlle Mariette.
88 Ferdinand, mulâtre créole de 29 ans, marin, libre de fait, par la même.
89 Félix, mulâtre créole de 17 ans, maçon, libre de fait, par la même.
90 Charles, mulâtre créole de 19 ans, maçon, libre de fait, par la même.
91 Elisabeth dite Aline, de 32 ans, couturière, ses enfants : Marie, de 4 ans, Alexandre, de 2 ans, Sébastien,
de 5 mois, mulâtres et mulâtresses, libres de fait, par sieur Louis dit Mulâtre.
92 Rose ?, négresse créole de ? ans, couturière, libre de fait, par le même ?
93 François ?, nègre créole de 52 ans, cultivant la terre, libre de fait, par sieur Léandre Arzatte.
94 Léonie ?, mulâtresse créole d'1 an, libre de fait, par dlle Marie Sainte, sa mère.
95 Sylvain, nègre créole de 36 ans, cultivant la terre, libre de fait, par dame veuve Charles Cérambe.
96 Marthe-Rose, de 42 ans, cultivant la terre, ses enfants : Catherine-Rose, de 5 ans et Marie-Victoire, de 2 ans, capresses créoles, libres
de fait, par sieur Maurice Belay.
97 François, mulâtre créole de 35 ans, cultivant la terre, libre de fait, par dlle Sophie Ste Catherine.
98 Jean-Joseph dit Sansnom, mulâtre créole de 28 ans, cultivant la terre, libre de fait, par la même.
99 Bernadine, capresse créole de 26 ans, couturière, libre de fait, par sieur Charles Borromée.
100 Elisabeth dite Avrillette, négresse créole de 27 ans, couturière, libre de fait, par le même.
101 Marie-Joséphine dite Cléophée, négresse créole de 16 ans, couturière, libre de fait, par dlle
Félicité.
102 Elisabeth Amédée, de 15 ans, couturière, ses enfants : Marie-Emélie, de 20 mois, et Césaire,
de 5 mois, mulâtre et mulâtresses créoles, libres de fait, par la même.
103 Lucie, capresse de 35 ans, couturière, son fils Joseph, de 14 ans, mulâtre, charpentier, créoles libres de fait,
par elle-même, autorisée par sa patronne.
104 Louis Zabeth ?, créole de 18 ans, charpentier, libre de fait, par sieur de Beauregard.
105 Montrose, mulâtre créole de ? ans, charpentier, libre de fait, par lui-même, autorisé par sa patronne.
106 Honorine, mulâtresse créole de ? ans, couturière, libre de fait, par Victor ?
107 Arsène, mulâtresse créole de 20 ans, couturière, libre de fait, par le même ?
108 Reine, de 19 ans [le reste illisible]
[n° 109 à 132 : illisible]
133 Adolphe Donatien, mulâtre créole de 29 ans, charpentier, libre de fait, par dame de Fougainville.
Une première analyse de cette liste montre d'abord qu'il faut être prudent avec l'orthographe des noms. Pour ne prendre qu'un seul exemple,
au n° 26, on nomme le sieur CHASSOLLE DESSABLON, nom qui devient CHANSOLLE DESSABLONS au n° 33, cependant qu'il a un sieur Gabriel CHANSOLLE, au n° 38.
Pour les partie illisibles, il faudra compléter avec les transcriptions faites sur le registre d'état civil de Rivière-Pilote mais
on peut déjà tracer quelques lignes directrices.
En ce qui concerne les métiers des affranchis, on trouve 18 charpentiers, 12 cultivateurs, 6 maçons et 2 marins. Du
côté des affranchies, on a 28 couturières, 27 cultivatrices, 3 blanchisseuses et deux sans profession. Au total, toujours pour les
noms lisibles, il y a 68 femmes, 40 hommes et 72 enfants, soit 180 personnes. La différence entre le nombre de métiers et le nombre
d'hommes et de femmes vient du fait que, pour certaines femmes, le métier n'est pas indiqué.
La quasi totalité des affranchi(e)s est d'origine créole. A noter, cependant, deux africaines : Marie-Sainte (n° 60)
"négresse africaine de 62 ans" et Céleste (n° 85) "négresse Ibo de 67 ans". A noter encore un cas
unique : Elisabeth-Barbe (n° 21) "métisse créole de 27 ans, liberté étrangère, autorisée par
le Procureur du Roi".
Pour certaines affranchies ou certains affranchis, on peut supposer un lien avec le nom de l'affranchisseur ou celui de l'habitation, comme par exemple au
n° 18 entre Elie BASILE et Elise. Toutefois, ce ne sont que des hypothèses et il faudrait surtout pouvoir comparer avec d'autres listes
d'affranchi(e)s de Rivière-Pilote. Toutes ces statistiques ne peuvent, d'ailleurs, avoir de valeur que si l'on compare sur plusieurs années.
Ainsi, sur la liste de 1833, le nom de de BEAUREGARD n'apparaît qu'une seule fois, ainsi que celui de de FOUGAINVILLE (sous réserve de
la vingtaine de noms qui doivent être complétés). Qu'en est-il avant et après 1833 ? Il faudrait également
comptabiliser le nombre d'affranchissements par "affranchisseur" ou "affranchisseuse", etc.
Du côté des affranchi(e)s et de leurs enfants, une étude sur les âges et les prénoms serait aussi utile mais il est plus
sage d'attendre la compilation avec d'autres listes, au moins pour les années de la décennie 1830.
(à suivre)
A/ L'habitation Fougainville
B/ L'habitation Saint Pons
C/ L'habitation Lescouët
D/ L'habitation Allou Wanceslas
E/ L'habitation de Mauny
F/ Analyse comparée des cinq sociétés
En 1848, dans un contexte très tendu, les propriétaires d'habitations ont créé avec leurs anciens esclaves des
"associations" ou "sociétés". Ces actes ont un intérêt historique évident, dans la mesure où ils constituent
autant de "photographies" des habitations, juste après l'abolition de l'esclavage.
(à compléter)
En ce qui concerne Rivière-Pilote, les archives notariales ont conservé les minutes de constitution de cinq de ces associations.
(à compléter)
Il y a trois copropriétaires dont Eugène Laure Amable Timoléon
de FOUGAINVILLE, agissant en son nom personnel et au nom de Stanislas Amédée de FOUGAINVILLE (demeurant à Paris) et d'Amand,
Charles, Oscar, ARTUR du PLESSIS (propriétaire demeurant en la commune de Rivière-Pilote) ; agissant aussi comme ayant l'usufruit des biens
de Mlle Marie-Agathe Léa ARTUR du PLESSIS, sa fille mineure issue de son mariage avec dame Anne Sophie de FOUGAINVILLE, décédée.
Du côté des cultivateurs, il y a 53 noms (qui ne sont presque tous que des prénoms) : Lucien, Henry, Abraham, Auguste, Charleri,
Dieudonné, Gilles, Hilaire, Jean Gilles, Medard, François, Florimond, Jean CATHERIN, Jorville (à vérifier), Joseph, Prosper,
Régis, Théodose, Zacharie, Clément, Louis Charles, Ste Rose, Elie, Siméon, Victor, Jean Louis, Léonce, Raymond,
Ferdinand, Sylveste, Jean N... (à vérifier), Marie Louise, Marguerite, Antoinette, Adèle, Augusta,
Louisia, Rénétte, Annette, Denise, Corantine, Clotilde, Charlotte, Félicité, Indille (à vérifier),
Médelpha, Marie Ro[se], Melia (à vérifier), Olympe, Théotiste,
Sévérine, Eugénie, Marguerite BO[...].
Article 1er : Objet de la Société
Ladite société a pour objet la culture de la canne et la fabrication du sucre.
Article 2e : Durée de la Société
La présente société est formée pour trois années ent[ières] et consécutives qui commenceront à
compter de ce j[our] et finiront au premier août 1851. les propriétaires et les travailleurs seront [censés] la renouveller
s'ils ne manifestent au moins tro[is mois] d'avance la volonté de la faire cesser.
Article 3e : Mise sociale
La mise sociale des propriétaires consiste dans autant de fonds que les travailleurs pourront en cultiver en cannes, dans les plantations
actuellement existantes, les bâtiments d'exploitation, boeufs, mulets, ustensiles aratoires, cabrouets, matériel d'exploitation et de
fabrication et cases des travailleurs. Lesquels biens il a été fait un état détaillé certifié véritable
par les associés et qui est demeuré ci annexé.
Tous ces objets demeurent la propriété exclusive des propriétaires et la société n'en est qu'usufruitière
pendant le temps de sa durée.
La mise sociale des cultivateurs consiste dans leur travail de culture de la canne et de fabrication du sucre, dans l'industrie de chacun d'eux sur la
dite habitation et dans les soins qu'ils s'engagent à donner à tout ce qui dépend de la dite société.
Article 4e : Dépenses à la charge de la société
La société supportera l'entretien des bâtiments de manufacture et d'exploitation, tel que le jeu du moulin, chaudière et
autres, des animaux, des ustensiles d'exploitation et des instruments aratoires, et généralement toutes les dépenses de [fesans]
valoir sont icelles qui seront mises ci après à la charge des propriétaires.
Elle supportera toutes les charges et les impôts fonciers qui pourraient être mis par le gouvernement durant la société, sur
les terres, bâtiments manufactures et matériel d'exploitation à l'exception toutefois des impôts qui peseraient
spécialement sur les bâtiments et autres biens dont la société n'a pas la jouissance. Ces dernières impositions seront
à la charge des propriétaires.
Dépenses à la charge de chaque associé
Les propriétaires auront à leur charge particuli[ère] l'entretien de leur maison et dépendances et les frais de leur
mandataire ou représentant sur l'habitation.
Chaque associé pourvoira séparément à sa nourriture et à son entretien tant en santé qu'en mal[adie]. Les
vieillards les infirmes et les enfants seront nou[rris] et entretenus par leur famille.
Article 5e : Obligations et immunités des travailleurs
Indépendamment des journées de travail qui seront fixée ci après, les travailleurs devront se fournir à leurs frais de
houes, coutelas, lochets (?), paniers, fou[rnir] des herbes pour les chevaux des propriétaires ou de l[eur] représentant en employant
un mulet pour ce travail, soigner et garder les bestiaux, tous les jours de la semaine sans en excepter les samedis, les dimanches, tous (?) à
tour de rôle, ainsi qu'il sera réglé par le conseil des commissaires dont il sera ci après parlé ; faire tous charrois
d'objets d'importation ou d'exportation nécessaires à l'usage et aux besoins de la société et à ceux des
propriétaires, par cabrouets, comme par mulets, ce mode de transport leur étant concédé par réciprocité pour
leur usage particulier, donner leur temps à la répara[tion] et à la reconstruction de tous les bâtiments, même de ceux
dont la société n'a pas la jouissance si besoin [il y a], le tout sans aucune rétribution, entretenir le chemins et les tra[?] de
l'habitation en bon état, changer les parcs des bestiaux et [?] l'habitation en bon état.
Les travailleurs ne pourront couper du bois sur la propriété sans la permission des propriétaires sous peine d'être passibles
des peines de police.
Les travailleurs auront la libre disposition du samedi pour leur propre compte.
Ils conserveront la jouissance des cases qu'ils habitent à la charge de les entretenir en bon état, ils auront droit à une quantité
de terre de six ares pour y planter des vivres. La situation de ces jardins sera désignée par les propriétaires.
Aucun travailleur ne pourra élever sur la propriété d'autres animaux qu'un porc bien parqué et des volailles.
Les propriétaires se réservent le troupeau de moutons qu'ils possèdent sur l'habitation sans partage des produits avec les
travailleurs, mais ils en supporteront les frais d'entretien.
Les dégats que les animaux pourraient faire sur l'habitation seront constatés par le conseil des commissaires qui prononcera sur les
dommages intérêts à payer par les maîtres de ces animaux ou leurs gardiens.
Chaque travailleur aura droit lorsque le moulin marchera de prendre dans la propre seulement une mesure de vesou, par jour.
(à titre de comparaison, dans l'article 7 de la société de l'habitation ALLOU WANCESLAS, il est écrit pour le paragraphe
équivalent : "à prendre dans la chaudière dite la propre")
Article 6e : Du travail
Les cultivateurs et autres travailleurs associés fourniront cinq jours de travail par semaine.
La journé de travail commencera à six heures du matin et finira à six heures du soir. Cet espace de temps sera coupé par trois
heures de repos, de dix heures à une heure ainsi qu'il a été convenu d'accord parties.
Toutefois à l'époque de la roulaison le temps de travail pourra se prolonger de deux heures si les propriétaires le jugent
nécessaire.
Les propriétaires ou leur représentant tiendront un registre où chaque travailleur sera inscrit avec le nombre de jours ou d'heures
qu'il aura manqué au travail. Ce registre sera lu toutes les semaines par les propriétaires à l'atelier réuni en
présence du conseil des commissaires.
Chaque chef viendra le soir rendre compte au directeur des travaux du travail de la journée et des manquements au travail et prendre son avis pour
le travail du lendemain.
Article 7e : Distribution du travail
Le travail se fera en commun, dans le cas cependant où les travailleurs voudraient se diviser en deux sec[tions], chaque compagnie aura un chef et
un sous chef pour représenter et défendre ses intérêts, surveiller l'exécution des travaux et maintenir l'ordre
parmi ses membres s[ur] la propriété. Chaque compagnie s'engage à porter le nombre des travailleurs à quarante au moins.
Le partage des plantations existantes et la désignation [des] terres à planter seront faits par les propriétaires. Les travaux
généraux de l'habitation seront faits en commun, la culture de la canne seule sera divisée par compagnie.
Article 8e : Avances à faire aux travailleurs
Les propriétaires s'engagent à moins d'impossibilité à faire aux travailleurs qui auront exactement remplis les heures de
travail convenues une avance de deux francs p[ar} semaine aux travailleurs de première force et [d'un franc] pour ceux de seconde force.
Ces avances seront notées sur le livret que chaque travailleur voudra avoir à cet effet.
Article 9e : Retenues et peines disciplinaires
Celui qui manquerait au travail pendant une journée sans raisons majeures appréciées par le conseil des commissaires et le
propriétaire subira une retenue sur ses bénéfices à venir, d'une part double de celle qu'il aurait acquise dans le même
espace de temps, et dans tout autre cas, du quantum qui lui reviendrait pour une journée seulement.
L'absence au travail sans la permission du conseil des commissaires et du propriétaire, pendant cinq jours de suite, l'inconduite notoire sur
l'habitation, l'insubordination grave envers le conseil des commissaires ou le propriétaire, pourront entraîner l'expulsion de la
société et par suite de l'habitation.
Le travailleur expulsé ne pourra rentrer sur l'habitation sans le consentement du propriétaire ou de son représentant, il n'aura
droit qu'aux denrées fabriquées alors, seulement il pourra récolter ou faire récolter les vivres de son jardin dans un
délai de quinze jours, le tout sans préjudice des recours de droit devant l'autorité compétente.
Le travailleur qui se retirerait volontairement de la société sans se faire remplacer par quelqu'un qui soit agréé par le
conseil des commissaires et le propriétaire, perdra également tous droits aux bénéfices de la société, il
pourra seulement prétendre aux vivres de son jardin comme il est dit ci dessus.
Chaque travailleur sera muni si bon lui semble d'un livret sur lequel seront inscrites chaque semaine, les heures pendant lesquelles il aura manqué
au travail.
Article 10e : Partage des bénéfices
Les produits de toute nature provenant des terres mises en société seront, prélèvement fait des denrées su[ffi]santes
pour couvrir les dépenses de la société, partagées en deux portions égales, dont l'une pour les propriétaires et
l'autre pour les travailleurs.
Il est bien entendu que prélèvement sera fait également, avant partage, de sirops suffisants pour nourrir les mulets et les chevaux
des propriétaires d'une récolte à l'autre;
Il est dérogé à ce mode de répartition des produits pour les denrées qui seront fabriquées avec la
récol[te] bonne à faire ; ces produits seront dévolus savoir [:] trois quarts aux propriétaires et un quart aux travailleurs.
Article 11e : Partage entre les travailleurs
Le partage entre les travailleurs se fera ap[rès] la vente des denrées leur revenant.
La somme à distribuer sera divisée en a[utant] de parts qu'il y aura de travailleurs à rétribuer.
Les travailleurs de première force rece[vront] une part entière;
Ceux de seconde force n'auront droit qu'à une demie part.
Ceux qui seraient continuellement attach[és] à la garde des animaux les samedis et les dim[anches] recevront deux (?) cinquièmes de part
(...?) selon leur catégorie.
Prélèvement sera fait sur chaque part des travailleurs du montant des avances qu'ils auraient reçues dans l'année, des amendes
et retenues qu'ils auraient subies et des dommages intérêts dont ils seraient passibles.
Les parts retranchées aux travailleurs de seconde force, les retenues et les parts perdues par les travailleurs exclus de la société,
seront employées à donner aux chefs une demie part et le surplus s'il en existe sera partagé entre ceux qui n'auront subi aucune
retenue pour [manquement] sans motifs au travail.
Les paiements auront lieu par les soins des propriétaires en présence des commissaires et seront notés sur le livret de chaque
travailleur, [au]ssi bien que sur [le] registre de l'habitation ; il en sera donné décharge aux propriétaires.
Article 12e : Abandon des avances
Si par des circonstances qu'on ne peut prévoir la société venait à ne donner aux travailleurs aucun bénéfice
autre que les dites avances, les propriétaires consentent à leur abandonner le montant des avances sans pouvoir prétendre de
restitution soit sur les produits de leurs jardins soit sur tous objets mobiliers ou immobiliers qui pourraient leur appartenir à quelque titre
que ce soit, les dits travailleurs n'entendant mettre dans la société que leur travail et leur industrie.
Article 13e : Conseil
Les travailleurs éliront en leur sein un conseil de commissaires composé de cinq membres dont les deux chefs et les deux sous chefs dont il
a été question à l'article 7e feront partie. Le propriétaire en sera le président.
Les attributions de ce conseil consistent à régler tous les différends qui pourraient s'élever entre les travailleurs,
à présider à la répartition des parts des travailleurs et à servir d'intermédiaire entre les travailleurs et le
propriétaire ou l'administrateur.
Ce conseil aura le droit d'exclure de la société ceux des travailleurs qui nuiraient à la société par [leur] inconduite
ou par leur paresse.
Article 14e : Décès du propriétaire ou de l'un des travailleurs
La société ne sera point dissoute par le décès des propriétaires, elle continuera avec leurs héritiers ou
ayant cause.
En cas de décès de l'un des travailleurs ses héritiers auront le droit de mettre en son lieu et place, dans [la]
société, la personne qu'ils voudront choisir pourvu qu'elle soit agréée par les propriétaires et le conseil des
commissaires;
Si le défunt ne peut être remplacé, il sera [tenu] compte à sa succession de sa part dans les bénéfices, eu
égard aux journées de travail qu'il aura fournies, défalcation faite des retenues et amendes et avances.
Article 15e : Administration
Le conseil des commissaires pourra faire choix d'u[ne] personne en dehors de la société pour vérifier les com[ptes] sur les livres de
l'habitation avec pièces à l'app[ui]. Ce vérificateur assistera au partage et donnera d[écharge] pour les
travailleurs qui paieront seuls son salaire.
Les propriétaires se réservent l'administration de l'habitation et la direction supérieure des travaux soit par eux mêmes soit
par un gérant de leur choix dont le paiement sera à leur charge, ils s'entendront pour l'administration avec les commissaires, ils auront
droit de choisir le commissionnaire de l'habitation, faire tous achats et échanges de bestiaux et généralement faire toutes les
dépenses nécessaires à la fesance valoir de l'habitation.
Article 16e : Dissolution de la société
A la dissolution de la société les propriétaires en retireront tout ce qu'ils y ont apporté en meubles et immeubles, le tout
en pareil état que celui constaté en l'inventaire annexé aux présentes. La société leur tiendra compte des
déficits comme des profits de la plus value ou augmentations.
Dont acte
Fait et passé en l'île martinique en la commune de la Rivière Pilote.
L'an mil huit cent quarante huit, les six juillet et quatre septembre.
[suivent les noms des témoins et des propriétaires qui signent, "les cultivateurs ayant déclaré ne savoir écrire et ce
requis nominativement par le dit notaire après lecture faite"]
Suit la teneur de la pièce annexé
Etat des batimens d'exploitation, matériel, instruments aratoires, ustensiles, bêtes de trait et de labour et plantations
apportés par les propriétaires de l'habitation sucrerie dite Fougainville sise en la commune de Rivière Pilote, dans la
société formée entr'eux et divers cultivateurs pour l'exploitation de ladite habitation.
BATIMENS
Un moulin à bêtes en bon état, venant d'être recon[struit] et dont une partie reste à peindre.
Une sucrerie et une purgerie en bon état sauf quelques tra[vaux] d'étanchement à y faire.
Deux cases à bagasse avec la bagasse qu'elles [con]tiennent.
Une case à cabrouet en bon état.
Un équipage à cinq chaudières ayant besoin de réparations.
Soixante cases à travailleurs dites cases à nègres.
MATERIEL
Trois tombereaux à cannes dont deux armés de roues en bon état.
Un tombereau à fumier ayant un côté de roues en mauvais état.
Un camion avec ses roues.
Un dito sans roues.
Six boëtes pour porter le fumier.
Equipage pour huit mulets.
Cinq jougs neufs.
INSTRUMENTS ARATOIRES
Deux charrues dombole. (?)
Dix sept lochets. (?)
Six haches.
Une houe à chacune des travailleuses.
USTENSILES
Un corbin en cuivre.
Cinq traits (?) à sucre dont un neuf.
Dix pots et treize formes.
Une colombe et son fer.
Un tour à barriques et sa corde.
Trente neuf chaînes à boeuf.
BETES DE TRAIT ET DE LABOUR
Trente huit boeufs de travail et vingt huit mulets dont les noms et les estimations sont désignés ci-après.
PLANTATIONS
Cannes plantées.
La pièce dite Rednil (?) de six carrés et demi dont six fumés.
La pièce dite canal (?) d'un carré et demi.
La pièce dite fond Toussaint d'un carré et demi avec fumier rendu sur les lieux.
La pièce dite Dupuis de trois carrés et demi.
La pièce dite Bananière avec fumier rendu sur les lieux pour un carré et demi.
La pièce dite Café de deux carrés.
La pièce dite Charles de deux carrés et demi.
REJETONS
La pièce dite Castel de cinq carrés et demi.
La pièce dite Bellebue de deux carrés et demi.
La pièce dite Vénette (?) de trois carrés.
La pièce dite Four à chaux de deux carrés et demi.
REJETONS A VENIR
La pièce dite Billot de trois carrés actuellement en c[annes] plantées.
La pièce dite Cocagne d'un carré actuellement en can[nes] plantées.
MULETS. Valeur.
Papillon 800,
Trompette 800,
La France 300,
Grison 600,
Mignonne 600,
L'éclair 600,
Souris 700,
Marigot 700,
Rougette 600,
Colibri 600,
Eléphant 600,
Macaque 600,
Flambé 500,
Voltigeur 400,
Zitane 400,
Lonpan 400,
Galaté 400,
Princesse 100,
Rafale 400,
Vaisseau 700,
Bateau 700,
Caneau 700,
Royal 800,
Café 700,
Récolte 300,
Coucou 350,
Rossignol 250,
L'étoille 800
BOEUFS DE TRAVAIL
Moco 350,
Maboya 375,
Bois d'Inde 375,
Docteur 300,
Canbaril 250,
Matelot 250,
Vulcain 200,
Rivière 200,
Montagne 250,
Eléphant 180,
Robuste 250,
Lombrage 300,
Bataille 300,
Janvier 300,
Revange 250,
Paillard 300,
Roncois (?) 250,
Flambeau 300,
Joli 250,
Cajole 150,
Chasseur 200,
Rempart 300,
Petit bois 180,
Vaillant 150,
Lion 150,
Sergent 200,
Rossignol 250,
Léger 250,
Rondo 250,
Balata 250,
Brigand 275,
Ronsin 250,
L'enfer 200,
Rosée 300,
Tigre 200,
Front bois 250,
Savane 300,
La ressource 225.
Certifié véritable et approuvé par les parties, signé et paraphé par les propriétaires.
[suivent les noms des signataires (mais aucun agriculteur) ; la date de l'acte est indiquée : 6 juillet et 4 septembre 1848, avec un
enregistrement le 12 septembre 1848]
Il y a une seule propriétaire, Laure Agathe de FOUGAINVILLE, veuve d'Aman Georges ARTUR du PLESSIS, cependant que Louis Charles Raoul ARTUR du
PLESSIS en est administrateur.
Du côté des cultivateurs, il y a 36 noms (en fait, uniquement des prénoms) : "Francisque, Paul, Auguste, Henry, Janvier, Chéry, Barthélémy
, Germaine, Charles, Cécile, Marinette, Thérésine, Laurencine, Adélaïde,
Jean Marie, Alerte, Ulysse dit Coly, Michou (?) Dieu Donné, Lubin fils mineur de
Marie Luce, Louis, Mathurin, Thérésine, Marie, Marie Luce, Alisste (nom à revoir)
Louise, Noël, Athanais, Valère, Zaire, Pierre, Sylvestre fils mineur de
Félicité, Edouard fils mineur de Jeanne douce, Sévérine fille mineure de Lise
décédée".
Le texte de la société de l'habitation Saint Pons est du 08.08.1848 et celui de l'habitation Fougainville des 06.07. et
04.09.1848. Le texte de Saint Pons paraît plus élaboré que celui de Fougainville. Il est écrit
sans "fautes de frappe", ce qui n'est pas le cas de Fougainville où, par exemple, il manque des mots de liaison, etc. Par contre, il est plus
succinct dans l'annexe où, en plus, la description des bâtiments est absente. ARTUR du PLESSIS
étant propriétaire de Saint Pons et copropriétaire de Fougainville, on peut supposer que sa contribution a été
importante dans les deux cas. En effet, les deux textes sont très ressemblants avec, surtout, des modifications mineures de forme. Pourtant,
certaines variantes sont importantes, comme celles que l'on trouve dans les articles 11, 13 et 14. L'article 3 précise aussi ce qui est exclu de
la "mise sociale", titre qui a été raturé pour être transformé en "Mise de fonds" :
Article 1er : Objet de la société
Ladite société a pour objet la culture de la canne et la fabrication du sucre.
Article 2e : Durée de la société
La présente société est formée pour une année qui commence à compter de ce jour et finira au premier août
mil huit cent quarante neuf, le propriétaire et les travailleurs seront censés la renouveller
s'ils ne manifestent au moins trois mois d'avance la volonté de la faire cesser.
Article 3e : Mise de fonds
La mise sociale du propriétaire consiste dans autant de fonds de terre que les cultivateurs pourront en cultiver en cannes, sous réserve
seulement de la pièce de terre dite Pilnbois [Plinbois ?], dans les plantations
actuellement existantes, les bâtiments d'exploitation, boeufs, mulets, ustensiles aratoires, cabrouets, matériel d'exploitation et de
fabrication et cases des travailleurs. Desquels biens il a été fait un état détaillé certifié véritable
par les associés et qui est demeuré ci annexé.
Tous ces objets demeurent la propriété exclusive du propriétaire et la société n'en est qu'usufruitière
pendant le temps de sa durée.
La mise sociale des cultivateurs consiste dans leur travail de culture de la canne et de fabrication du sucre, dans l'industrie de chacun d'eux sur la
dite habitation et dans les soins qu'ils s'engagent à donner à tout ce qui dépend de la dite société.
Article 4e : Dépenses à la charge de la société
La société supportera l'entretien des bâtiments de manufacture et le renouvellement du matériel d'exploitation, tel que le jeu
du moulin, chaudière et autres, des animaux, des ustensiles d'exploitation, des instruments aratoires et généralement toutes les
dépenses de fesance valoir sont celles qui seront mises ci après à la charge du propriétaire particulièrement.
Elle supportera toutes les charges et impôts fonciers qui pourraient être mis durant la société, sur
les terres, bâtiments, matériel d'exploitation et manufactures à l'exception toutefois des impôts qui pourraient être mis
spécialement sur les bâtiments et autres biens dont la société n'a pas la jouissance. Ces dernières impositions seront
à la charge du propriétaire.
Dépenses à la charge de chaque associé
Le propriétaire aura à sa charge particulière l'entretien de sa maison et dépendances et les frais de son
mandataire ou représentant sur l'habitation.
Chaque associé pourvoira séparément à sa nourriture et à son entretien tant en santé qu'en maladie. Les
vieillards les infirmes et les enfants seront nourris et entretenus par leur famille.
Article 5e : Obligations et immunités des travailleurs
Indépendamment des journées de travail qui seront fixées ci après, les travailleurs devront se fournir à leurs frais de
houes, lochets (?), coutelas et paniers, fournir des herbes pour les chevaux du propriétaire ou de son représentant, en employant
un mulet pour ce travail, soigner et garder les besti[aux], tous les jours de la semaine sans en excepter les samedis, les dimanches, tous (?) à
tour de rôle, ainsi qu'il sera réglé par le conseil des commissaires dont il sera ci-après parlé ; faire tous charrois
d'objets d'importation ou d'expor[tation] nécessaires à l'usage et aux besoins de la société et [à] ceux du
propriétaire, par cabrouets, comme p[ar] mulets, ce mode de transport leur étant co[ncédé] par réciprocité pour
leur usage particulier, d[onner] leur temps à la répartition de la reconstruction de tous les bâtiments, même de ceux
dont la société n'[a pas] la jouissance si besoin il y a, le tout sans aucune rétribution, entretenir les chemins et les traces de
l'habitation en bon état.
Les travailleurs ne pourront couper du bois sur la propriété sans la permission du propriétaire sous peine d'être passibles
des amendes de police.
Les travailleurs auront la libre disposi[tion] du samedi pour leur compte particulier.
Ils conserveront la jouissance des cases qu'ils habitent à la charge de les entretenir en [bon] état. Ils auront droit à une certaine
quanti[té de] terre pour y planter des vivres, la situation de ces jardins ainsi que l'étendue seront fixées par le
propriétaire.
Aucun travailleur ne pourra élever sur la propriété d'autres animaux que des porcs bien parqués et des volailles.
Les propriétaires se réservent le troupeau de moutons qu'ils possèdent sur l'habitation sans partage des produits avec les
travailleurs, mais ils en supporteront les frais d'entretien.
Les dégats que ces animaux pourraient faire sur l'habitation seront constatés par le conseil des Commissaires qui prononcera sur les
dommages int[érêts] à payer par les maîtres de ces animaux ou leurs gardiens.
Chaque travailleur aura droit lorsque le moulin marchera de prendre dans la propre seulement une mesure de vesou, par jour.
Le propriétaire conserve aux cultivateurs la moitié du produit de son troupeau de vaches composé de trente cinq têtes mais
à la charge de les soigner et en supporter la moitié de la perte du dit troupeau et se réserve le lait (?) de ce troupeau.
Article 6e : Du travail
Les cultivateurs et autres travailleurs associés fourniront cinq jours de travail par semaine.
La journée de travail commencera à six heures du [matin et finira à six heures] du soir. Cet espace de temps sera coupé par
trois heures de repos, de dix heures à une heure ainsi qu'il a été convenu d'accord parties.
Toutefois à l'époque de la roulaison le temps de travail pourra se prolonger de deux heures, si le propriétaire ou son mandataire le
juge nécessaire.
Le propriétaire ou son représentant tiendra un registre où chaque travailleur sera inscrit avec le nombre de jours ou d'heures pendant
lesquels il aura manqué au travail. Ce registre sera lu toutes les semaines par le propriétaire aux travailleurs réunis en
présence du conseil des Commissaires.
Chaque chef viendra le soir rendre compte au directeur des travaux du travail de la journée et des manquements au travail et prendre les avis pour
le travail du lendemain.
Article 7e : Distribution du travail
Le travail se fera en commun, dans le cas [cependant] où les travailleurs voudraient se diviser en deux sections, chaque compagnie aura un chef et
un sous chef pour représenter les intérêts, surveiller l'exécution des travaux et maintenir l'ordre
parmi les membres sur la propriété. Le partage des plantations existantes et la désig[nation] des terres à planter seront faits
par le propriétaire. Les travaux généraux de l'habitation seront faits en commun, la culture de la canne seule sera divisée par
compagnie.
Article 8e : Avances à faire aux travailleurs
Le propriétaire s'engage à moins d'impossi[bilité] à faire aux travailleurs qui auront exacte[ment] remplis les heures du
travail convenues, une avance de deux francs par semaine aux travailleurs de première force et d'un franc pour ceux de seconde force.
Ces avances seront notées sur le livret que chaque travailleur voudra avoir à cet effet.
Article 9e : Retenues et peines disciplinaires
Celui qui manquerait au travail pendant une journée sans rai[sons] majeures appréciées par le conseil de commiss[aires] et le
propriétaire subira une retenue sur ses bénéfices à venir, d'une part double que celle qu'il aura acquise dans le même
espace de temps, et dans tout autre cas, de la part qui lui reviendrait pour une journée seulement.
Le manquement au travail pendant cinq jours de suite, sans la permission du conseil des commissaires et du propriétaire, l'inconduite notoire,
l'insubordination grave envers le propriétaire et le conseil des commissaires pourront entraîner l'expulsion de la
société et par suite de l'habitation.
Le travailleur expulsé de l'habitation ne pourra rentrer sans la permission du propriétaire ou de son représentant, il n'aura
droit qu'aux denrées fabriquées lors - seulement il pourra récolter ou faire récolter les vivres de son jardin dans un
délai de quinze jours, le tout sans préjudice des recours de droit devant l'autorité compétente.
Le travailleur qui se retirerait volontairement de la société sans se faire remplacer par quelqu'un qui soit agréé par le
conseil des commissaires et le propriétaire, perdra également tous droits aux bénéfices de la société, il
pourra prétendre seulement aux bénéfices de son jardin comme il est dit ci dessus.
Chaque travailleur sera muni d'un livret sur lequel seront inscrites chaque semaine, les heures pendant lesquelles il aura manqué au travail.
Article 10e : partage des bénéfices
Les produits de toute nature provenant des terres mises en société seront, prélèvement fait des denrées suffisantes
pour couvrir les dépenses de la société, partagées en deux portions égales, dont l'une pour le propriétaire et
l'autre pour les travailleurs.
Il est bien entendu que prélèvement sera également fait, avant partage de la quantité de sirops suffisante pour nourrir les
mulets et les chevaux du propriétaire d'une récolte à l'autre;
Il est dérogé à ce mode de répartition des produits pour les denrées qui seront fabriquées avec la
récolte bonne à faire ; ces produits seront dévolus savoir : trois quarts au propriétaire, un quart aux travailleurs.
Article 11e : Partage entre les travailleurs
Le partage entre les travailleurs se fera après la vente des denrées leur revenant.
La somme à distribuer sera divisée en autant de parts qu'il y aura de travailleurs à rétribuer.
Les travailleurs de première force recevront une part entière;
Ceux de seconde force n'auront droit qu'à une demie part.
Ceux qui seraient continuellement attachés à la garde des animaux les samedis et les dim[anches] recevront de plus deux cinquièmes de
part selon leur catégorie.
Prélèvement sera fait sur chaque part des travailleurs du montant des avances qu'ils auront reçues dans l'année, des amendes
et des retenues qu'ils auront subies et des dommages intérêts dont ils seraient passibles.
Les parts retranchées aux travailleurs de seconde force et les parts perdues par les travailleurs exclus de la société seront
employées à subvenir aux besoins des cultivateurs nécessiteux qui pour maladie ou infirmité auraient été dans
l'impossibilité de travailler et par conséquent profiter des bénéfices de la société, le surplus s'il en existe
sera partagé entre ceux qui n'auront subi aucune retenue pour manquement sans motifs au travail.
Les paiements auront lieu par les soins des propriétaires en présence du conseil des commissaires et seront notés sur le livret de
chaque travailleur, aussi bien que sur le registre de l'habitation ; il en sera donné décharge au propriétaire.
Article 12e : Abandon des avances
Si par des circonstances qu'on ne peut prévoir la société venait à ne donner aucun bénéfice
autre que les dites avances, le propriétaire consent à leur abandonner le montant de ces avances sans pouvoir prétendre à aucune
restitution, soit sur les produits de leurs jardins, soit sur tous objets mobiliers ou immobiliers qui pourraient leur appartenir à quelque titre
que ce soit, les dits travailleurs n'entendant mettre dans la société que leur travail et leur industrie.
Article 13e : Conseil
Les travailleurs éliront en leur sein un conseil de commissaires composé de cinq membres dont les chefs d'atelier devront faire partie, le
propriétaire en sera le président.
Les attributions de ce conseil consistent [à régler] tous les différends qui pou[rraient] s'élever entre les travailleurs et
à servir d'intermé[diaire] entre ces derniers et le propriétaire ou l'administrateur.
Ce conseil aura le droit d'exclure de la société ceux des travailleurs qui nuiraient à la société par leur inconduite
ou par leur paresse ou leur insubordination, il aura de même le droit après consentement du propriétaire d'admettre dans la
société de nouveaux travailleurs, jusqu'à ce que le nombre des [?] soit porté à cinquante, chiffre auquel il [?]
à croire que l'on s'arrête dans l'intérêt commun.
Article 14e : Décès du propriétaire ou de l'un des travailleurs, vente de l'habitation.
La société ne sera point dissoute par le décès du propriétaire, elle continuera avec ses héritiers ou
ayant cause, il en sera de même en cas de vente de l'habitation la dite société continuera avec l'acquéreur.
En cas de décès de l'un des travailleurs ses héritiers auront le droit de mettre en son lieu et place, dans la
société la personne qu'ils voudront choisir, pourvu qu'elle soit agré[ée] par le propriétaire et le conseil des
commissaires;
Si le défunt ne peut être remplacé il sera tenu compte à sa succession de sa part d[ans] les bénéfices de la
société, eu égard aux jou[rnées] de travail qu'il aura fournies, défalcation fa[ite] des retenues et amendes et avances.
Article 15e : Administration
Le conseil des commissaires pourra faire choix d'une personne en dehors de la société pour vérifier ses comptes sur les livres de
l'habitation avec pièces à l'appui. Ce vérificateur assistera au partage et donnera décharge pour les
travailleurs qui paieront seuls leurs salaires.
Le propriétaire se réserve seul l'administration de l'habitation et la direction supérieure des travaux soit par lui même soit
par un gérant de son choix dont le paiement sera à sa charge, ils s'entendra pour l'administration avec les commissaires, ils auront
droit de choisir le commissionnaire de l'habitation, faire tous achats et échanges de bestiaux et généralement faire toutes les
dépenses nécessaires à la fesance valoir de l'habitation.
Article 16e : Dissolution de la société
A la dissolution de la société le propriétaire en retirera tout ce qu'il y a apporté en meubles et immeubles, le tout
en pareil état que celui constaté en l'état annexé aux présentes. La société lui tiendra compte des
déficits comme des profits de la plus value.
Dont acte
Fait et passé en l'île Martinique, en la commune de la Rivière Pilote sur l'habitation Saint Pons sus désignée. L'an mil
huit cent quarante huit le huit août. (témoins, signatures, "les cultivateurs ayant déclaré ne sachant le faire", enregistrement)
Suit la teneur de l'annexe
Etat du matériel, ustensiles, amimaux d'exploitation, vaches laitières et plantat[ions} de l'habitation sucrerie dite St Pons sise en la
commune de la Rivière Pilote.
MATERIEL
Un équipage excellent, une batterie pour r[?]. Limandes ayant besoin de légères répar[ations] pouvant contenir trente six
barriques. Un jeu de moulin en bon état. Trois traits à sucre. Trois pelles. Deux boëtes pour lever ? le sucre.
USTENSILES
Un cabrouet et une charrue en bon état.
ANIMAUX
Seize boeufs de cabrouets en parfait état. Un mulet de sept ans.
VACHES LAITIERES
Trente cinq vaches ou leurs suites.
PLANTATIONS
La pièce de terre de sept hectares dite Saint Vincent de premiers rejetons.
La pièce dite four à chaux de deux hectares de premiers et de deuxièmes rejetons.
Les pièces dites fonds bananes et la Rivière d'un hectare cinquante ares vieux rejetons.
La pièce dite fonds Genippa de quatre hectares de cannes plantées ayant reçues quatre façons.
La pièce dite grande Savanne au dessus du canal de plus d'un hectare de cannes plantées fumées ayant eu trois sarclages.
Deux hectares vingt cinq ares de rejetons de cannes à récolter sont dans la pièce de St Vincent ou dans la pièce de l'acajou.
La pièce dite la vieille maison et le dessus du réservoir de deux hectares cinquante ares de cannes plantées et en partie
fumées ayant reçu trois sarclages.
La pièce dite le dessus du canal et la Grande savanne de deux hectares cinquante ares de cannes plantées et fumées mais non encore
sarclées.
(Signatures, témoins, enregistrement, légalisation)
Cette société créée entre le représentant des propriétaires de "l'habitation sucrerie dite
Decasse ou Lescouet, sise en la commune de la Rivière Pilote, et divers cultivateurs" est du 8 août 1848.
Le représentant des propriétaires est Louis Charles ARTUR du PLESSIS (les propriétaires sont la veuve de Joseph Georges Rouxel de
LESCOUET et ses enfants - voir, pour plus de détails, dans la suite 1, les membres de cette famille)
Du côté des cultivateurs, il y a 33 noms (prénoms seuls ou noms et prénoms) : Jean Elie MONDOR,
Janvier BRINDON, Honoré MONTOUL (?), Jean dit nègre PÉNABLE (nom ?, surnom ?),
Saint Just SÉRINOS, Ferdinant MACACHI, Sylvain CHAMBORAIRE, Bruneau GODÉ, Victor
FILLOLET, Jeannot MÉDOUZE, Germaine JULET, S Rose BOSCAUT (Sainte Rose ?), Léon
FÉNÉLON, Victorine DORIR (ir ?), Hypolite JÉRÉMIE, Edouard
QUAMBRON, Virgile, Sylvain fils mineur de Magdeleine, Mathurin fils mineur d'Enrillette décédée, Chery fils mineur de Marie Sainte, Jacques, Joseph fils
mineur de Colombe décédée, Jean Baptiste, Marie SAINTE (Marie Sainte ?), Génevieve, Médée,
Thérésine LAROCHE, Adélas (A ?), Charlotte, Magdeleine, Augustine, Marie Louise.
Article 1er : Objet de la Société
La présente société a le même objet.
Article 2e : Durée de la Société
La présente société est annuelle, elle commencera à partir du trois juillet dernier. Les propriétaires et les
travailleurs seront censés vouloir la renouveler, s'ils ne manifestent, trois mois au moins d'avance, la volonté de la faire cesser.
Article 3e : Mise sociale
La mise sociale consiste dans autant de fonds de terre que les cultivateurs pourront en cultiver, dans les plantations actuellement existantes, dans les
bâtiments d'exploitation sauf le moulin qui est cassé et que les propriétaires s'obligent à mettre en état, dans les
boeufs, mulets, ustensiles aratoires, cabrouets et matériel d'exploitation et de fabrication et dans les cases des travailleurs. Desquels biens il a
été fait un état détaillé qui est annexé aux présentes. La mise des
travailleurs est la même que dans celle de l'habitation Saint Pons.
Article 4e : Dépenses à la charge de la société [et] dépenses à la charge de chaque associé
Les parties se soumettent et soumettent la société aux mêmes charges que celles indiquées au dit acte de société.
Article 5e : Obligations des travailleurs
Les travailleurs se soumettent aux mêmes obl[iga]tions que celles imposées aux cultivateurs de Saint Pons. En outre, les travailleurs
s'obligent à transp[orter] les cannes par mulets ou par cabrouets deva[nt] le moulin à vapeur de Mr de FROIDETOIS[?}FARGES.
Immunités
Les mêmes immunités sont accordées aux tr[avai]lleurs, sauf qu'ils ne pourront point (tirer ?) du vesou, le sucre n'étant pas
fabriqué pou[r] [?]. Les propriétaires concèderont aux travai[lleurs] la moitié du produit de son troupeau de vaches
[compo]sé de treize têtes, sauf le lait qu'ils se réser[veront] sans partage ; cette concession est faite à charge pour les
travailleurs de soigner le troupeau et de supporter la moitié des [frais ?].
Article 6e : Du travail
Les travailleurs s'obligent à fournir le même nombre de jours et d'heures de travail que les cultivateurs de l'habitation Saint Pons.
Article 8e : Avances à faire aux travailleurs
Mondit sieur DUPLESSIS es qualités s'obligent à faire aux travailleurs les mêmes avances que celles stipulées audit acte de
société.
Article 9e : Retenues et peines disciplinaires
Les cultivateurs et autres travailleurs seront soumis auc mêmes retenues et peines disciplinaires que celles stipulées audit acte de
société.
Article 10e : Partage des bénéfices
Le même mode de partage est (adopté ?) sauf qu'il sera prélevé sur chaque boucaut (?) de sucre fabriqué une somme de vingt et un francs
soixante centimes au profit de mr DESFARGES pour droit de fabrication. Il est dérogé à ce mode de partage de produits pour les
denrées qui seront fabriquées avec la récolte (...) à faire ; à cet égard il est convenu que les travailleurs
seront rétribués à raison d'un franc par journée de travail de neuf heures.
Article 11e : Partage entre les travailleurs
Le partage entre les travailleurs des produits de la société se fera en trois catégories. Les travailleurs de première
catégorie auront droit à une part entière. Ceux de deuxième catégorie à trois quarts de part et ceux de la
troisième catégorie à une demie part. Ceux qui seraient continuellement attachés à la g[arde] des animaux les samedis et
dimanches auront deux cinquièmes de part en plus selon leur catégorie. Les mêmes prélèvements et défalcations
convenus sur [ledit] acte de société auront lieu entre les cultivateurs de l'hab[itation] Lescouet.
Article 12e : Abandon des avances
Les propriétaires s'obligent à la conservation (?) stipulée audite acte.
Article 13e : Conseil
Tout ce qui est relatif à la formation et organisation d'un conseil de commissaires sera exécuté.
Article 14e : Décès des propriétaires ou de l'un des travailleurs
La même chose que celle convenue audit acte de société à cet égard sera exécuté.
Article 15e : Administration
Les mêmes conditions et conventions stipulées au dit acte seront exécutées.
Article 16e : Dissolution de la société
A la dissolution de la société les propriétaires et les cultivateurs auront les mêmes droits que ceux stipulés audit acte
de société.
Dont acte
Suit la teneur de l'annexe
MATERIEL
Un équipage excellent.
Limandes ayant besoin de quelques traverses, pouvant contenir 40 Bx. de sucre.
Quatres traits à sucre.
Trois pelles.
Deux boetes pour lever le sucre.
USTENSILES
Un cabrouet, une charrue en bon état.
ANIMAUX
Quatre mulets, seize boeufs, treize vaches ou leurs suites.
PLANTATIONS
La pièce de terre dite Boisneuf de neuf hectares, cannes plantées au mois d'octobre, ayant reçu plusieurs façons et presque toute
la fumure.
La pièces des cases à nègres un hectare, cannes plantées au mois de décembre ayant déjà reçu
plusieurs façons.
La pièce des fonds de la rivière un hectare, quinze ares cannes plantées au mois de janvier [et] février, ayant
déjà reçu deux sarclages.
Les deux pièces (Louvinne ?) Duval ensemble [?] hectares, 1er rejetons ayant reçu une façon.
Les deux pièces en dessus du grand chemin [et] cases à nègres, deux hectares, 1er rejetons, ayant reçu une façon.
Le fonds dit le (Bassin ?) Jacques, 1er rejetons soixante [?] ares, 1er rejetons.
Le fonds Arromon quatre hectares, dont de[ux] viennent d'être récoltées.
Certifié véritable, signé, paraphé, etc. (...)
Du côté des cultivateurs, il y a 39 noms (tous les patronymes sont désormais acquis) : François
GAZON, Raymond GAZON, Jean Joseph RHON, Joseph ALGER, Parfait GRUN, Jules ASDRUBAL, St Marcel ERUAM (?)
, Mond.. RHON (?), Jean Pierre ERUAM (?) , Jean Pierre
ARAGON, Louis APPÈLE, Alexis TARASCON, Lazarre AXARIAS, Isidore GAZON, Félix MAGELLAN,
Alexandre DARNIS, Elizabeth GAZON, Eloi GAZON, Elise GAZON, Jeanne GAZON, François GAZON, Virginie
GAZON, Marie Jeanne GAZON, Laurencine ALGER, Mariette RHON, Elisa RHON, Alexandrine GAZON, Rachel LACRAMPE,
Rosélie RHON, Emélie RHON, Hyacinthe RHON, Antoinette ALGER, Théotiste ALGER, Valère
ERUAM, Félicien CHAIDAL, Julie DARNIS, Elisa LACRAMPE, Adolphe LACRAMPE, Appoline LACRAMPE.
Tous assistés de Monsieur Marcel Antoine GROS DESORMEAUX, propriétaire demeurant en la commune de la Rivière Pilote, leur conseil.
Article 1er : Objet de la Société
La présente société a pour objet la culture de la canne à sucre, principalement, celle du café et des vivres, la
fabrication et la manipulation du sucre.
Article 2e : Durée de la Société
La dite société est formée pour deux années entières et consécutives qui ont commencé à partir du
premier du courant et finiront à la récolte de Mil huit cent cinquante et une.
Il sera facultatif aux parties de la prolonger sur les mêmes bases ou avec des modifications, en se prévenant respectivement trois mois avant
l'époque de sa dissolution de leur intention à cet égard.
Article 3e : Incorporation des nouveaux travailleurs dans la Société
Il sera loisible aux parties d'incorporer de nouveaux travailleurs dans la société, pourvu que le nombre total des associés ne
dépasse pas celui de quarante cinq et que ces nouveaux travailleurs soient agréés par le propriétaire.
Article 4e : Mise de fond du propriétaire
La mise de fond du propriétaire consiste en l'usufruit de son habitation sucrerie, caféière et vivrière, sise en la commune de la
Rivière Pilote, telle qu'elle se pousuit, étend et comporte en terres, cultivées ou non, batimens d'exploitation et de
manufacture, ustensiles aratoires ou d'exploitation, animaux de labour, cases à l'usage des travailleurs et plantations.
Tel au surplus que le tout est détaillé en un état certifié véritable par les parties, par elles reconnu exact et qui
est demeuré ci-annexé avec mention de son annexe par le dit notaire en présence des témoins soussignés.
Il est bien entendu que le propriétaire réserve pour son usage particulier et n'apporte point dans la dite société tous les
biens meubles et immeubles qui ne servent point à l'exploitation de la dite habitation, tels que sa maison et dépendances, chevaux,
écuries et autres objets.
Il est bien entendu que les cultivateurs ne pourront se servir des biens apportés en usufruit par le propriétaire dans la dite
société que pour les besoins de la dite habitation et qu'à l'usage auquel ils sont destinés.
De leur côté les cultivateurs associés n'apportent dans la dite société que leur travail et leur industrie sur la
dite habitation, ainsi que leurs soins de bon père de famille à tout ce qui est mis en société par le propriétaire.
Article 5e : Dépenses à la charge de la Société
La société aura à sa charge l'entretien des batimens d'exploitation et de manufacture, le renouvellement ou les réparations
selon que le cas l'exigera du matériel d'exploitation et de manufacture tels que moulins à cannes et à café, fourneaux,
chaudières, platines, grages et autres objets et de tous ustensiles aratoires ou autres, le renouvellement des animaux de trait et de labour qui
seraient devenus impropres au travail ou l'achat d'autres animaux si la culture ou l'exploitation l'exigeait.
La société supportera encore les dépenses des matériaux et fournitures, telles que bois, merrains, aissantes, tuiles,
briques, clous, huile, graisse et cordages, tous frais d'administration et de fabrication sauf ceux des bras, et généralement toutes les
dépenses de fesance valoir.
Néanmoins les dépenses de matériaux et de main-d'oeuvre, pour réparation du canal qui conduit l'eau à l'habitation,
seront supportées, pour la première année seulement, par le propriétaire, s'il y a lieu ; Ces réparations seront,
pour les années suivantes, à la charge de la société. En tout cas, ce canal sera nettoyé par les travailleurs, sans
aucune rétribution.
La dite société aura en outre à sa charge, mais à partir du dix huit mars courant, le paiement d'une somme de trois cent
quatre vingt huit francs quatre vingt centimes, montant du fermage d'une portion de terre d'onze hectares soixante trois ares trente quatre centiares
(neuf carrés).
Dépenses à la charge de chaque associé
Chaque associé pourvoira séparément et à ses frais, à sa nourriture, à son entretien et à ses soins,
tant en santé qu'en maladie. Toutes les dépenses qui nécéssiteront les biens meubles et immeubles qui ne servent point
à l'exploitation de la dite habitation ou à l'usage des cultivateurs associés, seront à la charge personnelle du
propriétaire.
Néanmoins les cultivateurs associés qui auraient des chevaux dans l'écurie du propriétaire contriburont avec lui à
l'entretien et aux réparations que l'état des lieux pourrait exiger, chacun proportionnellement au nombre de chevaux lui appartenant.
Article 6e : Mode de durée du travail
Les cultivateurs et autres travailleurs associés fourniront leur travail en commun et par compagnie.
Tous les jours seront consacrés au travail d'exploitation de la dite habitation, à l'exception des samedis, dimanches et jours de fête
conservés.
La durée du travail sera, hors les époques de roulaison, de neuf heures par jour, réparties entre le lever et le coucher du soleil.
Cet espace de temps sera en conséquence coupé par trois heures de repos dont une heure pour le déjeuner et deux heures pour le diner.
Ces heures de repos seront indiquées et fixées par l'administrateur directeur des travaux.
A l'époque de la roulaison il sera en outre fourni un travail supplémentaire de nuit, mais seulement par les personnes occupées
à la manipulation du sucre. Ce travail se prolongera jusqu'à minuit.
Les journées ou demi-journées de travail fournies en plus que celles convenues pour les temps ordinaires et les temps de roulaison seront
comptées aux travailleurs entr'eux, lors de la répartition qui aura lieu de la part afférente à la masse des travailleurs dans les
bénéfices de la société.
Le propriétaire ou son représentant tiendra un registre sur lequel chaque travailleur sera inscrit, avec le nombre de jours ou d'heures qu'il
aura manqué au travail ou de journées ou demi-journées qu'il aura fournies en plus. Ce registre sera lu toutes les semaines par le
propriétaire à l'atelier réuni en présence des commissaires.
Chaque chef viendra le soir rendre compte au directeur des travaux du travail de la journée, des manquemens au travail, du travail
supplémentaire fourni et prendre ses instructions pour le travail du lendemain.
Article 7e : Obligations et immunités des travailleurs
Indépendamment des journées de travail fixées ci-dessus, les cultivateurs devront fournir des heures pour la nourriture des chevaux
du propriétaire par compensation du fumier de l'écurie qui sera employé à la culture des plantations de la
société, mais ils auront droit d'employer un mulet pour ce travail. Ils devront s'entendre entr'eux pour héberger, nourrir, soigner,
entretenir et garder les animaux attachés à l'exploitation de la dite habitation, tous les jours de la semaine, sans en excepter les
samedis, dimanches et jours de fête ; faire tous charrois d'objets d'importation ou d'exploitation nécessaires à l'usage de
l'habitation et du propriétaire, transporter par cabrouets ou par mulets le produit des denrées appartenant au propriétaire,
jusqu'au lieu désigné pour leur embarquement ; donner leur tems à la réparation ou à la reconstruction de tous les
batimens, même de ceux dont l'usage est réservé exclusivement au propriétaire ; le tout sans aucune rétribution ;
nettoyer et entretenir les chemins et les traces, les mares et canaux de l'habitation ; entretenir les alentours des batimens en état de
propreté et généralement faire tous les travaux nécessaires.
Tout travail commandé devra être exécuté par celui qui aura été désigné ; sous peine pour le
délinquant d'être renvoyé de l'habitation par le directeur des travaux.
Les travailleurs ne pourront couper du bois sur la dite habitation, sans la permission du propriétaire sous peine d'être traduits devant le
tribunal compétent et d'être passibles envers le propriétaire de tous dépens, dommages et intérêts que de droit.
Il leur est formellement interdit, sous les mêmes peines de couper des cannes.
Les animaux de trait et de labour, les cabrouets, tombereaux et autres matériels étant spécialement destinés aux besoins et
aux travaux de l'habitation, nul ne pourra en disposer pour des besoins particuliers sans la permission du propriétaire. Tout délinquant
sera passible d'une amende de dix francs, sans préjudice des dommages intérêts qui pourraient être prononcés par les
tribunaux au profit du propriétaire contre tous les cultivateurs en cas d'accidens arrivés aux animaux et autres objets par le fait du
contrevenant.
Chaque travailleur associé devra se pourvoir à ses frais d'une houe, d'un coutelas et d'un panier et se présenter [sur] le lieu de
travail muni de l'un de ses instrumens ou de tous selon la nature de ses occupations.
Les travailleurs ne pourront élever sur l'habitation d'autres animaux que des volailles et des porcs mais ces derniers animaux devront être
bien parqués et attachés de manière à ne pouvoir occasionner des dégats.
Néanmoins il leur est facultatif d'avoir des chevaux sur l'habitation mais ils devront les mettre dans l'écurie du propriétaire. Il
est bien entendu que le nombre de ces chevaux pourra être restreint par le propriétaire.
En cas de dégats commis par les animaux des cultivateurs, ces dégats seront constatés et le délinquant sera passible de
dommages intérêts envers qui de droit. En outre les porcs pourront être tués sur le lieu du dégat, sans indemnité
pour le maître à qui il appartiendra.
Les chefs d'atelier devront faire prendre des ?, trois fois par semaine sur l'habitation par les travailleurs associés.
Les travailleurs devront fabriquer la farine manioc du propriétaire et ceux qui seront employés à cette fabrication auront pour leur
peine un tiers de la farine fabriquée.
Les cultivateurs associés étant solidaires du bon ordre sur l'habitation et devant veiller à son maintien seront responsables de tous
dégats occasionnés par les animaux attachés à l'habitation, de toutes dégradations survenues dans les batimens ou dans
le matériel d'exploitation par la faute de l'un d'eux, de toute disparition d'objets quelqu'en soit la cause ou l'auteur. Prélèvement
sera fait avant partage sur la portion des bénéfices attribuée aux cultivateurs de la valeur des dites dégradations et des
objets disparus, sauf le recours de conseil contre l'auteur ou les auteurs de ces dégradations ou soustractions.
Les travailleurs auront la libre disposition du samedi pour leur compte particulier.
Ils conserveront tant qu'ils feront partie de la société la jouissance des cases qu'ils habitent, à la charge de les entretenir en
bon état de réparations locatives et la jouissance d'un jardin dont l'étendue sera de douze ares, à prendre dans les terres
qui seront désignées par le propriétaire dans la proportion d'un tiers pour lui tous les fruits et revenus qu'ils feront tant dans les
dits jardins qu'à l'entour de leurs cases. Ce partage aura lieu à partir du vingt cinq mai prochain ; Le propriétaire aura droit en
conséquence au tiers de la farine faite par les dits cultivateurs.
Nul étranger n'aura le droit de demeurer dans les cases des travailleurs sans la permission du propriétaire.
En temps de roulaison, les personnes du moulin et de la sucrerie auront droit à un demi litre de vesou par jour, à prendre dans la
chaudière dite la propre. Le propriétaire aura droit de son côté à du sirop de batterie ou à des formes de sucre
en pareille quantité que celle prise par les travailleurs, eu égard au rendement du vesou en les derniers produits.
Les travailleurs s'obligent à entretenir l'habitation sur un bon pied de culture, et pour y parvenir à planter au moins sept hectares soixante
quinze ares cinquante six centiares (ou six carrés) de terre, en cannes neuves, à soigner les cannes et les rejetons, et leur donner toutes
les façons convenables.
Article 8e : Conseil
Afin de maintenir toute la régularité possible dans les travaux parmi les cultivateurs, il a été parmi eux quatre membres qui
composeront un conseil de commissaires. Ces chefs sont 1° François GAZON, 2° Raymond GAZON
, 3° Jean Joseph RHON et 4° Joseph ALGER. Le propriétaire de
l'habitation est président de ce conseil ; il aura voix délibérative et prépondérante dans le cas où tous les
membres ne seraient pas présens aux délibérations.
Les attributions de ce conseil consistent à régler toutes les difficultés qui pourraient s'élever entre les travailleurs ;
à présider à la répartition afférente à l'atelier dans les produits de la société, à
maintenir l'ordre et la tranquillité sur l'habitation et à y faire exécuter les travaux d'après les instructions du
propriétaire ou de son représentant et à servir d'intermédiaire entre le propriétaire et les cultivateurs.
Ce conseil aura le droit d'exclure de la société ceux des travailleurs qui nuiraient à la société par leur inconduite
ou leur paresse. Cette exclusion ne pourra avoir lieu que de l'assentiment du propriétaire. Il est bien entendu que ce droit accordé au
conseil n'atténue en rien celui du propriétaire d'obtenir par voie judiciaire ou administrative l'expulsion de celui contre lequel il aurait
de justes sujets de mécontentement ou qui ne tiendrait pas à tout ou partie des engagemens pris par le présent acte.
Le chef principal aura la surveillance des animaux et de leurs gardiens, afin que ces animaux soient conduits dans de bons paturages et ne portent point
préjudice aux plantations. Il nommera des gardes pour prévenir les incendies, les vols et les dégradations pendant la nuit.
Article 9e : Retenues et peines disciplinaires
Celui qui manquera au travail sans la permission du propriétaire à moins que ce soit pour cause de maladie subira sur sa part à venir
dans les bénéfices de la société la retenue d'un franc par jour au profit du propriétaire et de la somme qui lui
reviendra lors de la répartition pour une journée de travail au profit de la masse des cultivateurs ses associés.
Celui qui s'absentera du travail sans la permission du propriétaire subira sur sa part à venir dans les bénéfices de la
société la retenue au profit de la société de soixante quinze centimes par journée d'absence.
Celui qui abandonnera le travail de la culture de la canne pour cultiver les vivres ou les cafins perdra sur sa part dans les bénéfices du
sucre et du sirop une somme de cinquante centimes par jour.
Celui qui abandonnerait le travail trois jours consécutifs ou qui ferait des absences continuelles pourra être exclu de la société
et par suite de l'habitation si le Conseil des commissaires ou le propriétaire le juge à propos.
Il en sera de même de celui qui aurait commis quelque vol, qui se serait porté à quelques actes d'insubordination ou dont l'inconduite
serait notoire.
Le travailleur expulsé ne pourra rentrer sur l'habitation sans le consentement du propriétaire, il n'aura droit qu'aux denrées
fabriquées lors de son expulsion ; seulement il pourra récolter ou faire récolter les vivres de son jardin dans huit jours pour tout
délai. Il ne pourra arracher les vivres qui ne seront pas à maturité. Le tiers de ces vivres sera toujours acquis au
propriétaire comme il est dit à l'article sept ci-dessus.
Le travailleur qui se retirerait volontairement de la société sans se faire remplacer par quelqu'un qui soit agréé par
le Conseil des commissaires et le propriétaire, perdra également tous droits aux bénéfices non réalisés lors
de sa sortie, à moins qu'il n'en soit décidé autrement par le Conseil des commissaires et le propriétaire et, dans le cas
où il aurait droit d'être payé de tout ou partie de ses journées de travail ce paiement ne lui sera effectué que
lors de la répartition des bénéfices réalisés. Il est bien entendu qu'il pourra enlever ou faire enlever les vivres
de son jardin comme il est dit ci-dessus.
Article 10e : Partage des revenus
Les produits en sucres et sirop et en cafés provenant des rejetons et des cannes neuves cultivées par les travailleurs associés seront
déduction faite des dépenses à la charge de la société partagés en deux parts égales dont l'une pour le
propriétaire et l'autre pour les travailleurs.
Pour acquitter les dépenses à la charge de la société, il sera expédié avant partage, et jusqu'à parfait
paiement, par le propriétaire au commissionnaire choisi d'un commun accord par les parties sur le marché qui sera jugé le plus
avantageux par le propriétaire, des denrées en sucre sirop ou café en quantité suffisante. Ces denrées seront vendues
avec la commission d'usage et le net produit en sera appliqué aux dépenses de la société. Le commisionnaire fera retour des
comptes de vente et des pièces à l'appui des paiements qu'il aura faits en l'acquit de la société. Le tout sera
communiqué par le propriétaire aux commissaires de l'habitation et à leur homme de confiance qui donnera décharge au
propriétaire du règlement de son compte d'administration. Il fera ainsi de même par le propriétaire sur la part des
denrées revenant aux travailleurs, [partie à revoir sur le microfilm - la copie sur papier est trop pâle] (...) se trouvent
avoir à lui tenir compte des retenues ou amendes qu'ils auraient encourues. Il est dérogé au mode de partage ci-dessus convenu en ce
qui concerne les produits provenant ou à provenir de la récolte qui suit et pendante. La part des cultivateurs dans les comptes sur les
livres de l'habitation avec pièces à l'appui, ainsi que les carnets des travailleurs. Cette personne pourra se rendre les samedis et dimanches
sur l'habitation pour remplir sa mission, mais elle ne pourra y résider. Les cultivateurs paieront seuls son salarié.
Le propriétaire aura l'administration de l'habitation et la direction supérieure du travail. Il sera aidé dans cette tache par le chef
d'atelier et les commissaires. Lorsqu'il s'absentera il pourra déléguer ses pouvoirs au chef d'atelier.
L'administrateur aura le droit de faire tous achats d'objets et matériels à la fesance valoir de la dite habitation, d'échanger les
animaux qui seraient impropres au travail, d'en acheter d'autres et généralement de faire toutes les dépenses nécessaires
à la société.
Article 13e (sic) : Décès du propriétaire ou d'un cultivateur. Vente de l'habitation.
La présente société ne sera point dissoute par le décès du propriétaire, si bon semble à ses
héritiers ou ayant cause. En cas de décès d'un travailleur, ses héritiers ou ayant cause auront le droit de mettre en son
lieu et place dans la société la personne qu'ils voudront choisir, pourvu qu'elle soit agréée par le propriétaire. Si le
défunt ne peut être remplacé, il sera tenu compte à sa succession de sa part dans les bénéfices de la
société, en considération des journées de travail qu'ils aura fournies, défalcation faite des retenues amendes et
dommages intérêts qu'il aurait encouru.
Il sera facultatif au propriétaire de vendre son habitation en soumettant l'acquéreur aux clauses et conditions du présent contrat.
Article 14e : Dissolution de la société
Dans le cas où les travailleurs soit en masse [mot à vérifier] soit en partie ne tiendraient pas aux obligations et engagements convenus au présent
contrat, il sera loisible au propriétaire de rompre et dissoudre la présente société soit à l'égard de tous les
cultivateurs associés, soit à l'égard d'une partie seulement. En cas de cette dissolution les travailleurs ne pourront réclamer
au propriétaire leur part de bénéfice dans la dite société ou lors de la réalisation des revenus et que
défalcation faite des dépenses de la société et de tous dommages intérêts dus au propriétaire pour
inexécution de la part des travailleurs des conventions contenues au présent contrat. [partie de l'article à revoir à l'écran, la
copie papier étant trop claire]. A la dissolution de la société, il sera fait un recolement de l'état des biens et du
matériel de toute nature de l'habitation, annexé aux présentes et les parties [s'en] tiendront compte réciproquement des
déficits ou des augmentations qui y existeraient.
Dont acte
Fait et passé en l'Ile Martinique en la commune de la Rivière Pilote, sur l'habitation de Monsieur Allou Wenceslas. L'an mil huit cent
quarante neuf, le vingt six mars. En présence de 1° Monsieur Louis Joseph Alfred GROS DUBOIS, par profession et 2° Monsieur François GROS
DUCANET fils, propriétaire. Tous deux demeurant en la commune de la Rivière Pilote, témoins requis pour la validité des
présentes. [on précise que les autres parties ne savent pas signer]. Ainsi signé : ALLOU WENCESLAS,
GROS DESORMEAUX, DUCANET DESORMEAUX fils, GROS DUBOIS Alfred et ESCH notaire. Au bas est la mention suivante : Enregistré au Marin, le vingt neuf
mars mil huit cent quarante neuf (...).
Suit la teneur de la pièce annexée
Etat des biens meubles et immeubles apportés par Mr ALLOU WENCESLAS dans la société formée entre lui et divers cultivateurs
pour l'exploitation d'une habitation sise en la commune de la Rivière Pilote.
Batimens
Un moulin à bêtes en bon état.
Un batiment servant de purgerie, le tout en bon état.
Un batiment servant de sucrerie avec limandes et bacs en bon état.
Une case à café avec caisses roulantes en bon état.
Un moulin à passer le café en bon état.
Animaux de trait et de labour
Quatre jeunes mulets en bon état.
Seize boeufs en bon état.
Ustensiles
Un cabrouet, cinq jougs, trois chaines de volée (?), seize chaines à boeufs, une écumoire, deux traits à ?, divers cordages.
Une gragerie avec moulin et cinq grages en bon état. Deux platines montées dans chaudière en bon état.(...) Certifié
véritable, etc. [note : le patronyme du propriétaire est écrit WANCESLAS au début de l'acte et WENCESLAS à la fin de
l'acte.]
Du côté des cultivateurs, il y a 58 noms (la plupart avec le patronyme complet mais certains encore désignés uniquement par le
prénom), répartis en deux compagnies :
1ère compagnie 1ère division : Calixte APIN, chef, Saint Cyr SÉRAPHIN, lieutenant, Augustin
PELLICO APIN (PELLICO : 1er nom ou 2ème prénom ?), Mondésir RISQUAN APIN (RISQUAN :
1er nom ou 2ème prénom ?), Charles GOULOULOIS (le 2ème L n'est pas certain, c'est peut-être un B),
Prudent ARCHANGEL, Félix ACCORD, Clerine NAVARIN, Marie Louise UDOL, Negre Regis JACQUET,
Rose DURICA (?), , Rose ISSIER, Eléonore SERPENNE, Narcisse CORSAIRE, Ferdinand OUTRE,
Octave OUTRE, Clémentine, Jean de Dieu SERPENTIN, Monlouis MISÉ, Louise ISSELON (ou ISSELOU)
BOIVIN, Jean Louis BOIVIN, Céline Féline LUBIN, Rosalie Rose JEAN, Claire TALOND.
1ère compagnie 2ème division : Jean Louis, Gaspard, Eugène, Aimée, Rose, Aglaë.
2ère compagnie 1ère division : Jean Noël Milhe (ou Milhes - 2ème prénom ou 1er nom ?)
RIVIÉREZ, chef, Marcelin COLOMB, sous chef, Camille IBLERMONT, Lodoïska DONATIEN, Sully MÉNINE,
Marie Sainte BLAIRE, Joseph BAÏS, Joseph DIOT, Edouard CAMBON, Madeleine ABONOT (?),
Doralise CACHETÉ, Thérèse, Louis RIVIÉREZ DIOT, Marie Jeanine CACHEMAT, Chery CLEM,
Reinette FANTONAY, Saint Pierre TOUSSAINT, Michael LAPRESSE, Rosiette ROMY, Jeanne Claire ALANCLETE, Adolphe
COBOURG VECTOL (V de VECTOL ?).
2ère compagnie 2ème division : Mouloin (?), Louisel, Alexandre,
Francillette, Gustave, Suffren, Julien CORREY ou CORRÈGE, raffineur.
[Un peu plus loin, il est dit que M. de MAUNY ne change les conditions de travail convenues précédemment que pour satisfaire les chefs
et les cultivateurs et après avoir exposé à plusieurs reprises à l'atelier que la masse des travailleurs perd au lieu de
gagner à ce changement. Y avait-il eu un accord d'association préalable ou bien les conditions premières avaient-elles été fixées sans accord
écrit de ce type ? En tout cas, il est clair que ce sont les cultivateurs qui ont imposé ce changement au propriétaire.]
Article 1er : Objet de la Société
La présente société a pour objet la culture de la canne et la fabrication du sucre.
Article 2e : Durée de la Société
Elle est contractée pour trois années entières et consécutives à partir du premier mars dernier. Il sera facultatif aux
parties contractantes de la prolonger sur les mêmes bases ou avec des modifications, en se prévenant respectivement trois mois avant
l'expiration de la dite société, de la part du propriétaire aux chefs principaux et réciproquement.
Article 3e : Mise sociale
La mise sociale du propriétaire consiste en terres de la dite habitation, en quantité suffisante pour l'exploitation par les travailleurs
associés, en batimens, manufacture, matériel d'exploitation, en boeufs et mulets de travail, en cases des travailleurs et plantations en
cannes qui existent actuellement sur l'habitation et généralement en objets divers nécessaires à l'exploitation de la dite
habitation.
Il est bien entendu que mon dit sieur de MAUNY pourra disposer en faveur d'autres compagnies de planteurs, des terres de l'habitation qu'il voudra choisir
pouvu toutefois qu'elles ne soient alors déjà travaillées par les présens associés.
De leur côté, les cultivateurs associés apportent dans la dite société leur travail de culture de la canne et de
fabrication du sucre, leur industrie sur la dite habitation et les forces (?) qu'ils promettent et s'obligent de donner à tout ce qui dépend
de la dite habitation.
En conséquence ils s'obligent d'entretenir la dite habitation sur un pied convenable de culture et pour y parvenir ils s'engagent à labourer,
planter, fumer et cultiver les cannes en temps et saison voulue le tout selon les règles qui seront ci-après fixées.
Article 4e : Dépenses à la charge des associés
Toutes les dépenses de fesance valoir de l'habitation telles qu'achat de bois, merrains, aissantes, tuiles, briques, clous, graisse, cordages, animaux
de trait et de labour, matériel d'exploitation, les réparations des usines et batimens d'exploitation, la main d'oeuvre d'ouvriers, autres
que cultivateurs, rafineurs et gardiens d'animaux, les traitemens et salaires d'un écrivain ou économe, les marchés passés avec
les sieurs FELIX, HELICQ, Victorin CHARLES pour le bois et la construction du moulin et des cases à bagasse, le loyer de la terre Paimlu (?) à
raison de quinze cents francs par an, seront supportées savoir : un tiers par le propriétaire et les deux autres tiers par les deux autres
compagnies de cultivateurs, chacune par moitié.
Les loyers de la terre Paimlu (?) seront payés et supportés dans les proportions sus fixées par effet rétroactif du jour de la
passation du bail qui m'a été consenti à Mr de Mauny par acte au rapport du notaire soussigné, en date du dix huit décembre
mil huit cent quarante sept, enregistré au Marin le vingt sept du dit mois f° 167 R° C 5 et 6 par Garnier LARACHE aux droits de cinquante centimes.
Toutes les autres dépenses de main-d'oeuvre, soit pour la culture des terres, la garde des animaux et leur entretien, soit pour les travaux ordinaires
de l'habitation demeurent à la charge personnelle des travailleurs associés et seront prélevées sur leur part ci-après
fixée dans les produits de l'exploitation.
Article 5e : Mode et durée du travail
Les cultivateurs et autres travailleurs associés seront divisés comme il est dit précédemment. Tous les jours de la semaine
seont consacrés au travail d'exploitation de la dite exploitation, à l'exception des samedis, dimanches et jours de fête
consacrés. La durée du travail sera, hors les époques de roulaison de neuf heures par jour, réparties entre le lever et le
coucher du soleil. Les heures de repos et de repas prises dans le reste du temps devront être les mêmes pour les travailleurs, de manière
à ce qu'ils puissent reprendre le travail en même temps. A l'époque de la roulaison, il sera en outre fourni un travail
supplémentaire de nuit, mais seulement par les personnes occupées à la manipulation des produits. Le propriétaire ou son
représentant fera tenir un registre où chaque travailleur sera inscrit avec le nombre de jours ou d'heures qu'il aura manqué au
travail. Chaque chef viendra à midi et le soir rendre compte au directeur des travaux du travail de la journée et des manquemens au travail,
et prendre ses ordres pour le travail du lendemain.
Article 6e : Obligations et immunités des travailleurs
Indépendamment des journées de travail fixées ci-dessus les travailleurs devront fournir des herbes en quantité suffisante pour
la nourriture des chevaux du propriétaire ou de son représentant, comme compensation du fumier de l'écurie qui sera employé
à la culture des terres, mais ils emploieront un mulet pour ce travail, ils devront s'entendre entr'eux pour héberger, soigner, entretenir et
garder les animaux attachés à l'exploitation de la dite habitation, tous les jours de la semaine, sans en excepter les samedis, dimanches et
jours de fête ; faire tous charrois d'objets d'importation ou d'exportation nécessaires à l'usage de l'habitation et du
propriétaire ou de son représentant, donner leur temps s'il est nécessaire à la réparation et à la
reconstruction de tous les batimens, même de ceux dont la société n'a pas la jouissance ; nettoyer et entretenir les chemins, les traces,
les mares et canaux de l'habitation, le tout sans aucune rétribution, et généralement ils devront entretenir la dite habitation en bon
état.
Tout travail commandé devra être exécuté par celui qui aura été désigné sous peine de renvoi
prononcé par le Tribunal arbitral dont il sera parlé dans l'article septième ci-après. Les travailleurs ne pourront couper du
bois sur l'habitation sans la permission du propriétaire sous peine d'être passible des amendes et dommages intérêts à
prononcer par le Tribunal de police. Il leur est formellement interdit sous les mêmes peines de couper des cannes.
Les animaux, cabrouets, tombereaux et autre matériel étant spécialement destinés aux besoins et travaux de l'habitation, nul ne
pourra en disposer sans la permission du propriétaire. Tout délinquant pourra être renvoyé de l'habitation et passible d'une
amende de dix francs, sans préjudice des dommages intérêts qui pourraient être prononcés par les tribunaux.
Il est permis aux cultivateurs associés d'élever des bestiaux sur l'habitation mais à condition que les animaux soient bien
parqués. En cas de contravention, le propriétaire aura le droit de les faire sortir de l'habitation, de tuer même ceux qui seraient
nuisibles à la culture, sans préjudice de tous dommages intérêts à obtenir contre le maître de l'animal. Les
travailleurs auront la libre disposition des samedis pour leurs comptes particuliers. Ils conserveront, tant qu'ils feront partie de la société,
la jouissance des cases qu'ils habitent à la charge de les entretenir et réparer, et d'une portion de terre dont le propriétaire
désignera la position et fixera l'étendue pour leurs jardins particuliers. Nul étranger n'aura le droit de demeurer dans la case des
travailleurs sans la permission du propriétaire.
Article 7e : Tribunal arbitral
Il est maintenu sur l'habitation un Tribunal arbitral composé de six cultivateurs pris d'abord parmi les chefs. Ce tribunal sous la présidence
du propriétaire ou de son représentant jugera toutes les difficultés qui pourraient survenir entre les travailleurs et aura le droit
d'expulser les cultivateurs qui directement ou indirectement troubleraient l'ordre, empêcheraient ou négligeraient le travail.
Article 8e : Retenues et peines disciplinaires
Le cultivateur expulsé est obligé de quitter la propriété et n'a droit que sur les sucres fabriqués. Le cultivateur qui
abandonne l'habitation ne peut rien réclamer pour son travail. Ils pourront enlever dans les huit jours leurs vivres bons à arracher et ne
pourront point détenir ceux qui ne seraient pas à maturité. Il est interdit aux cultivateurs de travailler hors de l'habitation sous
peine d'être exclus de la société et expulsés de la propriété en cas de récidive. Chaque journée
hors de l'habitation donnera lieu à une retenue de deux francs. Les manquemens ordinaires donneront lieu à une retenue d'un franc par jour,
à l'exception du vendredi ; la perte de la journée entière du vendredi sera payée deux francs et la demi-journée, un
franc. Toutes les dites retenues appartiendront moitié au propriétaire et l'autre moitié aux cultivateurs qui auront fourni leur
temps à la société.
Article 9e : Partage des revenus
Avant tout partage, il sera prélevé provision suffisante pour payer et acquitter les dépenses de toute nature qui sont à la
charge de la société, ainsi que pour tenir compte soit à la société soit au propriétaire particulièrement
des retenues et dommages et intérêts dont les cultivateurs seraient passibles. A cet effet, il sera expédié par l'administrateur
à tel commissionnaire qu'il voudra choisir des sucres ou des sirops dont le produit net de tous frais, et commission d'usage sera appliqué
à l'extinction des dites dépenses, retenues et dommages intérêts. L'administrateur ne sera tenu de justifier de l'emploi des
deniers provenant des dites ventes avec pièces à l'appui, qu'aux chefs seuls.
Les deux tiers des dépenses de la fesance valoir, comme il est dit à l'article quatrième qui précède, seront à la
charge des cultivateurs, et l'autre tiers à la charge du propriétaire. Prélèvement sera également fait sur les sirops
d'une quantité suffisante pour l'alimentation des animaux d'une récolte à l'autre. Après ces prélèvemens les
produits de toute nature provenant des terres exploitées par la société seront partagés en deux parts égales dont l'une
sera dévolue au propriétaire et l'autre aux cultivateurs associés. Les parts seront tirées au sort.
Article 10e : Partage entre les travailleurs
Après le prélèvement des dépenses, la part revenant à chaque compagnie, suivant ce que chacune aura produit, sera rendue
par les soins de M. de MAUNY ou de son représentant, le produit en sera distribué entre chaque associé. Retranchement sera fait sur la
part des travailleurs des retenues et amendes et dommages intérêts qu'ils auraient encourus. Les retenues pour journées perdues seront
dévolues, comme il est dit à l'article huitième qui précède, savoir moitié; au propriétaire et l'autre
moitié aux travailleurs qui n'auront point encourus de retenues. Les paiemens des parts auront lieu par les soins du Tribunal arbitral de l'habitation ; ils seront notés sur les carnets de chaque travailleur, aussi
bien que sur le registre de l'habitation.
Article 11e : Administration
Il est expressément convenu que le propriétaire ou son représentant sera seul administrateur de l'habitation et des
intérêts de la société. En conséquence il pourra diriger les travaux à son gré, faire toutes les
dépenses que nécessitera le fesance valoir, faire tous achats, passer tous marchés et généralement être seul juge
des besoins de l'habitation et de la société et y pourvoir comme il avisera, à la charge d'en rendre compte seulement aux chefs des
dites compagnies.
Article 12e : Décès du propriétaire ou de travailleurs. Vente de la propriété
La société ne sera point dissoute par le décès du propriétaire, elle continuera [avec ?] ses héritiers ou ayant
cause. En cas de décès d'un travailleur, ses héritiers auront le droit de mettre en son lieu et place dans la société la
personne qu'ils voudront choisir pourvu qu'elle soit agréée par le propriétaire. Si le défunt ne peut être remplacé,
il sera tenu compte à sa succession de sa part dans les bénéfices de la société, eu égard aux journées de
travail fournies, défalcation faite des retenues, amendes et dommages intérêts qu'il aurait encourus. Il sera facultatif au
propriétaire de vendre la dite habitation, en soumettant l'acquéreur aux obligations contractées par le présent acte.
Article 13e : Dissolution de la société
A la dissolution de la société les achats et les améliorations seront acquis à la propriété, sans indemnités
à payer, comme aussi elle supportera sans réclamation contre les cultivateurs les détériorations qui y seraient survenues.
Article 14e : (sans titre)
L'inexécution de tout ou partie des engagements pris par les cultivateurs avec le propriétaire par les présentes stipulations pourra
entrainer si bon semble au propriétaire, la dissolution de la dite société par les voies légales
Article 15e : (sans titre)
Les clauses du présent acte seront applicables à tous travailleurs qui entreraient dans la dite société.
Dont acte
Fait et passé en l'Ile Martinique en la commune de la Rivière Pilote, sur l'habitation de Mauny. L'an mil huit cent quarante neuf, le vingt
huit septembre. En présence 1° Monsieur Joseph NELSON, habitant demeurant en la commune de la Rivière Pilote et 2° Monsieur
Amédée LITTÉE, habitant propriétaire demeurant en la dite commune. Tous deux témoins requis pour la validité des
présentes à défaut de second notaire. Et a mon dit sieur de MAUNY signé seul avec les témoins et le notaire, les
cultivateurs ayant déclaré ne savoir le faire de ce requis par le dit notaire en présence des dits témoins, le tout après
lecture faite. Ainsi signé : de MAUNY, J. NELSON, A. LITTÉE et ESCH notaire. Enregistré au Marin le trois octobre 1849 f° 60, v°
Ce 4 et 5. Reçu un franc. Signé LA PEYRE. ESCH.
(pas de pièce annexée)
Objet de la société
C'est l'article 1 pour les cinq habitations.
Le texte est strictement identique pour F, S, L, M : "L'objet de la société a pour
objet la culture de la canne et la fabrication du sucre". Pour A, on ajoute la culture du café et des
"vivres", ce qui suppose une importance relative du café et des cultures vivrières sur cette habitation.
Durée de la société
C'est l'article 2 pour les cinq habitations.
Il est de trois ans pour F et M, deux ans pour A et un an
pour S et L. Pour tous, il y a la clause de renouvellement automatique, sauf
préavis de 3 mois.
Mise sociale
Pour F, S, L, M, c'est l'article 3. Pour A, c'est l'article 4.
Pour S, le titre de l'article est "Mise de fonds" et pour A
, le titre est "Mise de fond du propriétaire"
Pour F, S et L, la formule adoptée est la suivante : "La mise sociale des (du) propriétaire (s) consiste dans autant de fonds que les
travailleurs pourront en cultiver en cannes". Pour A, on précise qu'il s'agit "d'usufruit" (de l'habitation
sucrerie, caféière et vivrière) mais pour les cinq, le descriptif est rapide : bâtiments d'exploitation, animaux de labour (boeufs
et mulets), ustensiles aratoires ou d'exploitation, cases pour les travailleurs et, bien sûr, les terres. Dans trois cas, il y a des réserves.
S réserve la terre de Pilnbois, L réserve le moulin
"qui est cassé et que les propriétaires s'obligent à metre en état" (cette indication est
déjà le signe d'une dégradation importante de cette habitation) et A réserve les meubles et immeubles ne servant pas à la société (maison d'habitation,
chevaux, écuries).
Enfin, pour les travailleurs, la formule est sensiblement la même, il s'agit pour eux de leur travail de culture.
Dépenses à la charge de la société
C'est l'article 4 pour F, S, L, M. C'est l'article 5 pour A.
Pour F, S, A, il y a un intertitre : "Dépenses à la charge de chaque
associé". Pour L, le titre est "Dépenses à la charge de la
société et dépenses à la charge de chaque associé". Pour M, le titre
est "Dépenses à la charge des associés"
Malgré la présentation un peu différente, les cinq traitent bien des charges pour chacun des associés.
La société supporte l'entretien des bâtiments de manufacture et d'exploitation et les charges des impôts fonciers. Si les clauses
sont très générales pour F, S et
l, c'est beaucoup plus précis pour A et M
. A rentre même dans les détails des matériaux et fournitures (bois, merrains, aissantes,
tuiles, etc.) et il y a une clause particulière pour le canal qui conduit l'eau à l'habitation et une autre pour une certaine portion de
terre. Même précision pour M qui évoque certains marchés et des loyers de
terres.
Pour les charges de chaque associé, comme d'habitude, les clauses sont identiques pour F, S et L : du côté du propriétaire, il a à sa charge l'entretien de
sa maison et les frais de son représentant, plus les frais de nourriture et d'entretien ; du côté des travailleurs, c'est aussi la
nourriture et l'entretien, étant entendu que pour les deux, c'est "tant en santé qu'en maladie" et y compris
"les infirmes et les enfants".
A ajoute une clause pour les travailleurs : "Néanmoins, les cultivateurs associés qui
auraient des chevaux dans l'écurie du propriétaire contriburont avec lui à l'entretien et aux réparations que l'état des
lieux pourrait exiger, chacun proportionnellement au nombre de chevaux lui appartenant."
La situation à M est plus complexe puisque, d'une part, il est prévu une répartition un tiers (pour
le propriétaire) et deux tiers (pour les travailleurs) en ce qui concerne une série d'achats, de marchés ou de loyers et, d'autre part,
il reste à la charge personnelle des travailleurs, "toutes les autres dépenses de main-d'oeuvre, soit pour la culture des
terres, la garde des animaux et leur entretien, soit pour les travaux ordinaires de l'habitation". Il est même précisé qu'elles
seront prélevées sur leur part dans les produits de l'exploitation.
Outre que cette dernière clause, très générale, laisse ouverte la porte à des abus, on devine une situation plus tendue
à M que dans les quatre autres habitations. Plus généralement, on se doute que l'un des risques de ces associations est de faire passer sur le compte de la société (et aux dépens des travailleurs) des
dépenses qui ressortent de la seule maison du propriétaire ou celles de ses dépendances qui sont hors exploitation.
Obligations et immunités des travailleurs
C'est l'article 5 pour F, S, L. C'est l'article 7 pour A
et l'article 6 pour M.
Pour F et S, c'est le même texte, quasiment mot pout mot. Toutefois, une
petite différence.
Dans F, il est dit : " Aucun
travailleur ne pourra élever sur la propriété d'autres animaux qu'un porc bien parqué et des volailles", alors
que dans S, la phrase devient : "Aucun travailleur ne pourra élever sur la propriété d'autres animaux que des
porcs bien parqués et des volailles".
Dans S, un paragraphe supplémentaire final : "Le propriétaire conserve aux cultivateurs la moitié du produit de
son troupeau de vaches composé de 35 têtes mais à la charge de les soigner et en supporter la moitié de la perte dudit troupeau
et se réserve le lait de ce troupeau".
Ce qui frappe dans la philosophie qui ressort de cet article, c'est la confusion entre ce qui dépend de la société de ce qui concerne les
biens propres du propriétaire. Ainsi, les travailleurs devront "faire tous charrois d'objet d'importation ou d'exportation
nécessaires à l'usage et aux besoins de la société et à ceux du propriétaire (...) donner leur temps
à la répartition de la reconstruction de tous les bâtiments, même de ceux dont la société n'a pas la jouissance,
si besoin il y a, le tout sans aucune rétribution". Même la clause suivante prête à ambiguïtés :
"entretenir les chemins et les traces de l'habitation en bon état", dans la mesure où l'on ne fait pas la
différence entre les parties propres à la maison du propriétaire et à celles correspondant à ce qui est mis dans la
société. Même chose quand il est écrit : "Les travailleurs devront fournir des herbes pour les chevaux des
propriétaires ou de leur représentant."
Pour L, les charges, les obligations et les immunités sont les mêmes que celles de
S. On retrouve la clause sur le troupeau de vaches qui est
de 13 têtes. Par contre, il y a une précision et une restriction :
- La précision : "les travailleurs s'obligent à transporter les cannes par mulets ou par cabrouets devant le moulin
à vapeur de M. FROIDETOIS FARGES." Probablement que cela correspond au fait que le moulin de l'habitation était cassé, comme il
est indiqué à l'article 3.
- La restriction : "Les travailleurs ne pourront point tirer du vesou", alors que pour S (comme pour
F),
"chaque travailleur aura droit, lorsque le moulin
marchera, de prendre dans la propre [c'est-à-dire la chaudière que l'on appelle la propre] une mesure de vesou par
jour".
Dans A, on donne une explication curieuse au fait que les cultivateurs devront fournir des heures pour la nourriture des
chevaux du propriétaire. C'est "par compensation du fumier de l'écurie qui sera employé à la culture
des plantations de la société" On retrouve la confusion constatée dans les autres habitations. C'est même plus
précis. Par exemple, il s'agit de nettoyer et entretenir "les mares et canaux de l'habitation, entretenir les alentours des
bâtiments en état de propreté et généralement faire tous les travaux nécessaires". Cette
dernière clause était donc, effectivement, suffisamment générale pour couvrir nimporte quel travail nécessaire ou non
à la société.
Tout de suite après, A prévoit la sanction : "Tout travail commandé devra
être exécuté par celui qui aura été désigné, sous peine pour le délinquant d'être
renvoyé de l'habitation par le directeur des travaux." Il est dit, plus loin, que les travailleurs ne pourront couper des cannes, on
prévoit des amendes en cas d'utilisation du matériel ou d'animaux pour des besoins particuliers. Par contre, les travailleurs pourront avoir
des chevaux sur l'habitation mais à condition de les mettre dans l'écurie du propriétaire. Quant aux risques de dégats par les
animaux des travailleurs, la punition peut être sévère, puisque "les porcs pourront être tués sur le lieu du dégat
sans indemnité pour le maître à qui il appartiendra."
Une clause nouvelle (par rapport à F, S et L
) apparaît plus équilibrée dans son principe : "Les travailleurs devront fabriquer la farine manioc du
propriétaire et ceux qui seront employés à cette fabrication auront pour leur peine un tiers de la farine fabriquée." On
prévoit une sanction collective en cas de dégradation mais aussi que les travailleurs auront "la jouissance d'un
jardin dont l'étendue sera de douze ares." C'est plus généreux que pour F, puisque celle-ci
prévoyait qu'ils "auront droit à une quantité de terre de six ares pour y planter des vivres.", alors que pour
S (et donc L), c'est plus vague : "une certaine
quantité de terre pour y planter des vivres."
Par contre, dans A, on reprend d'une main ce que l'on donne de l'autre puisque le propriétaire prendra un tiers
"des fruits et revenus qu'ils feront tant dans les dits jardins qu'à l'entour de leurs cases."
A précise encore que "nul étranger n'aura le droit de demeurer dans les cases des
travailleurs sans la permission du propriétaire" et qu'en temps de roulaison, les personnes du moulin et de la sucrerie auront droit à
un demi litre de vesou par jour à prendre dans la chaudière dite la propre. De son côté, le propriétaire aura droit
"à du sirop de batterie ou à des formes de sucre en pareille quantité que celles prises par les travailleurs."
Pour M, à l'article 6, on retrouve les clauses de A, sauf que, comme pour
L, les terres réservées aux travailleurs sont "une portion de terre", sans plus
de précisions. Par contre, pour les animaux que les travailleurs peuvent élever pour eux, il est dit : "il est permis aux
cultivateurs associés d'élever des bestiaux sur l'habitation." On ne précise donc pas s'il s'agit de porcs ou de volailles et
on n'en limite pas le nombre. Comme pour A, le propriétaire peut les faire tuer en cas de dégats aux
cultures. Il n'y a ni la clause de prise d'un tiers des fruits et revenus des jardins, ni celle de la sanction collective, mais il n'y a pas non plus la
possibilité de prendre du vesou par les travailleurs.
Du travail
Pour F, S, L, A, c'est l'article 6. Pour M, c'est l'article 5.
Le titre de A est "Mode de durée du travail" et celui de M est :
"Mode et durée du travail".
Pour F et S, l'article 6 est strictement identique et pour L, c'est un simple renvoi
aux dispositions de S. Pour ces trois habitations, il y a cinq dispositions : cinq jours de travail par semaine avec un
début de la journée à six heures du matin et une fin à six heures du soir, espace de temps interrompu par trois heures de
repos, de dix heures à treize heures, plus une possibilité de prolongation de deux heures à l'époque de la roulaison. Un rapport journalier sera fait tous les soirs par les chefs, en ce qui concerne le travail du jour comme de
celui du lendemain et aussi des manquements au travail. Un registre sera tenu pour inscrire le nombre de jours ou d'heures que chaque travailleur aura pu manquer au
travail. Ce registre sera lu toutes les semaines par les propriétaires à l'atelier réuni, en présence du conseil des
commissaires.
Pour A, la journée de travail est de neuf heures, "réparties entre le lever et le
coucher du soleil", avec trois heures de repos (une heure pour le déjeuner et deux heures pour le dîner), ce qui représente donc
une heure de plus par rapport à F, S, L et moins de précision quant au début et à la fin de
la journée. Par ailleurs, la différence est forte pour la période de "roulaison", puisqu'il est indiqué : "Il sera en
outre fourni un travail supplémentaire de nuit, mais seulement par les personnes occupées à la manipulation du sucre. Ce travail se
prolongera jusqu'à minuit". On a vu que pour F, S, L, le travail se terminait à 18 heures et
qu'il pouvait être prolongé jusqu'à 20 heures (deux heures de plus). Quant à M, les formules
sont encore plus floues. On retrouve la journée de neuf heures, entre le lever et le coucher du soleil, mais on ne donne pas le nombre d'heures de
repos et de repas et on ne précise pas à quels moments elles seront prises. Par contre, il est dit que "Les heures de repos
et de repas prises dans le reste du temps devront être les mêmes pour les travailleurs". Surtout, pour la roulaison et pour les personnes
occupées à la manipulation des produits, "il sera en outre fourni un travail supplémentaire de nuit". On ne
peut pas être plus vague sur le nombre d'heures. Pour le reste, les clauses sont les mêmes. A noter, toutefois, que dans
A, les rapports des chefs (chaque soir) devront inclure le "travail supplémentaire fourni".
Distribution du travail
Pour F, S, L, c'est l'article 7. Il n'y a pas d'article correspondant pour A (le
sujet est traité dans l'article 6) ni pour M ((le sujet est traité dans l'article 5).
Pour F et S, l'article 7 prévoit que le travail se fera en commun ou, si les travailleurs
préfèrent, en deux sections ou compagnies (pour la culture de la canne uniquement, les travaux généraux de l'exploitation
étant faits en commun). Chaque compagnie aura un chef et un sous-chef ayant un rôle de représentation, de défense des
intérêts et de maintien de l'ordre. Il y a encore deux clauses supplémentaires : chaque compagnie s'engage à porter le nombre des
travailleurs à quarante au moins et le partage des plantations existantes comme la désignation des terres à planter est du ressort des
seuls propriétaires. En ce qui concerne L, l'article 7 est absent (on passe de l'article 6 à l'article 8)
mais on voit bien qu'il s'agit toujours du même alignement des dispositions sur ce qui est prévu par S.
C'est aussi la preuve que cette convention a été bâclée, en l'absence des propriétaires.
Avances à faire aux travailleurs
Pour F, S, L, c'est l'article 8. Il n'y a ni article ni § traitant de ce sujet pour A, M
.
Les textes sont strictement identiques pour F et S, cependant que L renvoie à S : "les propriétaires s'obligent à
faire aux travailleurs les mêmes avances". L'article 8 fait une distinction entre "les travailleurs de première
force" qui toucheront deux francs d'avance par semaine et "les travailleurs de seconde force" qui ne toucheront qu'un
franc. Pour tous, ces avances seront notées sur le livret de chaque travailleur.
Retenues et peines disciplinaires
Pour F, S, L, A, c'est l'article 9. Pour M, c'est l'article 8.
Cinq stipulations se trouvent dans l'article 9 de F et S (
L se contentant de renvoyer à S). Selon le temps d'absence non autorisée, l'inconduite ou
l'insubordination, il est prévu une échelle de sanctions : retenues sur les bénéfices plus ou moins fortes et exclusion,
interdiction de rentrer sur l'habitation pour le travailleur expulsé qui a quinze jours pour récolter ou faire récolter les produits
de son jardin. Obligation de se faire remplacer pour un travailleur qui se retire volontairement, sauf à perdre tous droits aux
bénéfices et inscription sur un livret individuel des heures manquées au travail. A part quelques modifications de forme, le texte
est strictement identique pour F et S.
L'article 9 de A est beaucoup plus fourni. Les retenues sont fixées en francs et les conditions sont plus
strictes. Par exemple, l'exclusion peut être prononcée après trois jours consécutifs d'absence (cinq pour F et S). Le délai pour récolter les produits du jardin pour le travailleur
expulsé est de huit jours (au lieu de quinze pour F et S). Pour ces
mêmes produits, le texte est très restrictif : "Il ne pourra arracher les vivres qui ne seront pas à maturité. Le tiers de ces
vivres sera toujours acquis au propriétaire comme il est dit à l'article sept ci-dessus". Par contre, pour celui qui partirait
volontairement sans se faire remplacer, le conseil des commissaires pourrait décider qu'il ne perde pas tous les droits aux bénéfices
non réalisés lors de sa sortie. Il n'est pas non plus prévu de livret individuel. Enfin, une autre sanction est indiquée pour
un type d'infraction non prévue par F et S : "Celui qui
abandonnera le travail de la culture de la canne pour cultiver les vivres ou les cafins perdra sur sa part dans les bénéfices du sucre et du
sirop une somme de cinquante centimes par jour".
L'article 8 de M est plus réduit mais la ressemblance est forte avec A : les
retenues sont en francs et modulées selon le cas, le délai pour enlever les produits du jardin est de huit jours et même clause pour les
"vivres" qui ne sont pas à maturité. Par contre, restriction pour le travailleur expulsé qui n'a droit "que sur les sucres
fabriqués". Restriction aussi quand il est dit : "Il est interdit aux cultivateurs de travailler hors de l'habitation
sous peine d'être exclus de la société et expulsés de la propriété en cas de récidive". C'est une
clause d'exclusivité qui ne se trouve pas dans les quatre autres conventions. Particularité enfin, quant aux retenues :
"Toutes les dites retenues appartiendront moitié au propriétaire et l'autre moitié aux cultivateurs qui auront fourni leur temps
à la société". Cette façon de procéder est, évidemment, une manière astucieuse de s'attacher (on
dirait, aujourd'hui, d'intéresser) les "bons" travailleurs en les récompensant aux dépens des "mauvais" travailleurs. La même
idée est exprimée par A dans le premier paragraphe de son article 9 : "Celui qui
manquera au travail sans la permission du propriétaire, à moins que ce soit pour cause de maladie subira sur sa part à venir dans les
bénéfices de la société la retenue d'un franc par jour au profit du propriétaire et de la somme qui lui reviendra
lors de la répartition pour une journée de travail au profit de la masse des cultivateurs ses associés". A noter, tout
particulièrement, ce qui est écrit en ce qui concerne les absences pour maladie et qui constitue une clause protectrice pour les travailleurs.
On peut aussi comparer l'échelle des sanctions - avant exclusion - dans les cinq sociétés : pour F, S, L
, l'absence d'une journée coûte au travailleur une part double de celle qu'il aurait acquise dans le même espace de temps et,
pour les autres cas, du quantum qui lui reviendrait pour une journée seulement. Pour M, une journée
d'absence vaut deux francs et les manquements ordinaires un franc, sauf le vendredi où la demi-journée vaut un franc. Pour
A, la journée manquée vaut 75 centimes.
Partage des bénéfices
Pour F, S, L, A, c'est l'article 10. Pour M, c'est l'article 9.
Le titre, pour A, M est : "Partage des revenus".
Le texte est strictement identique pour F et S. Il est prévu un partage par moitié entre les
propriétaires et les travailleurs, après avoir défalqué ce qui est nécessaire pour couvrir les dépenses de la
société et nourrir les mulets et les chevaux des propriétaires. On retrouve ici la confusion des biens de la société et
des biens des propriétaires. Une dérogation à ce mode de partage est indiquée : "Il est dérogé
à ce mode de répartition des produits pour les denrées qui seront fabriquées avec la récolte bonne à faire : ces
produits seront dévolus savoir trois quarts aux propriétaires et un quart aux travailleurs". On peut supposer qu'il s'agit d'une
clause unique pour la récolte de ce qui a été travaillé avant la constitution de la société.
Pour L, comme toujours il y a un renvoi sur les clauses de S mais il y a deux
différences. D'une part, il est dit qu'une somme par boucaut (?) de 21,60 francs sera prélevée au profit d'un certain DESFARGES et,
d'autre part, pour la récolte à faire, il est précisé que "les travailleurs seront rétribués à raison d'un
franc par journée de travail de neuf heures". Là aussi, il s'agit d'une clause unique pour la récolte de ce qui a été travaillé avant la
constitution de la société mais avec un mode de rémunération différent et une durée de journée plus longue.
Le partage des revenus pour A est beaucoup plus précis. On retrouve la division en deux parts égales mais
en précisant qu'il s'agit des "produits en sucres et sirop et en cafés provenant des rejetons et des cannes neuves".
Surtout, les contours des dépenses nénessaires à la société font l'objet d'une description de procédures
minutieuse : le commissionnaire "choisi d'un commun accord", la vente avec "la commission d'usage"
, le contrôle des comptes par les "commissaires de l'habitation" et par "leur homme de
confiance" et la décharge donnée au propriétaire.
Pour M, il y a des similitudes avec A, bien que le texte soit différent. On
retrouve le prélèvement pour les dépenses de la société, le commissionnaire, la commission d'usage, les retenues et
dommages et intérêts. Par contre, le choix du commissionnaire est le fait du seul "administrateur", lequel ne sera
tenu de justifier des ventes "avec pièces à l'appui, qu'aux chefs seuls". C'est dans l'article 11 que l'on voit la
définition de l'administrateur ("le propriétaire ou son représentant sera seul l'administrateur de
l'habitation"). On voit aussi que le texte fait l'impasse sur le conseil des commissaires bien décrit dans A.
Enfin, le texte renvoie à l'article 4 pour le prélèvement, avant bénéfice, de la "fesance
valoir" ainsi que celui qu'il faut faire pour l'alimentation des animaux. Plus curieux est la dernière clause qui, pour le choix des deux
parts égales (propriétaires et travailleurs) prévoit que "les parts seront tirées au sort".
Partage entre les travailleurs
Pour F, S, L, c'est l'article 11. Il n'y a pas d'article ou de § sur ce sujet pour A
et pour M, c'est l'article 10.
F, S ont un texte identique à une clause près. L'article 11 fait la distinction entre les "travailleurs de
première force", les "travailleurs de seconde force" et ceux qui seraient "continuellement attachés à la garde des
animaux les samedis et dimanches". On rappelle que le partage tiendra compte des avances, amendes, retenues et dommages et intérêts.
Enfin, le conseil des commissaires sera présents lors des paiements, note en sera faite sur les livrets et décharge sera donnée aux
propriétaires.
Le paragraphe qui varie entre F et S concerne l'affectation des parts
retranchées (à cause des sanctions) ou perdues (à cause des exclusions). Pour F,
"elles seront
employées à donner aux chefs une demi-part et le surplus s'il en existe sera partagé entre ceux qui n'auront subi aucune retenue pour
manquement sans motifs au travail". Pour S, "elles seront employées à subvenir aux besoins des
cultivateurs nécessiteux qui pour maladie ou infirmité auraient été dans l'impossibilité de travailler et par
conséquent profiter des bénéfices de la société, le surplus s'il en existe sera partagé entre ceux qui n'auront
subi aucune retenue pour manquement sans motifs au travail".
Pour L, l'article 11 renvoie comme toujours à S mais avec une
différence puisqu'il y a trois catégories de travailleurs. Comme pour F et
S, il y a ceux qui touchent une part entière et ceux qui ont droit à une demi-part mais, en plus, on
trouve la catégorie de ceux qui touchent trois quarts de part. Dans les trois habitations, les gardiens d'animaux les samedis et dimanches
("continuellement attachés à la garde") ont deux cinquièmes de part en plus. A noter que pour les trois
habitations, on ne parle que des parts retranchées aux travailleurs de seconde force mais jamais aux travailleurs de première force.
L'article 10 de A évoque seulement les amendes et les livrets des travailleurs. Quant à
M, on reprend aussi la question des amendes, des livrets individuels et du registre de l'habitation, en
précisant que les paiements auront lieu par les soins du tribunal arbitral. A noter qu'en ce qui concerne les retenues pour journées perdues,
"elles seront dévolues, comme il est dit à l'article huitième qui précède, savoir moitié au propriétaire
et l'autre moitié aux travailleurs qui n'auront point encourus de retenues".
Abandon des avances
Pour F, S, L, c'est l'article 12. Il n'y a ni d'article ni § traitant de ce sujet pour A, M
.
On retrouve dans l'article 12 la même symétrie que dans l'article 8 qui prévoit ces avances. Elles seraient abandonnées s'il n'y
avait aucun bénéfice à distribuer. Et dans ce cas, il n'y aurait aucune restitution ni aucune compensation sur les biens des
travailleurs. Comme l'article 8, cet article est donc très protecteur pour les agriculteurs, ce qui fait une sérieuse différence avec
les sociétés de A et de M.
Conseil
C'est l'article 13 pour F, S, L. C'est l'article 8 pour A et l'article 7 pour
M.
Le titre, pour M, est : "Tribunal arbitral".
En dehors de L qui, comme toujours, s'aligne sur les dispositions prévues par S
, les clauses relatives au conseil varient pour les quatre autres habitations.
Pour F, il y a trois paragraphes.
Le premier est sur la composition, avec le président qui est le propriétaire et cinq membres "dont les deux chefs et les
deux sous chefs" prévus à l'article 7. Le second sur les attributions qui consistent à régler tous les différends
qui pourraient s'élever entre les travailleurs, entre ceux-ci et le propriétaire et à présider à la répartition
des parts des travailleurs. Le troisième concerne une attribution particulière, celle d'exclure les travailleurs qui nuiraient à la
société à cause de leur "inconduite ou par leur paresse". Donc, finalement un triple rôle de
médiation, de représentation et de répression.
Pour S, il y a, comme toujours, une forte ressemblance avec F, mais avec des
différences. En effet, si le deuxième paragraphe prévoit le même rôle de médiation, le premier paragraphe indique
qu'il est composé de cinq membre "dont les chefs d'atelier" devront faire partie et, surtout, le troisième
paragraphe ajoute une cause d'exclusion (inconduite, paresse, "insubordination") et un autre droit, celui "d'admettre dans
la société de nouveaux travailleurs", jusqu'à cinquante et après consentement du propriétaire. Par contre, il
n'est pas indiqué si le conseil préside à la répartition des parts.
Pour A, la composition est de quatre membres dont on donne les noms et les droits du propriétaire sont
précisés : il est non seulement le président de ce conseil mais, en plus, "il aura voix
délibérative et prépondérante dans le cas où tous les membres ne seraient pas présents aux
délibérations". Le rôle de médiation est plus développé et se transforme même en une sorte de relais
"hiérarchique", puisque le conseil est chargé de "maintenir l'ordre et la tranquilité sur l'habitation" et
aussi parce qu'il doit "y faire exécuter les travaux d'après les instructions du propriétaire". On va donc
beaucoup plus loin qu'un simple rôle de médiation. Enfin, on retrouve le droit d'exclusion mais il est aussi précisé que ce droit
n'atténue pas celui du propriétairede faire de même par voie judiciaire ou administrative.
Pour M, l'article sur le tribunal arbitral est beaucoup plus court. Il est composé de six cultivateurs
"pris d'abord parmi les chefs". Comme dans les autres habitations, il est présidé par le propriétaire, il
joue un rôle de médiation et il peut expulser ceux qui "troubleraient l'ordre, empêcheraient ou négligeraient
le travail.". A noter le verbe inscrit au début de l'article : "Il est maintenu" sur l'habitation un Tribunal
arbitral. Cela veut donc dire qu'il y en avait déjà un et cela renvoie certainement au début de la convention où il est dit que
M. de MAUNY ne change les conditions de travail convenues précédemment que pour satisfaire les chefs et les cultivateurs.
Décès du propriétaire ou de l'un des travailleurs
C'est l'article 14 pour F, S, L. C'est l'article 13 pour A (mais il n'y a pas
d'articles 11 et 12) et l'article 12 pour M.
Pour A, le titre est : "Décès du propriétaire ou d'un cultivateur. Vente de
l'habitation." Pour M, le titre est : "Décès du propriétaire ou de
travailleurs. Vente de la propriété."
Le texte est commun pour les cinq habitations mais avec un additif pour A et M. La
partie commune s'articule en trois idées : la société n'est pas dissoute avec le décès du propriétaire, elle
continue avec les héritiers ; les héritiers d'un travailleur décédé pourront le remplacer, sous réserve de
l'agrément du propriétaire et du conseil ; si ce remplacement n'est pas possible, il sera tenu compte de sa part dans les
bénéfices. L'additif indique qu'il "sera loisible au propriétaire de vendre son habitation en soumettant
l'acquéreur aux clauses et conditions du présent contrat" (A) ou aux
"obligations contractées par le présent acte" (M). Il y a encore une différence importante,
en ce sens que pour F, S, L, le remplacement du travailleur se fait avec le double avis du propriétaire et du
conseil des commissaires, alors que pour A et M, seul l'avis du propriétaire
est requis, ce qui est moins favorable pour les agriculteurs.
Administration
C'est l'article 15 pour F, S, L. Il n'y a pas d'article réservé à ce sujet dans A mais le dernier § de l'article 12 remplit le même objet. Pour M, c'est l'article 11.
L'article 15 des trois premières habitations est articulé autour de deux idées. La première est que le
"conseil des commissaires"
pourra avoir un commissaire aux comptes qu'ils pourront payer ; la deuxième est que le propriétaire garde entre ses mains l'administration
et la direction de l'habitation dans tous ses aspects. Le dernier paragraphe de l'article 12 de A reprend cette deuxième
clause, de même que l'article 11 de M. Pour cette habitation, il y a, d'ailleurs, une légère variante, car
il est dit que le propriétaire rendra compte aux chefs des compagnies. Quant à la première clause, elle se trouve aussi dans
A mais au dernier paragraphe de l'article 10 qui traite du partage des revenus et uniquement pour le contrôle de ce qui est
dû aux travailleurs. Quant à M, il n'y a rien à ce sujet.
Dissolution de la société
Pour F, S, L, c'est l'article 16 (le dernier article de la convention) ; pour A,
c'est l'article 14 et pour M, ce sont les articles 13 (initialement, le dernier article) et 14 (article sans titre).
Les articles sont identiques pour F et S. Comme pour le reste, L s'en reporte à S. Dans ces trois conventions, il est dit qu'à
la dissolution, les propriétaires en retireront tout ce qu'ils y ont apporté ; on fait référence à l'inventaire
annexé et compte tenu des déficits et des plus-values. Clause semblable pour A et M (sauf que pour M, il n'y a pas de référence à l'inventaire, puisqu'il
n'y a pas de pièce annexée). Par contre, A ajoute que le propriétaire peut
décider de rompre, soit complètement, soit pour une partie des travailleurs, si ceux-ci ne tiennent pas leurs obligations contractuelles.
Autrement dit, il s'agit d'une dissolution-sanction et on précise, toujours dans A, que le propriétaire
défalquera les dépenses et dommages-intérêts inhérents à ces manquements. Du coup, M
a ajouté un article 14, sans titre, qui reprend la même idée, en précisant que cette dissolution, conséquence de
l'inexécution de tout ou partie des obligations des cultivateurs, se fera "par les voies légales".
Incorporation des nouveaux travailleurs dans la société
C'est uniquement A qui a prévu un article particulier (le 3), permettant l'entrée de nouveaux travailleurs
dans la société mais à une double condition : que le nombre total des "associés" ne dépasse pas 45 et que ces nouveaux
travailleurs soient agréés par le propriétaire. La même disposition est incluse dans l'article 13 de S
, ce pouvoir étant donné au conseil et à condition que le nombre total ne dépasse pas cinquante.
Articles sans titres
On a déjà vu que M a ajouté un article 14 (sans titre) pour prévoir, comme A, une dissolution-sanction. Il y a encore, pour M, un article 15, également sans
titre (ce qui montre qu'il a été ajouté après la rédaction). Cet article prévoit que les clauses seraient
applicables à tous les travailleurs qui entreraient dans la société.
Fougainville, Saint Pons, Saint Vincent, Tocnay, Lescouët, Ravine Braie,
le monde d'hier et le monde d'aujourd'hui.
L'habitation Lescouët (L) est un peu à part dans cette comparaison, car ses propriétaires ont
quitté très tôt la Martinique, laissant aux du PLESSIS la liberté de gérer à leur place et en leur nom. Il semble bien
alors que le domaine ait été progressivement délaissé. Trois étapes permettent de se faire une bonne idée de la
situation :
- En 1812 : vente de l'habitation par les DECASSE aux LESCOUËT ; l'impression générale est celle d'une exploitation
prospère, avec 106 esclaves, des plantations de cannes, bananes et manioc, 26 mulets et 7 ovins.
- En 1848 : constitution de la société, juste après l'abolition de l'esclavage ; il n'y avait plus que 33 cultivateurs,
beaucoup de terres avaient été vendues mais on comptait encore 16 boeufs, 4 mulets, 13 vaches ou veaux. On sait aussi que le moulin
était cassé. Le texte de 1848 est très succinct et ses articles renvoient systématiquement aux clauses prévues
dans la convention de l'habitation
Saint Pons. Ce seul fait est révélateur de la situation marquée, par ailleurs, par les ventes de terres qui réduisent fortement
l'importance de cette propriété et expliquent la diminution du nombre de ses travailleurs.
- En 1852 : vente de l'habitation par les LESCOUËT aux GROS DESORMEAUX ; on voit que les confronts sont presque tous des terrains détachés de l'habitation et vendus les années
précédentes. Plusieurs bâtiments sont en mauvais état (par contre, le moulin a dû être réparé). Les
30 cases à cultivateurs sont aussi en mauvais état. Il y a toujours 4 mulets mais 2 sont aveugles et 1 est borgne, quant aux 20 boeufs, ils
sont tous en très mauvais état.
Si L est une copie de S, cette dernière n'est pas très
différente de F. Il paraît évident que les ressemblances entre ces trois sociétés
tiennent à la présence de du PLESSIS dans les trois habitations. Seul propriétaire de S,
copropriétaire de F et chargé de gérer L au nom des
LESCOUËT. On a aussi l'impression à la lecture des différents articles que A et M sont plus restrictifs que les trois autres et même que M constitue la
société la plus difficile pour les travailleurs. Dans tous les cas, on comprend l'échec de ce type de contrat d'association qui faisait
la part belle aux propriétaires, qui bien souvent était trop floue quant aux droits des travailleurs et qui, surtout, ressemblait
trop à la situation antérieure de non droit des esclaves. Devenus agriculteurs sur les mêmes plantations,, il aurait fallu marquer une
nette différence avec le passé. Un pas était fait dans F, S, L avec l'instauration d'avances mais
est-ce que la situation même de l'habitation, avec les mêmes cases, le même encadrement, les mêmes propriétaires, pouvait
vraiment engendrer des rapports nouveaux ? On peut en douter, d'autant que ces sociétés ont été créées
immédiatement après l'abolition de l'esclavage.
Dans le tome 2 de l'Histoire de la Martinique (de 1848 à 1939), d'Armand NICOLAS, le constat est sans appel, page 17 : "On voit
que l'association représentait, pour les planteurs, un premier pas vers cette fameuse "organisation du travail" qui ferait de l'ancien esclave un
nouveau serf attaché à la terre, il satisfaisait leurs fausses préoccupations morales, susceptibles "d'initier le nègre à
la liberté". Ainsi, "l'ordre et le travail" seraient assurés, mais aussi la pérennité de leurs privilèges. Certains
d'entre eux, les plus "libéraux", reconnaissaient que "ce mode devient attentatoire à la liberté individuelle du nègre". C'est
de cela aussi que se rendaient compte les cultivateurs en luttant contre l'association.
PERRINON écrit au ministre : "J'ai eu quelque peine à faire comprendre l'association, surtout aux femmes qui considéraient la
subordination et l'obligation du travail comme le signe distinctif de l'esclavage" (25 juillet 1848).
Le salaire avait la faveur de la majorité des travailleurs. GATINE note : "Le salaire même minime, mais exactement payé avec la case et
le jardin, semblait le plus sûr moyen d'obtenir le travail dans les circonstances où il s'est trouvé après
l'émancipation ... Il établit nettement, aux yeux des travailleurs noirs, la différence entre le travail forcé d'autrefois et
le travail libre d'aujourd'hui". Un autre spécialiste des questions du travail, E. THOMAS, ancien Directeur des Ateliers Nationaux, en mission à
la Martinique, écrivait au Ministre de la Marine : "Partout où l'association subsiste, le travail est illusoire, là seulement où
le salaire régulier est établi, le travail commence à mériter ce nom". En effet, il était remarquable que les
habitations sur lesquelles était employée l'association périclitaient, alors que les premières usines centrales quintuplaient
leur production par l'emploi d'une main-d'oeuvre salariée.
Ainsi apparaît l'antagonisme fondamental entre propriétaires qui veulent continuer l'esclavage par un système de travail forcé et
les travailleurs pour qui tous les procédés de contrainte rappelaient de trop proches souvenirs. (...)"
Il serait intéressant de faire une comparaison entre la situation des habitations de Rivière-Pilote en 1848 et 1870. Une
vingtaine d'années séparent l'abolition et la constitution de ces sociétés de l'insurrection qui a enflammé le sud de
l'île. On voudrait bien savoir ce qui s'est alors passé dans ces cinq habitations mais il semble bien que les archives notariales soient en
déficit pour tout le temps des troubles.
(à suivre)
(p. 96) "Concernant Rivière-Pilote, les recherches d'état civil, pour cette période succédant
à l'abolition, ont été limitées par l'état des registres, certains volumes ayant
été détériorés par les inondations successives. Les généalogies
dressées pour chaque famille enquêtée sont donc rarement complètes. De plus les indications
portées par les officiers de l'état civil sont beaucoup moins précises que pour le Morne-Vert et
Basse-Pointe. La diversité des noms de quartier disparaît sous le générique uniforme de "hauteurs
de la commune", ce qui rend difficile la localisation exacte de la population. De même la profession de cultivateur est
appliquée sans distinction aux petits propriétaires et aux employés à la culture. Le terme
de propriétaire ou d'habitant est réservé le plus souvent aux notables, contrairement aux
deux autres communes où il désigne le moindre possesseur d'un lopin de terre. De ce fait, il n'a pas
été possible non plus de suivre correctement l'itinéraire des Nouveaux Libres."
"La recherche sur Rivière-Pilote a toutefois permis de constater un mouvement assez lent d'installation de la
population dans les quartiers. Ce phénomène concerne surtout Jossaud où l'on trouve des domiciliations
sur les habitations (Fougainville, Desroches, Désormeaux ...) jusqu'à des dates assez tardives (1886).
Ce fait est sans doute à mettre en relation avec la vente du domaine de Jossaud survenue vraisemblablement dans les
années 1880. Seule la population du Morne-Honoré offre, à l'issue de ce travail, un tableau assez
complet. Je rappelle que le Morne-Honoré est le seul quartier étudié dont le peuplement s'est
effectué dès le début du XIXe siècle, voire avant, sans enregistrer de bouleversement au moment
de l'abolition (voir annexe 3). Nous sommes donc en présence d'un quartier plus
ancien que les autres, fondé par une famille d'affranchis mulâtres, rejointe après l'abolition par
quelques Nouveaux Libres. Faut-il reconnaître dans cette population, une paysannerie formée pendant
l'époque esclavagiste ?" (...)
La localisation de quatre quartiers de Rivière-Pilote
étudiés par Christine CHIVALLON dans son livre :
"Espace et identité à la Martinique (p. 47)"
(p. 248) Annexe 3 : "Historique de la formation de hameaux paysans de Rivière-Pilote"
"Vignette" "Ce hameau résulte vraisemblablement du morcellement d'une habitation vivrière ayant appartenu à la famille Vignerte. La présence de cette famille sur la commune est confirmée par l'état civil en 1851. Louis Adolphe VIGNERTE est alors cité comme habitant-propriétaire. Une petite annonce, relevée sur le journal Le Propagateur, permet en outre de vérifier l'existence de cette ancienne habitation : en 1870, est vendue sur licitation une portion de terre dite La Vignerte, d'une superficie de 20 hectares environ, consacrés au vivrier (1). Cette propriété est alors bornée par celle d'une famille issue de mulâtres libres dont les descendants vivent encore dans le hameau. Certains habitants actuels du quartier se souviennent des acquisitions faites par les grands-parents auprès d'un certain Monsieur VIGNETTE ..." "Morne-Honoré" "Là encore, le nom du hameau fait référence à son ancien propriétaire, Honoré PALATUA. Celui-ci a vécu à Rivière-Pilote dans la première partie du XIXe siècle. Les généalogies de familles vivant actuellement dans le hameau font état de filiations directes (2). Fils d'un mulâtre libre, Honoré appartient au groupe traditionnel des gens de couleur libres. Maître charpentier, sergent de la compagnie de couleur, il est aussi propriétaire d'une habitation et d'esclaves (3). En 1850, l'état civil mentionne une naissance sur l'habitation caféière de la veuve Honoré PALATUA. Cette propriété est de nouveau citée en 1889, selon cette même source, sous le nom d'Habitation Honoré. Entre temps, une partie a probablement été morcelée, puisque la vente de 26 hectares appartenant à la famille Honoré, est pratiquée en 1886 à la requête des héritiers (4). Cette vente a vraisemblablement permis l'installation de Nouveaux Libres dans le quartier. Ce faisant, de nombreux descendants d'Honoré PALATUA sont restés vivre dans le hameau, sans doute sur le reliquat des terres acquises par leur ancêtre. Il faut également noter la présence ancienne sur les lieux, d'une autre famille de mûlatres mentionnés libres dès le début du XIXe siècle. Ces informations permettent de situer avec certitude le Morne-Honoré comme l'un des seuls quartiers où l'installation de la population est en grande partie antérieure à 1848." "Jossaud" "La présence d'une ancienne habitation-sucrerie, ayant appartenu à monsieur JOSSAUD en 1820 (5), pourrait indiquer que la formation du quartier résulte du morcellement de ce domaine. Mais la situation sur le terrain apparaît plus complexe, tout au moins concernant la zone étudiée. Le démantellement de plusieurs grandes ou moyennes propriétés a sans doute été comme au Caplet, à l'origine d'un seul hameau." "Le domaine sucrier de Jossaud encore en activité en 1882, sous l'appellation d'habitation-sucrerie des Palmistes (6), a probablement été partagé vers la fin du XIXe siècle pour donner naissance à des propriétés de moyenne importance. D'après les témoignages, une distillerie a fonctionné sur l'une d'elles au début du XXe siècle (distillerie Prudent). Certains acquéreurs de moyennes propriétés, notamment quelques notables mulâtres, auraient à leur tour morcelé leurs terres. Cet ensemble correspond aujourd'hui à la partie sud du quartier." "Concernant la partie nord-ouest du quartier, les habitants les plus âgés s'en réfèrent à quelques anciennes habitations pour expliquer sa formation. Le morcellement des propriétés Desruisseaux et Désormeaux en serait à l'origine. Ces toponymes correspondent au nom de familles de propriétaires recensées par B. DAVID entre 1809 et 1829. L'état civil permet de retrouver ces mêmes familles présentes à Rivière-Pilote entre 1850 et 1860. En revanche, aucun de leurs descendants ne semble être resté dans le quartier, ce qui incite à penser que ces propriétés ont été vendues à un moment ou à un autre." Enfin, la partie nord-est, située sur les pentes du Morne-Vent serait associée à la présence d'un propriétaire blanc, Monsieur BELLAY, qui aurait donné une partie de ses terres à ses enfants illégitimes autour des années 1860-1880. Cette famille blanche vivait déjà à Rivière-Pilote entre 1809 et 1829 (7). Une habitation caféière est citée comme lui appartenant sur le registre d'état civil de 1850. Les lieux portent toujours le nom de Bellay, tandis que de nombreux descendants, se réclamant de cette branche illégitime, vivent encore dans le hameau. Bas Mangos "Une grande incertitude demeure pour tracer la genèse précise de ce quartier, due en partie au très faible nombre d'enquêtes pratiquées dans ce hameau. Il se peut que le lieu-dit Marianne, qui forme l'annexe de Bas-Mangos, soit associé au négociant blanc MARIANNE qui a vécu à Rivière-Pilote vers 1808 (8). Les généalogies des familles vivant actuellement sur les lieux ont permis de remonter à une génération de propriétaires vers 1870, mais le nom des hameaux apparaissant tardivement dans l'état civil (1913), il est difficile de savoir si ces personnes se trouvaient, avant cette date, précisément en cet endroit. L'Annuaire de la Martinique signale également la présence de propriétaires vivriers dans le quartier en 1935 (9)." "(1) Le Propagateur, mai 1870, disponible sur microfiches à la bibliothèque Schoelcher, Fort-de-France, Martinique. (2) Voir la généalogie de la famille Honoré reportée en annexe n° 4. (3) Ces informations ont été puisées dans le fichier élaboré par B. DAVID pour la réalisation de son étude dont les résultats sont exposés dans La population d'un quartier de la Martinique au début du XIXe siècle, d'après les registres paroissiaux. Rivière-Pilote : 1802-1829, 1975. (4) Registre des hypothèques, région Sud, volume 407, année 1886, article 7 (cette référence a été retrouvée grâce à la documentation réunie par Mmes MOUSNIER et CAILLE pour la réalisation de l'Atlas historique du patrimoine sucrier de la Martinique, 1990). A cette époque, l'Habitation Honoré aurait été une sucrerie. (5) D'après MOUSNIER et CAILLE, Atlas historique du patrimoine sucrier de la Martinique, 1990, (carte de 1820). (6) Le Propagateur, avril 1882, disponible sur microfiches à la bibliothèque Schoelcher, Fort-de-France. (7) D'après le fichier de B. DAVID. (8) D'après le fichier de B. DAVID. (9) Annuaire de la Martinique, année 1935, rubrique Rivière-Pilote (disponible aux Archives départementales de la Martinique)." |
La Martinique d'aujourd'hui.
Nos avions eu la chance de suivre le prologue de la course des yoles de 1996 dans un bateau qui suivait à distance (comme ceux que l'on peut voir sur les clichés de 1996 et de 2008). Pour nous, c'est cette course qui symbolise le mieux la Martinique d'aujourd'hui : la beauté, le sport et le sens de la fête, malgré les problèmes économiques et sociaux. Nous en profitons pour remercier BelleMartinique.com qui nous tient au courant de l'actualité en Martinique. Etudier le passé ne veut pas dire que l'on néglige le présent !
Le n° 13 de Business News (juillet/Août 2005) a fait son dossier sur le tour des yoles, avec le titre suivant : "Tour des Yoles : un modèle pour une nouvelle économie ?" Reprenons ici, simplement le "chapeau" de ce dossier réalisé par Eddie MARAJO (Directeur de la publication) : "Le Tour des Yoles n'appartient plus aux yoleurs. Il est devenu la propriété des Martiniquais. Ce n'est plus une manifestation sportive. C'est devenu l'événement de tous les superlatifs. C'est le spectacle le plus fédérateur, le plus aimé, le plus médiatisé, le plus beau, le plus fréquenté, le plus touristique, le plus sponsorisé, le plus récupéré politiquement, etc. de l'année. C'est surtout le symbole absolu de l'impact économique du sport dans une société qui cherche encore des voies de développement "miraculeuses" venues d'ailleurs en ignorant superbement la créativité et la réussite de ses enfants." Le sous-titre de cette revue annonce qu'il est Le magazine de l'actualité économique régionale - Guadeloupe - Guyane - Martinique - Caraïbe.. Le dossier est signalé en couverture : "Tour des yoles rondes de Martinique - 10 millions d'euros de retombées."
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Il y a les bons et les mauvais jours. Ici, quatre photos des conséquences du déluge qui a frappé la Martinique au début mai 2009. Ces clichés ont été pris à Rivière-Pilote (le bourg, le mur du cimetière, le stade, le lit de la rivière) et se trouvent sur la Newsletter Bellemartinique du 08.05.2009 : "300 mm d'eau tombés en quelques heures provoquant la mort de deux personnes, des inondations, éboulis, routes effondrées, maisons dévastées ..." Nouvelles inondations le 06.11.2015 : le maire, Raymond THEODOSE, estime que l'eau est montée à plus de 2,50 m (information sur la chaîne "La première"). Certains disent n'avoir jamais vu cela, même lors du cyclone Dean, en août 2007, où l'eau n'était pas montée jusqu'à 2 mètres, selon les sinistrés. - 2007 - 2009 - 2015 et, certainement, bien d'autres années encore mais, cette fois, c'est vraiment l'apocalypse se désole Raymond ZIETOT (le président des commerçants de Rivière-Pilote). Selon lui, aujourd'hui (le 09.11.2015), il est impossible pour les habitants sinistrés de se nourrir ou encore de s'approvisionner en produits de première nécessité." (article d'Audrey OLLON et de Peggy SAINT-VILLE).
Le 22.09.2013, un monument a été inauguré à Rivière-Pilote. Érigé en mémoire de l'insurrection de 1870 du Sud de la Martinique ; il représente Louis TELGA sur son cheval, Lumina SOPHIE dite Surprise, avec une pierre sous son pied (car elle en avait toujours une avec elle qui lui servait d'arme) et un troisième personnage qui représente symboliquement l'ensemble des insurgés. En septembre 2016, la Collectivité Territoriale de Martinique a consacré quatre journées de célébration de Gloriyé Septanm 1870, du 22 au 25 septembre 2016, à Fort-de-France et Rivière-Pilote. Un article, par Léandre LITAMPHA, sur ces commémorations se trouve dans le numéro d'Antilla du 30.09.2016.
Photo réduite à partir de la 4ème de couverture du n° du 26.09.2013 de la revue Antilla
(la photo initiale est de M. Léandre LITAMPHA)