La lignée des EUZET de Saint-Félix-de-Lodez et de Sète.
La branche de Sète (suite 3).
Une grande figure de Sète : Honoré EUZET
Ce fichier comprend les extraits de presse qui constituent les pièces justificatives de deux articles parus, le premier en février 2017, dans le n° 48 d'Etudes héraultaises, sous le titre : "La longue marche vers le pouvoir du futur maire de Sète, Honoré EUZET", le second en septembre 2018, dans le n° 50 d'Etudes héraultaises, sous le titre : "Honoré EUZET, maire de Sète et homme de pouvoir (1895-1931)"
Honoré EUZET, maire de la ville de Cette
(Le petit Méridional du 22.01.1927)
- dessin à partir de la photo parue dans Le guide de l'Hérault de 1904 -
La vie politique et la personnalité d'Honoré EUZET
(au travers de la presse)
1863-1869. 1870. 1871. 1872. 1873. 1874. 1875. 1876. 1877. 1878. 1879. 1880. 1881. 1882. 1883. 1884. 1885. 1886. 1887. 1888. 1889.
1890. 1891. 1892. 1893. 1894. 1895. 1896. 1897. 1898. 1899. 1900. 1901. 1902. 1903. 1904. 1905. 1906. 1907. 1908. 1909. 1910. 1911. 1912. 1913. 1914. 1915. 1916. 1917. 1918. 1919. 1920. 1921. 1922. 1923. 1924. 1925. 1926. 1927. 1928. 1929. 1930. 1931. Notes.
Abréviations : PM : Le Petit MéridionalEC : L'Eclair LC : Le Cettois PC : Le Petit Cettois NC : Le Nouveau Cettois JC : Le Journal de Cette LF : Le Frondeur IM : L'Indépendant du Midi JCM : Le Journal commercial et maritime de Cette CM : La Croix Méridionale MS : Le Midi Socialiste EM : L'Express du Midi AS : L'avenir Social LL : Le Libéral SC : Le Socialiste Cettois LPSC : Le Petit Socialiste Cettois LCS : La Concentration Socialiste LRM : La République du Midi LD : Le Docker |
Abréviations : AM : L'Avenir MaritimeMDM : Le Messager du Midi IMCM : L'idée moderne et la chronique du Midi PRC : Le Petit Républicain Cettois PR : Le Petit Réveil (de l'Hérault) MR : Le Midi Républicain SC : Le Sémaphore de Cette RAC : Le Radical Cettois AG : L'Avant-Garde REC : Le Réveil Cettois IME : L'Information Méridionale LVMR : La vie Montpelliéraine et régionale LM : Le Midi LT : Le Temps MN : Le Midi Nouveau LR : Le Rappel |
De 1863 à 1869
1870
1871
1872
Il est membre du Conseil municipal, de mai à décembre
1873
1874
Paul Napoléon DOUMET-ADANSON
(source Wikipédia)
1875
1876
1877
L'élection des députés
L'élection des conseillers généraux et des conseillers d'arrondissement
1878
Le Sémaphore de Cette des 18-19.03.1878
Cette : "Enfin, nous voilà complètement débarrassés de l'ordre moral. Hier soir, à six heures, MM. DOUMET-ADANSON, GAUTHIER et VIVARÈS, maire et adjoints de M. de BROGLIE, ont remis leurs pouvoirs entre les mains d'une administration républicaine provisoire, représentée par MM. FOREST, ESTÈVE et PEYRET. Dix mille personnes encombraient la place de l'Hôtel-de-Ville et les rues environnantes. (...)" (PM du 10.05.1876)
"ESPITALIER, négociant, est nommé maire de Cette", information dans "l'Officiel de ce matin" (PM du 28.07.1876) ; selon le site "mairesGenWeb", la nomination serait du 25.07.1876.
Il entre au Conseil d'arrondissement, en novembre
Les premiers résultats connus, grâce au PM du 15.10.1877, donnent Eugène LISBONNE en tête (4976 voix) contre DUBOIS (1426 voix), dans la deuxière circonscription de Montpellier, qui comprend Sète. Le lendemain, le journal précise que l'écart entre les deux candidats est de 3458 voix (PM du 16.10.1877)
Ces élections voient le triomphe des républicains : VERDIER, BERTIN, GALTIER, LAISSAC ... (PM des 05 et 06.11.1877). Quant à Honoré EUZET, il est élu conseiller d'arrondissement. Le premier article de presse qui le concerne (en tant qu'homme politique), est celui du PM du 01.11.1877. Le comité républicain de Sète s'adresse ainsi aux électeurs : "Le 4 novembre nous sommes appelés à nommer un conseiller d'arrondissement, qui sera aussi électeur sénatorial. Ce jour-là nous affirmerons une fois de plus notre amour pour la République, et notre aversion pour le pouvoir personnel. Les hommes du 16 mai croient trouver dans ce vote leur planche de salut, il sera la ruine de leurs espérances. Le comité républicain propose à vos suffrages : le citoyen Honoré EUZET, courtier, ex conseiller municipal." Le président de ce comité, A. ENJALBERT, appelle ensuite à la discipline de vote qui avait si bien réussie pour le vote du député. Le 03.11.1877, le PM critique le JCM qui prône l'abstention au scrutin "pour la seule et mauvaise raison que le canditat choisi ne leur convient pas. Ce candidat, M. Honoré EUZET, n'en aura pas une voix de moins (...)". Les résultats de l'élection sont donnés dans le PM du 05.11.1877 et par le MDM des 05 et 06.11.1877. Honoré est élu par 3.459 voix sur 4048 votants, soit un score de 85,45 %, ce qui représente un beau succès. Il remercie ensuite ses électeurs : "Citoyens, Vous avez déjoué les odieuses manoeuvres de nos ennemis. Encore une fois vous avez, le 4 novembre, affirmé votre ardent républicanisme. Vous avez fait votre devoir. Je vous remercie. - Citoyens, Votre mandataire a mesuré de son côté l'importance de la tâche que votre confiance lui impose, il ne faillira à aucun de ses devoirs. Il défendra vos intérêts, il défendra la République. Honoré EUZET" (PM du 10.11.1877).
C'est le 19.12.1877 que le conseil d'arrondissement se réunit à la préfecture pour élire son bureau et constituer ses commissions. Alexandre LAISSAC est élu président, lequel est aussi membre de la commission des travaux publics. Honoré EUZET fait également partie de cette commission où l'on trouve encore les nommés CAIZERGUES, FÉDIÈRES et VERNIÈRES. C'est, manifestement, le bon endroit pour se former et constituer un réseau de relations utiles pour l'avenir (PM du 20.12.1877).
Dissolution du conseil municipal : "Enfin ! l'ordre moral a trouvé des gens assez dévoués pour remplacer le conseil municipal républicain. La municipalité est révoquée ; le conseil municipal est dissous. C'est le coup de grâce à la candidature DUBOIS, déjà fort malade." (PM du 13.10.1877) Le dernier point fait référence à l'élection au Conseil général où LISBONNE l'emporte sur le candidat "officiel", DUBOIS (PM des 15 et 16.10.1877). On verra plus tard que les influences seront toujours fortes entre les trois élections : conseil général, conseil d'arrondissement et conseil municipal.
Le site "MairesGenWeb" indique qu'Emile DUSSOL est maire de Sète, le 11.10.1877. Cette date semble, effectivement, correspondre à l'article ci-dessus.
Le PM du 31.12.1877 annonce, suite à une circulaire du 25 décembre du ministre de l'intérieur, que les élections municipales auront lieu dans toute la France le 6 janvier prochain mais le même PM du jeudi 03.01.1878 indique : "Les bonaparto-légitimistes composant la commission imposée par le 16 mai à notre cité républicaine, viennent enfin de rentrer dans l'obscurité d'où ils n'auraient jamais dû sortir (...) Lundi soir (donc, le 31.12.1877), à cinq heures, a eu lieu l'installation de la commission municipale républicaine composée de l'ancien conseil municipal, arbitrairement dissous par Ordre Moral II. Le maire, M. ESPITALIER, et les adjoints, MM. PEYRET et LACAVE ont été, à leur sortie de la mairie, l'objet d'une ovation importante de la part d'une foule enthousiaste qui les a acclamés au cri de : Vive la République ! Cet acte un peu tardif de réparation a été accueilli par notre population avec un soupir de soulagement."
Membre du Conseil municipal, de janvier à mai, il s'oppose à ESPITALIER
A la même date, le MDM donne cette même liste, en précisant les métiers de certains : AUBÈS : coupeur (maison Boissière) ; BONNET : négociant ; DEMAY : entrepreneur de travaux publics ; FABRE : employé de commerce ; MESTRE : négociant. Le journal conservateur fait plusieurs commentaires sur cette liste : "Enfin le sort en est jeté. l'alliance de toutes les nuances du parti républicain s'est effectuée au sein même du parti radical (...) Sans nous arrêter à des questions de personnes qui nous importent peu, et sans tenir compte de quelques concessions apparentes, nous ne voyons en toute cette affaire que l'esprit et les tendances du comité radical et nous les connaissons trop bien pour ne pas estimer qu'il est encore aujourd'hui, comme toujours, le maître absolu du terrain électoral." Un peu plus loin, dans le même article, il donne ses consignes de vote, par le biais d'une lettre de Sète qui aurait été écrite le 4 janvier : "En de telles circonstances, le parti conservateur dans notre ville, doit, ce nous semble, s'abstenir en masse et de la manière la plus absolue (...) Les républicains modérés ont fait, du reste, pas mal de façons pour se rapprocher des radicaux. Les conservateurs n'en doivent pas faire pour s'en éloigner (...)"
Le 7 janvier, le PM indique, sans commentaires, que la liste républicaine a été élue, à Sète.
En prémices au clivage qui va avoir lieu dans le groupe des républicains, Jacques SALIS fait paraître une lettre dans le PM du 06.02.1878 qui montre, déjà, que la question de la grande jetée Régy va devenir le noeud de partage entre radicaux et modérés. car, dit-il, il y a, depuis quelque temps, une polémique au sujet des projets d'agrandissement et d'amélioration du port de Sète. On a donné naissance à un bruit comme quoi il serait hostile à l'exécution de la grande jetée de l'ingénieur RÉGY. Il rappelle, alors, le rapport qu'il a présenté et soutenu au conseil général, en 1875, justement en faveur de la grande jetée Régy. Il déclare donc : " Par ce qui précède, on pourra constater que loin d'être hostile à la grande oeuvre de M. RÉGY, j'y ai toujours été et j'en suis encore son partisan absolu. Je ne me suis rallié aux propositions nouvelles de M. SIMONEAU, ingénieur en chef du service maritime, que lorsqu'il a été démontré à la commission des travaux publics du conseil général, que l'administration supérieure s'opposait formellement à la mise en oeuvre du projet Régy, pour des raisons techniques et financières. Je regrette maintenant que des protestations se soient élevées aussi tardivement contre les nouveaux projets des ingénieurs qui constituent, quoiqu'on en dise, une amélioration sérieuse et réelle pour notre port et qu'on n'ait pas cru devoir les faire, avant que le conseil municipal notamment, se soit déjà et à l'unanimité prononcé en leur faveur. Car il est fort à craindre qu'à la suite de toutes ces récriminations de la dernière heure, le Gouvernement ne se désinterresse de la question et ne retire purement et simplement le projet de loi qu'il vient de soumettre aux Chambres, sans consentir, après cela, à la mise à l'étude du projet Régy. (...)" Par cette seule déclaration, on comprend le caractère de Jacques SALIS, capable de changer de position en fonction des nécessités, obtenir un peu plutôt que rien, négocier, apprécier les contraintes politiques, etc. Mais, évidemment, il risque de se heurter aux "jusqu'auboutistes ... sauf encore à suivre le vent dominant ! Enfin, il ne faut pas oublier qu'Honoré EUZET a bâti sa carrière dans le sillage de cet homme, ce qui peut expliquer bien des retournements.
C'est début mars qu'Henri FOURNAIRE, rédacteur en chef du JCM, organise une réunion au théâtre sur le sujet des travaux à faire au port. Le JCM reproduit un compte rendu sténographique des débats, dans son numéro des 3 et 4 mars 1878. 2000 personnes environ sont présentes. FOURNAIRE propose de former le bureau de la réunion. Le maire de Sète, Joseph ESPITALIER, est nommé président et deux capitaines au long cours en sont les assesseurs (l'un d'eux devant partir, c'est FOURNAIRE qui joue aussi ce rôle). ESPITALIER remercie les participants puis passe la parole à FOURNAIRE qui mène toute la réunion. Il expose les manoeuvres des ingénieurs qui ont poussé leur plan au lieu et place de celui qui avait été proposé par la Chambre de commerce. Il y a urgence car le projet des ingénieurs doit être présenté à la Chambre des députés. Une délégation (à laquelle il participait) a même été reçue par le directeur de la Navigation, au ministère des Travaux Publics, mais en vain. Enfin, FOURNAIRE rappelle un rapport établi en mai 1874, dans lequel l'auteur, Achille SIMONNEAU, indiquait que les dangers (du plan des ingénieurs) existaient réellement mais qu'ils étaient indispensables pour créer des quais à la compagnie du P.L.M. et donc "qu'il n'y a plus à tenir compte des plaintes qui pourraient se produire parmi les marins". Au-delà même de cette question qui bouleverse la population, on se rend compte que c'est le journaliste FOURNAIRE - et non le maire ESPITALIER - qui mène la contestation. Par la suite, on ne verra plus un responsable de journal tenir un tel rôle de premier plan. Cependant, rapidement, celui-ci va s'opposer aux intransigeants du conseil municipal (et du PM) puis au maire lui-même.
Le 12.03.1878, le PM met en avant le voeu du conseil municipal du 02.03.1878 qui fait suite à ses délibérations de janvier 1876, mai 1877 et janvier 1878 : "Que l'administration supérieure mette à l'étude la grande jetée Régy (pour l'amélioration du port) et l'édifie, s'il est possible, simultanément avec le projet des ingénieurs". Ce qui est notable dans le vote qui a eu lieu, c'est la liste des signataires et des opposants :
- Signataires : EYMERIC, CARRON, CELLY, MAMMIÈS, GAUSSEL, BONNET, SALIS, THOMAS, EUZET, CAVALIER, PRADINES, AUBÈS et MASSABIAU (c'est-à-dire, le groupe SALIS)
- Opposants : ESPITALIER, PEYRET, LACAVE, DÉJEAN, JANSON, PALHON, PEYRUSSE, HERVÉ, FABRE, DEMAY, OLIVE et MESTRE (c'est-à-dire, le groupe ESPITALIER)
- Abstenus : RIBES et BOURRAS (on va retrouver ces deux noms dans la liste ESPITALIER du mois de juin). C'est donc leur abstention qui a permis à l'opposition de faire passer ce voeu par 13 voix contre 12, opérant ainsi un renversement de majorité.
Le MDM ironise sur ce vote qui divise le camp des républicains : "Nous comprenons qu'après ce vote M. le maire de Cette soit fort embarrassé sur la conduite qu'il devra tenir. Il vient de partir, en effet, comme délégué par une réunion irrégulière, tumultueuse, convoquée par des individualités sans mandat, et sans autorité, et dont l'immense majorité, quoique composée d'artisans et de simples ouvriers, a le bon sens de reconnaître qu'elle n'a aucune compétence dans des questions de cette nature, et qu'on aurait bien pu la dispenser de servir de comparse dans cette comédie indigne de gens sérieux. Or, le voeu du conseil est en opposition formelle avec les prétendues résolutions prises dans la réunion. Dans cette conjoncture, quel est l'avis qu'appuiera M. le maire de cette ? " (MDM du 10.03.1878)
Le 14.04.1878, le conseil municipal traite du sujet de l'Exposition universelle. Il adopte un voeu présenté par Jacques SALIS et Honoré EUZET : "Considérant que le conseil municipal de Cette ne saurait rester indifférent à la grande oeuvre de l'Exposition universelle qui doit s'ouvrir le 1er mai prochain - Qu'il importe de faciliter aux classes ouvrières la visite de cette Exposition et l'étude des merveilles de l'art et de l'industrie qui y seront exposées - Qu'indépendamment de l'instruction et de l'expérience que les ouvriers pourront retirer eux-mêmes de cette visite, il est permis de croire qu'ils repporteront dans notre région les bénéfices de cette instruction et de cette expérience - Le conseil vote une somme de 1500 francs, qui sera mise à la disposition de la délégation ouvrière qui se rendra de Cette à Paris poue visiter l'Exposition à charge, pour les délégués, de dresser un rapport aussi exact que précis de leurs travaux et de leurs études - Nous engageons très-vivement les ouvriers à se réunir afin de choisir leurs délégués - Ces délégués devront se mettre en rapport avec la commission spéciale qui a été instituée, par le conseil municipal, à l'effet d'organiser la délégation." (PM du 20.04.1878)
Dans son numéro du 18.03.1878, le PM publie la lettre ouverte suivante : "Cette, le 10 mars 1878. Monsieur le Rédacteur du Journal commercial et maritime, à Cette. Dans votre numéro des 3 et 4 mars vous avez, sans motifs, entrepris une campagne de dénonciations et d'injures contre une partie du conseil municipal qui, dans la séance officieuse du 2 mars au soir, avait voté en faveur d'un voeu relatif au fort de Cette, voeu présenté par M. EYMERIC. Jusqu'à ce jour vous vous étiez contenté de faire allusion à ce dernier conseiller sans le désigner. Aujourd'hui, la situation est changée ; vous venez de nous désigner personnellement ; nous vous demandons réparation par les armes de toutes les insultes que vous nous avez prodiguées gratuitement depuis douze jours. Nous vous donnons le termps de purger honorablement votre différend avec le correspondant cettois du Petit Méridional. Après cela vous choisirez parmi nous celui qui vous conviendra le mieux comme adversaire. En cas de refus de votre part, l'un de nous sera désigné pour vous demander cette réparation. Souvenez-vous bien que dans cette affaire, vous avez eu le triste rôle d'insulteur. Signé : SALIS. - EUZET. - EYMERIC. - THOMAS. - Pour CARRON, absent ; BLANCHET."
Cette lettre ouverte se retrouve aussi dans le SC des 18 et 19 mars.
Cette lettre ouverte est intéressante à plusieurs titres. Le sujet, les noms des signataires, la pratique du duel pour venger l'honneur bafoué. Quant à la suite de cet échange, il en est resté au stade du duel épistolaire comme on le voit dans un article du PM du 21.03.1878 : CAMOIN, un des directeurs du PM, écrit une nouvelle lettre ouverte à FOURNAIRE, en tant que rédacteur du JCM, en lui demandant de démentir ses propos (FOURNAIRE deviendra le directeur-gérant du PC, lors de la création de ce journal des républicains modérés, appelés opportunistes par les radicaux). Ensuite, P. THOMAS, conseiller municipal, envoie deux de ses amis, BLANCHET aîné et MARMIÈS aîné au bureau du journal en question. Comme ils n'y trouvent pas FOURNAIRE, ils se rendent à son domicile afin de lui demander les noms de ses témoins "pour une réparation par les armes", ce à quoi, FOURNAIRE répond : "Je n'ai aucune réparation, soit par les armes soit autrement, à donner à M. THOMAS". L'affaire ne semble pas être allée plus loin mais cela a permis à THOMAS et à son parti de critiquer l'attitude de FOURNAIRE et de son journal.
En fait, le PC a plus tard expliqué, par le biais d'une lettre "d'un vieux démocrate" que cet incident est à l'origine de la division entre les intransigeants et les opportunistes mais, plus exactement, ce fut un prétexte : "Toujours avec la même bonne foi, ces messieurs s'offensent d'être traités d'intransigeants, ils ont l'air peiné de la division qu'on jette dans le parti républicain, mais qui donc a commencé cette division ? (...) Est-ce qu'ils n'ont pas avoué que la première cause de désunion a été le mécompte qu'ils ont éprouvé lorsque le conseil n'a pas voulu nommer un de leurs adjoints ? ... Est-ce qu'ils ne déclarent pas que dans la séance du 11 mai, M. MARNIÈS a soulevé l'incident qui demandait des explications à l'administration, à propos d'articles de journaux sur cinq conseillers. Eh bien, de là est partie la véritable division, et ce ne sont pas les opportunistes qui l'ont provoquée. Voyons s'il n'y a pas lieu, au contraire, de penser que ce sont les intransigeants qui ont cherché à faire naître une occasion. En effet, on se souviendra tout d'abord que ce sont les cinq qui ont commencé la discussion avec le journaliste du Commercial, qui s'est défendu selon son droit et son tempérament, et comme il l'a entendu, sans que le Conseil ait à rien à y voir. Mais n'oublions pas ce point essentiel : c'est dans les premiers jours de mars que la polémique des cinq et du journaliste a eu lieu. Comment se fait-il que messieurs les cinq aient attendu jusqu'au 11 mai c'est-à-dire deux mois après pour produire leur doléance ? Si ces messieurs devaient se plaindre n'était-ce pas au moment de l'action ? A ce moment n'aurait-il pas été convenable qu'ils allassent trouver l'administration de son cabinet pour lui demander de s'interposer, de faire cesser des intempérances de langage qui se produisaient de part et d'autre. Au lieu de ce procédé si pratique à tous égards, on a préféré interpeller l'administration, et lui demander des explications sur des faits qui lui étaient tout à fait étrangers, et cette interpellation s'est produite en pleine séance, au début de la session ordinaire la plus chargée en affaires. Est-ce qu'on ne voit pas là la désunion dans le conseil et le trouble dans les affaires ? (...) Qui donc partage si gratuitement, le conseil démissionnaire, en droite et en gauche ? N'est-ce pas encore ces brouillons intolérants dont il serait temps que la République fut débarrassée (...)" (PC du 16.06.1878)
Avant d'évoquer la démission de tous les conseillers municipaux, il faut encore revenir sur ce qui a produit cet évènement exceptionnel. A la clé, c'est toujours l'article du 3 mars du Journal commercial intitulé : Les cinq hommes forts (qui visait donc SALIS, EUZET, EYMERIC, THOMAS et CARRON). Dans le dernier numéro du PC (le 14.12.1878), Henri FOURNAIRE écrit : "Après l'impression produite par Les cinq hommes forts et quelques autres articles parus à la suite, la discorde pénétra dans l'assemblée communale dont les cinq faisaient partie. Chaque séance devint une arène où les combattants, divisés à peu près également, étaient prêts à se dévorer à propos de la chose la plus insignifiante. Le parti le plus avancé reprochait au modéré d'approuver au moins tacitement, sinon ouvertement, les appréciations des articles du Journal commercial, sans se douter à ce moment que leur véritable auteur était dedans et non au dehors du conseil. La position était très tendue et menaçait de tourner au tragique. Bref, il fallait en finir. D'autre part, le Journal commercial, possédé par un homme timoré et paisible ayant été quelque peu écorniflé dans son caractère commercial par ces articles-brûlots, me remercia de mes services (il publie la lettre de licenciement) Personne ne disconviendra que sans l'article du 3 mars, je ne fusse encore attaché au Commercial. Or, qui l'avait confectionné cet article ? - Mais passons. Le Conseil municipal fut dissous et l'auteur apparent de tout ce tapage envoyé inspecter les pavés." Cet article est aussi une réponse au PM qui, dans son numéro du 22.05.1878 avait passé l'entrefilet suivant dans sa chronique locale : " M. FOURNAIRE nous adresse une lettre qu'il nous est impossible d'insérer à cause des expressions injurieuses qu'elle renferme à l'adresse d'un de nos correspondants. Nous nous bornons à donner acte à M. FOURNAIRE de son insertion d'après laquelle c'est volontairement qu'il s'est retiré du Journal commercial."
La démission de tous les conseillers municipaux
"La municipalité et le conseil municipal de Cette ont donné leur démission à la suite de divergences qui s'étaient produites dans cette assemblée sur des questions locales. Plutôt que d'entraver, par une hostilité réciproque, la marche des affaires communales, les conseillers ont préféré donner leur démission, afin que le suffrage universel soit appelé en dernier ressort. Les élections auront lieu prochainement." (PM du lundi 3 juin : la séance du conseil municipal a donc eu lieu à la fin du mois de mai).La création du "Petit Cettois"
A la même date, le 10.06.1878, le PM indique qu'il a reçu le "premier numéro d'un journal républicain quotidien qui se publie à Cette, le Petit Cettois, organe des intérêts commerciaux et politique de cette ville." Il souhaite à son confrère "bienvenue et succès" et exprime sa satisfaction de "voir la cause républicaine compter un défenseur de plus.". En fait, c'est le nouveau journal dont FOURNAIRE est le directeur-gérant et qui va s'employer à faire gagner la cause des modérés face à celle des radicaux. Le plan va parfaitement fonctionner jusqu'à la fin de l'année 1878.
Le contexte municipal En réponse à un article du MDM, le PC du 12 juin rappelle qu'elle était la situation avant la dissolution du conseil municipal : "Le correspondant cettois du MDM, M. J.P. insinue dans sa lettre à ce journal à la date du 6 courant, que l'élément intransigeant aux dernières élections municipales l'avait emporté sur la partie républicaine modérée, dont M. ESPITALIER, maire, est le chef. M. J.P. se trompe bénévolement. D'abord, la victoire d'un parti sur un autre implique nécessairement la lutte entre adversaires ; or, nous ne sachions pas qu'à l'époque, les intransigeants fussent opposés aux modérés ; tout le monde était d'accord pour voter sur la même liste sans distinction de nuances. De plus, les chiffres officiels de l'élection démentent cette assertion. - Les voici : M. ESPITALIER obtint 3,964 voix. M. SALIS 3,928 voix. Différence en faveur de M. ESPITALIER, 36 voix. Le Conseil municipal était composé de 15 membres du groupe ESPITALIER et 12 du groupe SALIS. Deux membres du groupe SALIS démissionnèrent quelque temps après l'élection et jusqu'à la dissolution du Conseil, la balance resta entre 13 Espitaliers et 12 Saliens (...)". L'article est signé J.K. |
Le contexte journalistique Les républicains modérés étaient soutenus par le Petit Cettois (PC), cependant que les républicains radicaux s'appuyaient sur le Sémaphore de Cette (SC) et sur les journaux radicaux de Montpellier, notamment le Frondeur (LF). "L'âme" du PC était son directeur, Henri FOURNAIRE. Quand celui-ci rentrera en disgrace (voir plus loin), on le retrouvera, en janvier 1879, comme rédacteur de la chronique cettoise dans un nouveau journal, L'idée moderne et la chronique du Midi (IMCM). C'est dans la chronique du 05.01.1879 de l'IMCM qu'il écrit à propos du SC : "dirigé dit-on par MM. THOMAS, SALIS et EUZET" que, le 29.06.1878, il "râlait son agonie et expirait en envoyant sa dernière bordée avant de couler". Effectivement, c'est peu avant, le 30.05.1878, que le PM apprenait à ses lecteurs cette prise en main : "à partir du 1er juin le Sémaphore de Cette deviendra la propriété exclusive de MM. SALIS, conseiller général, THOMAS et EUZET, conseillers municipaux. Nous sommes heureux d'annoncer cette bonne nouvelle à nos amis de Cette qui auront désormais à leur disposition un organe exclusivement local qui saura défendre leurs intérêts et défendre en même temps la République. Nous adressons au nouveau Sémaphore nos voeux les plus sincères de prospérité. Avec des inspirateurs tels que MM. SALIS, THOMAS et EUZET les éléments de succès ne manqueront pas." Ainsi, à la veille des nouvelles élections de juin 1878, les deux factions républicaines avaient chacune leur journal local pour défendre leurs idées : le PC pour les uns, le SC pour les autres. |
Le contexte maçonnique Le PC du 09.07.1878 permet de comprendre le rôle souterrain de la franc-maçonnerie, chez les républicains, qu'ils soient modérés, opportunistes (comme le maire Joseph ESPITALIER) ou intransigeant, radical (comme son concurrent malheureux, Jacques SALIS) : Nous ne sommes pas franc-maçon (écrit Henri FOURNAIRE) Nous avons même souri parfois, n'allant pas à la messe, de voir des hommes s'imposer des rites et des cérémonies aussi ... inutiles que celles de n'importe quelle église. Depuis que nous savons le beau, le noble rôle joué par les francs-maçons cettois dans la déplorable querelle qui vient de finir entre deux de nos personnalités politiques, nous ne rions plus de la franc-maçonnerie. MM. DIDIER, NICOLAU, JANSON, COUGNENC et AUBÈS délégués de la loge des Vrais amis fidèles se sont littéralement multipliés en démarches de toute sorte, en supplications touchantes et émues, en appels suprêmes de paix et de concorde adressés à leurs frères en maçonnerie MM. SALIS et ESPITALIER (...)" |
La fin du "Petit Cettois"
"La distribution du journal à nos abonnés au moyen des enfants présentant des inconvénients dont ils ont raison de se plaindre, nous avons pris le parti, depuis hier, de faire opérer cette distribution par la voie de la poste" (PC du 22.11.1878). "A partir de lundi le Petit Cettois cesse de paraître" (PC du 24-25.11.1878). "Par suite de la suppression des annonces et autres revenus que le Petit Cettois avait acquis depuis sa fondation, la direction se trouve forcée de fixer le prix de vente à dix centimes au lieu de cinq" (PC du 07.12.1878). "Nous avons aussi décidé de ne plus faire d'abonnements en ville, à cause des difficultés que procure la distribution. Nous nous contenterons de la vente par crieurs autorisés. Un dépôt de notre journal sera établi au kiosque de la place de la Bourse" (PC du 07.12.1878). "La direction du Petit Cettois, désireuse de plaire au public, vient de fixer le prix de vente à cinq centimes le numéro ; elle espère qu'il lui sera tenu compte du sacrifice qu'elle fait pour lui être agréable" (PC du 14.12.1878). Ces avis montrent que le PC était financièrement aux abois en cette fin de l'année 1878. Le numéro du 14 décembre est le dernier et l'explication de l'arrêt se trouve dans le numéro du 7 décembre : "Depuis douze jours, l'inflexible Atropos a coupé le fil de la vie du Petit Cettois. Quand la vie d'un journal ne tient qu'à un fil, il n'est pas malaisé de le faire passer de vie à trépas ; il suffit de lui supprimer l'imprimerie. Le fil est rompu. Pour le renouer, il faut trouver une autre imprimerie (...) Au demeurant, le Petit Cettois reparaîtra une fois, deux fois ou trois fois par semaine, jusqu'à ce que l'installation d'une nouvelle imprimerie à Cette nous permette de l'éditer tous les jours (...) M. FOURNAIRE a fait et créé le Petit Cettois, les souscripteurs ont fourni leur argent, rien de plus naturel (...)". Dans ce dernier article, Henri FOURNAIRE vise le maire de Sète, Joseph ESPITALIER, comme il l'expliquera en 1879. Cet épisode aura des conséquences car le PC était la voix des républicains modérés de Sète.
1879
La création du "Nouveau Cettois"
Le premier numéro conservé (en ligne) du NC est du 06.03.1880 mais il porte le numéro 380 et les numéros suivants suivent cette numérotation (n° 381, 382, 383, etc.). Il ne s'agit donc pas d'une erreur, ce qui en reporte la création au tout début de l'année 1879, compte tenu des numéros dominicaux qui incluent les lundis. D'ailleurs, on en a la preuve par des articles du PM qui citent à plusieurs reprises le NC. Ainsi, dans son numéro du 05.02.1879 : "Le Nouveau Cettois du 4 février annonce la démission de M. LACAVE, notre second adjoint (...) Cette façon de congédier un bon soldat ne respecte ni la dignité, ni la reconnaissance dues à de si beaux états de service (...)". On peut encore donner en exemple le numéro du 19.02.1879 ; alors que dans son numéro du 17, le PM écrivait que le bruit de la retraite du maire de Sète courait en ville et s'accréditait d'heure en heure, le NC s'insurgeait contre ce bruit et critiquait SALIS supposé être l'auteur ou l'inspirateur de cet article : "On comprend aisément que ce bruit de retraite ait pu être désagréable à M. le maire. Avait-il l'intention d'accomplir un acte d'amabilité lorsque, au lendemain de sa victoire municipale, il écrivait à son rédacteur M. FOURNAIRE, qu'on ne blaguera absolument qu'EUZET et jusqu'à sa démission (...) Et là-dessus le Petit Cettois, dirigé par M. ESPITALIER, se faisait propagateur périodique de la retraite de notre sympathique conseiller d'arrondissement ; et cela, parfois, dans un style genre assez badin. Et si on rend aujourd'hui ce qui appartient à César, à qui la faute ? (...)". En fait, peu d'informations sur Sète sont signalées dans le PM en 1879. Seules exceptions, les critiques sur la ligne adoptée par le NC qualifié de "feuille réactionnaire" (PM du 27.02.1879). Ainsi, les numéros du PM des 12, 13, 17, 18, 19 et 20 avril se font longuement l'écho des disputes entre CHABRIER du NC (probablement son rédacteur en chef) et les deux directeurs du PM, SERENO et CAMOIN.La création de "L'idée moderne et la chronique du Midi"
"Ainsi que je l'ai annoncé par la voie du Petit Méridional, le Petit Cettois cesse momentanément de paraître par la volonté de M. Joseph ESPITALIER, maire de Cette, conseiller général par la grâce du Petit Cettois et de son rédacteur en chef (...) Le public cettois a pris parti dans la lutte électorale du mois de juin, pour tel chef de file qui lui a paru présenter plus de garanties, de capacité, d'honnêteté et de vertus civiques. J'ai été le porte-parole autorisé d'un de ces chefs. Aujourd'hui, ce chef me lâche, suivant sa propre expression, pour faire appel à l'étranger. Les 3800 qui ont suivi le drapeau que j'ai hardiment déployé ont mille fois raison de me demander d'où peut provenir un tel revirement. Serait-ce moi qui ai démérité, ou bien lui qui aurait trompé ? (...)" (IMCM du 05.01.1879)
Henri FOURNAIRE : un journaliste efficace mais trop franc ... et donc incontrolable ? On a déjà vu les démêlés d'Henri FOURNAIRE avec le JCM. Il en fut de même avec le PC, journal de combat qui permit aux modérés de gagner les élections mais qui laissa quelques souvenirs cuisants, comme il l'explique dans un article du PC du 14.12.1878 (dernier numéro paru), à propos de ces élections municipales de juin : "Le lendemain, à 9 heures du soir, le résultat des élections était chose certaine en faveur de la liste modérée, et le jour suivant parut l'article le triomphe de la raison, si vivement critiqué par les vaincus et les vainqueurs eux-mêmes, sous prétexte qu'il y était déclaré qu'on était heureux et fier d'une alliance avec les réactionnaires. Je m'empresse de prendre hautement la responsabitité de l'article ; c'est moi qui l'ai écrit ; mais avant de l'écrire, il a été inspiré et les mots incriminés ont été répétés à l'inspirateur, qui n'a rien trouvé à redire, (...) S'il faut dire la vérité, il n'y a jamais eu d'alliance et de compromission avec personne, du moins à ma connaissance ; mais secrètement, la plupart des meneurs de l'élection désiraient l'apport des 6 ou 700 voix réactionnaires qui ont voté (je le crois du moins), avec la liste des modérés ; ils ont été vexés de ce que le journal ait dit franchement la vérité. Il leur a semblé qu'on mettait à nu leurs plus secrètes pensées et quelques jours après, (...) un article réactif signé un clérical (...) parut à l'effet de tempérer la mauvaise impression première. L'élection finie, on aurait bien voulu me secouer comme un vieux paillasson et me déposer après devant la porte ; mais des incidents pouvaient encore survenir, une nouvelle élection était en perspective, on résolut, avant de me lâcher, de me brider ; des censeurs furent désignés pour venir tous les jours vérifier les articles avant de les donner à l'impression. Ces censeurs purent se convaincre par les originaux des manuscrits que j'étais toujours resté dans les limites raisonnables, et que si quelqu'un avait déraillé, ce n'était pas moi. Mais à leur tour, ils se mélèrent de fabriquer eux-mêmes de la copie, ce dont j'ai conservé les preuves. Je fus donc obligé de devenir le censeur des censeurs, et c'est grâce à l'un d'eux que la lettre contre Léo TAXIL, parlant de l'hyène à la gueule ensanglantée, fut publié malgré mon opposition."On trouve encore, dans le PC du 20.06.1884, l'entrefilet suivant : "On télégraphie de Bastia que M. FOURNAIRE successeur de SAINT-ELME à la rédaction du Sampiero a été l'objet d'une violente agression à la suite de laquelle une vive agitation règne dans la ville". (la nomination de FOURNAIRE devait être récente car SAINT-ELME est décédé - en fait, assassiné - en 1884). Décidément, les mêmes causes produisent les mêmes effets, semble nous dire le PC nouvelle formule, une justification a posteriori en quelque sorte ... Quant à son adversaire journaliste le plus acharné, Léo TAXIL, son étoile fut ternie dès 1881 : "La République maçonnique publie un décret du conseil de l'ordre du Grand Orient de France ratifiant l'expulsion définitive de la maçonnerie du sieur Gabriel Jogand PAGÈS dit Léo TAXIL, prononcée par la loge du Temple des amis de l'honneur français dans sa tenue du 14 octobre 1881. Cette expulsion a été motivée par la condamnation pour plagiat, subie en police correctionnelle par le sieur Léo TAXIL" (PC du 14.03.1882), ce qui n'empêchera pas le PM de continuer à faire la plublicité du Frondeur (le journal de Léo TAXIL) pendant de longues années encore. Mais, tel un phénix, FOURNAIRE reparaît avec le JCM, en 1886, toujours dans des relations conflictuelles, comme le montre une communication de J.B. VIVAREZ, publiée dans le JC du 04.08.1886 : "Le nommé Nemo (autrement dit Henri FOURNAIRE) dont l'autorité et la considération se valent, a jugé à propos de me prendre plusieurs fois à partie dans le Commercial d'une façon plus ou moins directe. Je me suis toujours promis de ne point répondre : on ne perd pas son temps pour si peu. Que pourrais-je, d'ailleurs, lui dire que tout le monde ne sache ? Il a injurié M. SALIS après avoir accepté ses invitations, M. ESPITALIER après avoir été à sa solde, M. Honoré EUZET après avoir été son associé, M. B. PEYRET qui l'a si souvent aidé dans des moments difficiles. Aujourd'hui, il se retourne contre moi, qui lui ai fait l'aumône quand il avait faim. Certes, je ne demande pas qu'un tel homme ait la reconnaissance du ventre. Mais devrait-il attendre au moins pour m'attaquer, d'avoir digéré le pain dont je l'ai nourri. Je ne fais pas appel à son honnêteté mais à son souvenir. Serait-ce encore trop exiger ?" Le dernier sursaut connu se place en 1889 quand, pour une élection municipale complémentaire, il se présente (au premier tour) comme candidat indépendant. Il obtient péniblement 90 voix et disparaît, à nouveau, dans l'anonymat ! |
1880
1881
L'élection municipale du 09.01.1881 : la revanche des radicaux.
C'est quelques jours avant l'élection municipale que le Comité central républicain présente la liste de ses 27 candidats, dans la mouvance radicale : "Jacques SALIS, conseiller général ; Gaston ARNAUD, propriétaire ; Sylvain AUBÈS, ancien conseiller ; Joseph BEFFRES, entrepreneur ; Joseph BERGNES, comptable ; F. BOUNY, maître tonnelier ; Paul BRUEL, négociant ; François CARTIER, boulanger ; Jérôme CAYRON, ferblantier ; Pierre CHAUVET, maître de chais ; Henri DEFARGES, capitaine au long cours ; Philémon DIDIER, commerçant ; Emile DUCROS, négociant ; François GAUSSEL, ancien conseiller ; Marius LAGARDE, tonnelier ; G. LAUTHIER, tonnelier ; Alexis LEQUES, tonnelier ; Mathieu MAGIS, plâtrier ; Pierre MARQUES, coiffeur ; Louis MASSABIAU, entrepreneur, ancien conseiller ; Joseph NICOULAU, entrepositaire ; G. NOUGARET, calfat ; François PARENT aîné, mécanicien ; Etienne PRADINES, ancien conseiller ; Etienne ROQUES, commerçant ; Pierre THOMAS, ancien conseiller ; Marius VAREILLE, négociant." (PM du 05.01.1881). La liste est présentée, pour le comité, par le secrétaire CANET, le président AYMERIC, le vice-président TAQUET et le trésorier VAILLÉ. Evidemment, on ne peut qu'être surpris de l'absence du nom d'Honoré EUZET dans cette liste. Comment l'expliquer ? Il faut, peut-être, rechercher là la première raison des problèmes qui vont suivre entre lui et les radicaux.Jacques SALIS, maire de la ville de Cette
(photo probablement prise en 1903 quand il est député de la 3ème circonscription de Montpellier)
- Guide de l'Hérault 1904, vue 855 sur le site en ligne des AD 34 -
1882
Les journaux de l'époque reproduisent souvent des lettres qui leur sont adressées sans que l'on sache qui, exactement, les a écrites. Ainsi, dans sa rubrique Tribune électorale, le PM du 14.10.1881 publie une lettre écrite le 13, concernant l'élection d'un conseiller général, suite à la démission de Jacques SALIS de cette assemblée : "Nous sommes l'écho d'un grand nombre de nos concitoyens en disant que pour mettre fin à la désunion qui vient encore diviser le parti radical et qui divisera sûrement notre conseil municipal, il serait nécessaire que le citoyen Honoré EUZET, conseiller d'arrondissement, qui d'après la hiérarchie démocratique a seul le droit d'aspirer aux fonctions de conseiller général, se présentât à nos suffrages. Elu deux fois conseiller municipal, conseiller d'arrondissement depuis quatre ans, le citoyen Honoré EUZET nous offre toutes les garanties possibles. Intelligence des affaires et convictions radicales éprouvées. Tous nos concitoyens connaissent son attitude ferme pendant les époques néfastes des 16 et 24 mai. De plus, nous sommes certains que son nom ramènerait l'union avec beaucoup de républicains qui ne se sont séparés de notre groupe que sous l'influence de deux personnalités rivales. Que le citoyen Honoré EUZET sorte donc de sa modestie habituelle ! Son nom s'impose ; qu'il se présente à nos suffrages, il sera vainqueur ; ou bien qu'il veuille bien nous donner les motifs de son refus. - Un groupe d'électeurs."
La réponse d'Honoré EUZET, est immédiate puisqu'elle se trouve dans le PM du 15.10.1881 : "Mes chers amis, je suis heureux que la lettre que vous avez publiée dans le Petit Méridional hier me fournisse l'occasion d'expliquer avec franchise pourquoi je n'ai pas cru devoir me rendre aux nombreuses sollicitations qui m'ont été faites, à l'effet de prendre part comme candidat à la lutte électorale du 16 octobre prochain. Plusieurs groupes d'électeurs avaient pensé que les quinze années de bons et loyaux services rendus à la démocratie cettoise, le mandat de conseiller municipal dont j'ai été investi à deux reprises, un stage de quatre ans dans le conseil d'arrondissement dont j'ai l'honneur d'être le vice-président, me donnaient des titres suffisants à la confiance de mes concitoyens ; ils avaient pensé aussi qu'il était bon que Cette fût représentée par un Cettois dans notre assemblée départementale où s'agitent des intérêts si divers. J'ai senti tout le poids de ces considérations et cependant j'ai cru qu'elles devaient céder devant des nécessités plus impérieuses encore. Ce n'est pas, en effet, au moment où notre parti donne le triste exemple des divisions personnelles que je dois venir jeter de nouveaux éléments de désordre. J'aurais volontiers autorisé mes amis à se servir de mon nom, si j'avais pu penser qu'il pût aider à reformer l'union du parti républicain cettois, dont je constate la division et le morcellement avec une tristesse qui sera partagée par tous les amis sincères de la démocratie. Mais ce résultat si désirable l'aurions-nous obtenu ? Il est pénible de le constater mais aujourd'hui le peuple trompé par des meneurs intéressés à nos divisions ne reconnaîtrait plus les siens. Voilà pourquoi, malgré les bruits qui ont couru avec persistance ces jours derniers, je ne briguerai pas le mandat de conseiller général. je me suis toujours tenu à l'écart de toutes les manoeuvres qui ont servi à nous diviser, et ce n'est pas sans une certaine fierté que je me rappelle que j'ai été l'élu de la démocratie cettoise dans un temps où elle était encore unie, où elle n'avait pas encore déserté le terrain des principes pour celui des personnalités. Il ne saurait donc me convenir de prendre une part quelconque aux querelles dont nous avons depuis quelques jours le décourageant spectacle. J'attends donc avec confiance l'expiration de mon mandat de conseiller d'arrondissement ; je soumettrai alors ma conduite et mes actes au verdict de mes concitoyens. Jusque là, je contribuerai dans le cercle modeste de mes attributions, à servir de mon mieux les intérêts de ma ville natale et de la République. Je vous assure, mes chers amis, de mon entier dévouement, H. EUZET, vice président du conseil d'arrondissement" Cette lettre fait référence à la candidature THOMAS (ex-sous-chef de la gare de Sète) - soutenue par les radicaux - contre celle de DUCROS - 2ème adjoint au conseil municipal. Le PM est rempli d'articles critiques contre Emile DUCROS. On comprends mieux pourquoi Honoré EUZET n'a pas voulu ajouter un élément supplémentaire de discorde. D'ailleurs, les résultats montrent que les deux candidats avaient chacun leurs partisans sans qu'aucun des deux ne se détache vraiment. En effet, le 18.10.1881, le PM indique que THOMAS l'a emporté avec seulement 2 voix de majorité, cependant que sur 9000 inscrits, il n'y a eu que 3200 votants. Le PM ajoute que "de nombreuses protestations se produisent qui amèneront infailliblement l'annulation de l'élection"
Dans sa lettre, Honoré EUZET indique qu'il est vice-président du conseil d'arrondissement. Effectivement, c'est dans sa première séance du 18.07.1881 que le conseil a tenu sa première séance sous la présidence du doyen d'âge, CAUSSE, assisté du plus jeune conseiller présent, GIRAUD. Au second tour de scrutin, c'est VIGOUROUX qui a été élu président par 6 voix contre 5 données à EUZET et 1 bulletin blanc (PM du 19.07.1881). Ensuite, EUZET a été élu vice-président par 8 voix. On voit, par ces votes, que notre Sétois avait pris du galon auprès de ses pairs. Il restait à transformer l'essai !
Républicain indépendant, il s'oppose aux radicaux, échoue à être élu au Conseil général et, en conséquence, démissionne du Conseil d'arrondissement
Le contexte journalistique Ce contexte est toujours celui d'une division entre les républicains radicaux [soutenus par l'Avenir Maritime, de Sète (AM) et le Petit Méridional, de Montpellier (PM)] et les républicains modérés [soutenus par le Petit Cettois) (PC), de Sète], cependant que les conservateurs [soutenus par l'Eclair (EC), de Montpellier] jouent les observateurs amusés et critiques des divisions républicaines. Un article du PC (le 18.02.1882) donne la tonalité de ces différences : "L'Avenir Maritime ayant eu l'occasion de parler de nous, hier, nous a traité de journal réactionnaire. Nous acceptons volontiers ce qualificatif - de la part d'un journal qui appelle l'Etre suprême Monsieur Dieu, - si ce journal a voulu dire que nous n'avons pas les mêmes principes que lui. Nous sommes, du reste, en trop bonne compagnie pour nous sentir blessé d'un terme qu'on n'a pas ménagé aux THIERS, aux DUFAURE, aux VACHEROT, aux Jules SIMON, aux VALLON, aux LABOULAYE, etc. Mais si notre confrère a voulu insinuer que nous sommes des partisans de l'ancien régime, des privilèges, - des ennemis de la liberté, nous n'acceptons pas l'épithète dont il nous gratifie, et nous lui répondons que nous sommes aussi libéral que lui, car nous voulons la liberté pour tout le monde, pour ceux qui pensent comme nous, comme pour ceux qui pensent autrement. Notre confrère pourrait-il en dire autant ? L'Avenir ajoute que les radicaux ne peuvent pas nous lire. Et pourquoi cela, s'il vous plait ? Est-ce que par hasard, il existerait dans le parti de l'Avenir un dogme qui interdirait à tous ses adeptes la lecture de journaux autres que les journaux radicaux ? Ce serait faire peu de cas de leur indépendance qu'on exalte si fort, pourtant. Ou bien, en alléguant cette prétendue impossibilité de nous lire dans laquelle se trouveraient ses amis, l'Avenir a-t-il voulu les mettre en garde contre la velléité qu'ils pourraient avoir à le faire, de peur qu'en nous lisant, leurs idées vinssent à changer ? Dans ce cas, ce serait faire peu de fond sur la fermeté de leurs convictions ? Quant à nous, nous avons une meilleure opinion de nos concitoyens, nous leur dirons au contraire : lisez tous les journaux, pesez, jugez, comparez en votre âme et conscience, et vous verrez ensuite quels sont ceux qui vous parlent le langage de la vérité, de la sagesse, du bon sens ; ceux qui veulent réellement votre bien, ceux qui sont vos vrais amis ? Nous ne redoutons pas cette comparaison le jour où le calme se fera dans les esprits et dans les coeurs, le jour où la raison règnera en maîtresse dans notre pays. L.C." Cependant, la situation n'est pas aussi claire qu'il y paraît. En effet, dans la campagne pour la conquête d'un poste de conseiller général, on voit alors le Sémaphore de Cette (SC), "organe de la démocratie radicale socialiste", soutenir à fond, Honoré EUZET, en tant que candidat radical socialiste contre Pierre THOMAS, le candidat radical officiel. Certes, les deux sont des candidats "républicains" mais il semble bien que le SC ait été créé à l'occasion du deuxième tour de cette élection au Conseil général, les résultats du premier tour ayant été invalidés par le Conseil d'Etat (l'exemplaire du 09.05.1882 n'est que le numéro 3, or, c'est justement dans ce numéro que l'on voit la profession de foi d'Honoré EUZET et la critique de son concurrent, Pierre THOMAS) ; ce nouveau journal est donc une machine de guerre des radicaux qui s'intitulent radicaux socialistes contre les radicaux tout court. |
"L'Avenir Maritime" contre "Le Petit Réveil" ou TAQUET contre EUZET
A la même date, le 23.03.1882, le PM et le PC tiennent le lecteur au courant sur le litige qui existe entre TAQUET (rédacteur en chef de l'AM) et EUZET. Le second reproche au premier des articles parus les 17 et 19 mars dans son journal (ces numéros n'ont pu étre retrouvés) et intitulés Types Cettois. Il estime s'être reconnu dans l'un d'eux, désigné sous le nom de Pipette (probablement en rapport avec l'usage de la pipe ou du moins du tabac). Il a envoyé ses témoins au domicile de TAQUET pour savoir si c'était lui qui était visé mais TAQUET a répondu qu'il n'avait pas nommé EUZET dans ses articles et donc qu'il n'avait pas à faire d'excuses. Au retour, les docteurs PEYRUSSON et BORDONE, missionnés par EUZET, ont fait leur rapport. A la suite, EUZET critique vertement TAQUET, en écrivant que s'il n'avait pas l'intention de le viser, il aurait dû avoir le courage de l'avouer et d'accepter les conséquences de sa déclaration. Du coup, TAQUET contre-attaque : "M. Honoré EUZET a cru devoir m'adresser des témoins pour me demander ou réparation ou rétractation de certaines paroles prêtées à à un personnage imaginaire que je désignais sous le nom de Pipette. D'après M. EUZET, ce personnage ne serait pas sans quelque ressemblance avec lui (...) Je refuse (...) formellement le duel proposé par M. Honoré EUZET à cause des articles parus dans l'Avenir, mais je lui demande réparation de la lettre insérée par le Petit Réveil de ce jour et je lui envoie mes témoins." Effectivement, le PM du 26.03.1882 donne le procès verbal fait par les deux témoins de TAQUET, AYMERIC et THOMAS, après avoir demandé à EUZET la "rétractation des outrages (...) ou une réparation par les armes". On voit que TAQUET inverse complètement la situation. En fait, chacun des deux dit être l'offensé et donc celui qui a le droit de choisir les armes et les conditions du duel (en plus, le seul fait du choix de THOMAS comme témoin de TAQUET montre que la compétition qui va suivre, entre EUZET et THOMAS, quant à l'élection au conseil général, avait probablement des ressorts plus personnels et plus anciens)L'élection du maire et des adjoints
Le 01.05.1882, le conseil municipal nomme comme maire Marius VAREILLE, comme premier adjoint Gaston ARNAUD et comme second adjoint Guillaume LAUTIER. "Ces nominations ont été le résultat d'une transaction. Notre conseil municipal était partagé, depuis quelque temps, en deux fractions à peu près égales, voulant, l'une, qu'il soit apporté dans l'administration de la Cité plus de décision, plus de volonté personnelle ; l'autre trouvant que le statu quo répondait heureusement à toutes les exigences de la situation présente : il n'est pas bon, en effet, que dans une assemblée délibérante, qui devrait avant tout ne s'occuper que d'affaires, un antagonisme trop accentué se produise ; que, sur un prétexte ou sur un autre, l'un tire à droite et l'autre à gauche." (PC du 02.05.1882) ; de son côté, le PM du 01.05.1882 donne le résultat des élections pour les communes importantes du département. En ce qui concerne Cette, il fournit les mêmes informations en précisant que "la séance a duré deux heures" et qu'il "n'y a pas eu de programme imposé". Le numéro du 1er mai du PC est manquant, ce qui empêche d'en savoir plus sur la liste des élus. De son côté l'Eclair donne les mêmes résultats en ajoutant que "ce résultat a surpris beaucoup de personnes" (EC du 01.05.1882) puis, le lendemain : "Il y aura encore de beaux jours pour M. NICAULAU, son camarade VAREILLE a été renommé maire, toutefois ce n'a pas été sans peine. Il paraît qu'il y a eu du tirage, la séance a été longue et orageuse et il n'a fallu rien moins que les efforts et l'éloquence du député de Cette pour faire prévaloir la transaction qui a amené le résultat que l'on connaît. Toutefois, l'accord n'aura pas été de longue durée, le bruit court que M. ARNAUD a déjà donné sa démission de premier adjoint." (EC du 02.05.1882). De son côté, l'AM explique longuement qu'ARNAUD avait espéré devenir maire, suite à différents contacts, et qu'il n'a pas retiré sa démission malgré une commission qui s'était rendue auprès de lui ; puis, le journal ironise : "M. ARNAUD voulait gravir le Capitole en chef et non en sous-chef" (AM du 05.05.1882)
L'élection au conseil général
(canton de Sète)
Des démissions en chaîne
"A la suite de l'élection de dimanche dernier (pour le Conseil général), M. EUZET a adressé à M. le préfet sa démission de conseiller d'arrondissement pour le canton de Sète. (PM du 23.05.1882). Bien évidemment, dans un écrit du 26, le MDM porte un jugement critique sur cette démission : "On nous a annoncé que M. Honoré EUZET a donné sa démission de membre du conseil d'arrondissement ; c'est de tradition républicaine : il n'y a dans le personnel qui marche sous les drapeaux de la république française que des amours-propres féroces. l'un donne sa démission d'adjoint parce qu'il n'a pas réussi à se faire élire comme conseiller général, l'autre se démet de ses fonctions de conseiller d'arrondissement parce qu'il n'a pas été élu conseiller général. Mais il y a plus, le conseil municipal lui-même serait en plein désarroi : on nous annonce la démission de MM. DUCROS et BRUNEL comme conseillers municipaux ; et on ajoute que d'autres membres du parti DUCROS imiteront bientôt cet exemple." (MDM du 28.05.1882). Le PM donne les mêmes informations mais sans commentaires : "A la suite de l'élection de dimanche dernier (pour le Conseil général), MM. DUCROS et BRUNEL ont adressé leur démission de conseillers municipaux à M. le maire. D'autres conseillers municipaux ayant soutenu aussi la candidature EUZET doivent imiter MM. DUCROS et BRUNEL." (PM du 26.05.1882).
1883
1884
Il entre au conseil municipal et est élu 2ème adjoint, en juin
1885
La question de la laïcisation
La question des locaux du théâtre
La gestion courante du conseil municipal
1886
Des relations excécrables entre le maire, Benjamin PEYRET, et son 2ème adjoint, Honoré EUZET
A une séance du conseil municipal en mai, présidée par OLIVE, premier adjoint, un conseiller municipal, COTHENET, demande la parole pour faire une proposition : "il regrette vivement que M. le maire n'assiste jamais aux séances du conseil et à celles des commissions. Si M. le maire persiste à s'absenter, il demandera au conseil d'exiger sa démission." Un autre conseiller municipal, CONQUET, demande un vote de confiance en faveur du maire mais EUZET intervient : " il dit vouloir rétablir la vérité et déclare que le véritable motif donné par M. le maire à la délégation qui avait été le trouver pour le prier de retirer sa démission n'était pas l'état de sa santé, mais le reproche qu'il croyait devoir adresser à M. EUZET, qui cherchait à empiéter sur ses attributions de maire. M. EUZET ajoute que M. le maire avait plusieurs fois fait volontairement abandon de sa prérogative. M. CONQUET proteste contre les paroles de M. EUZET et le prie de ne pas attaquer M. le maire lorsqu'il est absent. M. EUZET réplique que si la thèse soutenue par M. CONQUET était adoptée, le conseil ne prononcerait jamais le mot M. le maire, M. le maire étant toujours absent ; pour son compte, il ne croit pas que la délégation l'ait dispensé d'assister aux séances ; dans tous les cas, ce serait une violation de la loi. M. THER déclare que, tout en accordant sa confiance à M. le maire, il regrette qu'il soit absent à toutes les séances. Divers membres font la même déclaration et notamment M. COTHENET. M. COTHENET n'a aucune méfiance à l'égard de M. le maire ; il ne comprend pas qu'on réclame un vote de confiance en sa faveur. M. le maire a toute son estime, mais il n'hésite pas à déclarer au conseil qu'à l'ouverture de toutes les séances, si M. le maire persiste à s'absenter, ainsi que plusieurs autres de ses collègues, il demandera qu'on exige leurs démissions par application de la loi. On passe au vote par appel nominal et par vingt voix contre une, celle de M. EUZET, le conseil accorde sa confiance à M. le maire." (PM du 10.05.1886). Des précisions sont aussi apportées par le JC des 09-10.05.1886 : "M. CONQUET prend à son tour la parole, il rappelle qu'il y a cinq ou six mois, le Maire ayant donné sa démission, une délégation du conseil lui fut envoyée pour l'engager à retirer sa démission. M. PEYRET, touché de cette marque de sympathie de la part de ses collègues, consentit à revenir sur sa détermination, mais à la condition qu'on ne l'obligerait pas à présider les séances du conseil municipal." Sur les explications données par EUZET, le JC ajoute : "Je répondis au maire que puisqu'il me faisait ce reproche, (l'empiètement sur ses fonctions) il voulut bien m'indiquer lui-même quelles étaient mes attributions. Non seulement M. PEYRET n'a jamais voulu les définir, mais dans certaines circonstances, ajoute EUZET, il était bien aise de se décharger sur moi de ses propres directives. Ainsi, un jour, des dames étaient allées lui demander la permission de faire des processions. M. PEYRET qui était présent à la mairie, fit répondre à ces dames qu'il n'y était pas et me les envoya, afin de ne pas prendre la responsabilité d'un refus." Mais, selon les conservateurs, ce type d'argument se retourne contre lui quand il reproche au maire "de lui laisser les ennuis et la responsabilité des résolutions anticléricales. Il nous semble que M. EUZET devrait au contraire remercier le maire de faire ainsi son jeu puisque jusqu'à présent il a édifié une popularité sur une hostilité systématique contre les catholiques." (MDM du 10.05.1886). Et plus tard encore, ce journal élargit le raisonnement en constatant la foule nombreuse, présente aux funérailles du Frère Jacques BARDY : "Une cérémonie de cette nature est bien faite pour faire réfléchir M. EUZET, notre second adjoint ; et si comme on l'assure, c'est un homme intelligent, il comprendra qu'en dépit des apparences, notre classe ouvrière, qui manifeste tant de sympathie pour les hommes dévoués à l'éducation de ses enfants, n'a pas tant de tendances qu'il pourrait le croire pour les idées de laïcisation." (MDM du 02.06.1886)Les idées d'Honoré EUZET et de la minorité, au conseil municipal
Les fonctions d'Honoré EUZET, en tant que délégué cantonal
1887
La question de la construction d'un nouveau théâtre
C'est le 19.02.1887 qu'arrive au conseil municipal la discussion sur l'opportunité de construire ou non un théâtre municipal. Cette discussion est provoquée par la position de la commission des Beaux-Arts. Le maire est absent et la séance est - comme d'habitude - présidée par le premier adjoint, Théodore OLIVE mais il y a aussi 10 conseillers absents (TICHY, FALGUERETTES, TRIAIRE, NÈBLE, AUGIER, AIMARD, VAILLIÉ, SOULOUMIAC, AIGON et CONQUET) : "M. DEFARGES, au nom de la commission des Beaux-Arts, demande au conseil de supprimer la subvention au directeur du théâtre pour l'année 1887-88 et de ne pas renouveler le bail du théâtre Jeannin qui expire le 30 septembre. Les principaux arguments invoqués par le rapporteur en faveur des décisions de la commission sont : 1/ que le nombre de places du théâtre Jeannin étant trop restreint, les recettes ne peuvent pas suffire à payer les appointements d'une bonne troupe, malgré la subvention de 23.000 francs accordée par la ville au directeur ; 2/ que le directeur ne pouvant pas engager des artistes à 1500 ou 1800 francs par mois, le public cettois étant exigeant déserte le théâtre et il s'en suit que presque tous les directeurs se sont ruinés et que tous se ruineront si la ville continue à donner de l'argent pour l'exploitation du théâtre Jeannin ; que dans ces conditions le conseil municipal doit être assez consciencieux pour ne pas continuer à encourager un directeur à prendre une entreprise ruineuse en lui accordant une subvention. M. DEFARGES dit que ce qui a encouragé la commission à prendre cette décision, c'est que ne comptant plus sur le théâtre Jeannin, un nouveau théâtre remplissant toutes les conditions voulues sera construit par une société ou par l'administration et qu'alors seulement on aura un théâtre digne d'une ville ayant une population de 40.000 habitants. Il conclut en disant : ayez un théâtre confortable et alors vous pourrez avoir une bonne troupe ; vous pourrez en un mot vous montrer exigeants sans ruiner un directeur. M. EUZET combat les conclusions du rapport ainsi que les considérants ;" Sur la question de la rentabilité pour le directeur du théâtre, il déclare (qu'il) "trouve que le rapporteur a un peu été dans la voie de l'exagération en disant que tous les directeurs s'étaient ruinés ; il cite M. DELPARTE comme ayant gagné de l'argent et si les autres en ont perdu dans l'exploitation du théâtre, c'est qu'ils n'étaient pas aptes à prendre la direction. M. EUZET ose espérer que le directeur actuel, s'il ne gagne pas de l'argent, il n'en perdra pas non plus, surtout s'il continue à nous donner de bonnes représentations comme il le fait depuis quelques temps. L'orateur est de l'avis du rapporteur en ce que le théâtre Jeannin n'est pas un théâtre pour une ville de 40.000 habitants mais en attendant d'en avoir un plus confortable et que les finances de la ville permettent de le construire, il faut conserver celui-là." (PM du 21.02.1887)Les innovations du conseil municipal
Au premier trimestre, la ville de Sète voit se développer un conflit professionnel dans la boulangerie, à cause de l'augmentation du prix du pain. Or, la mairie tente d'intervenir pour aboutir à une conciliation entre les parties. Cette intervention politique est critiquée par le MDM au nom de la liberté commerciale : "On dit que M. EUZET et quelques uns de ses amis, assez mal inspirés à notre avis, ont insisté afin que le conseil municipal intervienne dans la question de la boulangerie et du prix du pain (...) Le conseil municipal s'est ingéré abusivement dans une question qui ne le regarde nullement et son intervention est une atteinte à la liberté commerciale. Certainement on peut croire que M. EUZET était animé d'excellentes intentions et qu'il aurait fait des propositions relativement modérées ; mais il est bien évident qu'il voulait par là se montrer agréable au club radical, afin de rester, au moins en apparence, le chef de ce parti à Cette, au point de vue de sa popularité et de son action politique. Mais il serait peut-être survenu un autre politicien ultra-radical, qui aurait demandé que les boulangers vendent au pair, et puis d'autres auraient prétendu qu'un homme, quand il a faim, a le droit de prendre un petit pain gratis, là où il se trouve, à le devanture du boulanger. Certes, nous conviendrons que dans une société bien organisée, il devrait y avoir un principe de solidarité en vertu duquel personne ne serait exposé à mourir de faim, surtout lorsqu'il en est qui ont de quoi nourrir des régiments. Mais c'est la collectivité tout entière qui doit faire les frais de cette solidarité et non point le boulanger seul." Finalement, les boulangers modèrent la hausse, avec un prix du pain qui n'augmente que de 5 centimes les 2 kilogs. Le MDM estime qu'ils ont été intimidés par l'agitation qui s'est faite autour d'eux. Quoiqu'il en soit, on se rend compte que ce conflit révèle deux conceptions de la vie en société. On peut, remarquer aussi qu'Honoré EUZET est, comme d'habitude, à l'avant-garde des idées nouvelles qui vont se développer par la suite, avec ce que l'on a appelé le socialisme municipal. (MDM du 06.04.1887)La gestion courante du conseil municipal
Voici quelques interventions et délibérations concernant la gestion courante :L'organisation de la mouvance socialiste
1887 est aussi une année où commence à se structurer la mouvance socialiste, comme on le voit dans le PM du 04.03.1887. Une convocation est adressée par voie de presse aux "citoyens membres du groupe socialiste", pour une réunion à leur siège qui est "au café débit du Parc, rue Grand Chemin, géré par le citoyen André TITÉ". L'objectif de cette réunion est de bâtir un programme "qui doit servir de ligne de conduite politique à ce groupe en formation."
1888
Il s'oppose à la construction d'un théâtre provisoire
Le vote pour la construction d'un nouveau théâtre
La question majeure de l'année est celle de l'édification d'un théâtre provisoire ou définitif à Sète.
- JC du 13.01.1888 : "Le conseil municipal se réunit demain, vendredi, pour décider si, l'état des finances ne lui permettant pas de voter la construction d'un théâtre définitif, il ne conviendrait pas de s'en tenir à celle d'un théâtre provisoire, qu'on édifierait, par exemple, sur le vacant situé avenue Victor Hugo, en face de l'école Paul Bert. Nous ne croyons pas que Cette, une grande ville désormais, puisse se passer pendant plus longtemps, d'un théâtre définitif ou provisoire. Il serait préférable de voter un théâtre définitif, l'argent que coûterait un théâtre provisoire devant être de l'argent perdu ; mais, comme il est peu probable qu'avant une dizaine d'années les finances de la commune permettent d'y affecter les deux millions qu'il coûterait bien certainement, il faut bien savoir se contenter du provisoire projeté. Seulement, pourquoi le conseil municipal voterait-il dare, dare, l'achat du théâtre provisoire de Montpellier ? Il faudrait, d'abord, le démolir pièces par pièces, ce qui ne se ferait pas sans dommages ; il faudrait, ensuite, le reconstruire en sciant, coupant, de manière à le mettre à la mesure de l'emplacement choisi, et la perte ne serait pas petite ! Les planches, la brique, le plâtre et le carton-pâte ne sont pas chers à Sète ; aussi croyons nous que, pour un prix inférieur à celui du théâtre provisoire de Montpellier, on y en construirait un, également provisoire, ayant un aspect beaucoup plus monumental, beaucoup mieux aménagé ... et neuf. Que ne fait-on pas avec 100 et même 80.000 francs intelligemment employés ? Nous sommes d'avis, par suite, et puisque on ne saurait faire autrement, que le conseil municipal décide, en principe, la construction, sur l'emplacement de l'avenue Victor Hugo, d'un théâtre provisoire ; mais qu'il se refuse absolument de traiter l'achat du théâtre de Montpellier avant d'avoir demandé à l'architecte de la Ville un plan et un devis lui permettant de se rendre compte si, en faisant cette acquisition, il ne consentirait pas un marché de dupe, dont les finances municipales feraient naturellement les frais.
- JC des 15-16.01.1888 : "Le conseil municipal s'est réuni hier soir, en comité secret, pour s'occuper de la question du théâtre provisoire, et si nous nous en rapportons aux indiscrétions qui sont venues jusqu'à nous sur ses décisions, il aurait décidé 1/ que le théâtre serait construit 2/ qu'il serait fait une démarche pour savoir à quel prix le propriétaire du théâtre provisoire de Montpellier consentirait à le céder et à le reconstruire à Cette 3/ que, si l'accord sur son prix ne se faisait pas, la Ville en ferait construire un, sur un plan et un devis à arrêter. Nous persistons à croire que le conseil municipal, après avoir décidé, en principe, la construction d'un théâtre provisoire, aurait dû s'en tenir à cette dernière résolution."
C'est un peu plus tard que l'on apprend comment la ville a pu continuer à avoir des représentations théâtrales, alors qu'il n'y avait ni théâtre provisoire ni théâtre définitif. En effet, la municipalité avait fait fermer, pour des raisons de sécurité, le théâtre Jeannin mais avait fait venir de Bordeaux le théâtre du sieur Piétro BONO, ce qui permettait de faire taire les mécontents. Or, celui-ci "a tenu rigoureusement sa promesse en donnant au public cettois cinq représentations par semaine composées principalement de nouveautés. En même temps, sa présence a donné du temps à la municipalité pour prévoir la saison suivante. C'est pourquoi Piétro BONO demande alors une subvention au conseil municipal, ce que le JC approuve fortement (JC des 29-30.01.1888). Cependant, au conseil municipal suivant, Honoré EUZET demande si la ville a pris des engagements à l'égard de Piétro BONO. Il lui est répondu que la ville l'a simplement autorisé à s'établir à Sète, "à l'exclusion de tout autre établissement de ce genre". Après discussion, le conseil repousse la demande d'indemnité (JC du 16.02.1888).
En même temps, l'hypothèse de l'achat du théâtre provisoire de Montpellier est abandonnée ; suite à une demande d'Honoré EUZET, le président lui répond que : "l'achat de ce théâtre présente de sérieuses difficultés, qu'il appartient par partie à des mineurs, qu'il doit se vendre en conséquence par licitation, et que cette vente n'est pas près d'avoir lieu. La ville n'a donc pas à compter sur cette acquisition." (JC du 04.02.1888)
A la même date, à l'occasion de la demande de remboursement par l'architecte CARLIER pour son expertise sur le théâtre Jeannin (le montant étant, d'ailleurs, jugé disproportionné), on apprend que "l'Administration de la ville ayant décidé la fermeture du théâtre Jeannin, et celui-ci ne s'étant pas opposé à cette fermeture et n'ayant formulé aucune plainte pour infirmer la décision administrative, on a dû légalement faire nommer une commission." (JC du 04.02.1888). Manifestement, il ne restait plus qu'une solution : bâtir un théâtre provisoire, mais le conseil municipal avait-il une majorité pour soutenir un tel projet ?
C'est justement sur ce sujet que 11 conseillers municipaux démissionnent, en mars. "La question du théâtre de l'avenue de la Gare est venue jeter la désorganisation au sein de notre conseil municipal. Nos lecteurs savent que, dans la séance des commissions des finances et des travaux publics qui a eu lieu mercredi dernier, la majorité de deux voix a été acquise à l'édification du théâtre Carlier. Les membres de la minorité ont fait remettre hier matin à M. le préfet la lettre de démission ci-après : M. le préfet, le conseil municipal étant sur le point de prendre une décision que nous considérons comme funeste aux intérêts de la commune, nous avons l'honneur de vous remettre notre démission afin de dégager notre responsabilité. Permettez-nous d'espérer, M. le préfet, que, conformément à la promesse que vous avez bien voulu faire à nos délégués, vous voudrez bien convoquer le corps électoral dans le plus bref délai pour lui permettre de se prononcer sur cette question délicate. Agréez, etc. - Signé EUZET, FALGUERETTE, MARTEL, MATHIEU, COTHENET, GAUTIER, AIMARD, BERTRAND, AUZIER, NEBLE, AIGON" (PM du 11.03.1888)
Au conseil municipal qui suit, les 14 conseillers municipaux restants votent, à l'unanimité, le rapport sur le théâtre Carlier, avec une dépense évaluée à 322.000 francs ; dans cette séance, le maire Benjamin PAYRET est présent mais c'est toujours Théodore OLIVE qui préside (!) ; ce dernier lit ensuite la lettre de démission des 11 et dit que cette démission est regrettable d'autant que "nous n'avons rien fait pour la provoquer" ; sur sa proposition, une délégation se rendra auprès des démissionnaires pour les engager à revenir sur leur décision. Font partie de cette délégation : OLIVE, TICHY et TEULON (PM du 13.03.1888).
Le préfet a bien du mal à trouver une position définitive dans ce conflit (probablement poussé en coulisses par chacune des parties) : " Cette, le 29 mars. - M. le préfet a bien voulu se décider à mettre à l'enquête le projet de théâtre de Cette (...) Le Petit Méridional nous annonce (...) que cette enquête de commodo et incommodo aura lieu du 21 au 23 avril prochain, presque en même temps que les élections municipales. Mieux vaut tard que jamais. Pour un homme habile, M. le préfet est un homme habile ; il veut, dans cette circonstance, ménager la chèvre et le chou. La chèvre, c'est l'administration actuelle ; le chou, c'est EUZET. Qui résistera de la chèvre ou du chou (?) Qui le sa ! (...) Pendant ce temps-là, les bons cettois attendront une salle de spectacle convenable ; les partisans de la salle Jeannin se prennent à espérer, car s'ils arrivent à l'Hôtel-de-Ville, vous pouvez compter qu'ils feront des pieds et des mains pour ouvrir cette rôtissoire (?). Un moment on avait cru que le projet Carlier rallierait tout le monde par ses bonnes dispositions, son aspect élégant, son bon marché et la célérité avec laquelle cet architecte s'engageait à le construire, c'était une erreur." (MDM du 30.03.1888)
Le sujet revient dès le début du nouveau conseil ; en effet, le 22.06.1888, à la suite de l'exposé du rapport GUIRAND, le conseil municipal finit par voter à la majorité les conclusions du rapport qui prévoient la construction d'un nouveau théâtre : "M. GUIRAND, rapporteur de la commission des beaux-arts, donne lecture de son rapport, concluant : 1/ A la construction d'un théàtre définitif sur une place qui serait située entre la rue Nationale et la rue Grand'Chemin et sur le prolongement de l'avenue de la Gare. Frais d'expropriation pour l'emplacement : 1.600.000 francs ; frais de construction : 1 million de francs. Total de la dépense pour la construction du théàtre : 2.600.000 francs. 2/ Au prolongement de l'avenue de la gare jusqu'au quai d'Alger ; montant de la dépense : 2.400.000 francs ; total général de l'évaluation des frais à faire pour l'exécution de ce projet grandiose : 5.000.000 francs." Le PM donne beaucoup de détails sur cette séance car il s'agit de montrer l'opposition des conseillers municipaux les plus radicaux : "M. BLANCHET combat les conclusions du rapport de M. GUIRAND. Il demande au conseil de construire le théâtre sur l'emplacement actuel des bureaux et des chantiers des ponts et chaussées. M. EUZET se prononce aussi énergiquement contre les conclusions du rapport. Il dit que l'exécution de ce grand projet entraînera la ville dans une dépense de 6.000.000 de francs au minimum. Il ne voit d'autres combinaisons pour contracter un emprunt de cette somme que le vote de 56 centimes additionnels (...) (le JC du 24.06.1888 indique le chiffre de 62 centimes, soit une augmentation de 30 %) y compris les 8 centimes additionnels qui viennent d'être votés. Quant aux avantages que les ouvriers de Cette en retireraient, M. EUZET n'est pas de l'avis du rapporteur. Ce sont les ouvriers étrangers dit-il, qui en profiteront, car les ouvriers cettois sont tonneliers ou portefaix. L'orateur conclut en demandant au conseil d'ajourner ce projet ruineux pour la ville, pensant qu'il serait préférable de construire un abattoir, un hôpital, une bourse et un théâtre définitif sur un emplacement dont le coût ne serait pas de 1.600.000 francs. M. COMBES, 1er adjoint, appuie les conclusions du rapport. Sur la demande de MM. VITOU, ROCCANTI, FABRE, FALGUERETTES, MARTEL, Francois MARTIN, EUZET, MAGISTRE, COLLOT CAVALLIER, CAYROL, GIRARD, BLANCHET, RICHARD, GINOUVÈS, le vote a lieu par appel nominal et les conclusions du rapport sont adoptées par 16 voix, contre 11 et 2 abstentions. Ont voté pour : MM. AUBÈS, AUSSENAC, COMBES, FABRE, AULOY, PLANCHON, GINOUVÈS, BOUDON, GIBERT, CHAUVET, GAUTHIER, GUIRAND, GOUDAL, SÉNÉGAS, MOULIN, JEANNOT. Ont voté contre : MM. BLANCHET, RICHARD, François MARTIN, MARTEL, FALGUERETTES, VITOU, ROCCANTI, GIRARD, CAVAILLER, EUZET. Se sont abstenus : MM. COLLOT et MAGISTRE. Absent : M. DURAND. (PM du 24.06.1888) A noter que le JC du 24.06.1888 donne des détails sur le contre projet présenté par BLANCHET, lequel souligne les manques d'infrastructures à Sète : "Notre ville qui l'existe pour ainsi dire que d'hier, a eu des développements si rapides qu'elle manque à peu près de tout ce que possèdent des villes d'importance bien moindre. Un théâtre définitif, un nouvel abattoir, l'hospice hors de la ville, une cale de radoub, une bourse, s'imposent certainement (...) Nous pouvons réaliser ces cinq projets avec une somme bien moins forte (...)"
Cependant, les débats du conseil municipal du 02.10.1888 montrent une nouvelle évolution ; en effet, il est dit que la commission compétente s'est occupée sérieusement d'arriver, dans le plus bref délai possible, à la réouverture du théâtre Jeanin, mais qu'il reste à obtenir l'autorisation du préfet. Ces débats sont plutôt houleux car certains estiment que le préfet est de mauvaise volonté (PM du 04.10.1888).
Le 16.10.1888, un article du PM fait le point de la situation, pour la nouvelle municipalité : "Nous n'avons jamais pensé que la réouverture du théâtre Jeanin était une solution définitive. Ce n'est là qu'une solution provisoire qui permettra aux Cettois de satisfaire leur goût et de ne pas être privés d'une distraction si agréable jusqu'au jour où un grand théâtre véritablement digne de Cette aura été édifié. C'est à ce but si vivement désiré par tous que doivent tendre tous les efforts. Aussi avons-nous été heureux d'apprendre de la bouche même du vice-président de la commission, M. FALGUERETTES, que tous les membres étaient unanimes pour hâter autant que possible le projet d'édification d'un théâtre définitif. Mais en attendant, il faut promptement un théâtre provisoire à Cette. Il y a donc nécessité urgente d'en finir avec cette question, d'obtenir l'autorisation de M. le préfet, sans toutefois qu'il faille compromettre les finances de la ville, qui n'ont certes pas besoin de grosses dépenses nouvelles. Si, comme le semble espérer la commission, M. le préfet autorise la réouverture de la salle Jeanin moyennant une dépense de 11.000 francs, il sera facile de donner la première représentation dès les premiers jours du mois prochain, ainsi que nous en avons déjà formulé le voeu. Le plus court moyen serait de traiter avec la troupe du théâtre de Béziers, qui pourrait venir donner trois représentations par semaine, sans quoi on risque de n'avoir qu'une troupe médiocre et dont le directeur serait loin de faire fortune."
Les élections municipales
Le premier tour des élections municipales
Un article du JC du 05.05.1888 fait un point très critique sur la liste des radicaux (dite de la concentration). Sous la signature d'un électeur du bon coin, sont particulièrement égratignés, AYMERIC et EUZET. Le premier, parce qu'il semble désigné pour être maire, alors qu'il n'est pas un enfant du pays et que, n'étant pas Cettois, il repartira quand la ville ne lui donnera plus d'avantages. Quant à EUZET, il est vu comme un "candidat usé, trop usé, qui veut toujours de la timbale municipale. Il ne la lâche pas depuis bientôt 20 ans et soit avec les écarlates, les rouges, les bleus, les mauves, il faut qu'il soit toujours à la mairie." Bref, c'est un caméléon et, en plus, quand on analyse les critiques réciproques passées entre AYMERIC et EUZET, on se demande où est la cohérence dans cette liste. L'auteur ajoute qu'il ne comprend pas l'intérêt qu'ont les BLANCHET, VITOU ou AULOY "à devenir les suivants de tels potentats"
Résultats du premier tour des élections municipales du 6 mai (9282 inscrits et 5206 votants) :
1/ Liste de la concentration républicaine radicale : ALBERGE Emmanuel, tonnelier 1671 - AULOY Emile, ingénieur 1911 (1800, selon le JC) - AYMERIC François, négociant en vins, ancien conseiller municipal 1902 - BÈFRE Joseph, entrepreneur, ancien conseiller municipal 1682 - BLANCHET Joseph, 2048 - BLAZY François, négociant 1776 - BRIFFAUD Baptiste, camionneur 1904 (1595, selon le JC) - CAVALIER Pani, négociant en vins 1795 (1792, selon le JC) - CAYROL Antoine, fabricant de caissons 1851 - COLLOT Louis, ancien conseiller d'arrondissement 1846 (1843, selon le JC) - COMBES Louis, négociant en vins 1774 - COTHENET Jean, négociant en vins, ancien conseiller municipal 1830 - CRÉMIEUX Napoléon, négociant en tissus 1767 - EUZET Honoré, courtier, ancien adjoint 1949 - FABRE Antoine, commis-négociant, ancien conseiller municipal 1886 - FALGUEIRETTES Auguste, négociant en vins, ancien conseiller municipal 1901 (1001, selon le JC) - FERRAND Pierre, capitaine marin 1723 - FRANÇOIS Martin, négociant en vins, ancien conseiller municipal ... (1904, selon le JC) - GALIBERT François, menuisier 1744 - GAUTIER Edouard, courtier, ancien conseiller municipal 1892 - GINOUVÈS Camille, maître de chaix, ancien conseiller municipal 1841 - GIBERT Louis, employé de commerce 1784 - GIRARD François, employé de commerce 1792 - JANSON Auguste, employé de travaux publics 1687 - MAGISTRE Barthélémy, pharmacien 1967 - MARTEL Lucien, négociant, ancien conseiller municipal 1921 - RICHARD Michel, négociant en vins, ancien conseiller municipal 1899 - ROCHE-FRANCHE Louis, épicier, président du syndicat 1711 - RONCATI Henri, maître de chaix 1849 - VITOU Prosper, propriétaire 1923 (PM et JC du 08.05.1888). Trois résultats sont très différents dans le JC par rapport à ceux qui sont donnés dans le PM (AULOY, BRIFFAUD et FALGUEIRETTES). Ils doivent donc être pris avec prudence. Le résultat pour FRANÇOIS n'est donné que dans le JC. Le meilleur score est celui de BLANCHET mais EUZET arrive en deuxième position.
2/ Liste de l'Alliance républicaine : BARTHÈS Victorin, propriétaire, capitaine au long cours 1493 - BRESSY Jules, propriétaire, ancien juge au tribunal de commerce 1565 - BRIFFAUD Emile Pierre, camionneur 1592 (1360, selon le JC) - CAUSSY Victor, négociant consignataire 1541 - CONQUET Michel, commerçant, conseiller sortant 1496 (1540, selon le JC) - DÉFARGE Henri, capitaine au long cours, conseiller sortant 1442 - DÉJEAN Bernard, boulanger 1427 (1429, selon le JC) - FRAISSINET Emile, agent de la compagnie marseillaise de navigation à vapeur, membre de la chambre de commerce, ancien conseiller municipal 1661 (1669, selon le JC) - GAUSSEL François, maître de chaix, conseiller sortant 1515 - GRANIER Pierre, ancien négociant, conseiller sortant 1518 - HERVÉ Charles, ex-chef de dépôt des chemins de fer du Midi, ancien conseiller municipal 1560 (1563, selon le JC) - LABRY Louis, négociant en vins 1614 - LACROIX Jean, entrepreneur de débarquements 1542 - LAUTIER François, mécanicien, conseiller sortant 1536 - MATHIEU Edouard, négociant, ancien conseiller municipal 1569 - MAURY François, conseiller sortant 1447 - MOUREAU Antoine, entrepreneur de débarquements, ancien conseiller municipal 1459 (1499, selon le JC) - NÈGRE Hyppolite, négociant en charbons 1558 - OLIVE Théodore, armateur, premier adjoint faisant fonction de maire 1598 - RIBES paul, négociant en vins 1644 - RIMBAUD Henry, négociant en vins 1599 - RIVIÈRE Bertrand, maître serrurier 1499 (1495, selon le JC) - ROCHE Marius, employé de commerce 1589 - SAUVAIRE Sylvestre, conseiller d'arrondissement 1601 - THER Joseph, gérant des camionnages des chemins de fer P.L.M. et Midi, conseiller sortant 1566 - VAILLÉ Emile fils, employé de commerce 1459 (1499, selon le JC) - VÉROLY Adolphe, conseiller sortant 1566 - VIVARÈS Jean Baptiste, conseiller sortant 1524 (PM et JC du 08.05.1888) Là aussi, beaucoup de différences de chiffres entre le PM et le JC. A noter, particulièrement le cas de BRIFFAUD.
3/ Liste du comité socialiste ouvrier (ou "Liste socialiste ouvrière", selon le PM) : AILLAUD Jean, prud'homme des ouvriers, portefaix 1357 - AUBÉS Frédéric Sylvain, coupeur, ancien conseiller municipal 1575 - AUSSENAC Antoine, président de la Fédération des chambres syndicales ouvrières, ancien conseiller municipal 1521 - BALMAIN Alexandre, secrétaire de la chambre syndicale des portefaix 1388 (1588, selon le JC) - BOUDON Pierre, employé aux chemins de fer du Midi 1435 - BOYER Achille, maître de chaix 1366 - CAUCANAS François, tonnelier 1314 (1374, selon le JC) - CHAUVET Pierre, courtier, ancien conseiller municipal 1415 (1412, selon le JC) - COMBES Henri, ingénieur civil 1535 - DIÉGELMANN Claude, serrurier-mécanicien 1373 - DONNADIEU Pierre, trésorier de la chambre syndicale des portefaix 1456 (1600, selon le JC) - DURAND Modeste, ancien membre de la commission municipale en 1870 1421 - GALANT Joseph, tailleur 1388 - GOUDAL Paul, soutireur, trésorier de la chambre syndicale des tonneliers 1392 - GRANIER père, ancien membre de la commission municipale en 1870 1410 - GRANIER Barthélémy, plâtrier ... (1395, selon le JC) - GRANIER Jules, tonnelier 1389 (1388, selon le JC) - GUIRAUD (GUIRAND, selon le JC) Marius, typographe 1398 - JANNOT Casimir, fabricant de futailles 1415 - LACOSTE Joseph, horloger 1375 - MAGIS Mathieu, plâtrier, ancien conseiller municipal 1383 - MOULIN Pierre, président de la chambre syndicale des tonneliers 1409 - PLANCHON François fils, limonadier, trésorier de la Fédération des chambres syndicales ouvrières 1427 - PRADINES Etienne, ancien conseiller municipal 1402 - PRAT Louis, tonnelier 1391 (1591, selon le JC) - SARRAZIN Joseph, camionneur 1391 (1591, selon le JC) - SELLEZ Jean, tonnelier 1372 - SÉNÉGAS Martial, imprimeur-lithographe, secrétaire de la Fédération des chambres syndicales ouvrières 1410 (1411, selon le JC) - SOULIER junior, boulanger, ex-gérant de la coopérative P.L.M. 1394 - VALLAT Pierre, tonnelier 1410 (PM et JC du 08.05.1888). Là encore, quelques différences notables qui sont dues, parfois, à la confusion de lecture de certains chiffres (le 3 et le 5, notamment).
A l'issue de ce premier tour, le JC tire, au-delà du cas de Sète, des leçons plus générales sur le suffrage universel : "Les élections municipales d'hier ont été chaudement disputées : le nombre de votants a été considérable ; le chiffre de 5200 votants a dépassé les prévisions. Il semblait pourtant d'après le peu de mouvement des jours précédents, que la lutte ne serait pas ardente ; on semblait fatigué de voter depuis longtemps, parce que plus ça change plus c'est la même chose, disait-on (...) Le suffrage universel est versatile comme un grand enfant que l'on a gâté par toutes sortes de câlineries et de promesses ; il aime toujours le nouveau et ce qu'il lui faut, c'est le changement. Quelque soit le bien que l'on ait fait ; que l'on ait administré avec sagesse ou non, on n'échappe pas à cette loi fatale. Et depuis 1870, (...) cette marche n'a pas été modifiée ; il n'est pas de cas que l'on puisse nous citer, qu'une administration ait été réélue, immédiatement, deux fois de suite, malgré les retouches à sa composition. Le suffrage universel élit une fois les républicains dits modérés, la fois d'après c'est au tour de ceux qui se disent plus radicaux, et ainsi de suite ; pourtant ce sont des républicains de même nuance au fond qui changent de camp par suite de divisions personnelles, voilà tout (...) Mais cette fois il y a eu des complications. Une liste socialiste s'est produite, et comme celle-ci d'un républicanisme plus extrême encore, est du fruit plus nouveau que les deux fractions qui se disputent le pouvoir depuis bientôt vingt ans, c'est elle qui devrait bénéficier des faveurs du suffrage. Et cependant depuis 1870, il faut l'avouer, pas un seul conseil municipal n'avait pu arriver au terme de son mandat, pas un n'avait fait autant de besogne, pas un n'avait été composé de gens aussi intègres (...) Le vrai succès de la journée est seul pour les socialistes et leur programme. Ils ont nettement défini ce qu'ils voulaient et on pense qu'ils tiendront leurs promesses. Comme ils n'ont jamais été au pouvoir, ils ne peuvent être ni jugés ni discrédités, et leur triomphe est une chose certaine et positive pour dimanche prochain si comme on le dit, les électeurs qui ont voté pour l'Alliance reportent leurs voix sur la liste socialiste. Quoique fasse la Concentration, qui n'arrive qu'avec une faible majorité sur celle de l'Alliance, elle ne pourra pas empêcher l'appoint des mêmes voix (...)" (JC du 08.05.1888). On ne peut qu'être impressionné par ce "diagnostic démocratique" mais dans cette analyse, c'est encore le mot positif qui est le plus inattendu (le triomphe des socialistes : "une chose certaine et positive"). Il fallait vraiment que la politique anticléricale (notamment) des radicaux ait choqué grandement une partie de la population pour que les modérés préfèrent se jetter dans les bras des socialistes !
Le pronostic du JC (journal des républicains modérés) est également partagé par EC (journal des conservateurs) : "Le courant se dessine de plus en plus en faveur de la liste socialiste pour le deuxième tour de scrutin qui aura lieu dimanche prochain. Ainsi que nous l'avons dit, les candidats de la liste de l'Alliance se sont désistés et la plupart des voix données à cette liste iront aux socialistes. D'autre part, on dit aussi qu'un certain nombre de modérés sont décidés à voter pour la liste socialiste afin d'empêcher la liste radicale de passer. On ajoute, non sans raison, que les socialistes n'étant pas encore passés au pouvoir, ne sont pas usés, discrédités, n'ont fait de mal à personne, tandis que plusieurs membres de la liste radicale, dont on ne connaît que trop le passé, soulèvent de grandes antipathies, et sont beaucoup plus redoutés que les socialistes. Etant donné cette situation, nous ne serions nullement surpris que, dimanche prochain, les socialistes ne triomphent avec une importante majorité. Ce serait nouveau et original à la fois." (EC du 10.05.1881)
Le second tour des élections municipales
"A la suite de M. OLIVE, tous les conseillers municipaux en exercice, ont donné leur démission, et nous les approuvons. Un conseiller de préfecture vient tous les jours de Montpellier pour expédier les affaires courantes." (JC du 10-11.05.1888)
"Tribune électorale : Ouvriers, frères et amis ! Les candidats de la liste de l'alliance républicaine se retirent honorablement de la lutte qu'ils avaient engagée dimanche dernier. Il ne reste plus en présence que les socialistes et les concentrés. Dans ces circonstances, nous faisons appel, nous socialistes, à tous les hommes de bon sens et de bonne volonté, c'est-à-dire à tous les dévouements. La liste de la concentration représente des haines, des vengeances, des appétits, des convoitises, des ambitions, sans compter les incapacités. Les candidats nous arrivent les uns de Carcassonne, comme AYMERIC ; les autres de Lyon comme ROCHE-FRANCHE ; ceux-ci de Perpignan, comme BÈFRE ; ceux-là de Martigue, comme FERRAND. Nous y voyons des processionnaires comme GAUTIER, des laïciseurs comme EUZET. Inconnus ou trop connus, honnêtes ou non, sobres ou intempérents, ils forment un accouplement bizarre autant qu'hybride. Arriver au pouvoir c'est pour eux impitoyablement frapper. N'ayant aucun courage, ils poussent en avant des ivrognes et des voleurs qui, sans respect pour l'autorité insultent M. OLIVE dans l'exercice de ses fonctions d'adjoint. Certes ! nous ne partageons pas les opinions de M. OLIVE, mais nos principes nous obligent à les respecter. (...) A dimanche frères ouvriers ! Que chacun soit à son poste. la victoire est certaine ! Pour un groupe socialiste, Pertufas." (JC des 10-11.05.1888)
"Tribune électorale : Le journal opportuniste de Montpellier, le Petit Méridional qui oublie qu'il doit en grande partie aux républicains de toute nuance de Cette son succès et sa vie, ne se contente pas de refuser d'insérer nos communications, alors qu'il insère complaisamment toutes celles de la liste dite de concentration, mais il va jusqu'à conseiller aux électeurs de voter pour cette dernière liste, sous prétexte qu'elle a obtenu la majorité des voix tépublicaines. Le Petit Méridional trompe sciemment ses lecteurs. Trois listes républicaines étaient en présence : Deux de ces listes ont obtenu ensemble 3200 voix environ, tandis que celle de la concentration n'a obtenu que 1800 voix en moyenne et on sait comment elle a obtenu ces 1800 voix, donc cette liste ne représente pas la majorité des républicains à Cette. S'il plait aux électeurs de l'alliance de voter pour la liste socialiste au deuxième tour de scrutin, nous ne voyons pas en quoi les socialistes commettent un acte monstrueux en acceptant ces voix qui sont toutes des voix républicaines. Ah ! si les électeurs de l'alliance votaient pour les AYMERIC, EUZET et tutti quanti, il est probable que ceux-ci ne dédaigneraient pas un tel appoint et ne le trouveraient pas monstrueux (...) Nous avons tenu à relever l'attitude partiale du Petit Méridional, comme nous avons relevé celle de M. SALIS, et nous engageons tous nos amis, les socialistes de Cette comme ceux du département à cesser de soutenir un journal qui se dit républicain et n'est, comme le Commercial de Cette, qui a refusé aussi d'insérer nos communications, que l'organe d'une coterie d'ambitieux et d'incapables (...). L'article est signé : B. VÉZY (JC du 12.05.1888)
Le jour même des élections pour le second tour, le JC publie une tribune électorale qui montre le clivage entre les radicaux et les socialistes. Publiée dans le JC, elle montre aussi que les libéraux, les modérés sont en faveur des socialistes : "Le Petit Méridional dans une de ses correspondances dit que la liste socialiste pour laquelle nous sollicitons vos suffrages, se compose d'ignorants et d'incapables. C'est ainsi, ouvriers, que nous traitent les concentrés, ces républicains de pacotille, qui oublient que nous les avons faits ce qu'ils sont et croient avoir le droit aujourd'hui de nous jeter à la face le mépris. Nous sommes des incapables ! - Mais où sont les capacités de la concentration ? Sont-ce les FERRAND, les BOUNY, les MAGIS, les BÈTRE, les CRÉMIEUX, etc. ? Est-ce que par hasard, ils valent mieux que nos amis SARRAZIN, AUBÈS, DURAND, PLANCHON, AUSSENAC ou P. GRANIER ? Au moins il y en a ici qui ont donné des preuves éclatantes de leur dévouement à tous ceux qui souffrent, qui ont subi des persécutions, qui ont été emprisonnés et proscrits pour ce bon peuple dont ils ont pris la défense et qui toujours sur la brèche n'ont jamais failli à leur mission. Quand les prétendus démocrates de la concentration parlent avec dédain de la classe ouvrière et qu'ils écrivent qu'on ne peut parmi nous trouver une administration éclairée, nous répondons que nous avons déjà vu GUIGNON et MICHEL à l'oeuvre et qu'ils ne se sont pas plus mal que d'autres acquitté de leurs mandats. (...) Pour trois groupes d'ouvriers. - Jacques L." (JC des 13-14.05.1888)
Les résultats du second tour des élections municipales sont donnés dans le JC du 15.05.1888 : noms, nombre de voix et appartenance (soc pour socialistes et c pour concentration), : AUBÈS 2488 (soc), BLANCHET 2474 (c), COMBES 2430 (soc), AUSSENAC 2420 (soc), MAGISTRE 2384 (c), RICHARD 2372 (c), COLLOT 2371 (c), FABRE 2368 (c), MARTEL 2368 (c), FRANÇOIS 2368 (c), AULOY 2365 (c), CAYROL 2363 (c), FALGUEIRETTES 2359 (c), VITOU 2355 (c), PLANCHON 2351 (soc), GINOUVÈS 2349 (c), RONCATY 2348 (c), BOUDON 2344 (soc), MOULIN 2342 (soc), GIBERT 2341 (c), JANNOT 2340 (soc), CHAUVET 2338 (soc), GAUTIER 2338 (c), GIRARD 2334 (c), SÉNÉGAS 2334 (soc), DURAND 2329 (soc), CAVALIER 2328 (soc), EUZET 2325 (c), GUIRAND 2324 (soc), GOUDAL 2321 (soc)." Et le JC de conclure : "En somme, la liste socialiste a obtenu 69728 voix, ce qui représente une moyenne de 2324 voix par candidat et la liste de la concentration a obtenu en tout 69635 voix, ce fait une moyenne de 2321 voix par candidat. Donc, on peut dire que dans l'ensemble la liste socialiste a eu la majorité des suffrages exprimés." Cependant, le résultat, en nombre de candidats élus, est de 13 socialistes et 17 de la concentration (on peut aussi traduire ce résultat en disant que l'addition des voix socialistes et modérées l'emporte sur les voix purement radicales. C'est, probablement, une leçon qu'EUZET ne devait pas oublier, quelques années plus tard, d'autant qu'en plus, cette fois-ci, il a failli ne pas faire partie des 30 élus.
(voir l'analyse de ces élections dans le JC du 01.05.1892)
L'élection du maire et des deux adjoints
Il faut reprendre l'intégralité du compte rendu du PM du 20.05.1888 pour se rendre compte du caractère tout à fait exceptionnel de cette élection (deux autres comptes rendus, plus brefs, se trouvent dans le n° de la veille) : "A 8 heures et demie du soir, au moment de l'ouverture des portes au public, un vacarme épouvantable s'est produit ; des insultes ont été proférées à l'adresse du nouveau conseil. Aux insultes succèdent les menaces et enfin les voies de fait. Des morceaux de brique ou de plâtre sont lancés aux conseillers : trois d'entre ces derniers sont atteints à la tête et aux mains. On voit le sang couler en abondance, quoique les blessures soient légères et sans aucune gravité. En présence de cette agression, tous les conseillers réclament M. le commissaire central ; la présence de deux agents aux tribunes publiques suffit pour rétablir le calme. Il était temps, car le public avait envahi l'enceinte réservée au conseil municipal et avait pris place à côté des élus, derrière eux, sur les fenêtres. On procède enfin à l'élection du maire sous la présidence du doyen d'âge, le citoyen DURAND Modeste. Au 1er tour de scrutin, M. BLANCHET est élu par 17 voix contre 12 obtenues par le citoyen AUSSENAC. M. le maire prend place au fauteuil de la présidence et, après avoir remercié ses collègues de l'avoir appelé aux fonctions de premier magistrat de la ville de Cette, il invite le conseil à élire le premier adjoint. 1er tour de scrutin : M. EUZET 15 voix ; M. AUSSENAC 15 voix. 2e tour de scrutin : M. EUZET 15 voix ; M. AUSSENAC 15 voix. M. EUZET demande la parole : Si j'avais accepté la candidature, dit-il, aux fonctions de premier adjoint, c'est que les dix-huit élus de la liste de concentration avaient pris l'engagement de m'accorder leurs voix. Trois de mes collègues ayant manqué à cet engagement, je retire ma candidature en présence de cet acte malhonnête. Applaudissements. M. BLANCHET, maire, dit : Si j'ai accepté les fonctions de maire, c'était par dévouement et aussi parce que j'avais lieu d'espérer que j'aurais à mon côté un homme d'expérience, M. EUZET. Celui-ci retirant sa candidature, je donne ma démission de maire, ne pouvant compter sur l'appui de nos trois collègues, devenus des transfuges aujourd'hui. Applaudissements unanimes. Le citoyen Modeste DURAND, doyen d'âge, reprend le fauteuil de la présidence et invite l'assemblée à élire le maire. Bulletins blancs 17, M. MAGISTRE 13 voix. M. MAGISTRE s'empresse de retirer sa candidature. Il est ensuite procédé à un autre tour de scrutin : M. AULOY 13 voix ; bulletins blancs 17. M. BLANCHET : M. AULOY accepte-t-il d'être candidat ?.. M. AULOY : - Oui ! (stupéfaction générale). M. BLANCHET : - M. AULOY accepte-t-il encore d'être candidat aux fonctions de maire ?.. M. AULOY garde le silence. On vote encore : M. PLANCHON 17 voix ; M. AULOY 12 voix. Le président proclame M. PLANCHON, maire. Celui-ci refuse.
Sur la proposition d'un membre, la séance est suspendue et les conseillers se retirent dans la salle des mariages afin de s'entendre pour la nomination de l'administration. Les socialistes demandent qu'il leur soit accordé le maire et le 3ème adjoint et déclarent que cette demande est le minimum de leurs revendications. Sur la proposition de M. EUZET, les 18 élus de la liste de concentration se retirent dans le cabinet du maire pour délibérer. On décide d'accorder aux socialistes le 1er et le 3ème adjoint et l'on insiste auprès de M. EUZET pour qu'il accepte les fonctions de maire. M. EUZET s'y refuse absolument. Il ne serait pas digne de lui, dit M. EUZET, d'accepter des fonctions que son ami, M. BLANCHET, vient d'abandonner si noblement. D'ailleurs, en présence de ce qui vient de se passer, peut-on pour administrer, compter sur une majorité ? On recherche de nouvelles combinaisons mais MM. RICHARD, MARTEL, VITOU se refusent à accepter les fonctions d'adjoint. Enfin, on s'arrête à une dernière résolution : laisser aux socialistes toute l'administration, en leur promettant un concours dévoué. M. EUZET est chargé de leur faire cette déclaration au nom du groupe. On rentre de nouveau en séance." Plusieurs tours de scrutin ont lieu successivement. Le maire est élu par 29 voix et les adjoints par 30 voix. Antoine AUSSENAC, élu maire, prend place au fauteuil de la présidence et déclare que, lui, modeste travailleur, est appelé aux fonctions de maire, par suite de circonstances inattendues.
C'est dans le PM du 22.05.1888 qu'Emile AULOY s'est justifié de son changement de vote lors de l'élection du premier adjoint, disant qu'à la suite du désistement de BLANCHET, il avait repris sa liberté d'action. En réalité, on voit bien, tant par les deux tours de scrutin pour le vote du premier adjoint que dans son explication, il s'est opposé à l'élection d'Honoré EUZET. Il voulait bien de BLANCHET comme maire mais il s'opposait à EUZET, non seulement comme adjoint mais encore plus comme maire. Il fut suivi par deux de ses collègues, rendant ainsi impossible la gestion de la ville par les radicaux. Tous les journaux se font l'écho de ce changement de situation. Ainsi, le MDM estime que "le désarroi le plus complet règne dans le camp radical" et, surtout, le journal reprend l'analyse des radicaux sur la traîtrise qui vient d'avoir lieu : "Nous affirmons que dans la séance préparatoire du jeudi 17 mai présidée par notre camarade GINOUVÈS, il a été pris l'engagement d'honneur de voter pour MM. BLANCHET, EUZET, MAGISTRE et CAVALIER comme maire et adjoints. MM. COLLOT et FABRE ont seuls faits des réserves pour le deuxième et troisième adjoints (et déclaré qu'ils voteraient en blanc). M. AULOY, quoiqu'il en dise, a accepté, ainsi que nous tous, ce pacte verbal. Dans les diverses réunions préparatoires, M. AULOY, comme les deux amis qui l'ont suivi dans sa défection, se sont montrés d'une violence peu commune vis-à-vis des socialistes et se sont opposés à toute conciliation, et si à la première séance du conseil de vendredi ils nous ont trompés, c'est qu'une heure avant ladite réunion, M. AULOY et un de ses amis étaient en conférence avec nos douze collègues de la liste socialiste, qui leur promettaient une place dans l'administration - texte signé par les radicaux, dont EUZET" (MDM du 26.05.1888)
Le MDM qui fait part de la sérénade par les sociétés de musique (l'Harmonie Cettoise, la Chorale des Touristes et la Fanfare des Ecoles - mais la Lyre Sainte-Cécile n'est pas présente) ironise quelque peu sur l'accueil de la population au nouveau maire. Après avoir constaté que son discours, sur le balcon de l'Hôtel-de-Ville a été fort applaudi et qu'il n'y a pas eu le moindre incident, il est dit : "Notre nouveau maire devient décidément très à la mode : AUSSENAC for ever" (MDM du 23.05.1888
Le 02.06.1888, les nominations se font pour les commissions et les délégations. Honoré EUZET devient membre de la commission des finances, de la commission des travaux publics, de la commission des eaux et de l'éclairage, de la commission des logements insalubres et de la commission scolaire ; il est aussi élu administrateur du bureau de bienfaisance, soit 7 représentations sur les 13 qui sont attribuées (PM du 05/06/1888).
Les affaires courantes
1889
1890
1891
1892
(à compléter)
1893
1894
1895
L'année commence par une élection municipale complémentaire ...
... et se termine par une élection municipale générale
La placette, son bassin et l'Hôtel-de-Ville
1896
"Nous apprenons que sur les instances de l'administration municipale, M. le préfet a revêtu de son approbation la délibération en vertu de laquelle 1000 francs, convertis en bons de pain, de viande et des fourneaux économiques, seront distribués par les soins des conseillers municipaux aux pauvres de la ville à l'occasion du premier mai" (PM du 01.05.1896).
1897
1898
1899
1900
Les travaux d'installation du tramway électrique
Le théâtre
1901
Les lignes en activité du tramway électrique
Le tramway électrique sur le quai de Bosc
La création d'un sanatorium maritime
La vente des terrains de la Corniche
La poursuite des travaux au théâtre
La question de la Bourse du Travail
La Bourse du Travail
Suite de la question, une quinzaine plus tard : "M. EUZET, maire de Cette, a reçu ce matin à l'Hôtel-de-Ville, une importante délégation des syndicats qui, au nom de leurs mandants, sont venus réclamer l'ouverture de la Bourse du Travail. M. le maire a répondu qu'il avait élaboré un règlement de la Bourse du Travail qui serait soumis au conseil municipal dans sa séance de vendredi prochain, et qu'après approbation, sauf les modifications qui pourront y être apportées par le conseil municipal, il demanderait aux chambres syndicales de vouloir lui donner leur adhésion. M. le maire a ajouté qu'il pensait que ce règlement sauvegarderait la liberté des syndicats qui doit rester entière (...)" (PM du 10.11.1901)
L'opposition au maire
1902
La démission de tous les conseillers municipaux
La nouvelle municipalité
JEAN JOSEPH MOLLE, maire de la ville de Cette
A propos d'AUDOYE, le RC du 18.04.1914 trace de lui un portrait au vitriol. L'article est intitulé : "Un traître" et rappelle son parcours depuis cette élection de 1902 : "Lorsque en 1902, après la scission de la Municipalité EUZET, AUDOYE fut candidat, il déclara à qui voulait à aucun prix être désigné adjoint si la liste MOLLE était élue. Les élections ont lieu au mois de Février, 20 Mollistes sont élus. MOLLE est maire et AUDOYE est nommé 2me adjoint sans qu'il lui soit fait violence. Le jour de l'installation de la municipalité, jour où furent remises les clefs de la Bourse du Travail : AUDOYE criait du haut du balcon de la Mairie : "Citoyens !!! je ne voulais pas d'écharpes, mais je me suis résigné devant les sollicitations à accepter celle de 2me adjoint à seule fin qu'elle soit l'écharpe des ouvriers !!! Comptez sur moi, etc., etc. Quelques mois après, AUDOYE le tonnelier, l'adjoint des ouvriers abandonnait la campagne qu'il menait contre les Wagons-Réservoirs, pour entrer dans la maison DOMERC ESTÈVE aux appointements de 2400 francs par an. Cet homme dont le nom figure sur la plaque commémorative de l'inauguration de la Bourse du Travail ; ce contremaître qui osait, il y a quelques temps dans une réunion (à laquelle assistait son compère MOLLE) donnée à la Bourse du Travail, pour les cheminots, accuser un de nos bons amis, d'être un désorganisateur de syndicats, s'ingénie à n'embaucher que des ouvriers non confédérés, en un mot il est le fervent soutien des jaunes du syndicalisme (...)"
La Bourse du Travail
La plaque d'inauguration de la Bourse du Travail
L'usine du Creusot
Le bilan de la municipalité précédente
1903 L'école pratique de Sète
1904 Honoré EUZET, photo probablement prise en 1903
L'inauguration du théâtre
Le 20.08.1888, le PM donne quelques éléments d'une discussion, au conseil municipal du 17, sur l'organisation et l'avenir du bureau de bienfaisance. Certains souhaitent une meilleure distribution des soins (il n'y a que quatre docteurs) et d'autres veulent que l'établissement soit laïcisé dans le plus bref délai. Sur ces deux points, Honoré EUZET donne son point de vue. Pour le premier, il craint que si l'on diminue les appointements des médecins (pour en augmenter le nombre), on ne trouve pas de docteurs. GINOUVÈS propose alors qu'il n'y ait pas d'attachés à l'établissement, ce à quoi il répond "que l'essai en a été fait sous l'administration VAREILLE et que le résultat a été mauvais" ; cette répartie, mise en avant par le PM, montre l'expérience qu'il a acquise au fil des années. Il demande aussi l'ajournement de cette question "par déférence pour l'administration du bureau de bienfaisance", ce qui est adopté. Pour la laïcisation, il démontre qu'elle entraînera la ville dans de grandes dépenses que le budget actuel ne pourrait pas supporter. "tout en déclarant qu'il est partisan de la laïcisation (...), il dit qu'il croit devoir, en sa qualité d'administrateur, déclarer loyalement qu'il n'est pas possible de laïciser immédiatement cet établissement humanitaire". Là aussi, son avis est suivi par les autres conseillers municipaux. Ces discussions, qui ont lieu au conseil municipal du 20.08.1888, sont reprises sous un angle différent par le MDM : "La dernière séance, à laquelle il nous a été impossible d'assister, a présenté ce seul fait intéressant, que M. EUZET, membre du conseil, délégué à l'administration du bureau de bienfaisance, était présent. M. EUZET, qui depuis le triomphe si inattendu des socialistes et la défection de quelques-uns de ses anciens alliés, a adopté pour système de ne jamais se rendre aux séances du conseil municipal, a tenu cette fois à y assister pour tâcher d'empêcher ses collègues d'entamer une nouvelle campagne de laïcisation contre cet établissement hospitalier. Ce n'est pas que M. EUZET soit ennemi de la laïcisation, bien au contraire ; mais, pour cette fois, il fait fléchir ses principes, en présence des difficultés et des charges qui en résulteraient pour la commune." En effet, il explique que certains dons et legs importants, reçus par le bureau, ont eu pour condition que l'établissement soit dirigé par des religieuses. Dans le cas contraire, les héritiers pourraient récupérer les immeubles et le montant du remplacement serait énorme. Il insiste aussi sur le coût salarial (une religieuse est appointée à 515 francs alors qu'une dame laïque reviendrait, au moins, à 1500 francs). Le journal conclut : "Quand le bon sens et l'esprit d'économie sont aussi bien d'accord, il est permis de manquer aux engagements les plus absurdes. Nos compliments à M. EUZET (MDM du 21.08.1888) Enfin, dans la même séance, il s'oppose à JEANNOT qui voudrait prohiber l'entrée de futailles de Mèze et de Marseillan car, dit-il, elles portent un grand préjudice au commerce des futailles de Sète. EUZET lui répond "qu'un voeu identique avait été formulé il y a quelques années à la municipalité. Il est illégal de vouloir protéger les produits industriels d'une cité au détriment d'une autre. Ce serait vouloir créer des douanes intérieures/" (JC du 19.08.1888). Là encore, il démontre sa connaissance des affaires et il apparaît comme, le sage, celui qui a la mémoire de l'institution.
Le 02.10.1888, le secrétaire général de la mairie, de PLEUC, présente le rapport de la commission des finances, en l'absence de son rapporteur. Honoré EUZET fait alors plusieurs interventions : "(...) Je tiens à faire observer que sur l'état des dépenses soumis au conseil, figurent les traitements de plusieurs mois de deux employés. Je demande à M. le maire de régulariser cette situation. Si ces deux employés sont utiles, vous n'avez qu'a demander au conseil la création de ces deux emplois mais de telles dépenses qui ont un caractère permanent ne doivent pas figurer au chapitre des dépenses imprévues." Le maire lui répond qu'il a dû remplacer un employé malade mais, qu'à l'avenir, il tiendra compte de ses observations. Un peu plus tard, Honoré EUZET fait une autre intervention à propos des bouches d'égout, après avoir constaté qu'il a été beaucoup réalisé pour l'assainissement de la ville qui est, aujourd'hui, très propre : "mais les bouches d'égout sont très défectueuses. Leur transformation coûterait 25.000 francs environ. L'état actuel de nos finances ne me permettent pas de vous proposer immédiatement ce crédit. J'invite l'administration à imiter celle qui l'a précédée, en reprenant son projet qui consistait à inscrire chaque année au budget une somme de 5000 francs pour la réfection des bouches d'égout." Le maire lui répond qu'il s'engage à inscrire la somme de 5000 francs sur le prochain budget, conformément à ses désirs. Honoré EUZET a aussi insisté sur l'énormité des crédits supplémentaires qui ont déjà été votés par le nouveau conseil (105.000 francs) et il demande à l'administration d'y réfléchir (PM du 04.10.1888). Evidemment, le PM met en valeur les interventions techniques et pratiques d'EUZET pour montrer son sérieux mais on se rend compte, par là-même, de l'étendue de ses connaissances dans la gestion quotidienne de la mairie. Il est évident que cet aspect jouera, plus tard, dans son élection au fauteuil de maire, en plus de ses antécédents républicains sous l'Empire et de son adhésion au radicalisme puis au radical-socialisme.
Technicité reconnue donc mais aussi emploi de tactiques politiques pour user peu à peu l'adversaire : "On peut déjà constater un grand découragement parmi les membres les plus modérés de notre administration communale. M. EUZET, l'absent par système, et aussi peut-être par calcul, va trouver de nombreux imitateurs ; il est même permis de présumer que d'ici à un mois les séances du conseil municipal ne seront plus suivies que par les douze ou treize membres qui composent la minorité socialiste." (MDM du 14.09.1888) Du coup, le journal s'interroge sur la question théâtrale, alors qu'aux dernières élections, tous les candidats, sans exception, avaient mis cette affaire au premier plan. Cet absentéisme voulu se retrouve même dans les commissions. Ainsi, la commission des finances du 27.09.1888 ne peut se tenir, compte tenu des absents, cetains excusés et d'autres non (Honoré EUZET se trouvant dans cette dernière catégorie). (MDM du 28.09.1888) Un autre journal, le JC, insiste encore plus sur ces absences. A propos de la commission des finances, au conseil du 18 septembre, JEANNOT se plaint que la question de l'emprunt n'a pu être traitée à cause des absences répétées et non excusées de certains de ses membres. "M. EUZET se sentant visé, répond que, s'il n'assiste pas aux réunions de la commission, c'est qu'il prend ses vacances. Et avec quelle permission ? lui demande le premier adjoint. Je n'ai de permission à demander à personne, riposte M. EUZET et mes vacances ne cesseront que quand il me plaira. M. COMBES dit que, lui-aussi, aurait besoin de vacances, mais que le devoir le retient au poste." AUSSENAC intervient alors pour faire cesser ces échanges dignes d'une cour de récréation : "M. le maire déclare l'incident clos et dit que l'esprit d'unité et la concorde doivent régner entre les membres des commissions. (JC du 20.09.1888). Cette sage intervention n'empêche pas, un peu plus tard, de nouveaux échanges acerbes entre COMBES et EUZET, à propos de l'Exposition de Sète ... et des absences d'EUZET aux séances du conseil municipal.
En fait, du côté des socialistes, plus l'année avance, plus il est difficile de tenir le conseil et le public qui assiste aux séances. Cela tient, en partie, au maire qui déclare que "les mesures coercitives lui répugnent". C'est le MDM du 24.06.1888 qui le constate alors que la séance du 23 juin vient de se dérouler avec le public qui a assisté en faisant un vacarme insupportable. Le journal conservateur ne peut s'empêcher de souligner : "On a beau être socialiste, il faut bien cependant être respecté, surtout quand on est le premier représentant d'une cité".
Le problème financier posé par la diminution des recettes de l'octroi.
A la séance du conseil municipal de 8 mars, un rapport est présenté sur les recettes de l'octroi. Le conseiller municipal GIBERT explique que pendant les quatre premiers mois de 1888, l'excédent a été de 22674 francs et que, si cette progression s'était maintenue jusqu'à la fin de l'exercice, on aurait eu une augmentation de 68.468 francs, alors que l'excédent n'a été que de 36.468 francs. Or, il y a eu de grandes fêtes en août et un concours musical qui a attiré à Sète un grand nombre d'étrangers, ce qui a forcé les industriels à faire des approvisionnements en conséquence. Les recettes de l'octroi auraient dû s'en ressentir. Ce n'est pas le cas. Il faut donc rechercher les responsabilités de cette situation, savoir notamment si les agents se sont bien acquitté de leur fonction. C'est d'autant plus indispensable que le service de l'octroi rapporte au budget 800.000 francs de recettes et donc qu'il constitue le plus clair des revenus de la ville. La discussion qui suit cette présentation devient confuse entre les socialistes et les radicaux. Finalement, Honoré EUZET intervient : "Je ne puis voter l'ordre du jour présenté par M. GIBERT, lequel contient implicitement un blâme contre l'administration, sans indiquer les causes d'une décroissance dans les recettes de l'octroi. Je demande donc que la lumière soit faite par une commission d'enquête nommée par le conseil municipal avec mandat de déterminer les responsabilités. Je ne puis, dit-il, être suspecté de tendresse pour l'administration, mais je ne puis la condamner sans qu'il soit fait une enquête sérieuse." La proposition est mise aux voix et adoptée à l'unanimité (PM du 11.03.1889). A noter que le PM, dans son compte rendu, ironise sur la majorité socialiste du conseil en écrivant, à plusieurs reprises : "le groupe du conseil dit socialiste" ou encore "plusieurs membres du groupe, dit socialiste", ce qui en dit long sur les relations entre les deux parties du conseil municipal.
Il faut attendre le conseil municipal du 05.04.1889 pour connaître les conclusions de la commission d'enquête. Le rapport présenté par GIBERT fait ressortir la désorganisation du service de l'octroi et l'indiscipline d'un certain nombre d'agents. Les préconisations sont, surtout, de rétablir le poste de préposé en chef adjoint (pour la surveillance active du service) et de redonner au préposé en chef toute l'autorité nécessaire, sous le contrôle de l'administration (c'est-à-dire de la mairie), pour obtenir l'obéissance et le fonctionnement régulier du personnel (environ 85 personnes). Le rapport dédouane le préposé en chef qui avait été mis en accusation par une partie du personnel. Ces conclusions sont, cependant, rejetées par 13 voix contre 10, les socialistes votant contre et les radicaux (dont EUZET) votant pour. La discussion qui suit prend, ensuite, un tour assez violent car les socialistes veulent mettre tous les torts sur le préposé en chef (interventions de JEANNOT, de CHAUVET, de PLANCHON). Ce dernier est particulièrement agressif : "Si l'on ne veut pas le révoquer, qu'on le pende. Il ne cesse de conspirer contre l'administration avec M. OLIVE, et M. GIBERT s'est fait leur complice." BLANCHET résume la situation en disant que le vote ayant rejetté les conclusions du rapport ne fait que consacrer les errements commis par l'administration (PM des 07 et 08.04.1889). On comprend alors que l'unité est définitivement rompue entre les deux groupes formant le conseil municipal.
La révocation d'employés : un système des dépouilles à la mode sétoise ?
Un autre débat anime le conseil municipal, le 8 mars. En effet, suite à la demande du premier adjoint, Henri COMBES, de voter une pension de retraite aux agents MAGNÉRI, MURATEL et CABANIS, dont l'emploi a été supprimé, Honoré EUZET fait une longue déclaration : "Je constate à regret que le conseil ne se réunit pas une seule fois sans être appelé à délibérer sur les demandes de liquidations de retraites ou d'indemnités formulées par des employés injustement révoqués. Sans parler des procès qui sont pendants, les sommes qu'il faudra inscrire au budget par suite des agissements de l'administration seront très onéreuses pour les finances de la commune. Dans le cas particulier qui nous occupe, quatre agents de police ont été révoqués par l'administration sans que celle-ci en eût le droit, et, depuis huit mois environ, il faut payer des agents sans que ces derniers remplissent leurs fonctions. L'administration, croyant sortir de cette impasse, a eu recours à un expédient : elle a fait voter par le conseil la suppression des emplois de ces quatre agents, emplois qu'il faudra rétablir plus tard ; mais les droits à la caisse de retraite de ces quatre employés communaux n'en existent pas moins. Or, comme la caisse de retraite ne fonctionne pas encore, c'est le budget communal qui devra servir les retraites et les charges seront très onéreuses pour celui-ci. De cette situation, il résulte que ce seront les contribuables qui aurant à supporter les conséquences des rancunes de l'administration. M. EUZET conclut en demandant au conseil de voter la liquidation des retraites demandées par M. COMBES, 1er adjoint, et en invitant l'administration à bien peser à l'avenir les conséquences des révocations et des suppressions d'emploi." La discussion qui se poursuit montre que les mentalités restent inchangées. A une interpellation de Casimir JEANNOT qui rappelle que le nombre de révocations était supérieur sous l'administration précédente, EUZET répond que la situation n'était pas la même et que, dit-il, "En tous cas, j'ai toujours été opposé aux révocations" ; quant à François PLANCHON, il déclare qu'"il y a encore de nombreux réactionnaires en place et l'administration donnera un bon coup de balai" ; il rappelle, ensuite, à Honoré EUZET qu'il a promis son concours à l'administration, ce à quoi celui-ci répond : "Je ne me considère plus comme lié à l'égard de l'administration qui a fait une véritable hécatombe d'employés, malgré les engagements pris." Le conseil finit par voter la liquidation de ces retraites et est aussi autorisé à se défendre devant le conseil de préfecture, dans l'action intentée à la ville par divers employés révoqués (PM du 11.03.1889)
Au conseil municipal du 19.03.1889, au nom de la commission des finances, GIBERT lit un rapport concluant au vote d'une indemnité correspondant à un mois de traitement, en faveur de trois employés communaux révoqués : ALLES, AUBERT et MIRAMOND ; un peu plus tard, une indemnité de 58 francs est accordée au garde du château d'eau révoqué, Jacques NOËL. (PM du 21.03.1889)
Le PM du 01.06.1889 estime que le conseil municipal se réunira dans le courant de la prochaine semaine et donne l'information suivante : "M. EUZET a demandé à M. le maire de porter à l'ordre du jour de cette séance les revendications des employés révoqués et de ceux dont l'emploi a été supprimé. Si M. le maire ne tenait aucun compte des désirs de M. EUZET, ce dernier interpellerait l'administration à ce sujet et demanderait la nomination d'une commission pour fixer le chiffre d'indemnité à accorder aux intéressés." Le PM du 18.06.1889 donne connaissance d'une communication d'employés communaux révoqués, BESSIL et Salomon PUECH : "En réponse à une lettre de M. MARTEL, publiée dans le Petit Méridional, nous déclarons qu'il est complètement faux que M. MARTEL nous ait dit qu'il s'abstiendrait de prendre part au vote sur la proposition de transaction faite par M. EUZET. Au contraire, après un long entretien que nous avons eu avec lui, nous avions acquis la certitude qu'il voterait en notre faveur, selon ses propres déclarations."
Une élection municipale complémentaire
Le PM du 26.06.1889 annonce la tenue de l'élection complémentaire : "C'est dimanche prochain que les électeurs devront nommer cinq conseillers municipaux afin que, selon la loi, le conseil municipal soit complété, pour élire deux adjoints". Le journal conclut, après analyse des candidatures que c'est toujours la même idée qui revient : "la dissolution du conseil".
Un retour inattendu, celui d'Henri FOURNAIRE, l'ancien journaliste, qui se positionne - seul - dans l'élection municipale complémentaire : "En sollicitant vos suffrages pour être nommé conseiller municipal, je n'ai qu'un but : continuer dans une autre sphère d'action le dévouement que j'ai toujours montré dans la presse pour le bien public et surtout celui des classes laborieuses dont je fais partie. Parmi les nombreuses questions à résoudre pour le conseil municipal, j'estime que la principale de toutes est l'homogénéité de sa composition". Il insiste sur le désarroi du corps électoral et sur le fait que tout le monde veut la dissolution du conseil. Dans sa conclusion, il se présente comme quelqu'un né à Sète et donc à même de comprendre et résoudre les problèmes locaux. (PM du 27.06.1889)
Les résultats du premier tour (9508 inscrits, 3600 votants), d'après le PM du 01.07.1889 :
- Liste boulangiste : MM. BOULANGER 1350, LAGUERRE 1302, NAQUET 1305, LAISANT 1287, DEROULÈDE 1303
- Liste socialiste : MM. ANDRÉ 1260, BROUZON 1268, MOLINIER 1271, MOLLE 1269, VIALAN 1270
- Liste des employés révoqués : MM. BÉHIL 765, BÉNÉZECH 762, GAYRAUD 769, PUECH 754, VAILLARD 754
- Candidat indépendant : M. FOURNAIRE 90
"Faisons remarquer qu'il y a, en chiffres ronds, 2000 voix antiboulangistes contre 1300, les socialistes ayant fait une déclaration antiboulangiste."
Les résultats du second tour (9508 inscrits, 3986 votants), d'après le PM du 08.07.1889 :
- Liste républicaine : MM. ANDRÉ 2443, BROUZON 2450, MOLINIER 2444, MOLLE 2441, VILAR 2441
- Liste boulangiste : MM. BOULANGER 1459, LAGUERRE 1454, NAQUET 1443, LAISANT 1435, DEROULÈEDE 1443
"Les votes obtenus par les socialistes, qui sont élus, appartiennent à toutes les fractions du camp républicain ; les boulangistes n'ont obtenu que les voix réactionnaires. Constatons ici un point important : malgré la propagande effrénée faite par les boulangistes entre le premier et le second tour de scrutin, malgré les photo-lithographies de BOULANGER, distribuées à profusion, les boulangistes ont perdu une centaine de voix. C'est bon à noter, n'est-ce pas ? Car cela démontre une fois de plus que seuls sont boulangistes les ennemis de la République et que s'il y a pu avoir quelques mécontents parmi les républicains, qui, au premier tour, ont voté pour la liste de la boulange, chacun a compris, au second, ce qui lui restait à faire, et chacun a fait son devoir."
A l'issue des élections, il s'agit donc d'installer les 5 nouveaux conseillers élus et de nommer les 2ème et 3ème adjoints au maire. Le Cm se réunit d'abord en séance officieuse, le 25.07.1889 pour s'entendre sur ces nominations. 26 membres sur 30 sont présents mais la séance commence mal car l'un des nouveaux élus demande la démission du maire et celle de CHAUVET, qui refusent. Dans le PM qui se fait l'écho des débats, il est écrit que "pendant plus d'une heure, ce n'a été qu'un débordement d'injures réciproques et d'épithèques les plus grossières". Enfin, par 24 voix contre 2 abstentions, il est décidé qu'il n'y a pas lieu de procéder à la nomination de deux adjoints. Honoré EUZET propose alors à ses collègues de démissionner en masse. Le maire appuie cette proposition mais les socialistes la combattent. Dès lors, la séance officielle du conseil municipal qui était prévue le 26 juillet est reportée à une date ultérieure (PM du 27.07.1889).
Le 03.11.1889, le PM donne des informations sur les finances de la ville, par l'intermédiaire d'une communication : "On nous écrit : Nous sommes heureux d'apprendre que suivant le voeu du public, dont le Petit Méridional a été l'interprète, et sur la proposition du maire, le conseil a décidé qu'un exemplaire du rapport de M. EUZET, concluant à l'adoption : 1/ du compte administratif pour 1888 ; 2/ des chapitres additionnels du budget de 1889 sera, ainsi qu'une copie de ces documents, distribué à la presse et déposé dans les divers cercles de notre ville" Après ces louanges, le PM souligne, cependant, que l'important est de connaître les résultats de la "gestion PEYRET-OLIVE jusqu'à juin 1888 et la gestion AUSSENAC du jour de la prise de possession du fauteuil jusques à fin 1888". Il faut encore connaître, dit le PM, les recettes d'octroi et autres recettes, jusqu'à fin octobre 1889, ainsi que les crédits supplémentaires depuis le 1er janvier. Tout cela pour savoir à qui il faut imputer la situation financière de la ville. Un autre article indique qu'il présente, au nom de la commission des finances, un rapport sur le budget 1890, lequel présente un solde positif de 1595 francs. Il subit les critiques du conseiller JEANNOT qui estime ne pas avoir assez eu le temps de l'examiner alors qu'EUZET conclut à son adoption ; mis aux voix, le rapport est adopté sous l'influence du président AUSSENAC, ce qui ne manque pas d'entraîner un échange acerbe entre JEANNOT et AUSSENAC (JC du 01.01.1890).
Un article ironique du MDM montre qu'en cette année 1889, de par sa compétence technique (et probablement son sens tactique), il est devenu indispensable aux conseillers municipaux socialistes, pourtant majoritaires : " Nous apprenons et de bonne source, que le préfet de l'Hérault, M. POINTU, aurait refusé, d'une façon carrée, la démission de six ou sept membres radicaux" (du conseil municipal). Le journal estime que leur retour apporterait inévitablement des troubles, alors que le conseil "qui, pour être fort amputé, n'en coule pas moins des jours tranquilles et heureux, sous la houlette de son berger, M. Honoré EUZET. C'est au résumé, une histoire drôlement curieuse que celle de ce conseil municipal panaché, qui n'a commencé à se diviser en deux camps des plus haineux qu'à cause de M. EUZET dont les socialistes ne voulaient pas pour premier adjoint et qui, aujourd'hui, en très forte majorité socialiste, se laisse conduire par lui, par le bout du nez. Ceci prouve donc qu'on est parfois plus gêné par ses amis que par ses adversaires." (MDM du 11.12.1889). Evidemment, une autre explication possible est qu'Honoré EUZET s'est rendu compte qu'il pouvait travailler avec les socialistes qui, de fait, étaient nettement moins compétents que lui. D'une certaine manière, cette période a probablement constitué un banc d'essai, avant de prendre le pouvoir.
Ce qui apparaît aussi, c'est l'entente - de fait - entre le maire AUSSENAC et EUZET. le premier est amené à soutenir le second contre les autres conseillers socialistes et il est évident que cette entente, cette confiance, prendra tout son poids dans l'élection de 1895. A titre d'exemple, au conseil du 07.06.1889, à propos des employés révoqués qui ont intenté un procès à la ville, EUZET propose la création d'une commission qui examinerait les motifs des révocations et qui leur accorderait des indemnités en conséquence. Suite aux protestations de certains conseillers, il ajoute qu'il "ne conteste pas les droits de l'administration mais une transaction lui paraît préférable à un procès". AUSSENAC est d'accord avec lui, alors que Modeste DURAND, JEANNOT et PLANCHON sont d'un avis contraire. De même, GIBERT s'oppose à la nomination d'une commission car, dit-il : "si vous entrez dans la voie qu'on vous propose et accordez des indemnités aux employés révoqués, vous reconnaîtrez par là que vous avez eu tort en les frappant et l'on dira que vous n'avez pas su ce que vous faisiez (Bravos dans l'auditoire)" Mais, ce qui est à souligner, c'est la réponse d'AUSSENAC : "Le président répond qu'il n'y a pas de mal à reconnaître ses torts, lorsqu'on vous prouve que vous vous êtes trompé". Evidemment, ce type de réaction entraîne de fortes critiques chez certains conseillers et même dans l'auditoire qui traitent le maire de Judas (EC du 10.06.1889). Ainsi, AUSSENAC devient suspect aux socialistes les plus extrémistes, comme le constate le MDM du 19.05.1889 : dans la séance du 17 mai, JEANNOT et PLANCHON critiquent l'administration municipale pour la dépense faite lors de la réception du ministre des travaux publics, Yves GUYOT. Honoré EUZET prend alors la défense du maire et la discussion s'envenime entre les trois conseillers. Le MDM écrit : "M. AUSSENAC reste à peu près impassible mais il est aisé de reconnaître que lui aussi devient suspect à la majorité des socialistes." En réalité, la division se fait entre ceux qui veulent administrer la ville au mieux de ses intérêts et ceux qui en restent à l'idéologie.
Les démissions de conseillers municipaux continuent en cette fin 1889 mais le préfet fait de la résistance : "Si nos renseignements sont exacts, quelques uns des conseillers qui ont vu leur démission refusée, ou plutôt encore non acceptée par M. le préfet, qui ne leur a pas même accusé réception de leur lettre, traduisent des velléités de retourner au conseil municipal. C'est sans doute la bonne harmonie qui y règne qui les attire. Quant à M. AUSSENAC, il verrait avec le plus vif plaisir revenir une à une toutes ses brebis égarées. Le bercail une fois à peu près complet, M. le maire les recommanderait à la garde vigilante de M. Honoré EUZET, son premier pastourel, et tout irait pour le mieux dans le plus profond des déficits jusqu'en 1892 et sans qu'aucune élection complémentaire vienne obscurcir l'horizon municipal." (MDM du 28.12.1889)
Le PM annonce encore plus de démissions dans son numéro du 18.07.1890 : "Ainsi que nous l'avions annoncé, les conseillers démissionnaires, au nombre de 16, ont reçu de M. le préfet un accusé de réception des lettres par lesquelles ils sont résigné leurs fonctions de conseillers de la ville de Cette. Le conseil se trouve par ce fait disloqué et la séance qui devait avoir lieu ce soir, est renvoyée à une date qu'il est impossible de prévoir aujourd'hui, c'est-à-dire qu'elle n'aura lieu qu'après les élections complémentaires. Par suite des démissions inattendues, telles celles de MM. EUZET et MAGISTRE, qui ont été seulement remises mardi dernier ; par suite aussi de la demande faite par la préfecture à M. BAUDOU, domicilié aujourd'hui à Alais, de vouloir bien donner sa démission, M. le préfet devra prendre un nouvel arrêté de convocation."
(à compléter)
Dans le camp radical, la discorde ne trouve pas sa source seulement dans un conflit de personnalités, c'est davantage celui d'un conflit de génération. Pour s'en convaincre, il n'y a que l'embarras du choix en cherchant dans les nombreuses chroniques électorales parues dans le JC. Certaines sont très critiques mais d'autres font appel à la raison entre vieux routiers de la politique, comme cet article signé MAZEL : "Depuis longtemps et tout particulièrement on ne veut plus d'AYMERIC, on ne veut plus d'EUZET ; depuis 1870, ils ont joué assez de rôles : ils ne voient pas que le corps électoral populaire ne veut plus d'eux, qu'ils le fatiguent. Tous les deux d'ailleurs ont peut-être bien quelques mérites, ils sont de plus de nos amis, mais ce n'est pas une raison pour qu'ils se croient indispensables et supposent que les autres n'ont pas de talents." L'auteur de cet article constate ensuite que le PM du même jour aboutit aux mêmes conclusions en demandant des hommes nouveaux et même entièrement nouveaux, n'ayant aucun passé politique compromis. Il conclut en disant : "Depuis vingt ans, les jeunes de 1870-71 sont devenus des hommes : ils veulent s'affirmer sans se mettre dans les souliers des autres, l'avenir leur appartient." (JC du 27.07.1890)
Tous ces éléments poussent le préfet à décider d'élections municipales complémentaires qui concernent 16 puis 15 conseillers municipaux à remplacer. La liste de ces conseillers est donnée par le préfet pour le premier tour de l'élection (le 3 août - le 2ème tour étant prévu le 10 août) : CHAUVET Pierre, FALGUEIRETTES Auguste, VITOU Prosper, BLANCHET Joseph, RICHARD Michel, MARTEL Lucien, GIBERT Louis, SÉNÉGAS Martial, MARTIN François, GINOUVÈS Camille, FABRE Antoine, DURAND Modeste, COLLOT Louis, MAGISTRE Barthélémy et EUZET Honoré. (JC du 20.07.1890)
C'est le 03.08.1890, dans le PM, qu'Honoré EUZET répond vertement aux attaques du comité de la ligue républicaine, opposée aux radicaux : "Au mépris de toutes les règles et les convenances, vous, candidats, vous prenez la liberté de me juger dans un placard signé de vous. Il n'est donc pas inutile de vous rappeler que je me disais républicain par mes actes, alors qu'il y avait danger à agir ainsi. Laissez-moi vous dire que pendant vingt ans j'ai servi mon pays avec le désintéressement le plus complet ; que je n'ai jamais sollicité et ne solliciterai jamais aucun poste rétribué par l'Etat, le département ou la commune. Il n'est pas de gouvernement assez riche pour me payer ma chère indépendance ! J'ai donc le droit de mépriser les injures des hommes qui ne viennent à la République que lorsque tout danger a disparu et qui, comme vous, ne voient dans la politique qu'un moyen de se faire une position. - Honoré EUZET
Evidemment, ces mots sont l'illustration que, plus on approche des élections, plus le climat se crispe. Pour mieux comprendre, il faut alors analyser les forces en présence.
Elections municipales complémentaires (communication de la Ligue Républicaine) : "(...) Ennemis des questions de vie privée, nous nous contenterons momentanément d'esquisser la vie politique du chef de liste du comité radical, de celui qui, par son entêtement à vouloir rester sur les rangs, a causé la scission du parti républicain de notre ville. Nous verrons par là ce qu'a pu faire l'ambition chez cet homme qui n'a cessé pendant 18 ans de parcourir en tous sens le parti républicain, ballotté comme une épave par tous les courants et venant échouer piteusement après tant d'efforts dans une liste composée d'éléments hétérogènes. M. Honoré EUZET a été nommé conseiller municipal dans une élection complémentaire en 1872 sous l'administration MICHEL. Il démissionna quelque temps après, ne pouvant s'entendre avec ses collègues. Comme membre du conseil ESPITALIER, il a été avec le président actuel de son comité, M. AYMERIC, l'un de ceux qui ont le plus contribué à diviser le parti républicain. Il a combattu avec un acharnement inexplicable M. Marius VAREILLE, dont l'honnêteté ne faisait doute pour personne. Elu en 1884 sur la liste de M. PEYRET, M. EUZET est devenu le membre le plus turbulent pour ne pas dire le plus néfaste du conseil. Si M. EUZET a pu considérer ses oppositions incessantes comme des services rendus, il faut croire qu'il n'a pas la notion vraie des mots, ni le sens réel des choses. Les services qu'il faut lui reconnaître ce sont ses fréquentes démissions. M. EUZET a été tour à tour républicain radical contre M. ESPITALIER, républicain socialiste contre M. THOMAS, aux élections du conseil général, républicain opportunistes contre M. VAREILLE, républicain nimportequiste contre M. PEYRET, enfin républicain boulangiste contre M. SALIS aux dernières élections législatives. Que peut-on penser de cet homme en politique ? Il n'y a qu'un mot pour le qualifier : c'est un Caméléon. Après cela, tirez l'échelle et recherchez les vrais radicaux." (JC du 10.08.1890). Cette tribune est signée par CAUSSIGAL, LABRY, GIBERT et RIBES ROCHE).
Elections municipales complémentaires : "Il est absolument impossible de prévoir les surprises que ménage le scrutin d'aujourd'hui. Plus que jamais les haines personnelles qui sont, on peut le dire, le fléau des élections municipales à Cette, se sont manifestées au dernier moment, avec une violence inouïe que rien ne faisait prévoir ces jours-ci. Des affiches, dont quelques unes à la main, sont placardées à toute heure du jour et toutes ne visent que M. AYMERIC et M. EUZET. Une d'entr'elles accuse M. EUZET d'avoir fait de la propagande boulangiste et porte les signatures de MM. BOISSIER et Aimable DIEBOLT. Ce dernier nous adresse à ce sujet la protestation suivante : Je proteste énergiquement contre l'abus que l'on a fait de mon nom, je n'ai jamais autorisé M. BOISSIER à faire afficher une accusation de boulangisme contre M. EUZET, quand il m'a demandé mon acceptation je la lui ai formellement refusée, je trouve donc son procédé absolument déloyal (...). (PM du 11.08.1890)
Elections municipales complémentaires : "On ne connaît pas encore le résultat complet du 2ème tour de scrutin qui a eu lieu hier, les noms des élus ayant été seulement communiqués au public (...) Ce qui ressort le plus clairement de ce vote, c'est l'écrasement du parti radical dans la personne de ses chefs et l'on peut ajouter que le succès relatif des socialistes est dû surtout aux divisions des républicains." Un "poème" adressé aux nouveaux conseillers municipaux résume l'ambiance à ce moment-là :
"L'électeur a voté - place aux nouveaux élus :
Feront-ils leur devoir mieux que les vieux édiles ?
Puissent-ils nous prouver par des travaux utiles
Qu'ils savent protéger nos biens et nos écus.
Moralité :
Quant aux vaincus, aux brouillons Euzettistes
Il était temps d'étouffer ces fumistes.
Signé : "Populus" (JC du 12.08.1890)
Elections municipales complémentaires : "Il est probable que les élections de dimanche dernier seront annulées. On nous assure qu'une partie des bulletins déclarés nuls ou blancs par les procès-verbaux ont été détruits contrairement à la loi au lieu d'être envoyés à la préfecture pour y être contrôlés. Parmi ceux qui n'ont pas été détruits, il en existe qu'il est impossible de déclarer nuls et appartenant à la liste de la Ligue ce qui déplacerait quelques noms pour les élus. On parle aussi de 280 bulletins en plus des émargements constatés. Une protestation signée par plusieurs électeurs a été adressée à M. le préfet (...)" (PM du 14.08.1890). Dans le même numéro, il est dit que le conseil municipal se réunira samedi prochain pour l'installation des 15 nouveaux élus et la nomination des 2ème et 3ème adjoints. Cependant, dans son numéro du 15.08.1890, le PM revient sur le sujet : "Contrairement à ce qui avait été annoncé, l'annulation des élections municipales de dimanche dernier n'a pas été demandée ; la protestation envoyée à la préfecture ne vise que les bulletins déclarés blancs ou nuls par le procès-verbal et qui ont été détruits au lieu d'avoir été envoyés à la préfecture pour y être contrôlés. Les conclusions de la protestation tendent à faire proclamer élus deux candidats de plus de la liste de la Ligue, M. GIBERT et M. ROUX."
Quatre listes sont en présence pour l'élection municipale de mai 1892 : Liste 1 : liste républicaine, dite aussi des groupes républicains réunis. Elle est connotée opportuniste ou opportuno-radicale par le journal EC ; Liste 2 : liste libérale indépendante. Elle est connotée réactionnaire par le journal PM ; Liste 3 : liste de concentration républicaine, avec le maire AUSSENAC. Elle est connotée socialiste par le journal EC ; Liste 4 : liste socialiste indépendante qui apparaît comme dissidente de la liste de concentration républicaine, avec seulement 9 noms alors que les trois autres listes en ont 29 ou 30. Il y a encore un candidat indépendant, BARTHEZ (capitaine au long cours) et un candidat socialiste révolutionnaire, Joseph LACOSTE.
Le LC qui, manifestement, fait la part belle aux libéraux, donne la profession de foi de la liste libérale indépendante. Celle-ci se refuse à présenter un programme mais indique qu'elle est un rassemblement d'hommes qui mettent leur intelligence et leur dévouement à la défense des intérêts matériels et moraux de la ville de Sète. La particularité est, certainement, le refus d'un positionnement politique : "Quant à la politique, elle sera mise absolument de côté. La politique engendre la désunion et la discorde. Une ville commerçante comme la nôtre n'a pas besoin de politiciens. Il lui faut des hommes d'affaires, choisis parmi les plus honorables, sans distinction de partis et capables de bien gérer nos affaires (...) Cette a fait la triste expérience des politiciens, elle doit aujourd'hui appeler à la diriger des hommes nouveaux, indépendants, intègres et désintéressés." (LC du 24.04.1892)
A la même date, La LRM fait paraître la communication du parti ouvrier socialiste (concentration socialiste) : "Chers concitoyens, Vous êtes appelés à élire, le 1er mai, vos conseillers municipaux. Nous recherchons l'honneur de vous représenter. Citoyens, Nous sommes très connus de vous comme d'anciens et dévoués serviteurs de la démocratie, aussi est-ce avec confiance que nous nous présentons à vos libres suffrages. Nous voulons l'union de tous les républicains d'avant-garde, de ceux qui réclament le développement progressif et régulier des institutions républicaines et des réformes sociales qui s'imposent pour l'amélioration du sort des classes laborieuses (...) La lutte qui s'engage n'est que le prélude de batailles plus importantes et plus décisives, mais il apparaîtra au moins claivoyant que les candidats du parti ouvrier socialiste, maîtres de la mairie, pourront, dès les prochaines luttes politiques, agir avec plus de force et de cohésion pour le triomphe de la vraie république. C'est pourquoi, nous le déclarons franchement, nous voulons nous emparer de cette citadelle. Ceci dit, Citoyens, nous estimons que les questions ouvrières devront être étudiées par nous avec le plus grand soin et le plus grand dévouement. Nous favoriserons la création de Syndicats professionnels, des Sociétés de secours mutuels et de caisses de retraite pour les ouvriers. Les questions qui intéressent notre port et notre commerce doivent être pour vos élus l'objet d'études incessantes. Contribuer au perfectionnement de l'outillage de notre port, au au développement de notre commerce, n'est-ce-pas préparer le bien-être qui doit résulter pour l'ouvrier d'un travail régulier et rémunérateur ? Nous réclamerons et et favoriserons la création d'une cale de radoub. Nous demanderons la suppression des tarifs différentiels qui font au port de Bordeaux une situation privilégiée et ont porté un coup fatal au commerce des grains, si florissant naguère. (...) Enfin, nous ferons tous nos efforts pour appeler à Cette, par tous les moyens, les établissements industriels (...) Nous créerons l'enseignement primaire supérieur, un collège de jeunes filles. Nous nous engageons à maintenir l'Ecole de musique, en y apportant d'importantes améliorations. Nous maintiendrons la surveillance du jeudi, établie malgré l'opposition d'une minorité rétrograde (...) Nous faciliterons aux sujets d'élite l'entrée dans les lycées, les collèges et les écoles spéciales (...) Des crèches seront créées pour l'enfance ouvrière (...) Nous nous efforcerons de doter notre ville, sans imposer de nouvelles charges aux contribuables, d'un théâtre, d'une Bourse du Travail, d'une Bourse du Commerce, d'un abattoir et d'un lavoir public et gratuit (...) En un mot, nous nous engageons à défendre d'une manière énergique le programme élaboré au congrès de Lyon qui est celui du parti socialiste. Suit la liste des candidats, par ordre alphabétique (LRM du 21.04.1892)
Les résultats, à l'issue du premier tour sont les suivants, selon le PM du 03.05.1892 :
- Liste 1 : AUQUIER 2728, BROUILLONNET 2700, BARBUT 2162, CRÉMIEUX 2466, DEFARGE 2687, DELGAR 2499, ENCONTRE 2491, ENGEL 2784, ESTEVE 2782, FABRE 2496, FERRIER 2618, FIGUIER 2665, GELY 2603, GOUDARD 2613, ICARD 2699, ISSANJOU 2626, JULIEN 2669, MARQUÈS 2509, NOELL 2834, PARPIEL 2604, PEYRE 2560, PEYRUSSE 2487, REMÈGE 2611, RIBES 2783, RIEUNAUD 2596, ROCHE 2807, ROQUE 2325, SCHEYDT 2838, VIEU 2628, VILBAR 2429.
- Liste 2 : AMADOU 1314, BAILLE 1318, BEAULIEU 1233, BOISSIERE 1191, BONNIEU 1242, CAFFAREL 1471, CANTAN 1218, CASTANIER 1218, CLAVERIE 1260, CONGEFIAT 1367, COTTALORDA 1291, COURTES 1381, DOUMET 1401, EUZET Henri 1317, FIGARET 1351, GAUTHIER 1431, GASSMANN 1317, GINTRAND 1198, GLEIZES 1300, GOUDARD 1272, JULLIAN-RÉCOULY 1194, LEMASSON 1248, NOZIÈRE 1211, PAÈS 1273, PALMADE J.B. 1224, PIOCH-AUZUECH 1235, REBOUL 1266, ROUBIÈRE 1197, VERGNES 1227.
- Liste 3 : AUSSENAC 1996, ALBERT 1809, ANDRÉ 1850, AUBÈS 1993, BARRAUDON 1793, BOISSIER 1853, BOUDET 1826, BOYER 1850, BRUNIQUEL 1852, CARTIER 1850, CAYROL 1918, CHANOINE 1863, COMBES 1829, DIDIER 1855, Honoré EUZET 1843, GIRARD 1817, GUIN 1836, JEANNOT 1800, LEQUES 1845, MADIERE 2831 (probablement 1831), MANDAVIALLE 1898, MGRAVAL (probablement MAGRAVAL) 1839, MOLLE 1847, PELLETIER 1882, PLANCHON 1832, ROUSTAN 1868, THOMAS 1825, VALETTE 1825, VAREILLE 1773.
- Liste 4 : GAZALOT 99, BASTIDE 100, BOUDET 127, ESPIE 109, ISOIRD 110, PRADAL 99, SÉNÉGAS 137, BARTHEZ (candidat républicain indépendant) 182, LACOSTE (socialiste révolutionnaire) 70.
Les résultats, à l'issue du second tour sont les suivants :
"La liste opportuno-radicale a obtenu une moyenne de 2600 voix, la liste socialiste une moyenne de 1850 voix et la liste libérale une moyenne de 1820 voix., pour 10.209 inscrits et 6.029 votants (EC du 03.05.1892)
(à compléter)
"Le conseil municipal se réunira dimanche prochain (le 15.05.1892) à dix heures du matin pour nommer le maire et trois adjoints. M. AUSSENAC ayant refusé d'expédier les affaires courantes jusqu'à dimanche, M. le préfet en a chargé M. BOURREL, adjoint, qui présidera à la nomination du maire. (PM du 12.05.1892)
Il écrit au SC une lettre publiée dans le JC, qui montre, notamment, son implication dans les réflexions locales menées par le parti socialiste local : "Monsieur le Directeur, Je constate avec regret que malgré mes dénégations énergiques et répétées, on persiste à m'attribuer certaines attaques dirigées, dans le Socialisme Cettois contre diverses personnes : deux d'entre elles, des adversaires politiques, peut-être, mais sûrement deux amis personnels, sont venues aujourd'hui même à ma grande stupéfaction m'apporter leurs plaintes. Tout cela est fort ennuyeux. Pour en finir, je déclare qu'à partir de ce jour, je cesse de collaborer au journal le Socialisme Cettois. Je me ferai un devoir et un plaisir d'offrir de nouveau ma collaboration quand le journal se bornera à traiter des questions sociales, politiques et celles d'administration municipale. C'est avec le plus vif regret que je prends cette détermination et mes amis peuvent être assurés que je serai heureux, lorsque ce journal aura l'allure que je désire lui voir prendre dans l'intérêt de notre cause, de continuer sous ma signature, la publication de mes articles d'études sociales et de commencer ainsi que je l'avais promis la publication que j'ai cru devoir ajourner jusqu'ici d'une série d'articles de critique rationnelle des actes de notre municipalité. Bien à vous. Honoré EUZET" (JC du 14.09.1892)
Ici, pour mieux comprendre les rôles respectifs des protagonistes, il faut citer des extraits de la thèse de Claude WILLARD sur les Guesdistes, lequel souligne que SALIS, réélu député, récompense de leur appui quelques collectivistes. D'abord, p. 640, en ce qui concerne François PLANCHON : "Né à Cette, le 23 février 1850, fils d'un plâtrier. Plâtrier lui-même, puis cabaretier. Fondateur et dirigeant du premier groupe collectiviste de Cette (1886). Elu conseiller municipal en 1888, non réélu en 1892. Délégué au Congrès national de Marseille (1892). Contribue à la réélection du député radical-socialiste SALIS (2e Montpellier) qui, semble-t-il le récompense en lui procurant un emploi à Paris. Il appartient un moment au groupe socialiste cettois de Paris, puis se retire de toute activité militante. Décédé à Cette le 25 juin 1925." On lit encore, p. 296 (note 6) : "PLANCHON, créateur du premier groupe cettois, en 1886, semble, en dépit d'un démenti de sa part, avoir obtenu, grâce à SALIS, un emploi lucratif à Paris (Le Socialiste Cettois, 25 novembre 1893, p. 3)." C'est, ensuite, le cas de "l'ancien maire AUSSENAC, candidat en 1893 dans la première circonscription de Nîmes, (qui) obtient une recette buraliste (Le Socialiste Cettois, 18 novembre 1893, p. 3) ; il disparaît, alors, de la vie politique militante." (p. 296, note 6)
Dans la même page 296 de sa thèse, Claude WILLARD explique le contexte : "Dans plusieurs circonscriptions, les collectivistes s'effacent, dès le premier tour, devant les radicaux. L'exemple est donné en 1893, par les socialistes de Cette : au congrès électoral le 30 juillet, ils acclament la candidature du radical SALIS socialiste sincère, honnête et profondément dévoué au prolétariat (Le Socialiste cettois, 5 août 1893, p. 3)". Il est délégué au congrès national de Paris et est revendiqué comme député collectiviste (le Socialiste du 26.08.1893). De même, les socialistes "annexent les voix de TÉDÉNAT (Béziers) et THÉRON (Carcassonne)". On voit donc que l'évolution d'EUZET doit aussi se comprendre dans ce mouvement d'ensemble.
En effet, dès le 22.08.1894, le PM annonce la démission des 8 conseillers municipaux socialistes qui viennent d'être élus. Chacun d'eux envoie sa lettre de démission au préfet, à peu près dans les mêmes termes. Le PM publie celle d' Honoré EUZET : "Monsieur le préfet, J'ai l'honneur de vous remettre ma démission de conseiller municipal. Elu sur la liste socialiste de protestation municipale, je ne saurais siéger auprès de ceux que le suffrage universel a si justement condamnés. Veuillez agréer, etc. Honoré EUZET". On comprend mieux, alors, pourquoi, dès que les résultats des élections avaient été proclamés, des cris de Démission ! et de Vive la République sociale ! avaient fusés dans la salle des mariages où avait lieu le recensement général. EC avait noté que ces cris provenaient d'électeurs du parti socialiste. Des explications sont encore données dans le numéro du PM du 24.08.1894 : "Ce n'était pas pour siéger que les huit conseillers s'étaient présentés aux électeurs, car ce petit groupe n'aurait rien changé aux décisions du conseil ; mais bien pour faire prononcer les électeurs sur la conduite des membres de la majorité qui n'était pas conforme à leur programme ni au mandat dont on les avait chargés - Un républicain impartial" Ces explications sont encore reprises dans la proclamation des huit élus socialistes (dont Honoré EUZET), dans le PM du 25.08.1894.
Il est élu maire pour la première fois
"Elections municipales complémentaires - Le deuxième tour de scrutin (en fait, le premier tour) qui aura lieu aujourd'hui ne s'annonce pas devant être très animé. Le parti au pouvoir n'a pas encore présenté de liste. Voici la composition de la liste socialiste : Honoré EUZET, Elie VAREILLE, CAYROL, BRUNIQUEL, JULIAN, CAUCANAS, GUIGUES, LEJARD, MOLLE." (EC du 27.01.1895). Le journal a rectifié le lendemain, en donnant les résultats du premier tour de scrutin : "Le premier tour qui a eu lieu hier n'a donné aucun résultat. Il y a eu 117 votes qui se sont portés sur divers noms plus ou moins fantaisistes. C'est pour le deuxième tour de scrutin que les socialistes présenteront la liste que nous avons publiée hier." (EC du 28.01.1895)
Les résultats du second tour de scrutin sont donnés dans EC du 04.02.1895. Pour 9441 inscrits,, il n'y a eu que 1939 votants. Tous les candidats de la liste socialiste sont élus : Alphonse JULIAN, 1881 ; Etienne GUIGUES, 1874 ; Onésime BRUNIQUEL, 1873 ; François CAUCANAS, 1871 ; Antoine CAYROL, 1870, Emile MOLLE, 1870 ; Elie VAREILLE, 1870, Armand LÉJARD, 1867 ; Honoré EUZET, 1866 ; plus, 20 blancs, 30 nuls et 32 divers. On peut noter que le plus mal élu est Honoré EUZET, ce qui ne manque pas de surprendre, compte tenu de la suite, dans cette même année
1895.
Cet épisode se termine par une autre démission, celle du conseiller PEYRE, de la majorité. Dans une longue lettre adressée au maire de Sète (EC du 06.02.1895), il rappelle qu'il a plusieurs fois attiré l'attention sur cette élection en estimant que la mairie ne devait pas rester neutre, compte tenu de son caractère lié aux démissions des minoritaires ("pouvaient-on, en effet, méconnaître ou feindre d'ignorer dans quelles conditions se présentaient ces élections complémentaires ?"). Ces appels n'ont pas été entendus et la majorité a été désavouée. Il a, pourtant, rappelé "cette campagne de mensonges, de calomnies, d'insultes des plus grossières qu'une certaine presse que je ne qualifierai pas, sous le voile de l'anomymat, dirigeait contre nous, depuis notre arrivée aux affaires" et qui, selon lui, devait recevoir la réponse qui s'imposait du corp électoral. Le contraire s'étant produit, il donne sa démission. De fait, la situation revient à celle de 1894, avant les démissions des minoritaires, à cette différence près que le parti socialiste se trouve conforté par le suffrage universel.
Les socialistes et les syndicats se réunissent, fin août, pour savoir s'ils doivent prendre part au vote du 1er septembre pour la constitution d'un nouveau conseil municipal. Des opinions différentes s'expriment. POUJOL et AUDOYE estiment que le moment n'est pas opportun, le temps à courir jusqu'au renouvellement (en 1896) étant insuffisant pour mener à bien les réformes projetées. SALIS puis PERIER proposent la nomination d'une commission mais SALIS croit qu'il faudrait éviter la lutte. "Le citoyen EUZET, invité par le citoyen LEBLANC à s'expliquer croit que le parti socialiste doit, en l'état, rester tranquille et ne pas servir de bouche-trou. Il dit qu'il existe actuellement un déficit considérable évalué à 6 ou 700.000 francs et qu'il y a ensuite une foule de créanciers qu'on ne pourra pas payer, attendu qu'on n'aura pas le temps pendant ce court espace qui nous sépare des élections générales et qu'on n'aura pas non plus l'autorité nécessaire pour diriger les affaires de la ville. Il termine en disant qu'il ne faut pas voter, car ce serait tomber dans le piège qui est tendu au parti socialiste.". Après d'autres interventions, le président met aux voix pour savoir s'il faut prendre part au scrutin ; à main levée, la réponse est négative et il est convenu de se réserver pour le mois de mai 1896 (PM du 25.08.1895).
Résultats du 1er tour de scrutin de l'élection municipale : "Aucune liste de candidats ne s'étant présentée pour le renouvellement de notre conseil municipal démissionnaire, le résultat du premier tour de scrutin est négatif. Quelques votes se sont égarés sur des noms divers." (EC du 02.09.1895)
"Nous apprenons aujourd'hui que, pour le deuxième tour de scrutin, les socialistes sont dans l'intention de présenter une liste de cinq candidats seulement. Ces candidats auraient pour mission de gérer les affaires de la ville jusqu'aux élections générales qui auront lieu au mois de mai prochain, afin qu'elles ne soient pas gérées par des étrangers. Si M. le préfet n'accepte pas cette combinaison, les cinq candidats donneront leur démission et nous continuerions à être administrés jusqu'au mois de mai par la délégation nommée par le préfet." (EC du 03.09.1895)
EC donne la liste des 30 candidats présentés par le comité socialiste ; voir ci-après, quelques variations dans la graphie de certains noms qui sont dans la liste indiquée par le PM. (EC du 07.09.1895)
Résultats du 2ème tour de scrutin de l'élection municipale, le 9 septembre. Candidats du "Comité central de tous les groupes corporatifs socialistes de la ville de Cette", sont élus (noms, prénoms, professions, nombre de voix) : "AUDOYE, tonnelier, 1623 ; BRUNIQUEL Onésime, boucher, 1650 ; BARRAL Louis, contre-maître, 1621 ; BOYER Achille, 2140 ; CAYROL Antoine, négociant, 2145 ; COMBES Victor, président de la chambre syndicale des boulangers, 2122 ; CAUSSE, employé de commerce (le chiffre des voix n'est pas indiqué) ; DAVID François, président de la chambre syndicale des pêcheurs de la Courantille, 2146 ; EUZET Honoré, courtier en grains, 1632 ; GAUSSEL François, fabricant de futailles, 1615 ; GIRARD François Balth., employé de commerce, 1643 (son nom est écrit GIFFARD dans la liste de l'EC) ; JULLIAN, vétérinaire, 2112 (son nom est écrit JULIAN dans la liste de l'EC) ; GRANIER Albert, employé de commerce, 1640 ; LEJARD, secrétaire du syndicat des employés du chemin de fer, 213 (le chiffre des voix est tronqué - son nom est écrit LEJART dans la liste de l'EC) ; LAMOUROUX, comptable, 1624 ; LEQUES Antoine, tonnelier, 1624 ; MADIÈRE Charles, 1627 ; MANDAVIALLE, prud'homme, soutireur, 1637 (son nom est écrit MANDAVIALE dans la liste de l'EC) ; MARAVAL, tonnelier, 1630 ; MOLLE Emile, pêcheur, 2123 ; MOURAILLE, employé au PLM, 1610 (son nom est écrit MOURAILLES dans la liste de l'EC) ; MOLINIER, serrurier, 1623 ; PELLETIER, architecte, 1637 ; JEANNOT Gustave, jardinier, 1632 ; ROUSTAN Jean, tonnelier, 2144 ; SALIS, dépositaire de journaux, 2133 ; SANSONNET Alexis, président de la fédération des chambres syndicales, 1627 ; ROSSIGNOL Marius, négociant, 1641 ; VALLAT Pierre, tonnelier, 1610 ; VAREILLES Elie, comptable, 2143 (son nom est écrit VAREILLE dans la liste de l'EC)." (PM du 09.09.1895)
L'EC donne aussi les résultats de l'élection ; celles-ci, écrit-il "ont eu lieu sans animation ni enthousiasme, et cela se conçoit, la lutte étant circonscrite entre les socialistes qui, se voyant sans adversaires, se sont divisés sur le choix de quelques noms. Deux listes étaient en présence : celle de M. EUZET, qui a déjà rempli les fonctions d'adjoint dans une précédente administration, et celle du docteur PEYRUSSAN, récemment nommé conseiller d'arrondissement. Voici les résultats : inscrits, 9663 ; votants, 2380. La liste EUZET (comité central) est élue entièrement, MM. CAYROL et DAVID en tête de liste, par 2146 voix. M. PEYRUSSAN est arrivé en tête de la liste du prolétariat avec 587 voix." (EC du 09.09.1895)
Les détails des résultats de la liste menée par le docteur PEYRUSSAN (Liste socialiste militante du parti ouvrier) sont les suivants : "PEYRUSSAN Paul, docteur en médecine, conseiller d'arrondissement, 587 ; GUIGUES Etienne, employé du Midi, président du syndicat des chemins de fer, 551 ; FABRE Germain, propriétaire, 531 ; SÉNÉGAS Martial, ex-adjoint au maire, 524 ; DOMINIQUE Pierre, limonadier, 504 ; BARTHEZ Victorin, capitaine au long cours, 529 ; COUDERC J., directeur de l'école des Beaux-Arts, 521 ; VALETTE F., Vice-président du syndicat des pêcheurs, 531 ; PRADEL Adolphe, boucher, 522 ; MALATERRE J., trésorier du syndicat des menuisiers, 530 ; LABAIL Jules, propriétaire de tramways, 490 ; GUYARD Jean, officier retraité, 525 ; VAILLARD Ph., président des prud'hommes, 534 ; ISOIRD J., président des pêcheurs de l'étang de Thau, 528 ; ROBERT, patron coiffeur, 513 ; LOUBET René, employé de commerce, 528 ; AZÉMA Simon, plâtrier, 527 ; BONAMI Ch., président du syndicat des tailleurs, 518 ; CASTEL, appareilleur de maçonnerie, 524 ; RICARD, employé de commerce, 512." (EC du 10.09.1895)
L'installation de la nouvelle municipalité se fait le 14 septembre. Le président de la délégation spéciale ouvre la séance et donne les résultats de l'élection devant les 30 conseillers municipaux. Le doyen d'âge, LAMOUROUX, prend ensuite la présidence et demande la nomination d'un secrétaire provisoire et de deux assesseurs. C'est ensuite l'élection du maire. Sur les 30 votants, Honoré EUZET est élu par 28 voix (2 bulletins blancs). Celui-ci s'installe alors dans le fauteuil de la présidence. Le public et le conseil applaudissent. C'est ensuite l'élection des deux adjoints. BRUNIQUEL est élu 1er adjoint par 27 voix (3 bulletins blancs) et JEANNOT est élu 2ème adjoint par 24 voix (5 bulletins blancs et 1 voix pour MOLINIER). Ce compte rendu détaillé est donné par le PM du 15.09.1895 qui ajoute les élément d'ambiance : "La façade de la mairie est brillament illuminée. L'Harmonie et l'Espoir ont donné une sérénade à la nouvelle administration. L'enthousiasme de la population est indescriptible." C'est, pour Honoré, le couronnement de la marche vers le pouvoir, lui qui fut conseiller municipal pour la première fois en 1872.
Discours d'Honoré EUZET, au conseil municipal : "Messieurs, Au nom de mes honorables collègues de l'administration, je vous offre de chaleureux remerciements pour l'honneur que vous nous faites en nous désignant pour présider à vos travaux ; ce témoignage de votre confiance et de votre sympathie nous touche jusqu'au fond du coeur, je vous exprime notre reconnaissance. Il est superflu de vous dire que nous mettrons à votre disposition toutes nos forces et toute notre bonne volonté. Nous vous demanderons de nous accorder, en échange, votre concours dévoué. Nous comptons surtout sur votre esprit de conciliation afin de conserver parmi nous une union utile, indispensable. Je n'exposerai pas de programme, je vous donnerai seulement un conseil qui est celui-ci : négliger, abandonner momentanément les discussions politiques pour nous consacrer entièrement à l'expédition des affaires. Vous trouverez sur ce dernier terrain à employer toute votre activité. Nous avons, en effet, à dresser le budget pour 1896 et un budget honnête, sincère ; nous avons, d'un autre côté et surtout à liquider la situation financière de la commune, c'est-à-dire dresser le bilan et créer de nouvelles ressources, afin de payer les nombreux créanciers de la commune et sortir notre cité de la position humiliante où elle se trouve. Telle est la tâche que vous avez à accomplir. Je vous ai demandé votre concours et offert tout notre dévouement, mais nous serions impuissants si nous ne pouvions compter sur l'appui bienveillant du pouvoir central. Cet appui, M. le Préfet ne le refusera pas, nous l'espérons, à des hommes de bonne volonté qui, tout en se réclamant avec énergie des idées sociales les plus larges et les plus hardies n'en poursuivent le triomphe que par les moyens honnêtes et légaux. Vive la République démocratique et sociale ! Avant de lever la séance, je tiens à remercier ces Messieurs de la délégation spéciale du tact et de l'esprit large et conciliant qu'ils ont apporté dans l'exercice de leur mission. La population tout entière gardera de leur séjour à Cette le meilleur souvenir et les saluer à leur départ avec sympathie et respect." (PM du 16.09.1895)
Discours d'Honoré EUZET, sur le balcon de l'Hôtel-de-Ville : "Mes chers concitoyens, Au nom de la municipalité et du conseil municipal, je vous remercie de la chaleureuse sympathie que vous voulez bien nous témoigner. Nous trouverons dans vos encouragements la force nécessaire pour accomplir la tâche difficile qui nous est confiée. Nous gérerons les affaires de la commune avec fidélité et honneur. Nous nous efforcerons, en un mot, de bien faire, afin de provoquer, quand nous quitterons la mairie, autant de regrets que nous recueillons aujourd'hui de marques d'estime et d'amitié. Encore une fois merci et Vive la République démocratique et sociale !" (PM du 16.09.1895)
De son côté, l'autre liste adresse une lettre de remerciements à ses électeurs : "Les candidats de la liste militante du Parti ouvrier viennent remercier, par la voie de la presse, les nombreux électeurs qui ont bien voulu nous honorer de leurs suffrages ; nous leur adressons nos plus sincères remerciements au nom de la République démocratique et sociale. Donc, merci à tous les électeurs cettois ! - Pour les candidats, GUIGUE." (PM du 15.09.1895)
La principale préoccupation du nouveau maire est d'assainir les finances de la ville. Dans la séance du conseil municipal du 5 octobre, il "propose de nommer une commission spéciale chargée de rédiger un manifeste exposant la situation financière vraie, lequel sera adressé à la population, afin qu'on ne fasse pas retomber sur l'administration actuelle le gâchis laissé par ses prédécesseurs." (EC du 07.10.1895). Un peu plus tard, avec ses deux adjoints, il rend visite au préfet pour lui exposer la situation financière de la ville. "M. le préfet, après l'exposé de M. le maire, a promis son concours pour le projet d'emprunt dont il a reconnu l'urgence." (EC du 15.10.1895)
Le PM du 23.12.1895, dans un article intitulé Emprunt et imposition extraordinaire, reprend l'exposé des motifs sur le projet financier de la municipalité : "La ville de Cette sollicite l'autorisation 1/ d'emprunter à un taux d'intét n'excédant pas 3,80 % une somme de 640.200 francs remboursable en 25 ans, et destinée, tant à combler le déficit budgétaire qu'à acquitter une subvention promise, en vue de l'établissement d'une station zoologique à Cette 2/ de s'imposer extraordinairement la même période de temps, 7 centimes 97/100 additionnels pour rembourser l'emprunt. Le déficit auquel il s'agit de pourvoir s'élève à 575.176 francs. Le budget primitif de l'exercice courant a été réglé en équilibre, mais par suite de la crise commerciale que traverse la ville, diverses recettes, notamment le produit de l'octroi et de l'entrepôt des douanes, donneront une moins-value que l'on peut, dès maintenant, fixer à 106.640 francs, en tenant compte des crédits à annuler faute d'emploi, et de plus-values sur quelques autres recettes. Les opérations du budget primitif, présenteront en réalité un déficit de 72.925 francs qui vient s'ajouter à celui de 502.261 francs accusé par le budget supplémentaire. Ce dernier déficit provient surtout des dépenses ordinaires, qui devraient en principe, être acquittées au moyen de ressources normales de la caisse municipale, mais à raison de son chiffre élevé, on ne saurait demander en une seule année, aux contribuables, la somme nécessaire pour y faire face. Il est d'ailleurs formé par des déficits accumulés depuis 1890. Dans ces conditions, il est urgent d'assurer le paiement des dettes arriérées et le recours à l'emprunt paraît nécessaire. La ville s'est engagée en 1893 à fournir une subvention de 75.000 francs, en vue de la création à Cette, d'une station zoologique, il importe de mettre la municipalité en mesure de faire face à cette dépense (...)"
Le conseil municipal, dans sa séance du 31.03.1896, vote un projet d'emprunt de 75.000 francs destiné à l'érection d'un nouveau bâtiment pour la station zoologique de Sète. La préfecture donne son accord, alors qu'elle l'avait refusé quand le conseil municipal l'avait voté une première fois dans la séance du 07.03.1893, sous l'administration du docteur SCHEYDT. (p. 17 du livre de Louis CALVET sur La station zoologique de Cette, paru en 1905) C'est, certainement, grâce à sa connaissance des procédures administratives et des gens en place qu'EUZET a pu faire accepter cet emprunt par l'autorité de tutelle. C'est tout un réseau d'influences que le professeur SABATIER (correspondant de l'Institut, Doyen de la Faculté des Sciences de Montpellier, Directeur-Fondateur de la Station zoologique de Sète) a rappelé dans son discours, lors du 25ème anniversaire de la création de la Station, le 23.05.1904 : "MM. LISBONNE et LAISSAC, comme présidents ; MM. SCHEYDT, EUZET, comme membres du Conseil général ; M. ROUVIER, comme membre de ce Conseil et rapporteur du budget, ont été de précieux amis de la Station." (p. 89 du livre de Louis CALVET sur La station zoologique de Cette)
Paris, le 3 mai : dans toutes les communes de France, il y a des élections pour le renouvellement intégral des conseils municipaux (les fois précédentes, c'était : le 04.05.1884, le 06.05.1888 et le 08.05.1892 (chronique électorale du PM, le 04.05.1896)
Juste avant les élections municipales L'Eclair se moque des socialistes : "Ne nous plaignons pas, car si nous avons des élections exclusivement socialistes, nous avons aussi des élections joviales. D'abord, on nous présente une liste composée d'un candidat unique qui nous est recommandé par le comité d'érection du kiosque de l'avenue de la gare ; puis une liste complète d'opposition comprenant comme chefs de file MM. le docteur PEYRUSSAN et RENAUD, ancien chef de gare. Avec eux, au moins, le corps électoral est sûr d'être à l'abri des dévoiements et des déraillements ! Les socialistes composant cette liste sont les adversaires de l'administration municipale actuelle et ne le cachent pas dans leur manifeste où ils appellent M. EUZET, maire : un homme néfaste qui rappelle (sic) les plus mauvais jours de l'Empire ! Enfin, il y a la liste officielle de la mairie, qui comprend avec M. EUZET et les adjoints tous les conseillers municipaux sortants. C'est pour cette liste que devront voter les douaniers, les employés d'octroi et toute l'armée, si nombreuse aujourd'hui, des employés communaux. Dans la coulisse, les radicaux, les opportunistes, les ralliés et ceux qui ne le sont pas, assisteront à cette lutte épique à laquelle vont participer 2000 à 2500 électeurs sur les 9000 inscrits à l'Hôtel-de-Ville !" (EC du 03.05.1896)
A Sète, "la liste EUZET, maire, et les conseillers sortants est élue par 3000 voix" (PM du 04.05.1896). Le jour suivant, des précisions sont données : la liste du Comité central socialiste, dite liste EUZET, est élue par 3600 voix. Honoré EUZET, maire sortant a 3727 voix, Onésime BRUNIQUEL, adjoint sortant, a 3720 voix, Gustave JEANNOT, adjoint sortant, a 3624 voix, cependant que Louis AUDOYE a 3676 voix et Pierre VALLAT 3655 voix ; la tête de liste de l'autre liste dite d'Union du parti ouvrier socialiste cettois, le docteur PEYRUSSAN, a 840 voix (PM du 05.05.1896)
Au conseil municipal suivant, EUZET est élu avec 26 voix, BRUNIQUEL (premier adjoint) avec 24 voix) et CAYROL (2ème adjoint) avec 24 voix. Le maire développe son programme politique puis remercie la foule sur le balcon de la mairie ; la façade est illuminée, les trois sociétés musicales exécutent des morceaux, le public applaudit (PM du 16.05.1896).
Le PM reprend la discours-programme d'Honoré EUZET : "Nous vous promettons de rester tels que nous nous sommes montrés durant les huit mois de notre première gestion : des socialistes, ardents et énergiques, des administrateurs laborieux et honnêtes (...) Un nouvel abattoir et un marché à bestiaux nous paraissent indispensables. Nous pensons aussi que la ville de Cette doit être dotée d'un théâtre digne d'elle. Des plans et devis ont déjà été dressés ; ils nous paraissent acceptables ; nous les étudierons et nous serons en mesure de les soumettre d'ici à trois mois à votre approbation, ainsi que les moyens d'exécution. Nous joindrons à ces deux importants projets celui qui a trait à l'appropriation de nos rues. Un projet de création de Bourse du travail vous sera soumis aussi ; 13.000 francs affectés à cette création sont déjà disponibles. Nous ferons de l'ancien abattoir, l'entrepôt réel des douanes, afin d'économiser 12.000 francs de loyer et 4000 francs de surveillance douanière. Enfin, nous vous réclamerons le vote d'une somme que nous ne pouvons déterminer encore, afin de subvenir aux frais d'étude du projet d'adduction des eaux de l'Hérault (...) Nous ne pouvons vous cacher que nous prévoyons de très nombreuses difficultés à surmonter (...) Nous souhaitons que vous soyez bien pénétrés de cette idée qu'il serait imprudent de lier ce projet à ceux purement locaux qui ne doivent point provoquer l'intervention de nos voisins et dont l'exécution est relativement facile. Si dans votre ardeur, vous vouliez tout entreprendre, vous vous condamneriez à l'impuissance (...) Il faut dire, au contraire, avec le personnage de Beaumarchais, que la difficulté de réussir ne fait qu'ajouter à la nécessité d'entreprendre (...) Dans le domaine politique (...) nous défendrons, en toute circonstance, les principes socialistes avec toute notre énergie. Mais nous refuserons de servir les rancunes, les haines et les appétits (...). Enfin, s'il est vrai, messieurs, qu'un conseil municipal doit surtout traiter les affaires locales et être apte à les résoudre, il faut aussi qu'il soit, en restant dans les limites de la loi, une assemblée politique. C'est aux conseils municipaux qu'il appartient de montrer, par une application forcément restreinte, mais utile, le sens pratique des idées socialistes ; nous avons le droit, en effet, d'introduire, dans nos traités avec les entrepreneurs de la commune, toutes les clauses qui proscrivent l'exploitation humaine, qui sauvegardent les droits des travailleurs et diminuent, limitent les heures de labeur. Nous avons le droit de favoriser le développement des syndicats. En un mot, nous ne faillirons à aucun de nos devoirs et de "Cettois" et de "Socialistes" (...)" Suit un discours sur le balcon de la mairie : " (...) Notre ambition est que vous puissiez dire de nous, quand nous quitterons la mairie, ils furent désinteressés et honnêtes. (...)" (PM du 17.05.1896)
"Mardi soir a eu lieu au Café de la Nouvelle France le punch offert par le groupe collectiviste (Parti Ouvrier Français), aux nouveaux conseillers élus (...) Le citoyen VALLAT a souhaité la bienvenue aux conseil socialiste et l'a félicité de son succès (...) M. EUZETa remercié le groupe de son aimable invitation (...) et a montré quelle était la tâche du nouveau conseil (...) Les citoyens ROUSTAN et AUDOYE ont aussi pris la parole (...) Des toasts ont été portés au rétablissement de la santé de Jules GUESDE." (PM du 21.05.1896)
Les tramways électriques : "La commission spéciale nommée par le conseil municipal dans sa dernière séance pour examiner cette question a nommé dans sa première réunion son bureau." MOURAILLE en est le vice président (le maire étant président de toutes les commissions), PELLETIER en est le secrétaire (PM du 29.05.1896). Puis, en octobre, le choix de la commission s'arrête sur trois compagnies dont les propositions sont basées sur le fil aérien (PM du 13.10.1896). Puis, en novembre, le conseil municipal est convoqué, en séance officieuse pour entendre le rapport de la commission, les trois concurrents et les ingénieurs qui sont allés prendre des renseignements à Montpellier (PM du 11.12.1896).
Le 08.06.1896, L'Eclair reprend le texte d'une lettre du maire, Honoré EUZET, à la compagnie du Midi. En fait, il avait déjà écrit le 26 mai et une réponse de la compagnie lui avait été faite. C'est la réponse à celle-ci qui est reprise dans le journal : "M. le directeur de la Compagnie des chemins de fer du MIdi, Paris. Par votre lettre du 3 juin, laquelle répond à celle que j'avais eu l'honneur de vous adresser le 26 mai, à propos de la non inscription de la ville de Cette au nombre des stations balnéaires pour lesquelles il est délivré des billets d'aller et retour (individuels et de famille), vous voulez bien me donner des raisons qui, selon votre administration, justifient cette sorte d'interdit dont notre ville est injustement frappée. Vous alléguez, en effet, que l'examen de la question vous a amenés à reconnaître que des billets d'aller et retour de 25 ou 33 jours, délivrés pour la destination de Cette, seraient utilisés couramment au lieu et place des billets ordinaires, par des voyageurs se rendant pour leurs affaires ou leurs plaisirs dans la région sud du réseau de la compagnie de Lyon. Vous ajoutez que la perte qui résulterait de votre Compagnie, du fait de ces agissements, a été évaluée à 200.000 francs par an. (...) J'ai le regret de vous dire que les raisons invoquées par vous ne me paraissent point justifier la mesure de rigueur prise contre Cette. J'ajoute, et je vous demande la permission d'affirmer, que les précautions prises par votre Société contre la ville de Cette resteront illusoires tant que les stations de Balaruc-les-Bains et Agde seront inscrites au nombre des stations balnéaires jouissant du tarif réduit que nous réclamons." (...) En effet, "votre Compagnie n'a pas moins à redouter les conséquences des mêmes actes commis par des voyageurs passant par Agde ou Balaruc. Vous admettrez sans doute, Monsieur le directeur, qu'un voyageur partant d'un point quelconque du réseau du Midi peut utiliser un billet de station balnéaire jusqu'à Agde ou Balaruc-les-Bains, faire timbrer là son billet à prix réduit, prendre ensuite, moyennant 0,30 s'il se trouve à Balaruc ou 1,20 francs s'il se trouve à Agde, un billet pour Cette, pour se diriger de là sur un point quelconque du P.L.M., à moins qu'il ne préfère se diriger de Balaruc sur Montpellier, sans toucher à Cette. Dans ces conditions, les précautions prises par votre Société ne me paraissent point de nature à sauvegarder ses intérêts, tandis qu'elles portent un préjudice ènorme à la ville de Cette (...) Une ville qui, comme la notre contribue pour une grosse part à la prospérité de votre Société puisque le rapport du Conseil d'administration accuse pour 1895 un trafic de 1.431.885 tonnes de marchandises et le passage de 712.419 voyageurs." En conséquence, il demande à que ses "justes revendications" soient examinées avec impartialité.
Dans une séance officieuse, le conseil municipal vote la somme de 400 francs pour terminer la construction du chemin de fer de Sète à Balaruc (PM du 22.06.1896).
Une protestation est affichée sur les murs de la ville par la Lyre Sainte-Cécile, relative à l'exclusion de cette société des fêtes locales : "Au nom de ses membres actifs, fondateurs et honoraires et de ses nombreux amis, la Lyre Sainte-Cécile proteste énergiquement contre la mesure prise par la municipalité l'excluant de la fête patronale. La Lyre Sainte-Cécile composée d'enfants de Cette, a toujours prêté son concours à toutes les fêtes organisées par les diverses municipalités sans exception. Elle ne croit pas avoir démérité de ses concitoyens. C'est donc à regret qu'elle se voit mise à l'index à la suite du concert franco-espagnol, dont elle avait pris seule l'initiative quinze jours à l'avance sans qu'elle eût pu prévoir que des jaloux intéressés réussiraient, par une contre manifestation organisée à la dernière heure, à détourner le courant sympathique de la population cettoise à son égard. - La Lyre Sainte-Cécile." (EC du 24.08.1896). La réponse ne se fait pas attendre, même si elle est simplement signée "d'un contribuable" : "Le manifeste de la Lyre Sainte-Cécile ayant paru sans signatures, M. H. EUZET, maire, n'a pas cru devoir y répondre. mais comme il convenait toutefois, pour que l'opinion publique fut éclairée de relater les faits qui s'étaient produits, je me suis rendu chez M. H. EUZET et d'après son entretien je me permets de livrer à la publicité les lignes suivantes : - Jeudi dernier, M. SASSY, président du conseil d'administration de la Lyre Sainte-Cécile se présentait accompagné d'une délégation devant le maire de Cette et lui exprimait son etonnement de l'exclusion dont était l'objet cette société musicale. M. le maire répondit que pour des motifs qu'il n'avait pas à apprécier la population cettoise avait témoigné de son hostilité contre la Sainte-Cécile, dans une circonstance récente, que des désordres graves s'étaient produits, que les rapports qui lui parvenaient signalaient encore une certaine surexcitation des esprits, que par suite il ne saurait consentir lui magistrat responsable de l'ordre, à réclamer pour la fête, le concours de la Sainte-Cécile, qu'il ne serait pas pardonnable si par suite de la sortie de cette Société les désordres qu'il pressent se produiraient, qu'il serait humiliant pour notre ville que les étrangers qui y viendront en foule durant nos fêtes assistassent à des scènes qui, seraient-elles seulement bruyantes ne laisseraient pas de produire une très mauvaise impression au dehors. Bref, tout en exprimant de vifs regrets le maire maintint sa décision, en promettant toutefois de réfléchir à cette facheuse situation et de faire appeler M. le président de la Lyre s'il trouvait le moyen de la dénouer à la satisfaction de tous. Les délégués parurent se retirer enchantés puisqu'ils remercièrent le maire à plusieurs reprises de son excellent accueil, ce qui amena celui-ci à leur répondre que tous ceux qui se présentaient à la mairie poliment étaient reçus avec la même courtoisie et que MM. les délégués ne lui devaient pas de remerciements. Le lendemain matin, vendredi, M. le maire fit appeler M. le président de la Lyre et lui tint à peu près ce langage : Je suis d'autant plus ennuyé de cet incident qu'en raison des opinions politiques connues de votre Société on peut m'accuser d'injustice, de partialité ; aussi je vous propose de donner un concert à la Plage, dimanche soir. cette sorte d'expérience que je consens à tenter pour vous être agréable, me permettra de juger de l'état d'esprit de la population et s'il vous était favorable, comme je le souhaite, vous pourrez participer à la fête de la Saint-Louis. Nous avons modifié le programme pour l'Orphéon L'Espoir, nous le modifierons pour vous. Je vous avoue que nous avons besoin d'une musique pour les courses vélocipédiques, l'Harmonie ne pouvant y assister, mais il n'entre point dans ma pensée de vous offrir seulement ce rôle effacé ; je vous ferai participer encore aux autres concerts. Il est bien entendu que je demanderai pour vous une subvention à la commission des fêtes et moi-même je contribuerai à augmenter cette subvention. Sur la réponse de M. le président que c'était trop tard pour organiser un concert le dimanche suivant, M. le maire offrit de mettre le personnel de la mairie à la disposition de la Lyre Sainte-Cécile, pour faire le service des convocations. Enfin, pour calmer les hésitations de M. SASSY, M. le maire lui dit à peu près textuellement ceci : J'agirai avec vous comme avec l'Harmonie et L'Espoir, si vous me déclarez que vous consentez à donner le concert que je vous demande, je vous inviterai ; de cette façon votre amour-propre sera sauvegardé et l'invitation de la municipalité pourra constituer pour votre Société une sorte de protection. Veuillez réfléchir et assurer à vos amis du conseil d'administration de la Lyre Sainte-Cécile mes meilleurs sentiments. M. SASSY remercia, et promit de donner une réponse dans la soirée. On sait le reste. Maintenant la population cettoise appréciera, en cette circonstance, la conduite de M. le maire qui a tout fait pour tout concilier, et arriver à une entente, laquelle n'a pu aboutir, les administrateurs de la Lyre Sainte-Cécile ayant été de l'aveu même de leurs propres amis, on ne peut plus mal inspirés dans leur décision." (PM du 27.08.1896). A la suite des incidents qui se produisirent lors du passage des orphéonistes espagnols à Sète et des positions respectives de la mairie et de la Lyre, le président de celle-ci démissionne : "Une partie de la population attribua à M. SASSY, président de la Lyre Sainte-Cécile, la responsabilité de ces incidents et témoigna d'une certaine hostilité contre lui. M. SASSY, craignant que cette hostilité ne rejaillisse sur la Société qu'il présidait, a jugé à propos, dans l'intérêt de cette Société, de donner sa démission (...)" Le conseil d'administration de la Lyre accepte cette démission et nomme président par interim, Louis CAFFAREL. (PM et EC du 12.09.1896)
Cet épisode est survenu alors que le contexte est fortement défavorable aux conservateurs, comme on le voit avec la décision du conseil municipal de supprimer la subvention aux écoles congréganistes maternelles, plus précisément celles des rues de la Darse, Franklin et du quartier haut : "par conséquent, ces écoles seront supprimées et on mettra à leur place des écoles laïques. Enfin, il sera créé une nouvelle école laïque au quartier haut." (EC du 12.09.1896)
Dans le même numéro de ce journal (et aussi dans le PM du 11.09.1896), on voit que le conseil municipal adopte (en séance officieuse) le projet de construction d'un théâtre sur le terre plein de l'avenue Victor Hugo, "dont le coût sera de 600.000 francs". C'est le docteur SCHEYDT (conseiller général) qui est nommé "commissaire enquêteur" pour les grands travaux, en particulier la construction du théâtre (PM du 16.10.1896).
Un réseau téléphonique doit relier les divers bureaux de l'octroi, les services municipaux et le domicile du maire, "afin d'éviter les lenteurs et de simplifier le service" (PM du 11.09.1896)
Le Cm du 29.11.1896 ratifie la nomination des délégués sénatoriaux : Honoré EUZET, BRUNIQUEL (le premier adjoint) et plusieurs conseillers municipaux (EC du 30.11.1896)
Le bureau de bienfaisance crée un service d'accouchements gratuits pour les indigents, à partir du 1er décembre (PM du 02.12.1896).
Les 05 et 06.04.1897 tous les membres du conseil municipal, y compris le maire et les adjoints, font publier une longue communication pour défendre et expliquer leur politique financière : "En rentrant à la mairie, nous trouvâmes un déficit de 650.000 francs. Nos concitoyens n'ont jamais eu la naïveté de croire que nous allions le combler sans créer de nouveaux impôts. Est-il juste de nous reprocher aujourd'hui d'avoir demandé ces impôts absolument indispensables ? (...) Voici ce que le préfet de l'Hérault, VINCENT, écrivait à M. le maire de Cette, à la date du 03.02.1896 : (...) Vous savez, monsieur le Maire, que le déficit du budget de Cette provient en grande partie de ce fait : que la valeur du centime communal a diminué. Le produit des centimes affectés au service des anciens emprunts ne suffit plus à payer les annuités prévues dans les contrats d'emprunts. Il en résulte une différence qui retombe à la charge du budget ordinaire. C'est ainsi que le déficit devient permanent. Donc, citoyens, les augmentations réclamées soit aux contributions directes, soit à l'octroi étaient absolument indispensables et pour combler le déficit ancien et pour équilibrer les budgets futurs. Nous affirmons sur notre honneur, qu'à cette heure, à part 6000 francs réclamés à l'octroi et qui restent en réserve pour la construction du théâtre, il n'a pas été créé un centime d'impôt de plus qu'il n'était nécessaire (...) Lettre du préfet VINCENT du 09.12.1896 (ayant pour objet de signaler le danger des crédits supplémentaires) : je suis heureux de reconnaître que vous avez puissamment contribué à les surmonter, qu'elles ont été les difficultés rencontrées pour mettre de l'ordre et apporter quelque sécurité dans la marche des services financiers de la ville (...) (...) Il est vrai, citoyens, qu'en notre qualité de Cettois, nous souhaitons pour notre ville, un théâtre digne d'elle ; nous ne voulons plus rester tributaires de nos voisins (...) La construction du théâtre aura pour conséquence une augmentation d'impôts de un franc par habitant (...) Le conseil municipal n'a jamais eu à intervenir dans la fixation du contingent dû par la ville de Cette (pour le cote mobilière) Quant à la répartition nouvelle individuelle qui a été faite cette année, ce n'était peut-être pas de bonne politique de la tenter ; mais c'était un acte juste et honnête (...) En ce qui concerne le reproche de n'avoir pas supprimé les droits d'octroi,, cette suppression constituerait une folie (...) Les communes ne peuvent remplacer les droits d'octroi que par des centimes additionnels (...) Or, le produit net de l'octroi est, suivant la moyenne des dernières années de 560.000 francs et la valeur du centime à Cette étant de 5200 francs, il faudrait donc créer 107 nouveaux centimes additionnels ; ce qui revient à dire que celui qui paie 50 francs paierait 117,50 francs, celui qui paie 100 francs paierait 235 francs (...)"
Le 10.04.1897, les socialistes défendent la politique du maire, pour le théâtre, l'emprunt et l'octroi : "Oui, M. EUZET, le maire actuel, s'opposa en 1888, à la construction du théâtre et cette opposition est tout à son honneur. Alors qu'on prétendait prélever les 400.000 francs nécessaires à cette construction (sur le boni des entreprises de l'adduction d'eau et de la halle), M. EUZET s'écriait : Si vous êtes sincères, vous êtes des imprudents ; si non, vous êtes des canailles. Et il avait raison. Au lieu du boni que l'on faisait luire, l'entreprise de l'eau seule, se solda par un excédent de dépenses de près de 600.000 francs. Comme vous auriez ri, Messieurs les cléricaux, si grâce à l'opposition de M. EUZET, cette insigne folie n'eut pas été évitée." Ensuite sur l'emprunt : "Oui, M. EUZET, Maire de Cette, a combattu l'emprunt projeté par l'administration SCHEYDT ; mais il s'agissait, il ne faut pas l'oublier, non pas d'un modeste emprunt de 600.000 francs, mais de 2.800.000 francs et il faut que vous soyiez de mauvaise foi pour établir un parallèle entre ces deux projets d'emprunt." Et enfin sur le service de l'octroi : "Quant à la suppression de l'Octroi, l'administration actuelle est la seule depuis 1870, qui l'ait étudiée sérieusement et en ait exposé nettement les conséquences devant le corps électoral. L'administration municipale a dit à ses concitoyens : Nous vous avons indiqué les dangers de la suppression de l'octroi ; notre conscience se refuse à l'exécuter. Cependant, si vous le voulez, prononcez-vous nettement ; nous sommes prêts à nous incliner. N'est-ce pas clair ?" L'article est signé : Un groupe de Socialistes (LPSC, n° 12, 3ème année ; cependant, il est écrit au crayon, à côté de l'indication du numéro et de l'année de parution : Réapparition)
EUZET "informe ses administrés qu'un crédit de 6000 francs, pour l'ouverture des chantiers communaux, vient d'être autorisé. Il invite, en conséquence, les ouvriers sans travail, désireux d'être occupés, à se faire inscrire à la mairie." Une commission recevra les candidatures. (PM du 22.04.1897)
Le 26.04.1897, le PM rapporte qu'au conseil municipal du 22, EUZET donne lecture du projet de traité avec la compagnie d'électricité (pour les tramways électriques) ; dans la même séance, le conseil accorde 300 francs de subvention à chacune des sociétés musicales, L'Harmonie et La Lyre, et "accepte à l'unanimité la mesure de suppression d'eau et de gaz de certains établissements religieux prise par l'administration".
A Sète, l'avant-projet concernant les tramways électriques est entre les mains de l'ingénieur en chef des ponts et chaussées : "Espérons que tout ira bien et que dans quelques mois notre ville sera dotée de tramways grâce à l'activité de M. EUZET" (PM du 01.06.1897). A Montpellier, des retards dans la mise en exploitation des tramways électriques. La mise en état du réseau est commencée depuis quelques jours ; les tramways devraient pouvoir rouler en octobre ; 6 lignes sont prévues (LVMR du 18.07.1897).
"L'emprunt ayant été approuvé par les deux Chambres, nous croyons savoir que l'on s'occupera immédiatement de la construction du théâtre. On va procéder immédiatement à des sondages pour l'établissement des fondations de l'édifice." (PM du 22.07.1897) "Le Journal Officiel promulgue la loi adoptée par les deux Chambres autorisant la ville de Cette à emprunter à un taux d'intérêt n'excédant pas 3,80 % une somme de 735.000 francs, remboursable en 30 ans et destinée à pourvoir à diverses dépenses énumérées dans une délibération communale du 12.02.1897, notamment à la construction d'un théâtre et à la réfection du pavage des rues. La ville de Cette est également autorisée à s'imposer extraordinairement pendant 30 ans, à partir de 1898, 6 centimes 66 centièmes additionnels, au principal de ses quatre contributions directes." (PM du 08.08.1897)
Le 29.09.1897, le conseil municipal de Sète vote, à l'unanimité "l'envoi de M. EUZET à Paris, comme délégué au Congrés de protestation des communes de France contre la taxe sur les blés." Il lui vote une indemnité de 500 francs à cet effet. Le maire remercie le conseil de cette marque de confiance, "car il a trop conscience dit-il, du mal fait au pays par les nouveaux tarifs douaniers pour ne pas accepter avec empressement l'occasion de les défendre. D'autres pourront, dit-il, promettre de le faire avec plus d'éloquence, mais non avec plus de conscience et d'énergie." (PM du 01.10.1897)
Il est élu conseiller général
Les critiques de ses deux adversaires : Pierre PAUL, de la même mouvance politique, et E. AULOY. Pour le second, la profession de foi d'Honoré EUZET est plutôt celle d'un maire que celle d'un conseiller général. Il critique la gestion budgétaire du maire car, entre 1896 et 1898, il note une augmentation de 62.264,41 francs dans les dépenses extraordinaires, d'où sa remarque : "Connaissant les grandes qualités administratives de notre maire, nous avons lieu d'être surpris de cette énorme augmentation. Il est vrai que figure dans cette somme environ 20.000 francs pour augmentation d'appointements d'employés et cela, bien entendu, dans le but d'en faire des électeurs complaisants en prévision des mandats qu'il est susceptible de solliciter. Nous nous étonnons d'autant plus de cette augmentation que, d'après le maire lui-même, le nombre d'habitants de notre ville a diminué de 8.000. Tous les gens qui raisonnent doivent, comme moi, trouver que les frais d'administration auraient dû diminuer dans les mêmes proportions. En un mot, que le maire aurait dû, pour défendre les intérêts de la ville, savoir faire des économies." (PM du 29.07.1898). Pour le premier, Pierre PAUL, il écrit le 27.07.1898 dans le PM : "On n'incrimine pas un homme qui fut porte-drapeau d'un parti, d'une ville. On le remplace. Nous nous honorons du bien qu'il a pu faire et nous lui reprocherons seulement celui que son autoritarisme lui a empêché de faire" Et encore : "Si vos concitoyens se détournent de vous, citoyen EUZET, c'est que mettant en balance les qualités que vous avez et celles qui vous manquent ils ont trouvé que ces dernières l'emportaient (...) Votre nom n'étant pas sorti lors de la réunion des délégués du peuple vous vous insurgez contre la décision prise. Vous vous dites socialiste et vos actes démentent vos paroles. Le vrai socialisme ne veut pas de cumul (...) Admettre le cumul (...) c'est admettre l'homme fatal, indispensable. C'est revenir aux petits tyrans locaux, après avoir lutté pour l'anéantissement des gros (...)". La tonalité de la critique est claire, c'est l'idée de se débarrasser des " "politiciens purs" au profit des "véritables travailleurs".
Résultats des élections au Conseil général pour le canton de Sète : inscrits 8013 ; votants 3757 ; élu : EUZET avec 2771 voix, contre Pierre PAUL (739 voix) et AULOY (710 voix), selon le PM du 01.08.1898.
Le 02.09.1898, EC indique quels sont les voeux adoptés par le Conseil général, émis par Honoré EUZET (cette communication vise, peut-être, à répondre aux critiques de ceux qui voyaient dans son programme plus celui d'un maire que d'un conseiller général). Le premier voeu concerne la protection du travail : "qu'une législation réellement protectrice du travail intervienne au plus tôt sur les bases de la journée de huit heures, de l'interdiction du travail de nuit, du repos obligatoire d'un jour par semaine et de l'élection par les ouvriers et ouvrières, constitués en collège corporatif, des inspecteurs et inspectrices du travail et du conseil supérieur du travail" ; le deuxième voeu concerne le service militaire de deux ans. Après avoir constaté que, dans les faits (du service de trois ans), il y a trop de dispenses, de renvois anticipés ou d'affectations dans des fonctions non militaires, il propose : "que le temps du service dans l'armée active soit réduit à deux ans et qu'il soit égal pour tous, les soutiens de famille étant seuls exceptés" En cas de refus par les Chambres, il faudrait au moins que les seules dispenses ne concernent que les soutiens de famille ; le troisième voeu vise à la suppression des quatre contributions directes (l'impôt personnel et mobilier, l'impôt sur les portes et les fenêtres, l'impôt sur la propriété bâtie et l'impôt des patentes, ces quatre impôts pesant beaucoup plus sur les pauvres que sur les riches, et il ajoute : "que le demi-milliard de ressourses ainsi disparues soit demandé à un impôt personnel général et progressif sur les revenus supérieurs à 3000 francs et à une accroissement également progressif des droits de succession et de mutation par décès sur les héritages supérieurs à 20.000 francs."
Une communication d'un lecteur de EC paraît dans ce journal (à la rubrique de Mèze) : "Je lis dans L'Eclair du 30 courant à la chronique de Cette, le compte rendu des joutes régionales dont la finale dit ceci : "Les jouteurs des environs, inscrits en petit nombre ..." Je ne puis laisser passer cette phrase sous silence ; il convient de faire connaître au public que le maire de Cette a envoyé une lettre au maire de Mèze, dans laquelle il le prie, vu le grand nombre d'inscrits, de ne lui donner le nom que de deux jouteurs mézois. Quand on fait un concours régional, on fixe une date pour l'ouverture et la fermeture des inscriptions et on applique ensuite à chaque localité le nombre de jouteurs au prorata de leur population. Or, lisez la liste des jouteurs et vous verrez que sur 50, il y a 42 cettois, 2 de Balaruc, 4 de Frontignan et 2 de Mèze. Dans cette circonstance, le maire de Cette a mis en vigueur la méthode bismarckienne : "Nous vous écrasons par le nombre". Veuillez ..." (EC du 02.09.1898)
Le 30.09.1898, le journal L'Aurore cherche à connaître l'opinion des Français de province sur l'affaire DREYFUS. Le journaliste arrive ainsi à Sète et le journaliste estime que pour être renseigné sur l'état de l'opinion, le mieux est encore d'interroger celui qui la représente, le maire de Sète, Honoré EUZET. A une première question sur le sentiment de ses concitoyens, celui-ci répond : "Ah ! Je ne pourrais pas vous dire que l'on a été, de tout temps, dreyfusiste ici. Ceux-ci étaient même très rares au début ; la population de Cette, laborieuse et honnête, a longtemps refusé de croire qu'un officier condamné pût être innocent et qu'il ait pu y avoir à l'Etat-Major des officiers indignes. L'affaire HENRY a été une révélation douloureuse pour la masse et on est aujourd'hui partisan de la révision - une révision au grand jour. Voilà ce que je crois, en toute conscience, être l'opinion de l'immense majorité de mes concitoyens." Au journaliste, il déclare encore toute sa déception pour ROCHEFORT qu'il trouvait "des plus sympathiques" et qu'il avait vu la dernière fois au banquet d'inauguration de la Verrerie ouvrière. "Jamais je n'aurais pensé à ce moment que cet homme marcherait un jour avec les faux patriotes, avec la Libre Parole et toutes les Croix. Il a perdu ici toute sa popularité. Dernièrement, les membres du conseil municipal, tous républicains ardents, votèrent des flétrissures à ce renégat ; je crus devoir refuser de signer moi-même, par respect pour sa vieillesse simplement". Inversement, il fait l'éloge de JAURÈS ("ici, on le trouve simplement admirable et il y a des ouvriers qui se feraient hacher pour lui") et aussi de CLÉMENCEAU, à côté duquel il dit avoir combattu en des époques difficiles et qui a fait son admiration au cours de cette campagne.
Le 04.12.1898, LVMR annonce que, le lendemain, dimanche, à l'Hôtel-de-Ville, aura lieu, "sous la présidence d'honneur de M. Honoré EUZET, maire et conseiller général", la remise solennelle du drapeau aux membres de la section de Sète des Vétérans des armées de terre et de mer. Le journal ajoute que "les sociétés musicales et de gymnastique prêteront leur concours à cette solennité". Un article du journal Le Vétéran décrit cet évènement dans son numéro n° 1 de janvier 1899 : "La manifestation de la remise du drapeau à notre Section de Cette, qui a eu lieu le dimanche 4 décembre, a pris le caractère d'une véritable solennité patriotique. Au cortège avaient pris part l'Harmonie de Cette, la Lyre Sainte-Cécile, la Fanfare scolaire et la Cettoise, cette dernière sortant pour la première fois le drapeau de la Fédération des sociétés de gymnastique du Rhône et du Sud-Est, drapeau dont elle a la garde, comme on sait, depuis la fête de gymnastique du mois d'août dernier. (...) L'allocution des plus heureuses prononcée par M. Honoré EUZET, maire, en remettant le drapeau à M. le commandant BUFFEL, président de la Section, a été couvert d'applaudissements. Le commandant BUFFEL a répondu en ces termes : En recevant ce drapeau de vos mains, et au nom des vétérans de la 78ème section, dont vous êtes le premier membre inscrit, je vous remercie chaleureusement pour les belles paroles que vous venez de prononcer (...) Sous les balcons de la mairie, les musiques exécutent la Marseillaise et le Salut au drapeau devant une affluence énorme de personnes (...) Un banquet a eu lieu dans la grande salle du Grand Café (...)"
Ses deux priorités : l'avancement des travaux de construction du théâtre et l'installation des tramways électriques
"On annonce que les pièces complémentaires du projet d'installation des tramways électriques sont toutes arrivées à la mairie et viennent d'être transmises à M. GUIBAL, ingénieur en chef des ponts et chaussées du département de l'Hérault" (JC du 28.01.1899)
Au conseil municipal du 3 février, le conseil municipal "décide de substituer à la pierre de Brouzet la pierre des Estaillades, qui lui est bien supérieure, pour construire la façade principale du théâtre et les façades latérales jusqu'aux escaliers d'honneur. Une commission de six membres se rendra à la carrière des Estaillades pour s'assurer si les livraisons sont faites assez promptement, afin de ne pas ralentir la marche des travaux. Un crédit de 12.000 francs prélevés sur les rabais consentis dans les diverses entreprises a été voté à cet effet." (JC du 07.02.1899)
Au conseil municipal du 21 avril, "un projet de décoration de la scène du nouveau théâtre, projet qui s'élève à 26.235 francs, est approuvé." (JC des 23-24.04.1899)
" On annonce que M. le directeur des tramways électriques s'entendra aujourd'hui avec M. le Maire afin de régler certains détails concernant les travaux d'installation des tramways électriques" (JC du 04.05.1899)
"Dans quelques jours, on va mettre la main aux travaux d'installation des tramways électriques. Une partie du matériel est arrivée à Cette" (JC du 16.05.1899).
Au conseil municipal du 22 septembre, Honoré EUZET propose de voter le renouvellement du bail du théâtre de la Grand'rue afin de permettre aux troupes de passage d'y donner des représentations "en attendant la construction du nouveau théâtre" ; malgré les critiques du conseiller COMBES, le renouvellement du bail est voté. (JC des 24-25.09.1899)
"Cette, le 4 octobre. A l'issue de la réunion publique qui a eu lieu le 22 septembre 1899, le conseil municipal s'est réuni hors session pour entendre la lecture du rapport de M. MALLAT, délégué du Conseil au congrès d'Epernay (...) M. EUZET déclare qu'il approuve toutes les résolutions prises au congrès d'Epernay. Il félicite les congressistes des sentiments humanitaires qui les ont guidés, mais il se sépare d'eux sur ce point particulier qu'il admet que le parti socialiste doit s'emparer du pouvoir politique en acceptant non seulement des fonctions électives, mais encore qu'un ou plusieurs de ses membres rentrent dans un ministère républicain. Il rappelle qu'un socialiste au ministère, s'il sait rester sur le terrain des revendications ouvrières, peut rendre de grands services ; il cite l'interprétation par MILLERAND de la loi sur les accidents, interprétation qui eût pu être moins favorable aux ouvriers si le titulaire du ministère du commerce n'eût pas été un socialiste. Il cite aussi le décret du 10 août 1899 sur la règlementation du travail qui assure en matière de travaux publics du département, à l'ouvrier un minimum de salaire, limite les heures de travail, etc. C'est là encore un bienfait. M. EUZET ajoute qu'il estime en outre que, se plaçant au point de vue politique, MILLERAND a bien agi en entrant dans les circonstances difficiles que nous traversons, dans un ministère républicain. En conséquence, il demande au conseil municipal, réuni hors session, d'approuver la conduite de MILLERAND et de lui renouveler l'assurance de son dévouement. Le Conseil qui a donné tout le temps des marques d'approbation, se rallie à cette proposition et décide que cette résolution sera communiquée à M. MILLERAND." (La Lanterne du 06.10.1899)
A l'occasion de la présentation du projet de budget 1900 de la ville, Honoré EUZET fait le point sur le nouveau théâtre en construction : "Il faut que nous réservions sur nos économies une somme de 69.000 francs qui est indispensable pour achever les travaux du théâtre (...) Nous dépenserons 850.000 francs environ, il est vrai, pour la construction d'un théâtre digne de notre ville, et sur cette somme, nous n'avons réclamé à l'emprunt que 600.000 francs. Nous avions donc raison de compter sur votre esprit d'économie, d'avoir eu confiance dans l'avenir, dans le relèvement de notre ville. Quoiqu'il en soit, il fallait que nous puissions faire taire la malveillance en présentant à la fin de notre mandat, un état détaillé des dépenses effectuées pour le théâtre, des dépenses à faire, des sommes disponibles et que nous puissions affirmer sur notre honneur, que ceux, quels qu'ils soient, qui auront la charge de terminer les travaux soient à l'abri de tout mécompte." (JC du 12.11.1899)
"M. le Maire demande au conseil d'approuver le contrat passé entre la ville et M. INJALBERT, sculpteur, pour la décoration du nouveau théâtre - Adopté." (JC du 14.11.1899)
"Depuis quelques jours et sur divers points de la Ville on a déjà donné les premiers coups de mains à l'installation de nos lignes de tramways. Sur le terre plein de l'avanue Victor Hugo on procède actuellement à des épreuves d'aiguillage et l'on continuera par le même travail rue des Pêcheurs. (...) Du côté du pont Sadi-Carnot on est en train de découper les traverses de bois qui doivent supporter les rails." (article intitulé : "Nos lignes de tramways" dans le JC du 22.11.1899)
"C'est à la suite d'une conférence tenue par MM. GUIBAL, ingénieur en chef, EUZET maire de Cette, HERMANN ingénieur ordinaire, PETIT, directeur de la compagnie des tramways de Cette et CAILIÈS, ingénieur en charge des travaux à Cette, que les dernières difficultés touchant les tramways de notre ville ont été aplanies. A la suite de cette conférence, M. le directeur des tramways de Cette a adressé à M. le maire de Cette la lettre ci-après :
Lyon, le 17 novembre. M. le maire de la ville de Cette, Nous avons l'honneur de vous informer que nous avons l'intention de commencer dès maintenant les travaux de pose de voie des tramways de Cette. Etant donné que le décret d'utilité publique n'est pas encore sorti, nous avons l'honneur de vous faire savoir que ces travaux seront engagés sous notre propre responsabilité et que nous déchargerons entièrement celle de la municipalité si ce décret ne devait pas sortir ; et dans ce cas, nous prenons en outre l'engagement de débarrasser nos voies et de remettre les chaussées en état. Dans ces conditions, nous pensons que rien ne s'oppose au commencement des travaux et vous prions, Monsieur le maire, de vouloir bien nous faire connaître vos observations s'il y avait lieu. Veuillez agréer etc. Le Directeur. PETIT.
Il est inutile d'ajouter que M. le maire a répondu favorablement à cette demande. C'est donc une affaire complètement réglée." (JC du 28.11.1899) On doit saluer ici le volontarisme et le savoir faire d'Honoré EUZET ; dans un pays de forte centralisation, il a su dépasser les difficultés administratives pour faire réussir un projet technique au service de sa cité.
"Nos quais et nos artères principales regorgent de fer et sont presque encombrés des matériaux nécessaires à l'installation de nos trams. C'est un remue-ménage partout, qui va s'accentuer sous peu. Nous avons l'air d'être à la veille d'une grande foire" (Petite chronique du samedi dans le JC des 10-11.12.1899)
"C'est aujourd'hui lundi qu'à commencé, à l'avenue de la gare, les travaux de pose des rails des tramways électriques. Ces travaux n'excèderont pas une durée de cinq mois." (JC du 12.12.1899)
le 20.08.1899, c'est l'ouverture de la session d'août du Conseil général ; LAISSAC est élu président ; les vice-présidents sont MONTAGNÉ et AUDIBERT ; les secrétaires, ABBES, EUZET et GAUZY ; il est aussi désigné comme faisant partie de la commission des finances et du budget (EC du 22.08.1899).
Il est réélu maire, en mai
Avant les élections municipales, le Comité central socialiste des groupes politiques et corporatifs fait une communication parue dans le PM pour présenter le bilan du groupe socialiste du conseil municipal. "Entrés à l'assemblée communale alors qu'une situation financière très obérée semblait devoir nous paralyser, nnous avons pu, cependant, réaliser les travaux ci-après :" ; suivent, dans les détails la liste des travaux menés sur la voirie (éclairage, ponts, agrandissements, pavages, réfections ...) ; les points forts sont la construction d'un théâtre,, la construction des lignes de tramways électriques, la captation des sources d'Issanka ("ce travail a eu pour résultat d'éviter la nécessité de supprimer ou de mesurer l'eau à la population, mais bien au contraire de la lui fournir en abondance"), la contribution à l'achèvement de la Station zoologique, l'aménagement de l'Ecole du commerce et de l'industrie ("Nous avons eu la bonne fortune, avec l'aide de notre ami MILLERAND, auquel nous sommes heureux d'adresser nos remerciements fraternels, de créer une Ecole professionnelle du commerce et de l'industrie, appelée à rendre aux enfants du peuple d'inappréciables services. Cette école coûtera 100.000 francs, mais nous ne le regrettons pas, puisqu'elle doit contribuer à former d'excellents ouvriers et à faciliter aux humbles l'entrée des grandes écoles de l'Etat"), il a créé la magnifique Bourse du Travail "dont les travaux sont actuellement en exécution et dont la remise aux syndicats sera faite solennellement au cours de l'année" ... Sont encore passés en revue les actions relatives à l'hospice et au Bureau de bienfaisance (notamment, la création d'un service d'accouchement gratuit pour les indigents), l'Instruction publique (bourses, distribution gratuites de livres ... subventions diverses ... D'un point de vue économique, c'est encore la "facilité d'établissement à Cette des importantes usines du Creusot en cédant à cette société des terrains primitivement réservés, dans l'étang des eaux blanches, à la construction d'un abattoir et en votant en sa faveur le dégrèvement d'une somme de 300.000 francs de droit d'octroi" ; ce sont encore les secours en faveur des grévistes, les crédits pour les congrès ouvriers, la création d'un cabinet de consultations juridiques gratuit ... (PM du 15.04.1900)
Résultats de l'élection municipale, à Sète : "inscrits 9620, votants 5501, liste EUZET élue avec 3422 voix" (PM du 08.05.1900). EUZET a le score le plus élevé avec 3389 voix mais les deux conseillers municipaux qui vont être de farouches opposants obtiennent aussi de bons résultats : Pierre VALLAT avec 3270 voix et, surtout, Louis AUDOYE avec 3370 voix. Les résultats pour chaque liste et pour chacun de ses membres sont donnés dans EC du 08.05.1900 : liste du conseil municipal sortant, liste du comité d'union républicaine (soutenu par EC) et liste du comité de discipline républicaine et socialiste. Dans le même numéro, il est annoncé pour le 12 mai l'installation du conseil municipal élu et l'élection du maire et des adjoints. Cette installation fait l'objet d'un compte rendu dans EC du 14.05.1900 : les mêmes sont reconduits avec EUZET comme maire, BRUNIQUEL comme premier adjoint (il avait obtenu 3325 suffrages) et CAYROL comme second adjoint (il avait obtenu 3422 suffrages), chacun avec 28 voix et un bulletin blanc. Le journal ironise à partir du discours du doyen d'âge (CAYROL) qui a du mal à lire son papier : "il adresse son salut à ses amis du ministère dreyfusard qui, d'après lui, ou plutôt d'après les paroles qu'on lui fait dire, est le nec plus ultra des ministères et n'est insulté et calomnié que par les réactionnaires ! (sic). Ces dernières paroles qui sont aussi audacieuses que mensongères, démontrent quel est l'état d'esprit qui anime ce nouveau conseil et ce qu'il faut attendre de lui au point de vue politique !"
Nouveau doublé des deux comités dans le PM du 27.04.1900, sur le même sujet. H. GODEAU, le secrétaire du Comité central socialiste des groupes politiques et corporatifs écrit : "A propos des tramways électriques, nos adversaires contestent à la municipalité le droit de mettre à son actif les avantages que la cité recueillera de la construction des lignes électriques. "Elle n'en a pas eu l'idée," disent-ils ; "les pourparlers remontent à l'administration précédente". Il est absurde de raisonner de la sorte. C'est comme si l'on reprochait à une administration de faire des chemins, trottoirs, un théâtre, sous prétexte qu'une administration précédente avait eu l'idée de faire un théâtre, des trottoirs, des chemins. Mais l'idée n'est quelque chose que par l'exécution. N'est-il pas vrai qu'un plan ne vaut que par la mise en oeuvre ? Ah ! le fameux capitaine qui tracerait de merveilleux plans de bataille et qui serait toujours battu à plate couture ! Et nos adversaires ont beau dire, le plan des tramways a été magistralement exécuté. La compagnie concessionnaire choisie, compagnie essentiellement française, quoique on veuille bien en dire (voir la lettre de l'honorable maire de Belfort), a fait des concessions qu'aucune autre n'aurait pu faire. Le public peut se convaincre de ce que nous affirmons en allant à la mairie consulter le dossier des tramways. Il aura facilement la preuve, à la lecture de ce dossier, que la Compagnie d'électricité donnera à la ville, durant la période de la concession, plus de 500.000 francs de bénéfices." Ce à quoi Marius IMBERT, le secrétaire du Comité de discipline républicaine et socialiste répond : "Pour revenir aux tramways électriques, des précisions ne seront pas déplacées : Disons donc que la compagnie Cauderay, dont le système est bien plus avantageux que le système adopté (car il constitue le dernier perfectionnement) s'engageait à payer intégralement les droits d'octroi sur toutes les marchandises employées, de plus, elle devait verser une indemnité de 10.000 francs en faveur des cochers spoliés et s'engageait à payer un minimum de salaire de 4 francs aux employés sous ses ordres. Pourquoi a-t-on préféré la Compagnie Herdt ?
Le PM et, parfois, EC permettent de suivre l'évolution des travaux d'installation de ces tramways électriques. Ainsi, le PM du 28.01.1900 indique-t-il que l'on allait commencer la "construction de l'usine qui fournira la force motrice utile à la marche des travaux. Cette usine sera construite sur des terrains situés sur la route de Montpellier, immédiatement après le bureau de l'octroi. Des hangars et des voies de dégagements permettront de garer ; les voitures utiles au service des voyageurs seront aussi aménagées dans le même enclos. Complétons cette nouvelle par un renseignement. Les tramways suivront la route de Montpellier jusqu'au passage à niveau du chemin de fer. Il est peu probable qu'ils aillent jamais plus loin, à cause de l'opposition de la Compagnie P.L.M." Dans la même idée des luttes d'influences industrielles et de l'extension de ce moyen de transport, on note dans le programme électoral du Comité central socialiste des groupes politiques et corporatifs : "Nous poursuivrons notamment la construction d'une ligne de tramways partant de la Pointe Courte pour aboutir au coeur de la concession du Creusot" (PM du 05.05.1900). On commence, ensuite, à évoquer la fin des travaux : "MM. PETIT, HANQUEZ et CERNEZ, ingénieurs de la compagnie des tramways électriques, étaient hier dans notre ville. Ils ont assuré à plusieurs personnes que les tramways seraient terminés dans les premiers jours de juillet et que les tramways commenceraient à marcher le 14 juillet." (EC du 12.05.1900)
En réponse, le Comité central socialiste des groupes politiques et corporatifs déclare : " On reproche au maire son attitude à propos du théâtre provisoire CARLIER ; cette accusation n'est pas nouvelle. Il nous suffira pour la réduire à néant de rappeler la lettre de M. EUZET du 8 octobre 1896. Dans cette lettre M. EUZET rappelle sa déposition écrite, remise à M. BOULIECH, conseiller général, commissaire enquêteur, le 23 avril 1888 et dans laquelle il dit textuellement ceci : "Je ne veux pas parler de l'emplacement" et plus loin "Tout en reconnaissant qu'un théâtre à Cette est d'une utilité absolue, je réclame l'adjudication." Je ne vois rien dans cette déclaration qui soit en contradiction avec mon attitude d'aujourd'hui. Si je me suis opposé à la construction du théâtre CARLIER, c'est que je considérais le traité de gré à gré de 350.000 francs comme illégal, onéreux pour la commune et constituant un acte de favoritisme. Mon opinion n'a pas changé. Je critiquais surtout la combinaison financière. On comptait pour faire face à la dépense sur les rabais consentis par les entrepreneurs de la nouvelle adduction d'eau, soit 137.004, 81 francs et des halles 83.720,53 francs. - Total 220.835,34 francs [sic]. Le solde devait être payé par annuités de 30.000 francs. M. EUZET se demandait comment on pourrait prélever annuellement 30.000 francs quand les recettes sont en diminution constante. Il se demandait s'il n'y aurait pas d'aléas dans les travaux importants que l'on venait d'ouvrir et si l'intégralité des rabais résisterait. Les ressources ont constamment diminué depuis 1888 et les rabais des Halles et de l'adduction des eaux ont non seulement été absorbés mais encore il a fallu emprunter 403.000 francs pour achever l'adduction des eaux d'Issanka. Il a fallu faire deux emprunts depuis 1888 rien que pour combler le déficit. M. EUZET terminait sa lettre en disant qu'il avait raison de s'écrier : "Vous vous trompez, vos ressources n'existent que sur le papier, vous serez dans l'impossibilité de tenir vos engagements". Quant à cette allégation, que M. CARLIER aurait été payé des honoraires qu'il réclamait, elle constitue un nouveau mensonge au passif de nos piètres adversaires. Il est vrai que M. CARLIER a réclamé des honoraires que le Conseil municipal lui a refusé et que le Conseil de préfecture, devant lequel il s'était pourvu, l'a débouté de sa demande. - Pour le Comité et par ordre : le secrétaire H. GODEAU." (PM du 02.05.1900)
Bien entendu, toujours dans le PM du 02.05.1900, le Comité de discipline républicaine et socialiste appuie encore ses critiques afin d'avoir le dernier mot, d'où la communication suivante : "Sur l'emprunt de 735.000 francs, une somme de 600.000 francs était affectée à la construction du théâtre, d'après le plan dressé par M. l'architecte de la ville. Voilà plus de deux ans que les travaux ont commencé et on affirme que les travaux exécutés à ce jour, ont déjà absorbé presque la totalité de cette somme. D'aucuns, même, soutiennent que la dépense nécessaire pour achever ce monument, s'élèvera à la somme de 2.000.000 -deux millions. Ne voulant pas être taxés d'exagération, nous évaluerons au double de la somme prévue, le crédit indispensable pour terminer la construction de ce théâtre - ce qui représentera une annuité d'environ 70.000 francs à inscrire pour une période de trente années, au budget communal. Nous aurons une belle cage. Nous dirons demain ce que l'on mettra dedans. - Pour le comité, le secrétaire, M. IMBERT."
A l'occasion de sa visite à Sète de Pierre BAUDIN, ministre des Travaux Publics, Honoré EUZET, maire et conseiller général, le reçoit et prononce à la mairie un discours dans lequel il rappelle l'ancrage à gauche de ses concitoyens depuis la Révolution : "La ville de Cette fut toujours républicaine. Elle a affirmé à maintes reprises durant la période révolutionnaire ses sentiments démocratiques. En 1848, Cette donnait la majorité à LEDRU ROLLIN contre BONAPARTE. En décembre 1851, les électeurs cettois votaient en majorité contre le plébiscite et en 1870, ils refusaient en masse leur vote à l'Empire. C'est vous dire, M. le ministre, que mes concitoyens sont venus au socialisme par une évolution toute naturelle, sont restés fermement attachés à la République, c'est-à-dire à la liberté - ce merveilleux et sûr instrument d'émancipation, car ils savent qu'il en coûte pour la conquérir - et qu'ils sont tous groupés à cette heure sans distinction de nuance ou de doctrine, autour du gouvernement de défense républicaine, unis, confondus en un même sentiment, l'amour de la République." (PM du 18.10.1900)
Un seul numéro conservé (pour 1900) d'un journal qui se veut le défenseur de la classe ouvrière, Le Réveil Cettois (RC) donne le ton des échanges acerbes avec la municipalité, par l'intermédiaire du journal de celle-ci, L'Avant-Garde (AG). Le 03.11.1900, le RC écrit à propos de l'AG : "Les rédacteurs de ce journal, fonctionnaires municipaux, évoluant sous les ordres de M. le Maire, ont puisé dans les bas fonds, que connaissent seuls les habitués des tripots et des lupanars, les injures les plus viles et les plus grossières à l'égard des citoyens qui ont commis le crime d'assister à une réunion publique (...) Les séides de M. le Maire ont maltraité et diffamé 1.400 contribuables cettois, formant le public habituel des conférences (...) C'est toujours la même tactique que suivent envers leurs adversaires aux potentats d'un jour ; hier, pour acquérir le pouvoir, ils déversaient leurs immondices sur la tête des bourgeois honorables qui constituaient l'administration SCHEYDT ; aujourd'hui, pour conserver l'assiette-au-beurre, ils couvrent de boue les prolétaires qui ne veulent plus de leur despotisme (...) Oh honte ! Ils prétendent représenter à la mairie le socialisme et la classe ouvrière. Quelle duperie ! Cette, noble cité, fière des services rendus à la cause de la République et à la liberté, gardienne jalouse de ton indépendance et de ta dignité, souffriras-tu d'être plus longtemps dirigée par une poignée de forbans qui te déshonorent ? (...) Le groupe d'études sociales". Dans le même numéro du RC, des critiques sont apportées contre le maire, Honoré EUZET à propos de l'octroi et aussi à cause des dépassements de crédits pour les travaux du nouveau théâtre, accordés sans consultation du conseil municipal (le RC comme l'AG avaient sorti leur premier numéro le 18.08.1900 - selon le PM des 16 et 17.08.1900)
Quant à la presse, EC et PM, qui sont conservés et en ligne, ne représentent qu'une partie des journaux en circulation à Sète, à cette époque. Ainsi dans une communication d'un certain MARECHAL (ancien officier de marine) où il se plaint de critiques portées contre lui, il écrit au directeur de L'Avant Garde : "On me met sous les yeux le numéro de votre journal du 3 courant où je suis violemment attaqué, je ne sais dans quel but, n'ayant jamais fait de politique et ne voulant pas en faire. Je ne donnerai pas cette satisfaction aux anciens polémistes du Socialisme cettois, de répondre à leurs insultes anonymes (...)" (EC du 06.11.1900).
Conseiller général, il intervient à plusieurs reprises dans l'année. Il s'oppose à la création d'une chambre de commerce à Béziers mais la commission qui a étudié le projet y est favorable ; EUZET parle du "désintéressement indiscuté de la chambre de commerce de Sète" mais le projet est adopté. A la séance du 23.08.1900, avec AUDIBERT ; il renouvelle le voeu demandant l'attribution aux communes du service des inhumations (EC du 24.08.1900). De même, le 22, le conseil général renouvelle un voeu de sa part tendant à la création d'écoles coloniales dans les ports de mer et demandant au ministre de hâter la solution de cette demande (EC du 23.08.1900)
Le 24.12.1900, le maire de Sète, agissant pour le compte des hospices de la ville, obtient la cession du Lazaret et d'un lot comprenant plus de quatre hectares de terrain pour construire un sanatorium maritime (voir le rapport du conseil général, dans sa séance du 23.08.1901)
Un haut fourneau du Creusot à Sète : "La société Schneider, du Creusot, avait jeté son dévolu sur 300 hectares de surface remblayable où elle installa en 1900 un haut fourneau, et où elle projetait l'aménagement d'un chantier de constructions navales, projets malheureusement avortés par suite de circonstances bien étrangères à l'admirable situation qui avait séduit leurs auteurs." (Le port de Cette, en 1918, par la Chambre de commerce de Sète)
C'est surtout en 1901 que l'on verra se multiplier les actions des conseillers municipaux de la minorité d'opposition, AUDOYE et VALLAT mais le PM du mardi 23.10.1900 montre qu'ils sont déjà offensifs en cette fin 1900 : "Samedi soir a eu lieu au théâtre une réunion publique donnée par les citoyens AUDOYE et VALLAT. La réunion composée de 1400 citoyens adopte à l'unanimité un ordre du jour approuvant pleinement les déclarations des citoyens AUDOYE et VALLAT dans le compte rendu de leur mandat ; les engageant à soutenir la lutte de propagande engagée contre les membres du conseil actuel ; blâmant les agissements de la majorité du conseil."
"Tramways électriques. - Toutes les lignes sont actuellement en activité et fonctionnent dans de bonnes conditions. Quelques défectuosités dans le service, obligatoires dans un début, commencent déjà à disparaître. C'est ainsi que la ligne des casernes au pont Viria, vient d'être prolongée jusqu'au pont National et ira, sous peu, nous affirme-t-on, jusqu'à la Bourse. C'est là une heureuse amélioration qui relie directement le quartier des Jardins des fleurs avec le centre de la ville et les halles. D'autres défectuosités disparaîtront certainement, comme a disparu celle-là, au fur et à mesure que ces défectuosités seront reconnues. Il est probable, par exemple, qu'avant peu, et en attendant que la ligne du môle à la gare soit terminée, ce qui demandera longtemps encore, puisqu'il faut construire un pont, il est probable, disons-nous, qu'un abri sera élevé aux extrémités de cette importante ligne, à moins que l'augmentation du nombre des voitures nécessaires à assurer un service régulier, ne permette d'en laisser une en permanence à cet endroit là. Il serait peu pratique, et la Compagnie y perdrait du reste beaucoup, de laisser les voyageurs se morfondre, exposés aux intempéries du temps et dans des endroits aussi exposés, pour attendre l'arrivée d'une voiture. Nul doute s'il en était ainsi, que beaucoup de personnes ne préfèrent s'en aller à pied." (PM du 28.01.1901). Même tonalité dans EC du 28.01.1901 : "Les tramways électriques ont obtenu un grand succès auprès de la population" ; le journal note aussi quelques insuffisances et des améliorations à apporter mais, souligne-t-il : "Il faut s'estimer heureux des résultats obtenus, qui réalisent les espérances les plus optimistes."
"Le tramway de Sète a changé le paysage de la ville, les calèches ont petit à petit disparu. Cette commodité de transport a été un atout pour la ville, surtout pour le tourisme. En particulier, le dimanche, les voyageurs descendaient du train arrivant de Montpellier pour se ruer vers les plages, au Kursaal, au casino ou à la Corniche, où de nombreux bars ou guinguettes permettaient d'oublier une semaine de dur labeur. (...) La concurrence des autobus et des voitures a fait qu'en 1934, après 33 ans de bons et loyaux services, Gaston ESCARGUEL, alors maire de Sète, enverra les tramways à la ferraille." (Article de Michel LEBRETON, p. 143 du n° XL à XLI - 2015-2016 de la Revue d'Histoire et d'Archéologie de Sète et sa Région)
Le 29.12.1901, EC fait le point sur les travaux du théâtre : "La construction de notre nouveau théâtre se poursuit avec une sage lenteur. Si l'extérieur paraît très avancé et si la partie architecturale de la façade est presque terminée et attire les regards, l'intérieur sera plusieurs mois encore occupé par les ouvriers. La salle du foyer est à peine ébauchée. La salle de spectacle et la scène commencent à prendre tournure. (...)" Compte tenu des évènements qui vont suivre, début 1902, il est clair que ce point fait sur les travaux représente l'état du monument au moment du changement de municipalité.
(Photo J.C.E., le 26.09.2017)
Nouveau rebondissement au conseil municipal du 15 novembre : "M. le maire a demandé la nomination d'une commission municipale qui aurait pour mission d'examiner les projets de règlement pour la Bourse du Travail. Il a déposé en même temps un projet indiquant dans quelles conditions cette Bourse pourra être livrée aux syndicats. M. AUDOYE a combattu vivement le projet déposé par M. le maire et dit que jamais les syndicats ne pourront l'accepter. M. VALAT s'est joint à son collègue et a dit que le projet de l'administration municipale est anti démocratique, toutes les Bourses du Travail devant être autonomes. Il a parlé du conseil municipal de Nice qui, quoique réactionnaire, n'a pas porté atteinte à cette autonomie. Le maire a répondu que le projet devant être renvoyé à une commission, il n'en discutera pas le fond. Il a ajouté qu'il est inexact de dire que tous les syndicats ont protesté contre une règlementation qui ferait une Bourse du Travail sous la direction de la municipalité. Il continue en disant avoir reçu treize lettres de syndicats, six demandent l'autonomie ; sept la livraison de la Bourse, sans parler de son autonomie. Qu'enfin sept ne se sont pas prononcés. MM. AUDOYE et VALAT, auxquels se sont joints plusieurs personnes qui sont parmi le public, ont protesté vivement et affirment que la Fédération a écrit au maire, que tous les syndicats avaient déclaré ne pouvoir accepter la Bourse que si elle était autonome. M. DAVID a dit que pour être fixés sur les sentiments des syndicats il n'y aurait qu'à leur demander ce qu'ils pensent de l'autonomie. Le maire a répondu qu'il ne peut se prononcer que sur les documents qu'il a en mains. M. AUDOYE a affirmé que le maire donnerait sa démission si le conseil n'acceptait pas son projet, car il veut tenir les ouvriers sous sa direction. Ce dernier a protesté et déclare avoir trop de respect pour ses collègues pour vouloir leur imposer quelque chose. Il a ajouté que le seul fait de demander la nomination d'une commission qui devra examiner son projet et celui de la fédération ouvrière, indique ses intentions et son désir d'accepter ce que fera le conseil municipal. M. DAVID fait savoir que tous les syndicats se sont prononcés, il y a plus de six mois déjà, pour l'autonomie de la Bourse du Travail, et que les sept, mentionnés par le maire, n'ont fait que réitérer un voeu déjà émis. M. VALAT a affirmé de nouveau que tous les syndicats sont pour l'autonomie, il a adjuré le conseil de ne pas nommer de commission et d'accepter la réglementation de la Fédération. M. AUDOYE a déclaré avoir trois réglements de Bourse du Travail qui sont tous autonomes. Le conseil ayant décidé de nommer une commission avec mission d'étudier un projet de réglementation a désigné pour en faire partie, MM. LÊQUES, GIMOND, ROUSTAN, SANSANNÉ et MOURAILLE. Pendant cette discussion, le maire a dû, encore une fois, faire appeler le commissaire central pour maintenir l'ordre dans le public où quelques personnes manifestaient trop bruyamment. Le calme s'est alors rétabli et les manifestants, qui n'étaient du reste pas de nombre, sont restés silencieux. Pendant cet incident, M. VALAT ayant eu un propos désobligeant pour M. le maire, ce dernier a dit lui dresser procès-verbal." (PM du 18.11.1901) EC donne sur cette séance des renseignements qui complètent ce compte rendu. Le journal rappelle que la Bourse du travail est construite depuis 9 à 10 mois mais qu'elle est fermée depuis son achèvement. Les chambres syndicales ont déjà nommé le secrétaire et le concierge et ont élaboré un règlement mais le maire veut imposer son propre règlement. Les chambres syndicales ont délégué AUDOYE et VALLAT pour le déclarer au maire. Le point d'achoppement essentiel paraît être la nomination du secrétaire que le maire veut imposer. Après la discussion, la proposition du maire de s'en remettre à une commission pour examiner les deux règlements est adoptée par 12 voix contre 4. Quand le public se retire (en conspuant le conseil municipal), 4 conseillers se retirent aussi en protestant. La prochaine séance du conseil municipal est prévue le 19 décembre pour continuer l'exament des affaires portées à l'ordre du jour. (EC du 17.11.1901)
EC du 29.12.1901 fait paraître une lettre ouverte, adressée à Honoré EUZET et aux conseillers municipaux, qui est une véritable mise en demeure : "La Fédération des chambres syndicales et les bureaux de tous les syndicats réunis le 27 décembre 1901, ont décidé de vous renouveler la lettre ouverte qui vous a été envoyée le 13 novembre : La Fédération des chambres syndicales et les bureaux de tous les syndicats, réunis en séance extraordinaire le 12 novembre courant, renouvellent à M. le maire et à MM. les conseillers municipaux tels quels les réglements et statuts concernant la Bourse du travail, élaborés par la commission de la Fédération et acceptés par tous les syndicats de la ville de Cette, sans la moindre modification apportée par le conseil municipal et qui ont été transmis à M. le maire le 6 juin 1901. Ou bien les syndicats se verront, avec grand regret, dans l'obligation de repousser, très energiquement, le projet qui doit être soumis au Conseil et qui ne rentre aucunement dans l'autonomie. Considérant que la dite lettre est restée sans réponse depuis déjà 48 jours. Considérant, en outre, que ladite Bourse du travail devrait déjà être remise aux syndicats depuis longtemps. Considérant, en outre, que la fédération des chambres syndicales et les bureaux des syndicats, appuyés par tous les syndiqués, ont usé de tous les moyens pacifiques auprès de l'Administration et du Conseil municipal. Demandent à la dite administration et au conseil municipal, avant d'employer les derniers moyens, par une manifestation syndicale. De livrer la dite Bourse, dans son autonomie pleine et entière, dans le délai de 7 jours, c'est-à-dire vendredi prochain, 3 janvier 1902. Passé ce délai, nous considèrerons votre silence comme une réponse défavorable aux syndicats et vous laisserons seuls responsables de la manifestation qui sera faite le dimanche 5 janvier 1902. Espérant que vous voudrez bien répondre à notre demande favorablement et dans le délai voulu, veuillez (...)"
En cette année 1901, quel est l'image donnée par Sète ? Une conférence donnée à la mairie par la Société littéraire permet d'en avoir un aperçu. C'est à propos d'un projet de sculpture d'INJALBERT, sur la place de la marine que l'on peut lire : "Notre ville est admirablement organisée pour le travail, mais n'a rien pour flatter les goûts artistiques. Ses quais sont larges, spacieux, ses rues bien percées, bien pavées, mais les embellissements y sont rares. Il y a bien le Château-d'Eau, l'Avenue de la gare, un théâtre bientôt, mais c'est tout et c'est peu. Voilà pourquoi, il est utile que, comme Béziers, Montpellier et toutes les villes importantes, Cette ait son monument artistique qu'iront admirer les étrangers qui visiteront notre citée" (le conférencier THOMAS, dans un article rapporté par le PM du 16.09.1901)
En fait, on en venait à l'ultimatum et il allait falloir trancher : "Dans sa réunion du 30 décembre, la Chambre syndicale des ouvriers metallurgistes et similaires, constatant le peu d'empressement que M. le maire met à livrer la Bourse du Travail, avec son autonomie, aux syndicats, décide, à l'unanimité de ses membres, de se conformer aux décisions prises par la Fédération dans sa séance du 27 décembre dernier, réclamant à nouveau la remise de la Bourse du Travail pour le 3 janvier 1902, sans restriction aucune sur les réglements présentés par ladite Fédération. - Pour le Syndicat et par ordre, le secrétaire." (PM du 01.01.1902)
Dans le même numéro du PM, le journaliste dévoile les coulisses d'une négociation forcée entre la majorité et la minorité du conseil municipal : "Le conseil municipal est convoqué pour demain en séance officieuse. Le but de cette réunion est l'examen d'une proposition de la municipalité de démission du conseil municipal. Voici à la suite de quels incidents cette décision a été prise : Ainsi que nous l'avons annoncé, la commission nommée par le conseil municipal pour l'étude d'un réglement de la Bourse du Travail devait se réunir avant-hier soir, à six heures. Au moment où cette commission allait délibérer, ou était en délibération, nous ne pouvons préciser ce point, M. AUDOYE se présenta et prit place dans la salle. Invité à se retirer, il refusa ; sur l'initiative du maire, la commission se rendit dans le cabinet de ce dernier. Elle y fut suivie par M. AUDOYE, qui refusa de nouveau de se retirer. Le maire envoya alors chercher le commissaire central. C'est en attendant l'arrivée de ce dernier, car il était parti de la mairie, et à la suite des propos échangés de part et d'autre que la démission collective du conseil aurait été décidée. M. AUDOYE, au nom de la minorité, et le maire auraient, au nom de la majorité, pris l'engagement d'honneur de se retirer et de faire le corps électoral juge de la division qui sépare les membres du conseil municipal. Cette décision est heureuse. Elle est la seule solution raisonnable à une situation qui ne pouvait continuer plus longtemps, et cela dans l'intérêt de la ville et aussi des intéressés. Etant donné l'acuité des rapports, il est probable, en effet, que cela aurait fini mal pour tous. C'est ce que tout le monde semble avoir compris. C'est, certes, une "sortie par le haut", intelligente, mais comment Honoré EUZET a-t-il pu se mettre lui-même dans cette impasse pour une question qui n'était pas essentielle, du moins à nos yeux d'aujourd'hui ?
En tout cas, en ville, la situation devient anarchique : le temps n'est plus à la négociation ! "Hier soir, à neuf heures, les ouvriers des chambres syndicales devaient se réunir dans l'école de la rue de la Charité pour délibérer au sujet de la Bourse du Travail. M. le maire ayant refusé de leur livrer la salle malgré les instances de M. BÉNÉZECH, député de Montpellier, arrivé hier à Cette, les ouvriers syndiqués ne purent se réunir. Ils formèrent alors un monôme et au nombre de 5 à 600, les manifestants parcoururent la ville en chantant : "C'est la Bourse qu'il nous faut !" La Carmagnole et le Ça ira ! La police suivit les manifestants mais sans les disperser. Ceux-ci se portèrent en masse sur le plan de la Poissonnerie et, du haut du perron, quelques citoyens haranguèrent la foule et décidèrent d'organiser une nouvelle manifestation ce matin, à dix heures." (EC du 05.01.1902) "Le monôme s'est reformé ensuite, au chant de l'Internationale en parcourant les rues de la ville ; il s'est arrêté quelques minutes devant la mairie et s'est rendu enfin devant l'habitation du maire qu'il a salué par des cris peu sympathiques. (EC du 06.01.1902) Le PM donne à peu près les mêmes informations mais en passant sous silence l'humiliation faite au maire devant son domicile : " (...) De la mairie, les manifestants se sont dirigés vers le local de la Fédération, situé Grand'Rue. Toujours calmes, les manifestants se sont rangés sur le plan de la Marine (marché aux poissons), pendant que le bureau de la Fédération délibérait sur les décisions à prendre. Après une délibération assez courte, l'un des membres du bureau est venu donner rendez-vous pour ce matin à dix heures aux syndiqués pour se rendre à la mairie, y porter le référendum des chambres syndicales. Les manifestants se sont alors reformés en monôme et dirigés vers la mairie, toujours en chantant : "C'est la Bourse qu'il nous faut". (PM du 05.01.1902) Comme prévu, une nouvelle manifestation a lieu le lendemain : "Hier matin vers onze heures, la deuxième manifestation projetée a eu lieu sous les balcons de l'hôtel-de-ville. Une centaine d'ouvriers syndiqués ayant à leur tête les conseillers de l'opposition y assistaient. M. AUDOYE, accompagné de quelques uns de ses collègues, se présenta à la porte du cabinet de M. le maire, mais n'ayant trouvé que le secrétaire général, il redescendit et, de l'escalier d'entrée, s'adressant à la foule, il protesta contre l'absence du maire et dit qu'ils reviendrait ce soir à six heures, pour présenter au maire les desiderata des chambres syndicales. La police assistait impassible à cette manifestation qui n'a pas eu d'autres suites." (EC du 06.01.1902) A la lecture de ces faits, on se rend compte que les syndicats étaient en train de gagner la "bataille de l'opinion" mais encore fallait-il le concrétiser dans les urnes.
Le 08.01.1902, la majorité du conseil municipal tente de redresser la situation en faisant afficher sur les murs de la ville un long texte donnant le point de vue des élus majoritaires. Le titre, à lui-seul, résume la situation : "La vérité sur la Bourse du Travail". Les arguments essentiels sont qu'il faut distinguer entre les vrais syndicalistes et ceux qui n'ont d'autre objectif que de lutter contre la majorité socialiste du conseil municipal, en faisant de la Fédération "une citadelle", d'où ils ont lancé "d'insolentes sommations devant lesquelles, ils le savaient, des hommes libres et dignes ne pouvaient jamais s'incliner". Bref, c'est à cause de ces manoeuvres grossières que la Bourse du Travail n'a pas été encore livrée aux syndicats. Au passage, la majorité ne manque pas de ridiculiser les manifestants : "Nous félicitons les sages ouvriers, syndiqués ou non, qui, restés sourds à des incitations malsaines n'ont point voulu s'associer à la manifestation annoncée à grand fracas la faisant ainsi piteusement avorter, couvrant de ridicule ceux-là même qui l'avaient organisée". Surtout, le texte revient sur le coeur de la discorde, l'autonomie de la Bourse du Travail : "On a parlé d'autonomie. Mais qui a jamais songé à asservir la Bourse du Travail, si ce n'est ceux qui malheureusement, imposent à cette heure, mais pas pour longtemps, leur tyrannie aux Syndicats, et la pire de toutes, celle de l'incohérence et de la brutalité. Il est bon que l'on sache que la commission municipale de la Bourse du Travail, d'accord avec la municipalité, a fixé les points suivants qui sont fondamentaux : 1/ La Bourse du Travail autonome s'administrant par une commission composée des délégués des Syndicats, lesquels sont nommés par les divers Syndicats ; 2/ Cette commission nommant elle-même dans son sein, un secrétaire général non salarié responsable ; 3/ Il est adjoint à cette commission et aux ordres du secrétaire général un secrétaire nommé par le concours auxquels participeront seulement, exclusivement les ouvriers syndiqués. Les Syndicats font sans aucun contrôle d'aucune sorte leur règlement intérieur et dressent également leurs budgets. Telles sont les grandes lignes du règlement que le conseil municipal doit soumettre aux Syndicats. Il est impossible d'y voir rien contre l'autonomie réclamée justement par les Syndicats et dont autant et plus que quiconque nous sommes les partisans. La vérité est que les adversaires du conseil municipal ont trompé les ouvriers et que c'est sciemment qu'ils ont jeté le désordre dans les esprits comme ils cherchent à le porter dans la rue. Nous avons cru qu'il fallait démasquer ces coupables intrigues et dire à ces hommes, à ces ennemis des syndicats : Vous avez perdu votre temps, les ouvriers syndiqués ont trop de bon sens et sont trop honnêtes pour vous suivre plus longtemps dans la voie dangereuse et funeste où vous avez voulu les engager. Ils sauront éviter les pièges que vous leur tendez. Vive la République démocratique et sociale !" Suivent les 25 noms des conseillers de la majorité dont, en premier Honoré EUZET (PM du 08.01.1902.
Cette - Remise de pouvoirs : samedi 11.01.1902, à 15 H 30, "M. EUZET, maire de Cette, a remis les pouvoirs à la délégation spéciale nommée par décret présidentiel." (PM du 13.01.1902)
Le 28.01.1902, le PM donne les résultats du premier tour des élections municipales : inscrits 9489, votants 5019, bulletins nuls ou blancs 80, suffrages exprimés 4939. Un seul élu : Antoine CAYROL avec 2549 voix. L'HEUREUX-MOLLE arrive ensuite avec 2466 voix. Honoré EUZET n'est que 23ème avec 2386 voix, cependant que Louis AUDOYE en a 2360 et Eugène MASSONAUD 2558. Un second tour est nécessaire. A la même date, l'EC décrit l'ambiance, tire les leçons du premier tour et se fait philosophe : "Par un retour qui peut faire philosopher sur la fragilité des grandeurs humaines, les socialistes qui avaient élevé M. EUZET au pouvoir ont voté comme un seul homme contre lui, à la suite des incidents de la Bourse du Travail, que nous avons relatés. La campagne électorale avait été des plus acharnées. L'opposition à la tête de laquelle s'étaient placés les deux terribles adversaires du maire : MM. AUDOYE et VALAT, s'était accrue de la présence de Me MOLLE, un jeune avocat qui ne manque pas de talent et qui a donné un certain relief à la liste AUDOYE. L'administration sortante, au dire de ses amis, ne s'est pas défendue avec autant d'énergie que ses adversaires en ont mis à la combattre, parce que, dit-on, elle escomptait le succès. Grande et générale fut la surprise quand on apprit que les listes rivales s'égalisaient presque et qu'un deuxième tour de scrutin devenait nécessaire. La joie fut grande parmi les ouvriers, qui manifestaient leurs sentiments par des chants de victoire, non seulement au dehors, mais encore dans la salle de vote. Un socialiste monta sur la table et entonna l'Internationale avec reprise du refrain en choeur. Le pauvre délégué préfectoral, lui, ne paraissait pas à la noce ! Les résultats furent connus très tard : à 2 heures du matin. La foule était encore assez nombreuse devant la mairie, des femmes même y stationnaient. Les commentaires allaient bon train. La leçon qui se dégage du scrutin d'hier, c'est que généralement les conservateurs se sont abstenus. Ils sont fatigués de jouer le rôle de dupes et d'être traités en parias, et ils ont voulu le faire sentir. Du côté même des voix républicaines qui sont allées à la liste EUZET, il y a eu de nombreuses radiations qui ont porté principalement sur les francs-maçons, les fanatiques de libre-pensée et les laïcisateurs à outrance. C'est ainsi que le sectaire MOURAILLE, le laïcisateur acharné de l'hospice, se voit relégué au 42ème rang et restera probablement sur le carreau au 2ème tour. Ceux qui croient se rendre populaires en faisant de l'anticléricalisme feront bien de méditer cet évènement. Plus loin, le journaliste ajoute : Le bruit courait hier en ville que M. EUZET avait l'intention de se retirer de la lutte électorale. Son comité doit tenir ce soir une réunion à ce sujet." (EC du 28.01.1902)
Dans cette continuité, EC fait ensuite un appel aux conservateurs pour le second tour : "Ne serait-il pas ridicule, d'autre part, d'aller porter nos voix à celui qui nous a froissé dans tous nos sentiments religieux en frappant les dames de Saint Maur, les Filles de Saint Dominique et les soeurs gardes-malades dont celles-ci inspirent même le respect aux cultes dissidents ; en interdisant en 1898, la procession de la Fête-Dieu dans les cours de l'hospice Saint-Charles, sous le futile prétexte que les chants religieux dérangent les malades. Du reste, M. Honoré EUZET n'avait-il pas dit qu'il allait serrer la vis à la réaction ? Hélas ! nous l'avons bien vu. Mais nous avons une force : il faut aujourd'hui nous en servir. Ne pouvant être au pouvoir, montrons que nous sommes capables de tenir en échec celui qui a la prétention de nous asservir. C'est donc contre le franc-maçon EUZET que nous devons porter nos voix pour lui rappeler d'abord le mal qu'il nous a fait et tenir en garde ceux qui arrivent contre le désir qu'ils pourraient avoir à nous nuire. Nous engageons donc nos amis à voter contre le franc-maçon EUZET et le laïcisateur huguenot MOURAILLE et à composer une liste d'où seront exclus les noms des candidats qui se sont signalés par leur haine de sectaires. Nous comptons que notre appel sera entendu et compris. - Le comité conservateur et libéral." (EC du 02.02.1902)
Le 04.02.1902, le PM donne les résultats du second tour. "La liste de concentration socialiste (opposée à la liste EUZET et menée par MOLLE, MASSONAUD et AUDOYE) est élue avec une importante majorité. 634 électeurs qui n'avaient pas voté dimanche dernier, l'ont fait avant-hier (...) On constate que la liste de la concentration socialiste a augmenté en chiffre rond de 655 voix et celle du comité central (la liste menée par Honoré EUZET) de 35, ce qui tend à établir que l'on a voté davantage qu'au premier tour de scrutin." Les résultats sont, en effet, éloquents pour les leaders des deux listes : L'HEUREUX-MOLLE arrive en première position avec 3358 voix, immédiatement suivi par Eugène MASSONAUD (3131 voix) et Louis AUDOYE (3052 voix). Quant à Honoré EUZET, il est 55ème sur 58, avec seulement 2375 voix. "Après la proclamation du scrutin, M. MOLLE a dit quelques mots aux nombreuses personnes qui se trouvaient dans la salle des mariages et a promis la remise de la Bourse du Travail, avec son entière autonomie, aux Syndicats ouvriers".
Ce résultat est donc catastrophique pour Honoré EUZET qui s'est entêté sur cette question de l'autonomie de la Bourse du Travail. Cependant, si l'on comprend facilement la position des ouvriers, socialistes ou non, syndiqués ou non, une autre raison explique son échec : il faut la chercher du côté des républicains modérés et des conservateurs. Ceux-ci ont d'abord lancé l'idée d'une liste qui leur serait propre : "Il nous faut une liste à nous ... catholiques et conservateurs. D'ailleurs, déjà une liste s'étale sur nos murs : celle de l'ancien conseil, complétée par cinq nouveaux membres dont les sentiments antireligieux nous sont connus - et qui ne changeront donc rien à la politique sectaire suivie par leurs aînés. De l'autre côté du parti socialiste, nous ne pouvons espérer mieux." Devant ce constat, un "groupe de catholiques" lançait donc un appel pour la constitution d'une liste qui pourrait s'opposer aux socialistes (EC du 23.01.1902). Mais il faut croire que ces arguments n'ont pas suffi : il n'y a pas eu de liste. Une autre position a, alors, été proposée : le vote nul ! "Sans discuter longuement les actes du conseil démissionnaire, on peut sans crainte affirmer qu'il fut surtout imbu d'esprit franc-maçonnique, c'est-à dire antireligieux et sectaire. Il est impossible que Cette reste plus longtemps indifférent au grand mouvement patriotique et purificateur de la Patrie Française. Que tous les électeurs qui veulent le relèvement de la patrie compromise votent en masse dimanche pour son courageux président, Jules LEMAÎTRE. (la ligue de la patrie française : organisation politique d'orientation nationaliste, fondée le 31.12.1898, elle a pour objectif de fédérer les antidreyfusards) A dimanche donc ! biffons tous les noms des socialistes et sur les mêmes listes, inscrivons le nom du grand patriote Jules LEMAÎTRE." (EC du 24.01.1902) Deux jours plus tard, le même journal précise son point de vue en faveur de l'abstention (sous couvert d'une communication par un groupe de militants), en se moquant et en critiquant les modérés qui pourraient voter pour "le moins mauvais" des socialistes ... Honoré EUZET (il faudra probablement retenir cette image que l'ex-maire de Sète a toujours dans une partie -mais une partie seulement - de la population modérée et conservatrice) : "Dans cette élection, deux listes socialistes seront donc en présence, la liste du millerandiste et franc-maçon EUZET, et la liste AUDOYE. Les conservateurs et les libéraux, oubliant les ignominies dont ils ont été et sont encore les victimes iront, honteux peut-être, donner leur voix à l'homme qui n'a exercé jusqu'à présent son autorité que sur quelques dévotes, dont le crime avait été de chercher à conjurer, en 1885, par des prières publiques, les dangers d'une épidémie qui faisait dans les rangs de notre population de grands ravages. Ils iront à l'homme qui supprima d'un trait de plume la subvention accordée aux classes gratuites des Dames de Saint-Maur ; A celui qui a proposé, ou plutôt ordonné à son docile conseil d'émettre un avis défavorable contre les Dominicaines établies dans notre ville (...) A celui qui a prononcé à la distribution des prix du collège le discours sectaire que chacun connaît. Ils iront à ce soi-disant administrateur qui, entré à la mairie avec un budget parfaitement équilibré au moyen d'un emprunt de 130.000 francs, arrive, après quelques années, à un déficit d'environ 200.000 francs. Ils voteront pour celui qui est la cause de l'augmentation annuelle des impôts, dont souffrent les plus humbles et les petits. Ils voteront pour la liste où figure le laïcisateur MOURAILLE, à la politique duquel le citoyen EUZET est certainement lié. Et le lendemain du vote, ils se diront entre eux en se frottant les mains Ma foi, nous avons cru devoir, en conscience, donner la préférence au moins mauvais de nos adversaires ! Et le moins mauvais aura été naturellement le libre penseur EUZET (...) Quant à nous, quoi qu'il arrive, nous prêcherons l'abstention et nous nous abstiendrons. - Un groupe de militants "(EC du 26.01.1902). On voit ici combien la critique a été forte contre EUZET et la politique anti-religieuse qu'il a menée avec son conseil municipal. Finalement, on trouve dans EC des injonctions à voter blanc, à voter nul, à s'abstenir et, surtout, à ne pas soutenir la liste EUZET. Celui-ci a donc dû subir, à la fois, les critiques de la gauche et de la droite, ce qui explique son échec cuisant.
(Archives de l'Assemblée nationale, sur le site de M. Jacques BLIN)
Même ostracisme politique au sein même de la mairie, comme c'est souligné dans le PM du 16.04.1910, avant le premier tour des élections législatives, quand ce journal qui soutient SALIS (député sortant) critique violemment MOLLE (candidat à la députation) sur sa gestion comme maire de Sète : "A peine étiez-vous arrivé à la mairie que vous avez révoqué, sans vous soucier des misères que vous créiez, des employés communaux, dont le seul tort était de ne pas partager vos idées politiques." On sait, cependant, que cette pratique était habituelle et qu'Honoré EUZET l'a, lui-même, appliquée.
(Photo J.C.E., le 26.09.2017)
C'est toujours pour soutenir ces investissements industriels qu'il émet un voeu au Conseil général, voeu auquel l'assemblée départementale s'associe, à l'unanimité : "Considérant que le département et la région ont adhéré avec empressement à l'installation des usines Schneider sur une partie des étangs des eaux blanches et d'Ingril, lesquelles comprennent ou comprendront des hauts fourneaux et des ateliers de construction navale ; Que l'approbation unanime apportée aux enquêtes par les populations consultées, indique combien celles-ci ont compris, dès le début, quels grands avantages elles pourraient retirer de cette création ; Que déjà, d'ailleurs, de nombreux ouvriers trouvent dans et par ces usines un travail régulier ; Considérant toutefois que la création par MM. SCHNEIDER et Cie, du Creusot, de leur usine a toujours été subordonnée à l'exécution de divers travaux en vue de permettre à des navires de passer directement de la mer à l'étang, par le canal maritime, le canal latéral et le canal de la Bordigue ; Que le ministre des travaux publics a déposé son grand programme tendant à compléter l'outillage national par l'amélioration des cours d'eaux et des ports ; Considérant que le projet de travaux compris dans la série A et dont l'énumération est ci-dessus, se trouve incorporé dans ce grand projet ; Considérant que la durée d'exécution du programme ministériel est fixée à 16 ans ; Qu'en ce moment, le projet est arrêté au Sénat et risque d'y échouer ; Vu les engagements contractés, vu les sacrifices faits par la Chambre de commerce et le Creusot ; Dans l'intérêt du port de Cette, pour le bien de la marine marchande si éprouvée et que ces retards privent d'un frêt considérable ; Considérant surtout que en raison des engagements pris il serait injuste de faire subir à des travaux reconnus indispensables le sort de l'ensemble du projet ; Le Conseil général demande avec instance à M. le ministre des travaux publics de vouloir disjoindre du grand programme de travaux projetés ceux de la série A pour en faire un projet spécial." (JC du 29.08.1902)
Dernière occasion de clivage politique en 1902 : l'élection législative. Le JC soutient MOLLE qui, dit-on, fait une tournée triomphale dans la région, à Bouzigues, à Loupian, à Lapeyrade. Inversement, le journal du 10.04.1902 reprend les argument de MOLLE pour critiquer SALIS à qui on reproche de "s'être solidarisé avec l'ancien maire M. EUZET" ; on fustige le trio SCHEYDT (qui a refusé toute subvention aux chambres syndicales), EUZET (qui a "refusé de livrer la Bourse du Travail à moins qu'il n'en soit le maître et alors que contrairement à son programme, il l'avait faite attendre sept ans" et SALIS (qui a refusé aux ouvriers d'user de son influence auprès du préfet pour que soit rendue justice aux ouvriers, etc.) Finalement, SALIS est réélu, au second tour, après la démission de MOLLE. Sur Sète même, il obtient 2158 voix (contre 2085 au premier tour), loin devant ses autres adversaires (VERDALE : 157 voix), DOUMET (17 voix), CACHIN (3 voix) et JANUS (2 voix).
"Le groupe d'Etudes sociales et le groupe du Parti ouvrier français de Cette, qui avaient soutenu les cinq membres de la minorité, appartenant à cette dernière organisation, contre le renégat EUZET, ex-maire de Cette, organisèrent un Congrès et y présentèrent la candidature du camarade CACHIN, qui était venu les aider dans la lutte soutenue, aux élections municipales, contre la liste EUZET. La scission se produisit et la candidature MOLLE, maire élu sur le programme du P.O.F. fut soutenue par la majorité du Conseil municipal, contre la candidature SALIS, radical-socialiste, et DOUMET, progressiste. Le citoyen CACHIN fut alors soutenu par ces deux groupes qui l'avaient présenté à la candidature de protestation. Au premier tour, cette candidature obtint 120 voix. Au deuxième tour, les révolutionnaires, d'un commun accord, se sont abstenus. Les électeurs qui avaient voté pour MOLLE, battu au premier tour, s'abstinrent, et le candidat officiel fut élu au deuxième tour, contre DOUMET, progressiste. Le candidat SALIS aurait été battu si les partisans de MOLLE, maire actuel de la ville de Cette, jeune arrivé en politique, avaient soutenu la candidature CACHIN." Ce texte est un extrait du compte rendu du premier congrès national du Parti socialiste de France (Unité socialiste révolutionnaire) qui s'est tenu à Commentry les 20, 27 et 28.09.1902. Le rapport pour l'Hérault est écrit par "le citoyen CHATTENET", l'extrait ci-dessus concerne la troisième circonscription dans l'arrondissement de Montpellier, pour les élections législatives [Lille, imprimerie ouvrière M. DHOOSSCHE, 147, rue d'Arras - cote à la Bibliothèque nationale de France : L b57 13648 (1)].
Voici quelques extraits de ce mémoire parus dans le JC :
- "(...) Mais il nous a paru qu'il fallait que chacun sût quelle était la situation financière de la commune, quand nous avons abandonné la gestion de celle-ci, le 31 décembre 1901, afin de dégager entièrement notre responsabilité (...) Et d'abord, nous affirmons que depuis cinquante ans, aucun conseil municipal, même parmi ceux du second empire, qui étaient réputés avoir une compétence plus étendue que ceux venus sous la République et composés en grande partie d'ouvriers, nous affirmons, disons-nous, que depuis cinquante ans, aucun conseil municipal n'a produit ce qu'a produit le nôtre et n'a laissé une situation financière plus nette en ce qui toutes les recettes et les dépenses courantes ayant un caractère permanent (...) C'est bien là ce qui explique qu'après avoir été longtemps menacé de voir notre gestion vérifiée par un inspecteur des finances, nous attendons encore depuis près d'un an cette vérification annoncée avec fracas (...) Ah ! Si on nous refuse cette satisfaction, c'est qu'on a dû s'apercevoir bien vite qu'une inspection approfondie de notre gestion financière ne pouvait qu'aboutir à des éloges que nous aurions eu conscience d'avoir mérités et qu'en conséquence nous aurions acceptés avec plaisir sans la moindre fausse modestie (...)" (JC du 05.11.1902)
- "Le nouveau Théâtre (...) Nous nous hatons de dire que nous nous félicitons de l'avoir édifié dans des conditions de solidité, de luxe et d'art qui en font un superbe monument. Nous nous en félicitons pour plusieurs raisons. D'abord, parce que quelle que soit la somme qui sera dépensée pour sa construction, cette somme est et restera une partie de la fortune de la Commune, une partie de cette fortune que rien ne pourra entamer ni détruire, fortune que nous n'avons point dispersée mais transformée en faisant un emploi utile, nous nous en félicitons parce que nous avons confiance en l'avenir de notre cité, nous nous en félicitons enfin parce qu'en socialistes sincères, dévoués et pratiques nous ne regretterons jamais d'avoir dépensé de l'argent qui sorti de la bourse des riches est entré sous forme de salaires dans la modeste escarcelle des ouvriers. Au surplus nous serions vexés certainement si nos concitoyens pouvaient croire que nous nous laissons émouvoir par les âneries débitées à propos du Théâtre. Qu'il soit bien entendu que nous ne nous présenterons pas devant eux dans une humble posture. Au contraire ! Le Théâtre est notre oeuvre, oeuvre que depuis cinquante ans aucun maire n'avait osé entreprendre. Il restera comme le témoignage de notre courage, de notre initiative. Il restera l'honneur de l'ancien Conseil municipal (...)" (JC du 08.11.1902)
Bien entendu, le bilan de la municipalité précédente est également fait par la nouvelle équipe municipale. C'est aussi l'occasion pour le PM de rappeler quelle est sa ligne de conduite par rapport aux communications qui lui sont soumises. C'est ce que fait le journal dans son numéro du 15.11.1902 : "Quelques personnes nous ont manifesté leur surprise à ce que nous n'ayons publié que l'esprit de la lettre de M. EUZET et ayons supprimé un passage de la lettre de M. MOLLE, passage qui, du reste, n'était d'aucune utilité pour la clarté de l'idée émise. Notre réponse sera nette. En cette circonstance, nous avons continué à suivre la ligne de conduite que nous nous sommes imposés et que nous porsuivrons sans nous préoccuper des colères, des haines même, contre notre journal ou contre ses collaborateurs. Nous avons supprimé et nous supprimerons toujours, dans les communications qui nous seront adressées, les passages que nous considèrerons comme susceptibles de creuser davantage le fossé qui divise le parti républicain. Que l'Eclair, journal réactionnaire, fasse autrement. Il est dans son rôle d'antirépublicain. Mais ce serait sortir du nôtre que d'agir comme ce journal. Ceci dit, nous reproduisons, sans commentaires, les quelques lignes que l'Eclair a publiées à propos des lettres de M. MOLLE et de M. EUZET. Ces lignes demandent à être méditées. Voici ce que nous dit le journal clérical de Montpellier : Comme on le voit, nos bons socios se traitent bien entre eux ! La lutte qui s'anonce ne manquera pas, sans doute, d'intérêt ; nous tiendrons nos lecteurs au courant des coups que se portent ces apôtres de la fraternité républicaine" En effet, le 12.11.1902 EC publie une lettre de MOLLE à EUZET (pour l'inviter à discuter des finances au théâtre de la ville) et la réponse d'EUZET : "M. MOLLE, Je ne tomberai pas dans le guet-apens que visiblement vous préparez. Je ne discuterai pas avec un imb... tel que vous." Le 13.11.1902, le PM reprend la lettre de MOLLE en en supprimant un passage, et en résumant la réponse d' EUZET quant à son refus mais sans reprendre les mots injurieux.
Le même jour, le 15.11.1902, EC et JC rapportent les débats qui ont eu lieu dans une réunion (le 13), au théâtre municipal de la Grand'Rue, présidée par le maire, entouré par les membres du conseil municipal.
MOLLE fait un discours incisif visant à démolir la politique municipale de son prédécesseur. C'est surtout EC qui donne le plus de détails : "Citoyen, dit-il, comme c'est un imbécile qui va parler, vous voudrez bien lui accorder toute votre indulgence. Ce coup droit porté à l'ancien maire qui qualifia ainsi son successeur provoque une explosion de rires et d'applaudissements. M. MOLLE pousuit, tenant à la main le mémoire que M. EUZET a fait paraître pour défendre sa gestion municipale (...) Ce que nous contestons, c'est que les dépenses engagées l'aient été avec utilité : M. EUZET déclare qu'il a su trouver en dehors des 600.000 francs de l'emprunt pour le théâtre 200.000 francs d'économies, sans établir de charges nouvelles et qu'il a laissé en caisse un excédent de recettes de 75.000 francs. Voici la vérité : Tandis que la ville obtenait du Conseil général 20.000 francs de réduction sur sa part contributive, les contribuables n'en ont pas bénéficié, car, d'une autre côté, ils étaient augmentés de 3 centimes additionnels ; d'autre part, les droits d'octroi ont subi une augmentation de 4 décimes ; au total, les contribuables ont eu à payer, de 1895 à 1902, 22 centimes additionnels représentant 304.000 francs d'impôts supplémentaires ! Quant au prétendu excédent de 75.000 francs que dit avoir laissé M. EUZET, il se réduit à 35.787 francs si l'on en déduit les 10.000 francs de la subvention gouvernementale pour le collège que la ville n'a pas encore reçus et les 30.000 francs de la vente des terrains de la Corniche qui ont servi à payer M. RICCARDI, l'entrepreneur du théâtre. Au résumé, pour boucler son budget, M. EUZET a porté au chapitre des dépenses des crédits souvent insuffisants, à tel point que, pour les équilibres, le conseil actuel a dû voter, depuis son arrivée à la mairie, une somme de 24.596 francs de crédits supplémentaires.
Après avoir fait l'exposé du budget de 1903 que l'administration actuelle veut faire sincère, M. MOLLE aborde la question du théâtre. Le projet établi par M. EUZET était loin d'être celui d'un bon administrateur. Pour n'être pas critiqué, il avait laissé croire que la construction d'un nouveau théâtre ne dépasserait pas 600.000 francs. Il avait fait tout son possible pour que la commission des bâtiments civils ne relevât pas ce chiffre. Ce projet comprenait des murs de carton et une charpente insuffisante qu'il a fallu doubler. On avait omis d'y faire figurer les frais de chauffage et de ventilation (45.000 francs), l'éclairage (40.000 francs), la décoration, le paratonnerre, les verrières, la dorure, les châssis des décors, les cordages etc. etc. M. MOLLE explique ensuite comment M. EUZET a trouvé, au moyen de virements, les 300.000 francs qu'il se flatte d'avoir économisés. C'est d'abord 18.000 francs destinés à réparer un syphon, 20.000 francs qui devaient servir à l'étude d'adduction des eaux de l'Hérault, 5000 francs portés pour la station zoologique, 2000 francs provenant de la vente de terrains à la butte-ronde, 1000 francs touchés pour l'assurance d'un incendie à l'hospice, 14.000 francs de boni des étaux de la halle, 47.330 francs de boni sur le budget 1900, 16.000 francs destinés à l'agrandissement de l'école pratique, 4000 francs pour des chapitres additionnels de 1901, 38.000 francs des terrains de la Corniche. Total : 214.133 francs, auxquels il faut ajouter 63.635 francs des rabais imposés aux adjudicataires et 47.992 francs qui devaient servir à l'entretien des bâtiments communaux. A chaque énumération, l'orateur pose la question : Où allaient s'engouffrer tous ces crédits ? - Au théâtre ! répondent en choeur les auditeurs. Ainsi la salle entière trouve à s'égayer au cours d'une démonstration de chiffres qui aurait pu être très monotone."
Et MOLLE conclut : "Le théâtre coûtera 1.700.000 francs. Nous mettons M. EUZET au défi de contester ce chiffre. Il faut donc trouver 650.000 francs environ (chiffre qui devait suffire au début pour sa construction). On pourrait certainement se le procurer en ratiboisant chaque année, comme l'a fait M. EUZET, une centaine de mille francs sur les différents chapitres du budget, mais une bonne administration ne doit pas user de pareils procédés qui porteraient l'achèvement du théâtre à six ou sept ans d'ici. Un emprunt est indispendable. (...) La séance prend fin par l'adoption de l'ordre du jour suivant : Les citoyens réunis au théâtre municipal le 13 novembre 1902 au nombre de 1500, blâment le citoyen Honoré EUZET, conseiller général et ex-maire de la ville de Cette, d'avoir laissé les finances de la ville dans une situation déplorable et félicitent le citoyen MOLLE, maire, et le conseil municipal d'avoir fait l'exposé d'une façon nette et précise. Considérant que par son refus formel d'assister à cette réunion le citoyen Honoré EUZET donne une preuve de sa mauvaise gestion, l'assemblée lui demande sa démission du Conseil général." Comme le PM, le JC fait un résumé de cette séance (mais beaucoup plus succinct) dans son numéro du 15.11.1902, en rappelant surtout l'emprunt qui est proposé par le maire. On comprend, dès lors pouquoi Honoré EUZET a refusé d'aller à cette réunion qu'il avait qualifiée de "guet-apens" 'JC du 13.02.1902)
(place Victor-Hugo, de 1899 à 1914)
Au conseil général, FERRASSE dépose un voeu pour féliciter et soutenir le ministre Emile COMBES pour sa politique anticléricale. Ce texte est signé, notamment, par Honoré EUZET (EC du 26.08.1903)
(Guide de l'Hérault 1904, vue 863 sur le site en ligne des AD 34)
Le nouveau théâtre "Pendant de très longues années la ville de Cette n'eut pas de théâtre lui appartenant et c'est dans une petite salle de la Grand'Rue, appelée salle Jannin qu'avaient lieu les représentations théâtrales. Longtemps les municipalités successives s'imposèrent de lourds sacrifices pour entretenir dans cette salle de spectacle une troupe sédentaire. Malheureusement l'exiguïté de la salle et son manque total de confortable, le défaut d'adaptation de la scène aux besoins modernes, en même temps que les difficultés d'accès et l'insuffisance des dégagements ne favorisèrent pas les recettes directoriales et rarement on vit un directeur arriver jusqu'au bout de la saison pour laquelle il avait pris des engagements. La situation déplorable dans laquelle se trouvaient tous les directeurs préoccupa sérieusement les administrations qui se succédèrent à la mairie de Cette. On essaya alors une combinaison avec les villes voisines, dont les troupes allaient donner à Cette un certain nombre de représentations par semaine. Les résultats financiers ne furent pas meilleurs. Alors, et pour ne pas priver tout à fait la population cettoise de spectacles, l'administration décida de conserver la salle Jannin en location et de la livrer, moyennant une redevance de 100 francs à toutes les troupes et tournéees de passage qui désireraient s'arrêter à Cette. Les tournées eurent bientôt le même triste sort que les directions et l'on vit surtout des troupes obligées de renoncer à jouer faute de spectateurs. Il fallait donc remédier à cet état de choses et créer une salle de spectacle pouvant répondre aux besoins d'une population de 35.000 habitants.C'est au mois de mai 1896 que l'administration Euzet décida de faire ériger à Cette un théâtre municipal. L'idée n'était d'ailleurs pas nouvelle et depuis une dizaine d'années de nombreux projets avaient été soumis aux municipalités précédentes. A notre connaissance, le premier en date était dû à M. POLGE, architecte de Montpellier ; M. NAHMENS devait avancer les fonds nécessaires. Le deuxième fut proposé par M. VIMEUX, représentant de M. DROSSE, de Lyon ; ce projet, dit-on, avait été conçu par M. CASSIEN-BERNARD, l'architecte du Grand-Théâtre de Montpellier. M. CARLIER, architecte à Montpellier, arriva troisième, se présentant comme entrepreneur pour réaliser l'exécution d'un théâtre provisoire pour la somme forfaitaire de 250.000 francs. La quatrième proposition fut faite par M. BÉRAIL, ingénieur du service des eaux à Cette, qui projetait d'installer sur la promenade du château d'eau un théâtre appelé théâtre hydraulique. Enfin l'offre la plus récente fut adressée par une société marseillaise qui offrait de construire un théâtre provisoire en même temps qu'elle effectuerait une série d'autres travaux. Je passe sous silence un certain nombre de projets fantaisistes comme celui de transformer en théâtre l'église Saint-Louis. Toutes ces propositions, tous ces projets n'ont pu aboutir soit par manque de persévérance de la part de ceux qui les avaient mis en avant, soit par suite de la trop grande importance des travaux à exécuter. C'est alors que l'administration Euzet en mai 1896 décida l'abandon de l'ancien théâtre et la construction d'un nouveau. L'emplacement était tout désigné : c'était le petit terre-plein de l'avenue Victor-Hugo, manquant peut-être de largeur, mais convenant d'une manière parfaite à l'édification d'un monument de ce genre. Le théâtre ne pouvait que contribuer à l'embellissement de ce quartier, le plus beau certes de la ville. isolé de toutes parts, sa façade principale donnant sur une avenue largement ouverte, à proximité de la gare des voyageurs, desservi par une ligne de tramways électriques en projet à ce moment-là, en service maintenant, le nouveau théâtre se trouve dans une situation exceptionnelle. De plus, et c'est une considération qu'il ne faut pas négliger, en utilisant cet emplacement la ville réalisait unz première économie de 180.000 francs, représentant la valeur du sol et évitant une expropriation toujours coûteuse. La construction du théâtre décidée, l'architecte de la ville, M. GOUR, reçut l'ordre d'étudier un projet de théâtre pour la somme de 600.000 francs. Ce projet dressé le 25 juin 1896, fut présenté au Conseil minicipal qui en approuva les plans et les devis estimatifs. Le projet fut adressé au Préfet de l'Hérault qui l'envoya au Ministre de l'Intérieur. Celui-ci le communiqua au Ministre des Beaux-Arts en demandant l'avis du Conseil supérieur des Bâtiments civils. Après un premier examen, M. GOUR fut appelé à Paris par M. THIERRY, architecte du gouvernement, rapporteur du projet, pour apporter sur place les modifications demandées par le Conseil. De même que l'architecte DAVIOUD pour le théâtre du Châtelet, M. GOUR a dû se conformer aux prescriptions du Conseil des bâtiments civils, imposant pour la couverture du monument un comble unique, comme au théâtre de Bordeaux. Les modifications demandées pour l'ensemble furent faites très rapidement et le projet reçut l'approbation pour la fin de l'année 1897. Au mois de février 1898, l'architecte municipal se trouve donc donc dans la nécessité d'exécuter dans un délai de 18 mois (le conseil voulant inaugurer le théâtre avant l'expiration de son mandat) le nouveau théâtre dont on ne lui avait pas laissé le temps de mûrir le projet. Il restait, en outre, à étudier le chauffage et la ventilation, l'éclairage électrique et le machinisme de scène sans tenir compte des entreprises nouvelles qui allaient s'y rattacher. Tous les travaux furent mis au concours et un retard considérable se produisit qui se répercuta surtout sur la marche des travaux de maçonnerie déjà en cours d'exécution. En établissant son projet, M. GOUR avait fait connaître à la municipalité que, même en banissant tout luxe de ce monument, qui pourtant en réclamait tant, le crédit de 600.000 francs, affecté à la construction, était notoirement insuffisant. Malgré un avis semblable donné par le Conseil des bâtiments civils, la municipalité fit la sourde oreille, disant à l'architecte : Nous verrons plus tard. C'est pour cela que l'on trouve d'aussi sérieuses différences entre le projet et l'exécution. Tant à l'intérieur qu'à l'extérieur, le nouveau théâtre est, dans les décorations, d'une somptuosité dont nous ne rencontrons nulle part la trace, ni dans les dessins du projet, ni dans le devis général de la dépense. Certainement, la ville de Cette ne pouvait avec une somme de 600.000 francs, avoir la prétention de faire construire un monument remarquable, alors qu'une des maisons de l'avenue Victor-Hugo, prise au hasard, coûte 300.000 francs. La municipalité actuelle le comprit dès son arrivée au pouvoir et sortit, de bonne heure, des réserves que s'était imposées le conseil précédent. Ce sera la gloire de la municipalité MOLLE et en particulier du maire, J. L'HEUREUX-MOLLE, de n'avoir pas craint, pour parachever l'oeuvre de sa devancière, d'imposer à la ville une dépense supplémentaire de 900.000 francs, afin de décorer le nouveau théâtre avec tout le luxe que doit nécessairement comporter une salle de spectacle." L'article est signé A. AUGÉ. "(LVMR du 03.04.1904) |
Le théâtre de Sète
(Photo sur le site de L'Encyclopédie Sétoise)
Contrairement à ce qui est de règle pour un monument de cette importance, on ne mit pas le projet du théâtre au concours. M. EUZET, désireux de parler en maître et de diriger lui-même, voulut son architecte, et c'est ainsi que nous furent préparés tous les aléa, toutes les erreurs qui survinrent. Il fut donc décidé que M. GOUR, architecte communal, dresserait un projet de théâtre s'élevant à 600.000 francs pour lequel on demanderait à faire voter un emprunt. Ainsi donc, voilà un maire qui, en entrant à la mairie, est obligé de faire un emprunt, parce que, dit-il, la situation de la ville le lui impose et ce qui va de nouveau grever la ville par un nouvel emprunt dont la somme ne représentera que le tiers de ce qui sera nécessaire, car ce théâtre que l'on prétendait vouloir faire avec 600.000 francs coûtera définitivement près de 2.000.000. On a leurré sciemment le conseil municipal et l'opinion publique. Nous en donnons une preuve immédiate par la lettre que M. EUZET écrivait à M. GOUR, à Paris, lorsque ce dernier défendait son projet devant la commission des bâtiments civils. "Il faut obtenir,disait-il, que notre chiffre de 600.000 francs, soit accepté. je compte sur vous pour cela, etc., etc. Expliquez-leur que les sommes nécessaires au complément de l'oeuvre, nous les prendrons dans nos budgets futurs." L'exécution du théâtre était à peine commencée que les aléa se produisaient. La maçonnerie de fondement étant insuffisante, il fallut l'augmenter. Le premier plan manque de surélévation, de sorte que, bientôt on s'apercevra que les dessous de scène manquent de profondeur. Il faudra alors prendre un spécialiste pour construire une cuvette de 0,60 cm au dessous du niveau du canal, dont le coût supplémentaire s'élèvera à 12.000 francs. Tous les lecteurs comprendront l'avantage qu'il y aurait eu à surélever le premier plan. Tous l'édifice en aurait bénéficié au point de vue de l'exthétique. On ne verrait pas, aujourd'hui, le perron du théâtre sous la forme disgracieuse qu'il nous est présenté. Toutes choses étant mal conçues, ou ayant été volontairement obtenues, le résultat est généralement déplorable. C'est bien ce qui faisait dire à M. GOUR dans l'un de ses rapports à M. EUZET : Nous avons marché dans cette importante construction avec des crédits trop restreints et sans marge. N'est-ce pas la critique de M. EUZET dans toute cette affaire. Les conséquences vont s'en faire sentir au fur et à mesure de la marche des travaux.
A peine a-t-on exécuté le tiers de l'élévation du théâtre qu'on s'aperçoit que les pierres de Beaucaire, dont on se sert, sont de qualité inférieure. On modifie une première fois, en s'adressant à un autre fournisseur. Celui-ci ne sera pas définitif, car une troisième qualité de pierre viendra remplacer la seconde. Ce sera alors seulement qu'on aura enfin trouvé la pierre qu'il fallait. Tout l'ensemble de l'édifice va subir les mêmes aléa puisque, nous verrons finalement la maçonnerie, qui sur le cahier des charges devait s'élever à 243.290 francs atteindre le chiffre énorme de 750.751 francs 69. De même la ferronnerie qui était portée à 63.642 francs va voir son chiffre monter à 220.807 francs ; charpenterie 16.200 francs s'élèvera à 52.593 francs 12 ; zinguerie 14.052 francs 90 sera plus tard de 35.716 francs 31 ; peinture et vitrerie 5138 francs 16 verra son chiffre à 24.110 francs 72 ; sculpture Baussan de 7000 francs à 36.342 francs indemnités comprises et ainsi de suite pour tous les articles, pour lesquels nous pourrons y comprendre encore la sculpture Injalbert qui de 20.000 francs a fini par coûter 50.000 francs ; le chauffage et la ventilation non prévus et dont la somme totale est de 36.696 francs. Veut-on un exemple des impedimenta. Pendant la construction du théâtre, alors que déjà on se rendait compte du coût énorme de cet édifice, il vint à l'esprit de M. EUZET de confier à M. INJALBERT le soin de compléter le fronton du théâtre par un sujet de sculpture. Le prix de 20.000 francs en fut débattu, accepté et le contrat signé. On ne voudra pas croire à l'impéritie qui a présidé dans cette idée. M. EUZET fut donc tout étonné lorsqu'il fallut pour l'exécution de ce motif sculptural un ensemble de dépenses qui élevèrent le coût primitif de 20.000 francs à celui de 50.000 francs environ. On n'avait pas prévu que l'exécution de cette oeuvre d'art obligerait à un supplément de travaux que motiverait son exécution. On voulut faire grand. Cet article n'est qu'une première partie et la suite était prévue dans le numéro suivant de EC. Généralement, on trouve en ligne deux numéros pour une même date, chacun donnant en page 3 des nouvelles de villes ou villages différents. Malheureusement, il n'y a qu'une seule édition en ligne pour le 10.04.1904 et celle qui comprend la suite de cet article n'y est pas. Peut-être que l'on pourra un jour combler cette lacune.
Le théâtre de Sète
(Photo sur le site de la Fondation du Patrimoine. Languedoc-Roussillon)
L'élection municipale de 1904
Dès le mois d'avril, la controverse enfle, avant les élections municipales de mai. Ainsi, EC rapporte une polémique entre MARMIÈS-CLOT (qui vient de sortir une brochure intitulée Vérité, à charge contre l'administration précédente) et un employé des douanes du nom de ROMANI. ""Une phrase de la brochure de M. MARMIÈS disant que quelques messieurs avaient transformé le but de l'Amicale des Douaniers fut relevée, il y a quelques jours, dans un manifeste signé : Sept douaniers en retraite. M. MARMIÈS répondit à ce manifeste anonyme en déclarant qu'il constituait une manoeuvre électorale de M. EUZET et qu'il avait été rédigé par un fonctionnaire à sa dévotion. M. ROMANI, le fonctionnaire visé, fit paraître à son tour un factum attaquant M. MARMIÈS avec la dernière violence. Ce dernier piqué au vif a fait distribuer hier soir un nouveau manifeste, accusant formellement M. ROMANI d'être l'auteur de l'immondice signée : Un groupe de sept douaniers, et lui décochant les épithètes de menteur, lâche, pleutre, pourriture, épave de la politique, malandrin, fantoche, couard, etc., etc. Comme on le voit, ça commence bien. Que sera-ce dans quelques jours ? En tout cas, nous ne manquerons pas de compter les coups." (l'article est intitulé Entre eux) On comprend que les conservateurs vont se délecter des combats entre factions socialistes.L'élection cantonale de 1904
Lors des élections cantonales de 1904, Honoré EUZET est conseiller sortant et annonce qu'il ne sera pas candidat, dans une lettre qui est reprise dans le PM, sous le titre, Un beau geste : "Mes chers amis, Dans les circonstances actuelles, au cours de la période actuelle qui s'ouvre, vous m'avez fait l'honneur de me prier instamment d'accepter la candidature au Conseil général, de m'inviter à solliciter en un mot le renouvellement de mon mandat, en m'assurant votre appui le plus dévoué. J'ai le regret de vous dire que je ne saurais accepter cette candidature que vous m'avez offerte avec une insistance qui m'honore, je vous suis profondément reconnaissant de vos affectueuses démarches. Mais permettez-moi de vous rappeler que c'est volontairement, de bonne foi, sans arrière-pensée, dans l'unique but de contribuer à l'union si désirable du parti républicain socialiste, que vous avez, avec mon adhésion complète, absolue, désigné des délégués au Congrès qui s'est institué pour préparer cette union. Je rends hommage au zèle, au dévouement, à l'intelligence des honorables délégués qui, au sein du Congrès, ont défendu avec habileté et énergie les droits des 2238 électeurs républicains socialistes qui, lors des dernières élections, répondirent à l'appel du Comité central socialiste (...) (il donne donc là le nombre de voix qu'il a obtenues lors de l'élection municipale du mois de mai, c'est-à-dire 1101 voix de moins que Jean Joseph MOLLE). Il insiste encore, dans sa lettre, sur le désir d'unité, sur le rôle du Congrès de choisir le candidat et sur le principe d'honnêteté qui assure la meilleure politique (PM du 19.07.1904). Cette lettre et sa position lui seront rappelées en 1905 quand il prendra une décision radicalement différente, lors d'une nouvelle élection au Conseil général.
La crise économique et sociale à l'usine sidérurgique Schneider de Sète "On sait qu'à la suite de la dernière grève des ouvriers des Forges de Cette, le haut-fourneau dût être démoli. Les ouvriers qui avaient repris le travail, ont été jusqu'à ces derniers temps employé à toutes espèces de travaux, mais il était à prévoir que leur présence deviendrait bientôt inutile dans l'usine, dont la marche est complètement arrêtée. En effet, ils ont été la plupart remerciés à l'exception de quelques hommes, qui font sauter à la dynamite le bloc de fonte extrait du haut-fourneau. Quant à la reconstruction du nouveau haut-fourneau, on dit qu'il faudra encore de longs mois pour qu'elle soit chose faite." (EC du 12.09.1904)Il reste une trentaine d'ouvriers ; la société hésite à faire de nouveaux travaux "à cause de la mise à l'index de la société de la part des ouvriers dockers", d'où l'impossibilité d'expédier les fontes. (EC du 19.09.1904) "Les ouvriers des chantiers Schneider viennent d'être en partie congédiés ; sur 350 ouvriers qu'occupait les forges, 30 seulement resteront. Les dockers avaient mis cette Compagnie à l'index, on annonce qu'elle ajournerait à une date indéterminée la construction du haut fourneau qui avait été décidée." (Le courrier de l'Aude du 21.09.1904) "L'oeuvre de ruine se poursuit (...) Le port de Cette, à la veille d'une ère de prospérité que faisait prévoir l'installation de nouvelles usines (...) Les usines métallurgiques Schneider viennent de fermer, la mise à l'index des syndicats la mettant dans l'impossibilité de manipuler ses marchandises de matière première et, depuis, le silence le plus morne règne sur ces chantiers (...) M. SCHNEIDER n'était certes pas le seul qui avait compris combien la situation du port de Cette se prêtait au trafic industriel et commercial, d'autres sociétés (minoteries, fonderies, manufactures de produits alimentaires) se préoccupaient de créer des succursales sur notre territoire ; les évènements, ces derniers temps, ont détruit toutes ces bonnes volontés et ces sociétés abandonnent définitivement leurs projets trop à la merci de l'arbitrage syndical (...)" Signé : Un Cettois. (EC du 11.10.1904) " (...) Nous apprenons même que deux des machines soufflantes vont être démontées et expédiées au Creusot. (...) Hélas, pourquoi en si peu de temps, exactement deux années après, devions-nous assister à l'évanouissement de notre rêve. Le ciel qui s'illuminait le soir à la lueur des coulées de fonte s'est assombri tout à coup ; un calme de mort a succedé à l'agitation fiévreuse des chantiers (...) Grèves et mises à l'index ont produit des effets trop désastreux dans le monde du travail comme dans celui du commerce pour que tous deux ne désirent ardemment n'en plus voir le retour (...)" (EC du 21.12.1904) |
1905
L'élection cantonale de 1905
Au premier tour des élections cantonales pour le canton de Sète, les résultats du scrutin sont les suivants : MOLLE ("candidat de l'Union républicaine socialiste"), 2535 voix ; Marius FRANÇOIS ("candidat soutenu par la réaction"), 2536 voix. Il y a ballottage. Le PM du 27.02.1905 qui donne ces résultats et présente ainsi les deux candidats, ajoute : "Naturellement, la réaction a voté comme un seul homme en suivant le mot d'ordre de EC, du LL et celui donné dans les réunions des libéraux de samedi soir. Toujours d'après ce journal, les inscrits étaient 9245 et les votants 5152, soit 55,73 %. Ce taux de participation est apparu important et le PM écrit qu'il n'y a pas eu d'incidents et qu'un "très grand nombre d'électeurs ont pris part au vote;" Ce sobre commentaire cache, évidemment, une grande déception et une non moins grande inquiétude pour le second tour. Ce résultat indique, surtout, une mobilisation des électeurs qui rejettent radicalisme, radical-socialisme et socialisme dans un paysage local qui, depuis 1870, donnait toute la place aux forces de gauche.
1906
1907
1908
L'élection municipale : malgré des obstructions et des violences, le succès de la liste EUZET
Trois listes sont donc en présence : celle de MOLLE, comprenant la majeure partie des conseillers sortants, la liste dite d'Union républicaine ayant Honoré EUZET à sa tête, et la liste de la Fédération radicale-socialiste "qui est l'émanation du groupe de la Petite Chapelle", c'est-à-dire les Francs-Maçons (EC du 01.05.1908). Evidemment, le PM soutient la liste radicale-socialiste et critique celle d'EUZET ; ainsi, avec cette communication de républicains : "Il faut croire que le monsieur qui fut autrefois M. Honoré EUZET, membre du Parti Ouvrier Français, a mis beaucoup d'eau dans son vin. Il essaie timidement de se défendre d'avoir sur sa liste l'Action Libérale et pour compenser ce léger désaveu, il fait immédiatement l'affiche contre le Petit Méridional, la Petite Chapelle et le citoyen LAFFERRE. M. EUZET nous permettra de lui dire qu'il est trop tard pour désavouer. Les noms de l'Action Libérale qui sont sur sa liste sont trop connus et, pour couper court à toute hésitation, nous déclarons que M. VIGNAU, directeur de l'Action Libérale, nous en a fait l'aveu devant témoins, qui sont les uns conservateurs et les autres républicains, dont nous sommes prêts à donner les noms." Dans sa démonstration le PM souligne aussi que les journaux conservateurs, EC et le Télégramme militent en faveur d' EUZET. (PM du 01.05.1908)Entre MOLLE et EUZET, la lutte continue ... dans la presse
Le maire perdant, MOLLE, écrit, dans le PM, une lettre très dure contre le maire vainqueur, EUZET : " Connaissez-vous la prestigieuse eau forte de REMBRANDT représentant le vieux DIOGÈNE assis au bord d'une route, tandis que, vers le deuxième plan de droite, un jeune homme cueille à un pommier des fruits qu'une servante reçoit dans les plis de sa jupe ? DIOGÈNE est vieux, très vieux, les reins cassés, le front strié de rides, les yeux flétris et les mains bossuées de grosses veines ; le jeune homme, lui, respire la jeunesse et la douce vision de meilleurs espoirs. Du côté du vieillard, le ciel est sombre et nuageux, tandis que sur la droite, faisant saillie à la belle harmonie du groupe des jeunes, l'hôrizon se colore de teintes vives et de vols d'oiseaux. Cette oeuvre du grand peintre est l'image exacte de notre situation. Parvenu à la fin de votre carrière, brisé par une vie consacrée à la chose publique, vous êtes le vieillard qui, sous le poids du passé lourd d'orages, se courbe, triste et aigri ; tout le regret de la jeunesse morte endeuille votre regard, et vers moi, qui en suis tout juste à ma trente-deuxième année, vous levez vos yeux emplis de cette haine jalouse qui monte des vieillesses, lorsqu'elles songent à l'irrémédiable fuite du temps qu'elles ne vivront plus. Vous me dites, avec les dents serrées, que je vous trouverai partout et toujours devant moi. Mais, mon cher Monsieur, vous oubliez la différence de notre âge ; vous oubliez que lorsque l'avenir s'ouvre à peine pour moi, vous en êtes vous, à parler de vos troisièmes jeunesses. Hélas ! Contre cela, toutes les puissances sont vaines, toutes les haines sans effet. Au lieu de grimacer vous-même, comme vous le faites, vous devriez, arrivé au but ultime de votre carrière, chercher au contraire à vous parer de cette sérénité qui donne au visage de ceux qui ont vécu longtemps cette pure noblesse inspiratrice du respect (...) Dans un article écrit par M. Eustache GÉDÉON, employé à la mairie de Cette, et revêtu de votre signature aux angles tranchants, vous m'insultez bassement, espérant que vos outrages à la Quidam (le surnom qu'EUZET utilisa dans la presse, à plusieurs reprises) me feront sortir du calme et vous donneront l'occasion de me traîner en correctionnelle.Ça ne prend pas du tout, cher Monsieur, et votre article, qui n'est qu'une insipide décoction de Larousse à la glue baveuse de Quidam me cause la plus grande satisfaction, tant il vous dépeint hargneux, persistant, haineux et bouffi d'orgueil, malgré son style d'Iroquois. Quant à votre audace, elle déconcerte les esprits les plus froids. Quidam ! Vous avouez que vous fûtes, que vous l'êtes et que vous le serez, remuant ainsi cette boue dont le Socialiste Cettois macula notre ville et sa population. Amis patriotes, que sera la troisième jeunesse de M. EUZET, si elle doit dépasser la seconde, celle qui va fleurir la prose honteuse du Grand Administrateur ! Oui, Monsieur, restez avec le lock-out au cou comme un carcan (référence au refus de donner les clefs de la Bourse du Travail), Seigneur Châtelain (allusion à sa "Villa Joyeuse" qui faisait les beaux jours des concours horticoles) ; il est votre tare et votre symbole de trahison envers la classe ouvrière. Ruinez Cette au profit des Marseillais et couvrez de votre apathie ce gouffre où vous entraîne votre complicité politique. Mes amis ! Les freluquets veillent avec moi ; la mairie désormais est une maison de verre où les administrateurs ne feront plus à leur guise les affaires de la cité. Tout se voit et tout se sait ; (...) Malgré ses résurrections Quidamesques, la victoire dernière restera à ceux qui, dans la grande liberté et la pleine lumière, ont combattu et combattront toujours, à ceux qui savent être bons quand vous n'êtes que haineux (...) à ceux dont la parole vous flagellera sans répit, vous, le caméléon le plus extraordinaire que la politique ait enfanté, (...) Quidam tu fus, Quidam tu resteras. - J.L. MOLLE, conseiller général." (PM du 05.10.1908)Le problème budgétaire
"On sait que le nouveau conseil municipal se trouve en présence d'un déficit réel et malheureusement acquis de 270.000 francs en chiffres ronds, et que, par suite de la majoration voulue et imprudente des recettes, il se trouvera en 1909, en présence d'un nouveau déficit de 80 à 100.000 francs environ, qu'il faudra absolument combler. Pour ce qui est de ce dernier déficit, le bénéfice qui résultera de la conversion de la dette permettra certainement de le combler ; reste la grosse somme de 270.000 francs qu'il faut payer. Faut-il imposer brutalement pour une seule année (1909) les contribuables de 270.000 francs d'impôts nouveaux, ou bien faut-il contracter un emprunt pour 10 ans, ce qui constituerait pour les contribuables une charge nouvelle pendant cette période de 34.000 francs environ ? Tel est le grave problème que le nouveau conseil municipal aura à résoudre. La chose est délicate, aussi croyons-nous savoir que M. EUZET, d'accord avec ses deux adjoints, a l'intention d'instituer un référendum auquel prendraient part ceux qui paient l'impôt foncier, c'est-à-dire les impôts sur la propriété bâtie et non bâtie, l'impôt mobilier seulement et des portes et fenêtres et des patentes. Ce référendum, dans l'esprit de la municipalité, serait présidé par le président du tribunal de commerce, le président de la chambre de commerce, un membre du tribunal de commerce et un membre de la chambre de commerce." (EC du 25.10.1908)Le lock-out des compagnies de navigation
Les débuts du conflit entre les ouvriers du port et les compagnies de navigation sont expliqués dans le PM du 09.08.1908 : "Cette 8 août, soir. Nos lecteurs se rappellent la lettre par laquelle les agents des Compagnies Marseillaises ont dénoncé le contrat du 6 avril 1906. Cette rupture aura son plein effet demain. Des renseignements précis sont difficiles à recueillir car les deux parties gardent un mutisme absolu. Il semble toutefois que demain les vapeurs des Compagnies Marseillaises ne s'arrêterons pas dans le port de Cette. (...) On nous affirme d'autre part qu'aujourd'hui, dimanche, les Compagnies Marseillaises feront apposer des affiches indiquant les modifications qu'elles désirent introduire dans le contrat. Ce matin à 11heures, a eu lieu à la Bourse du travail, une réunion de laquelle on nous communique le procès verbal ci-dessous : Les ouvriers du port se sont réunis samedi, 8 août, à la Bourse du travail, pour prendre des mesures afin de répondre efficacement au lock-out dont ils sont menacés de la part des Compagnies de Navigation Marseillaises (...)" Un nouveau contrat est élaboré par les ouvriers, une commission est mise en place pour entrer en discussion avec les Compagnies.Le "système des dépouilles" continue
"Hier, le conseil municipal a voté les remboursements effectués à la caisse de retraite par les employés communaux révoqués par le maire. Ces remboursements s'élevant à la somme de 2350 francs, en chiffres ronds, auxquels il convient d'ajouter un mois de traitement payé à chacun de ces employés, à titre d'indemnité. Voilà la première note, que devra payer la ville pour permettre à certains de satisfaire leurs rancunes politiques. Il est vrai que ce sont les contribuables qui paieront. Ajoutons qu'une demande de MM. CAZALIS et JULIAN qui réclament un an de traitement à titre d'indemnité, a été rejetée." (PM du 29.09.1908) Et, le 29.06.1908, le PM écrit : "Il nous revient que quatre des membres les plus influents de ce comité (celui d'EUZET pendant la campagne électorale) sont employés à la mairie depuis plus de huit jours." Il est évident que ces nouveaux embauchés remplacent ceux qui ont été révoqués à cause de leur couleur politique.
1909
1910
Aucun numéro du JC de 1910 n'est en ligne mais, heureusement, les AD 34 possèdent une collection de numéros de l'année 1910 du Journal Commercial et Maritime de Cette (JCM) qui, à cette époque (c'est sa 36ème année) s'intitule simplement Le Commercial et Maritime de Cette (LCM). C'est un journal qui se veut neutre politiquement. On n'y trouve donc pas les joutes habituelles des PM, EC et autre JC. Les articles du PM et de EC permettent, cependant, de compléter l'ensemble quand il y a des rubriques concernant la ville de Sète.
Le premier article qui concerne les finances de la ville jette aussi un éclairage cru sur le caractère d'Honoré EUZET et sur ses méthodes administratives ; en même temps, il permet de se rendre compte de la situation financière de la municipalité en ce début d'année : "Le projet de budget pour 1910 - non encore voté en janvier - remis par M. EUZET à la commission des finances, était accompagné d'un long exposé que le maire de Cette a fait publier dans Le Journal de Cette et L'Eclair. Cet exposé peut être résumé ainsi qu'il suit :
1/ Les recettes municipales diminuent depuis de longues années. Le déficit laissé par l'administration précédente était fatal. Le tort de cette administration est de ne pas avoir créé des ressources nouvelles - lisez impôts nouveaux - pour suppléer à la diminution des recettes.
2/ Cette diminution persiste et s'accentue.
3/ L'administration EUZET parera à toutes ces difficultés et bouclera le budget municipal sans déficit ni impôts nouveaux.
4/ Les 54.000 francs demandés aux contribuables en 1910 pour réparer les dégats faits par un orage, ne leur seront pas demandés en 1811.
5/ M. EUZET qui a écrit ce document est un grand administrateur.
On nous permettra de considérer le 4ème paragraphe comme quelque peu irrespectueux pour les lecteurs des journaux qui ont publié le document municipal. Il semble ne pas leur attribuer une compréhension bien nette des faits si, en effet, il est exact - ce dont beaucoup doutent du reste - que les 54.000 francs demandés au contribuable cettois sont la conséquence d'un orage il est naïf de dire qu'ils ne seront pas demandés de nouveau en 1911. A moins que ... nous glissions. Glissons aussi sur le cinquième paragraphe. Reste les trois premiers. Ils semblent quelque peu contradictoires. On se demande par quels prodiges M. EUZET arrivera à concilier la diminution des recettes qu'il constate avec l'équilibre budgétaire qu'il promet étant donné surtout que son exposé parle de dépenses nouvelles et pas du tout d'économies sérieuses. Il y a là, semble-t-il, une contradiction qui demande à être expliquée. Non par des mots et des phrases, mais par des chiffres comparés et officiels et contrôlables pour tous. La publication de l'état financier laissé par l'administration MOLLE, promise formellement, serait peut-être un moyen, surtout s'il était accompagné d'un état des dépenses, sincère, exact et sans virements, d'une année sur l'autre. Du reste, peu importe le moyen. Il suffit qu'il soit trouvé et que des précisions et explications soient données et cela dans l'intérêt même du bon renom administratif de M. EUZET. Ne pas donner ces précisions et explications serait, en effet, premettre toutes les suppositions et laisser croire comme exact ce que certains disent et qui peut être résumé ainsi qu'il suit :
1/ Le prétexte donné pour créer 11 centimes d'impôts nouveaux est un trompe l'oeil. Les dégats occasionnés par l'orage du 14 octobre 1909 n'absorberont qu'une faible partie des 54.000 francs que M. EUZET demande aux contribuables.
2/ Il est exact que l'administration précédente ait laissé un déficit - qu'elle aurait évité si elle eut été prévoyante - mais il est non moins exact que M. EUZET a majoré l'importance de ce déficit. Volontairement et sciemment ce dernier a exagéré les manquants qu'il a dit exister dans les prévisions budgétaires de 1908 et, de ce fait, s'est créé de très importantes avances pour les budgets suivants en reportant, sur ces budgets, les excédents de ces crédits supplémentaires demandés par lui, EUZET, et non employé en 1908 parce que exagérés, c'est-à-dire inutiles en partie. M. EUZET est responsable d'une importante partie des impôts nouveaux créés sous son administration, et ces impôts lui ont procuré des ressources complémentaires. M. EUZET n'est donc pas le grand administrateur que l'on prétend, mais simplement un homme très habile sachant faire supporter à autrui, la responsabilité de ces actes susceptibles d'irriter les contribuables contre sa gestion. Sa capacité consiste à maquiller la vérité et non à bien régler les dépenses, éviter les gaspillages, supprimer les dépenses inutiles ou superflues, etc., c'est-à-dire à donner le maximum à ses administrés, surtout en demandant le minimum aux contribuables, mais à demander beaucoup à ces derniers pour donner peu, ou pas davantage aux premiers. Ce qui est à la portée de tout le monde. Des explications et précisions détruiront, sans doute, tous ces racontars, c'est pourquoi nous les demandons à M. EUZET. Non pour polémiquer sur une question de finances, mais, pour être renseignés, ainsi que tous ceux qui paient les impôts." L'article est signé : Des contribuables qui voudraient savoir (PM du 07.01.1910) On retrouve dans ces critiques plus ou moins voilées, ce qui lui avait été déjà reproché pour le financement des travaux du théâtre : un jeu de virements entre les comptes pour masquer certains coûts et le gonflement de certains crédits budgétaires pour pouvoir les utiliser ultérieurement à d'autres buts, dans le cadre des opérations municipales.
Le PM du 02.02.1910 résume les échanges ayant eu lieu au dernier conseil municipal (non daté) : " M. EUZET annonce au conseil que l'emprunt voté est réalisé et demande l'autorisation de payer les déficits communaux de 1907-1908. Il ajoute que la municipalité, débarrassée de ses dettes va pouvoir réaliser un programme. Il annonce la réorganisation de l'Ecole supérieure où vont être créés des cours de comptabilité, de dactylographie, de mode, de cuisine et autres connaissances utiles et susceptibles de donner aux jeunes filles des moyens d'existence autres que ceux que procure l'enseignement, aujourd'hui encombré. M. EUZET parle aussi de l'agrandissement de l'école Pratique, de la route de Cette à Agde, de la création d'un square au terre-plein de l'avenue et promet l'exécution de ces projets." ; en début de séance le conseil a voté un crédit de 1000 francs pour les victimes des inondations (à noter qu'il n'y a que 16 conseillers présents).
"Nous apprenons avec plaisir que, dans sa séance d'hier, le conseil municipal de la ville de Cette, a changé en concession perpétuelle l'emplacement temporaire où reposent les cendres du républicain de la première heure que fut le regretté JANSON. D'un tempérament ferme et généreux, ce dernier fut un de ceux qui, en 1868 et 1869, se dressèrent avec toute l'ardeur de leurs convictions profondes, contre le despotisme qui déshonorait la France (...) Pendant la période difficile, il mena, en compagnie de notre maire actuel, une lutte sans merci contre l'empire qui, hélas ! devait nous conduire à Sedan (...) Nous approuvons sans réserve la sage décision de notre conseil municipal et adressons un souvenir ému à notre regretté camarade JANSON, à sa famille, ainsi que nos remerciements au citoyen Honoré EUZET, pour l'heureuse initiative, qu'il a su prendre, honorant ainsi la mémoire d'un républicain convaincu que l'on pourrait citer en exemple à la nouvelle génération.". L'article est signé par "Un groupe de vieux démocrates" (PM du 27.02.1910)
Une élection législative qui marque une nouvelle fracture dans le camp républicain
L'année 1910 est marquée par une élection législative qui va nuire fortement à la cohésion du conseil municipal. Pourtant, tout avait bien commencé avec une réunion, à la mairie, des délégués des différents comités des candidats : celui de SALIS, celui de MOLLE, celui de TAILLAN et celui dit "comité Anti-Parlementaire". Reçus par Honoré EUZET, dès le début, les délégués du comité Anti-Parlementaire déclarent qu'ils regrettent de ne pouvoir prendre part aux pourparlers, qu'ils ne sont venus que par déférence et uniquement pour affirmer qu'eux et leurs amis ne prendront pas part au vote, pas plus qu'ils ne participeront au dépouillement. Après cette déclaration, ils se retirent et les autres participants déterminent ensemble les modalités de l'élection et du dépouillement. (LCM du 20.04.1910) Il n'en reste pas moins que les communications dans les journaux sont sans concessions pour les candidats qui n'ont pas leur faveur. Le PM qui soutient la candidature SALIS écrit, par exemple : "Silence M. MOLLE ! Lorsqu'on n'a pu arrêter la ruine du port de Cette ! Lorsqu'on laisse après soi, pour la ville de Cette, un déficit de 400.000 francs ; lorsque l'on a été incapable de retenir les établissements du Creusot, on n'a plus le droit de parler de gaspillages et d'incurie !" (PM du 14.04.1910 - groupe radical socialiste de Villeveyrac)Grande confusion au conseil municipal, suite à l'élection législative
"Après la proclamation des résultats, le maire a prononcé quelques paroles engageant au calme et a fait illuminer la mairie. Quelques groupes, peu nombreux, se sont formés et ont parcouru la ville accompagnés de hautbois et en chantant l'Internationale. Un de ces groupes s'est arrêté devant nos bureaux et quelques cris de A bas le Petit Méridional ! A bas la Petite Chapelle ! se sont fait entendre." (PM du 09.05.1910)Dans cette élection, le rôle des catholiques, des libéraux, des modérés et autres royalistes
Le 08.05.1910, le PM avait repris un article de la CM de la veille, portant la date du 8 mai, signé de son directeur, l'abbé BESSODES ; cet article lève un coin du voile sur les tractations plus ou moins occultes des candidats. - "Nous avons écrit, le 3 mai, à M. MOLLE, candidat à la députation à Cette, la lettre suivante : Monsieur, La Croix Méridionale a fait voter pour vous au premier tour, afin de démolir SALIS, et aussi parce que vous vous êtes déclaré hostile à la Petite Chapelle. (surnom donné aux radicaux francs-maçons et à leurs sympathisants) Pour le deuxième tour, nous sommes très vivement sollicités de faire voter pour M. TAILLAN qui nous promet la liberté d'enseignement et la liberté de conscience (en 1904, Louis LAFFERRE, grand Maître et député de Béziers est à l'origine de la suppression de la clause de liberté de conscience) On objecte encore, contre vous, certaine mascarade injurieuse à la religion qui eut lieu pendant que vous étiez maire. Nous voudrions savoir ; 1 Si, comme M. TAILLAN, vous êtes favorable à la liberté d'enseignement et à la liberté de conscience ; 2 Si oui, nous voudrions recevoir, concernant la dite mascarade, des explications qui puissent satisfaire bon nombre de nos amis. Il en est, en effet, qui, à cause de ce grief qu'ils vous font, s'apprêtent, si aucune explication n'est donnée, à voter pour M. TAILLAN. Nous tirons notre journal, vendredi matin. J'aurais besoin, si vous jugez à propos de me répondre, de recevoir votre réponse jeudi matin. L'absence de réponse équivaudrait de votre part à une fin de non recevoir. Nous nous déterminerons en conséquence. - Agréez, etc. BESSODES." Et, plus loin, il était écrit : "A l'heure où nous mettons sous presse, nous n'avons pas reçu de réponse. Nos lecteurs voteront selon leur conscience. M. MOLLE a fait tomber SALIS. L'essentiel maintenant est de mettre à la place du député sortant un député dont le programme et les actes se rapprochent le plus près possible du nôtre."
1911
1912
Les élections municipales
Au centre, Maurice LAURENS, le nouveau maire ; à sa gauche : Paul GOURGUET, 1er adjoint ; à sa droite : Alexandre ANDRÉ, 2ème adjoint
(Le Journal de Cette des 02-03.06.1912 qui donne, en 1ère page, la photo des 27 nouveaux élus)
Dans son discours, le nouveau maire dit, notamment : "Je remercie M. Honoré EUZET, maire sortant, des paroles aimables et flatteuses qu'il nous a adressées tout à l'heure. Je le prie d'accepter l'hommage de nos sentiments respectueux et dévoués".
Après un discours sur le balcon de l'Hôtel de Ville, les musiques par l'harmonie de Cette et la Fanfare Scolaire, le maire rejoint son domicile (quai de Bosc) avec tous les édiles précédés des musiques. "Là, M. LAURENS prononce quelques paroles de remerciement et les musiques, après avoir joué une aubade devant le domicile du nouveau maire, vont en exécuter une autre sur le quai de la Bordigue, devant la demeure de M. EUZET, maire sortant, que cette attention délicate a beaucoup touché." Après avoir évoqué les concerts du soir et les illuminations, le journal conclut : "Une ère d'apaisement est ouverte, faisons des voeux pour qu'elle soit le prélude d'une ère de prospérité !" (JC du 21.05.1912). Maurice LAURENS devait rester maire de Sète jusqu'en décembre 1919 car, ce que personne ne pouvait prévoir, c'est évidemment la grande guerre de 1914-1918, qui marqua la cité comme elle marqua la France et le monde. Quoiqu'il en soit, cet épisode politique de 1912 est unique dans la période 1870-1914, un entre deux guerres plein de bruit et de fureurs sur le plan politique. Comme un joueur de cartes qui passe son tour, Honoré EUZET a su préserver l'avenir et montrer à la population une grande ouverture d'esprit.
1913
1914
1915
1916
1917
1918
Un portrait de la ville, en 1918 : "Etant une ville de fondation récente, elle ne possède pas de monuments, sinon un théâtre tout récemment construit, une caserne d'infanterie, neuve aussi, et un collège édifié depuis une vingtaine d'années. Néanmoins, il ne lui manque aucun des établissements qui constituent la ville moderne : des écoles nombreuses dont une Ecole pratique de Commerce et d'Industrie et une Ecole navale, une Bibliothèque municipale, très riche, une Station zoologique avec aquariums (dépendant de l'Université de Montpellier), un Musée de peinture. Ses deux plages, dites de Frontignan et de la Corniche, sont très fréquentées pendant la saison balnéaire ; cette dernière, située derrière le mont Saint-Clair, est entouré de villas. Elle est reliée à la ville par un tramway électrique partant de la gare. Depuis 1863, l'eau potable, qui avait fait défaut jusqu'alors, est assurée en abondance par un aqueduc de dix km de long venant de la source d'Issanka, et qui alimente quatre réservoirs (dont l'un situé sur le sommet de Saint-Clair) contenant ensemble 20.000 mètres cubes."(Le port de Cette, en 1918, par la Chambre de commerce de Sète)
1919
Dans L'Eclair du 22.05.1912, Alexis VIGNAL, directeur de la Caisse d'épargne de Sète et ancien conseiller municipal, adresse une lettre à Honoré EUZET pour critiquer son attitude passée quand il ne voulait pas entendre parler de l'autonomie de la Caisse d'épargne. Or, le Conseil d'Etat vient de donner son aval à cette autonomie et VIGNAL de rappeler les mots de l'ancien maire : "Quand dans une séance publique le conseil municipal a, presqu'à l'unanimité, voté l'autonomie de la Caisse d'épargne, vous avez osé taxer de mauvaise action, cet acte d'intérêt et de bienfait public, et vous avez ajouté : Il passera de l'eau sous le pont, avant que la Caisse d'épargne de Cette soit déclarée autonome !". VIGNAL ajoute : "Que ressort-il donc de tous ces faits absolument indéniables ? C'est que nous étions tous des naïfs ou des imbéciles, et que seul, M. Honoré EUZET était un grand homme (...)." On ne peut s'empêcher de penser à l'attitude d'EUZET pour la Bourse du Travail. Dans les deux cas, il s'est obstiné alors que le mouvement national allait dans le sens de l'autonomie de ces institutions par rapport aux mairies.
Quant à MOLLE, il refuse le moindre rapprochement avec TAILLAN : "Je tiens à informer la section de Cette que je suis démissionnaire du Parti Unifié à ce jour. Je ne puis admettre un seul instant que ceux qui ont fait campagne pour TAILLAN et ont travaillé pour lui au deuxième tour, viennent me demander compte de m'être réjoui du succès de LAURENS, adversaire de TAILLAN. Vous ne pouvez m'imposer de devenir son ami pour faire plaisir à quelques uns de notre groupe." (JC du 19.06.1912).
Le 07.07.1912,le JC explique quel va être le projet d'organisation des écoles laïques de Sète (transferts de l'Ecole de Commerce, de l'école Lakanal, de l'école supérieure de filles, de l'école maternelle des Dominicaines, création du groupe scolaire du Souras Haut, etc.) : "Depuis des années, elle est posée (la question de l'organisation de ces écoles) Etudiée par les anciens conseils municipaux et particulièrement par M. EUZET, ce sera l'honneur de l'Administration LAURENS de l'avoir solutionnée".
Au fil des séances du nouveau conseil municipal, un diagnostic sévère va être établi sur l'ancien conseil mais en montrant, aussi, qu'Honoré EUZET a été bloqué par une majorité de conseillers municipaux. Ainsi, dans la séance du 23.08.1912 présidée par Maurice LAURENS, le rapporteur SENTENAC déclare : "Je ne puis m'empêcher de souligner la mauvaise gestion du défunt conseil municipal. Nous avons dû voter des chapitres additionnels pour combler le déficit considérable qui est l'oeuvre de nos prédécesseurs (...)" ; à propos de l'imprévision de dépenses dans le budget primitif de 1912 : "Tous (ces) crédits avaient été vainement demandés par M. EUZET, maire. L'ancien conseil les lui avait toujours refusés. Ainsi que l'a dit parfaitement M. LAURENS, maire, tel est l'héritage désastreux que nous ont légué nos prédécesseurs qui ont eu pour seul sdouci de dresser un budget électoral et de faire acte de candidat." A la suite de ces interventions, TAILLAN défend la politique de l'ancien conseil et déclare que : "Le conseil n'avait pas confiance dans l'administration et qu'il avait refusé les crédits relatifs aux travaux publics parce que le maire n'avait ps voulu nommer les commissions de contrôle demandées par l'assemblée. (...) Quoiqu'on dise, conclue-t-il, le seul reproche qu'on peut nous adresser, c'est celui d'avoir réalisé trop d'économies et ce reproche nous honore." A la suite de ces discussion, le conseil prend deux décisions qui (dit le journaliste du Journal de Cette) "constituent une humiliation pour le conseil municipal défunt, en approuvant le compte administratif de l'ancien maire ainsi que les chapitres additionnels du budget de 1912 accusant un déficit de 170.000 francs : "On a sciemment trompé les électeurs et que si dans un but électoral on s'est offert la fantaisie de dégrever provisoirement les contribuables, ceux-ci devront payer le double l'an prochain par la faute de conseillers imprévoyants." De plus, en déclarant de traiter pour l'éclairage électrique avec la compagnie du gaz, le nouveau conseil municipal "a réalisé la prophétie de l'ancien maire disant aux conseillers municipaux qui décidèrent avec enthousiasme dans la séance du 11.11.1911 de traiter avec M. CHRISTOPHE : Le vote que vous venez d'émettre est absolument platonique". Le journaliste promet alors de revenir, ultérieurement, sur toutes ces questions dans une chronique qui s'appellera : "Les coulisses d'un conseil municipal défunt" et il ajoute : "La justice vient toujours à son heure" (Le Journal de Cette du 24.08.1912). Même diagnostic, un peu plus tard, à propos du choix de la compagnie du gaz pour l'éclairage électrique de la ville : "si l'ancien conseil avait accordé ladite concession à ce dernier (M. CHRISTOPHE) c'était que l'honorable M. Honoré EUZET, dont on connaît la compétence en matière administrative, était contre la concession Christophe, non pour être contre le conseil municipal, mais bien parce qu'il prévoyait de grosses difficultés pour la ville de Sète" (JC du 13.09.1912). Et encore, en novembre : " Avec l'ancienne administration municipale, il ne fallait compter sur aucun travail sérieux, en raison des divisions existant entre le Maire et son conseil. Il suffisait que l'un dit blanc pour que l'autre répondit noir. Les intérêts des Cettois, la bonne administration étaient ce qui comptait le moins pour le conseil défunt et il suffisait à la majorité pour son bonheur, d'être désagréable à M. EUZET" (JC du 06.11.1912).
Le JC du 20.09.1918 publie la lettre de démission du maire, Auguste LAURENS, adressée au préfet (et aussi celle des conseillers municipaux), suite à la nomination d'un administrateur (ALQUIÉ) à la commission de l'Hôpital de Sète : "Il ne s'agit ici d'aucune question de personnalité. Il s'agit seulement d'une offense gratuite faite au Maire de la Ville de Cette que sa dignité empêche d'accepter." Et plus loin : "Acte que je considère comme une injure. Je vous retourne une seconde fois l'arrêté de nomination afin que le dépôt aux archives soit fait par celui qui sera appelé à me remplacer."
EC du 29.09.1918 résume la situation : "M. LINARÈS, préfet de l'Hérault, venu hier à Cette (...) a voulu voir les conseillers municipaux (...) Ils ont décliné l'invitation. Bref, M. M. LINARÈS, qui avait cru devoir se solidariser avec son prédécesseur, M. CAUCEL, en renvoyant à la mairie de Cette la nomination de M. ALQUIÉ comme administrateur de l'Hospice, est revenu ... bredouille à Montpellier. Nous croyons savoir que M. le Préfet convoquera officiellement les conseillers municipaux" Et le journal constate que la mort de MOLLE, le député, prive la ville de Sète de tous ces élus.
Dans un article du 04.10.1918, le PM annonce la démission des conseillers municipaux, suite à la nomination, par le préfet CAUSEL d'un administrateur à l'hôpital, "dans des conditions qui ont atteint M. LAURENS, maire de Cette, dans sa dignité, nomination confirmée par M. LINARES, nouveau préfet de l'Hérault." Et, plus loin : "L'assemblée blâme l'attitude de M. CAUSEL, alors préfet de l'Hérault, qui a attendu la veille de son départ de Montpellier pour faire une nomination demandée par un petit groupe d'hommes politiques, ne cherchant qu'à semer la division et la discorde au moment où, plus que jamais, l'union sacrée devrait être respectée." (cet extrait est repris d'une lettre du maire qui date du 02.10/1918 et qui confirme la démission collective des conseillers municipaux, à cause de l'affront fait à M. LAURENS (Archives Municipales de Sète).
"Il est bruit de la désignation de M. EUZET, ancien maire, à la tête de la délégation qui doit remplacer, dans quelques jours, notre administration démissionnaire. Celui qui céda lui-même la place à M. LAURENS, rentrera donc, sans coup férir, en possession du fauteuil pour lequel il livra, jadis, des luttes homériques. Cependant, par suite de la non démission de M. TAILLAN, conseiller municipal, il restera à M. le préfet LINARÈS de parachever le coup de force de son "regretté" prédécesseur, en prenant un arrêté de dissolution du conseil municipal. Sans cette dissolution - dont le motif sera qu'un seul conseiller est dans l'impossibilité de délibérer - M. TAILLAN aurait légalement plus de droits que la délégation spéciale et cela ne saurait être accepté par nos futurs administrateurs. Il est d'ailleurs à préciser que MM EUZET et TAILLAN ne feraient précisément pas bon ménage ensemble. Les socialistes cettois paraissent accueillir cette transformation inattendue avec une etonnante sérénité, comptant sans doute sur de prochaines revanches électorales." (EC du 15.10.1918)
Le préfet ayant essayé en vain de persuader les conseillers municipaux de reprendre leur démission, "rechercha les moyens de parer à une situation si regrettable. Il fit des démarches, s'enquit et parvint d'obtenir le concours éventuel d'un homme que certains peuvent ne pas approuver, mais dont tout le monde reconnaît les connaissances administratives. Avec lui, on était certain que les intérêts cettois seraient gérés intelligemment. C'est alors que se produisit le coup de théâtre. Nos élus avaient résisté à toutes les considérations d'intérêt général et local, ils ne purent rester indifférents à la nomination d'un administrateur capable de diriger, avec compétence, les services municipaux, de mettre un peu d'ordre dans le ravitaillement et de faire procéder à la réfection des égouts. Réunis extraordinairement, ils informèrent le Préfet qu'ils retiraient leur démission, donnée et maintenue dans des lettres acrimonieuses qu'ils avaient rendues publiques." (PM du 17.10.1918)
Lettre adressée, le 18.10.1918, par le maire, Maurice LAURENS, à Gustave PASCAL, 222ème Infanterie, 8ème Cie, Secteur 231 : "Mon cher Ami, A la suite de notre démission, le Préfet de l'Hérault, avait proposé comme Président de la délégation spéciale municipale, M. Honoré EUZET, ancien maire. Afin de déjouer cette nouvelle manoeuvre politique et barrer la route à M. EUZET, mes collègues et moi avons décidé de retirer immédiatement notre démission. Je viens donc vous prier, Mon cher Ami, d'en faire autant, en adressant par lettre recommandée, à M. le Préfet, le retrait de votre démission de conseiller municipal de la Ville de Cette. Ainsi se terminera à la confusion de nos adversaires, une crise municipale qu'ils ont créée. Croyez, Mon cher Ami, à mes sentiments dévoués. Le Maire" (Archives Municipales de Sète)
" La crise municipale est terminée. Sans être taxés d'exagération, nous pouvons affirmer que la très grande majorité du public Cettois n'y a absolument rien compris du tout ; et cela, parce que notre municipalité, pas plus dans sa lettre de démission que par la suite n'a osé indiquer la vraie raison de son attitude à l'égard de l'ancien préfet M. CAUSEL. Pour rendre un compte exact de la façon dont les choses se sont passées, il faut remonter à la séance mémorable dans laquelle notre conseil municipal, brutalement, supprima 30.000 francs de subvention à nos instituteurs. Cette mesure déplorable était injustifiée à tous les points de vue. Au moment où la République s'impose pour l'éducation des enfants du peuple les charges les plus lourdes, les sacrifices les plus étendus, il était essentiellement antidémocratique, antipopulaire, de jeter à la rue de pauvres malheureux gosses ou les obliger à prendre le chemin de l'école congréganiste. Le préfet vit là une mesure inacceptable et parfaitement antirépublicaine. Nous ne rechercherons pas, pour le moment, à quels mobiles, à quels ordres ou à quels engagements obéit la Municipalité en agissant ainsi ; nous nous contentons de souligner combien regrettable était la mesure prise. A quelques jours de là, le préfet eut à faire choix d'un délégué au conseil d'administration de notre hôpital. Le maire lui suggera alors le nom d'une personne de la ville qui, soit dit en passant, ne brillait pas précisément par l'ardeur de ses sentiments républicains. Le préfet, cependant, dans un but d'Union sacrée, était disposé - faisant abstraction de ses préférences personnelles - à accepter ... ce candidat, mais demanda, en échange, au maire de Cette, de revenir sur la mesure essentiellement injuste et antipopulaire prise par son conseil municipal à l'égard des enfants de nos écoles laïques. Le maire, dans le but de gagner du temps, promit de tenter un effort auprès de son conseil municipal. Les mois passèrent ainsi jusqu'au moment du départ du préfet CAUSEL. C'est alors que ne voulant pas continuer davantage à être le jouet de M. LAURENS, le préfet CAUSEL fit son choix, légalement, en toute indépendance. Choix différent de celui suggéré par le maire de Cette. Voilà quels furent - en toute impartialité - les prémices de la crise. Et ce fut ainsi que le maire, jugeant - on voit combien à tort - que cette nomination avait été faite dans des conditions qui - disait-il - portaient atteinte à sa dignité, jeta à la face du nouveau préfet, sa démission de maire, celle de ses adjoints, de son conseil municipal, du conseiller d'arrondissement, du conseiller général, ces deux derniers ignorant totalement que c'étaient aux présidents de leurs assemblées respectives qu'ils auraient dû faire parvenir leur démission. C'est ici, à présent, que commence le deuxième acte de la comédie. Le préfet LINARÈS - dont tout le monde reconnaît la haute compétence et le grand talent d'administrateur, - essaya de faire revenir nos édiles sur leur décision. Il plaida chaleureusement, montra les ennuis qui pourraient résulter pour la ville de la nomination d'une commission municipale ; il montra les dangers qu'il pourrait y avoir à laisser une cité de l'importance de la nôtre sans administration. Rien n'y fit. la satisfaction d'un amour-peopez mal placé devait, pour nos élus, primer toute autre considération. Le préfet tenta une nouvelle démarche ; à grand renfort de notes communiquées à la Presse, on nous fit savoir qu'il n'avait même pas été reçu. En présence de cette obstination, le préfet LINARÈS proposa alors au ministre de l'Intérieur la nomination d'une Commission municipale, ayant à sa tête un homme respecté par tout le Parti républicain cettois et dont toute la ville avait gardé le reconnaissant souvenir d'une administration habile et intègre. Brusquement, alors, les choses changent de face et - troisième acte de la comédie - toutes les démissions sont retirées, même celle du maire qui devait être irrévocable. Quelles furent les raisons de ce geste ? Nous ne pensons pas un seul instant que le souci des intérêts de la Ville ait pesé le moins du monde dans l'esprit de nos édiles. Nous croyons plutôt que cette salutaire mesure leur fut inspirée par le désir bien compréhensible d'éviter un examen possible de la situation lamentable dans laquelle se trouve, au point de vue économique, la gestion municipale. Nous n'étonnerons personne - car ce sont là des choses de notoriété publique - en affirmant que des critiques sévères - pour ne pas dire plus - pourraient être faites concernant le ravitaillement de notre Cité. Et si Henri IV estimait que Paris valait une messe, d'autres estiment que le pouvoir municipal vaut bien la peine d'avaler en choeur quelques petites couleuvres. Nous pourrions raconter encore que nos édiles, se faisant faire alors une douce violence, avaient entre temps, prêté une oreille attentive aux suggestions venues d'un groupement réactionnaire de notre Ville, dont les principaux membres se réunirent chez un des notables, bourgeois de l'avenue Victor-Hugo, pour envisager la situation créée par la crise municipale. Entre amis, il faut savoir se faire des concessions ; on se mit d'accord, et, cette fois, les démissions furent retirées sans tambours ni trompettes (...) En attendant, le gâchis va continuer. Un jour, les électeurs se souviendront." (PM du 21.10.1918)
Lettre de lAURENS, maire de Sète : "Vous avez inserré l'attaque (elle n'est pas de vous puisqu'elle a paru déjà dans le Journal de Cette), acceptez de bonne grâce la contre-attaque, elle sera d'ailleurs courtoise (...) La question des surveillances dans les écoles serait résolue depuis longtemps sans l'intransigeance de l'ancien préfet, M. CAUSEL. Et la preuve en est que dès son départ, j'ai dit à son successeur que les surveillances devaient être rétablies au prochain budget. Il n'est pas vrai que M. CAUSEL en ai fait d'abord une condition pour accepter la nomination d'un administrateur de l'hôpital. Il ne l'a fait qu'après coup, pour masquer son désir ou son obligation de répondre à certaines influences que tout le monde connaît. Ensuite, ce qu'on appelle une comédie ne se serait pas passé si chacun était resté à sa place. L'opinion publique a pensé qu'il fallait empêcher certains personnages trop intrigants de se faire installer à des postes qui auraient dû être réservés, ou à des fonctionnaires, ou à des hommes éloignés de la politique. C'eût été réellement de l'Union Sacrée. On ne l'a pas voulu et la manoeuvre a été déjouée au grand désappointement de certains (...)" Il dit ensuite tout ignorer de ces réunions de réactionnaires, il note que le PM a supprimé une des attaques parue dans le JC, concernant la personne qu'il avait proposée à l'administration de l'hôpital et il défend son honnêteté et son républicanisme. (PM du 24.10.1918)
Le PM du même jour fait des commentaires critiques sur les arguments de LAURENS. D'abord, parce que celui-ci reconnaît lui-même que la suppression des surveillances scolaires fut une faute puisqu'il les rétablit. Ensuite, parce que, pour la commission municipale, toute individualité susceptible d'assumer la fonction aurait eu forcément des préférences politiques connues et, quant aux fonctionnaires, ils ne seraient pas adaptés à la situation, alors que les problèmes de ravitaillement se posent avec acuité. Et puis, écrit le journaliste, "Nous n'avons pas compris le retrait des démissions données au lendemain de la visite du préfet, alors que l'on n'entrevoyait qu'une délégation de fonctionnaires. Nous nous l'expliquons beaucoup moins le lendemain du jour où M. EUZET qui avait d'abord refusé, avait cédé aux sollicitations du préfet, lequel avait dû venir à Cette pour vaincre les dernières résistances de l'ancien maire de Cette. Dans le premier cas, les édiles auraient pu justifier le retrait de leur démission par la défense des intérêts locaux. Dans le deuxième, ils ne peuvent arguer que de leurs ressentiments politiques. (...)" (PM du 24.10.1918)
Honoré EUZET répond, à son tour, au maire, Maurice LAURENS : "Si vous aviez gardé votre sang-froid, vous auriez eu "faute de vous renseigner" l'intuition que je ne suis pas l'auteur de l'article paru dans le Petit Méridional et qui vous met si fort en colère. Ce n'est pas que je désavoue cet excellent et véridique exposé des faits qui se rattachent à la crise municipale ouverte si délibérément par vous, je me déclare au contraire heureux d'apporter mon témoignage à mes amis, en regrettant toutefois qu'ils n'aient point prévu qu'en disant de moi autant de bien que j'en pense d'eux, ils inquiétaient les convoitises et réveillaient les vieilles rancunes et des haines qui m'honorent. Or, vous faites appel, Monsieur, à l'opinion publique, tandis que j'estime, comme vous, qu'elle doit être éclairée. Je vous remercie donc de me fournir l'occasion d'apporter un peu de clarté dans ce débat. Dès le 21 septembre au matin, des amis de Cette vinrent m'offrir éventuellement la présidence d'une commission municipale destinée à remplacer le conseil municipal démissionnaire ; à la suite d'un entretien amical, je leur répondis le soir même, en ces termes :
Mes chers amis, Vous avez bien voulu me pressentir ce matin à propos de la nomination d'une commission municipale dont je serais le cas échéant le président. Je vous avoue que je suis très hésitant car, si je vois sans regret des adversaires politiques quitter la mairie, si je vois avec la plus grande satisfaction la nomination à l'Hospice d'un bon républicain, je n'aspire pas à remplacer le maire démissionnaire, tout au moins, comme commissaire délégué par M. le Préfet. Il faut évidemment que la loi donne les moyens aux préfets de doter une ville, d'une administration, qui faute d'un conseil municipal devient indispensable, mais le législateur a si bien compris qu'il pouvait y avoir inconvénient à recruter cette commission parmi les hommes politiques de la commune, qui sont toujours discutés et dont la nomination peut inciter les partis, à taxer le préfet de partialité, qu'il a autorisé l'administration préfectorale, à prendre les délégués en dehors des éligibles ou des habitants de la commune. Etre désigné par M. le Préfet, c'est un grand honneur, et une marque de confiance, dont je le remercie vivement. Mais ne trouvez-vous pas, qu'il est permis d'hésiter, quand comme serviteur , on a toujours considéré que la volonté librement, nettement exprimée du corps électoral, donnait seule droit à l'investiture, à l'exercice d'un mandat administrateur ou politique. Vous m'avez dit que M. le Préfet ne consent pas à nommer des fonctionnaires et que, d'ailleurs, le personnel de la Préfecture est fort réduit en ce moment. Mais notre premier magistrat ne pourrait-il pas faire appel à des fonctionnaires retraités ? Il trouverait dans cet élément des hommes actifs, pondérés, qui feraient bien dans une administration. A-t-il pensé à MM. X... et X... ? J'ai voulu, mes chers amis, vous faire part de mes réflexions. Permettez-moi d'ajouter qu'une décision immédiate ne s'impose pas tant que la démission du conseil municipal n'est pas définitive et que, d'ailleurs, cette démission étant acceptée, un délai de huit jours est imparti à M. le Préfet pour la nomination de la commission municipale. Enfin, je crois encore que le conseil municipal consentira à retirer sa démission et je le souhaite vivement. Bien à vous. Signé : H. EUZET.
Entre temps, M. le Préfet faisait de pressantes démarches auprès du conseil municipal, afin d'obtenir le retrait des démissions, tandis que j'étais l'objet de nombreuses sollicitations de la part de mes amis, qui pensaient que je pouvais rendre quelques services à notre ville. Enfin, M. le Préfet, justement préoccupé de la situation anormale créée par la municipalité, voulut bien, par deux fois, "chez moi", me demander instamment mon concours. Je crus alors de mon devoir d'accepter la mission difficile qui m'était offerte et que je n'avais nullement recherchée. Mais avec cette restriction que mes amis de la Délégation et moi-même refusions d'accepter l'allocation que la loi impose aux communes en faveur des délégués municipaux, que M. le Préfet voudrait bien attendre les derniers délais pour accepter les démissions, qui, dans ma pensée, seraient retirées, et qu'enfin il voudrait bien rechercher avec nous les moyens de rétablir dès le premier novembre les surveillances dans les écoles. Et maintenant je souhaite que, mieux inspiré, vous consentiez à réparer le préjudice causé aux jeunes enfants de nos écoles. C'est ainsi que les pères de famille vous pardonneront peut-être votre dernière incartade.
J'ai dit : telle fut l'attitude de mes amis de la délégation et la mienne ; j'estime qu'elle fut tout au moins aussi digne que la vôtre. Honoré EUZET." (PM du 28.10.1918)
Avant-hier est décédé notre ami Jacques SALIS, ancien député de l'Hérault. Né à Cette, docteur en droit, nommé conseiller général en 1874, M. SALIS fit partie du conseil municipal en 1875 et nommé maire (sous réserve de vérification, c'est seulement en 1881 qu'il fut nommé maire, avant Marius VAREILLE) Réélu au conseil général en 1880, il fut choisi comme député et vit son mandat renouvelé en 1885, 1889, 1893, 1898, 1902, 1906. Monsieur Jacques SALIS, comme la plupart des hommes politiques, ne fut pas à l'abri des critiques, mais il laissera le souvenir d'un sincère républicain et d'un homme dont l'intégrité ne fut mise en doute par personne. Depuis quelques années, il vivait entouré de soins et très retiré dans sa belle campagne Le Patrimoine, où des amis, restés fidèles, allaient de temps en temps égayer un peu sa solitude. (...) (PM du 19.11.1919). Hier ont eu lieu les obsèques de M. SALIS qui, pendant plus de trente ans, a représenté la circonscription de Cette au Parlement. (...) Les cordons du poële étaient tenus par MM. LINARÈS, préfet ; MOUNIÈ, secrétaire général ; LAURENS, maire et HURIAUX, avocat. Dans l'assistance, nous remarquons MM. PELISSE, ancien député ; PRATS, président de la Chambre de Commerce ; COSTE, président du Tribunal de Commerce ; MICHEL, conseiller général ; EUZET et SCHEYDT, anciens maires ; GABAUDAN, attaché au Cabinet de l'Instruction publique. Au cimetière, M. LINARÈS, préfet, et le docteur CRÉMIEUX ont prononcé des discours rappelant la carrière politique et les qualités du défunt (...)". Suit le discours de LINARÈS qui rappelle, notamment, comme dans l'article du PM du 19, que SALIS a été maire en 1875. (PM du 20.11.1919)
Le nouveau paysage journalistique |
L'élection municipale ramène Honoré EUZET au pouvoir
Le 13.10.1919, les membres des commissions de l'Union des anciens combattants et des démobilisés sont invités à se réunir pour l'élaboration d'une "liste municipale de défense des intérêts de Cette et des démobilisés" (PM du 11.10.1919). Dans le même mois, un communiqué de cette Union indique qu'à la quasi unanimité, "les poilus se sont prononcés en faveur d'une liste municipale composée uniquement de poilus" (PM du 29.10.1919). Pourtant, un mois plus tard, on va voir que cette Union renoncera et laissera la place aux adversaires habituels dans ce type de confrontation.
"Le Mouton, champion des joutes régionales
vient de faire plonger son adversaire"
1920
La question des tramways
1921
1922
La subvention à la compagnie des tramways
Le maire, officier de la Légion d'honneur
La grève des ouvriers du port
L'école pratique dans de nouveaux locaux
Le tracé de la route entre Agde et Sète
1923
1924
Discours du maire sortant, LAURENS, pour l'installation de la nouvelle municipalité : "J'ai lu ces jours derniers dans une chronique locale qu'en procédant à votre installation j'accomplissais un acte de haute courtoisie envers vous tous et principalement à l'égard de M. EUZET, qui m'a lui-même installé si courtoisement en 1912. Certes, je vous demande d'accorder à ce geste une telle valeur, mais vous me permettrez d'y ajouter autre chose. Je veux d'abord vous féliciter pour le brillant résultat de l'élection du 30 novembre. C'est une victoire républicaine dont vous avez le droit d'être fiers. Elle s'est faite dans le calme et la dignité qui, espérons-le, seront à l'avenir la règle de toutes les grandes consultations du suffrage universel. Elle est la preuve que le parti républicain sera toujours inébranlable quand il saura rester uni. (...)" (IME du 09.12.1919)
Discours d'Honoré EUZET pour son installation comme nouveau maire. Après avoir remercié Auguste LAURENS puis les "électeurs républicains socialistes", il déclare : "Nous rencontrerons, en effet, de nombreuses difficultés résultant uniquement de l'état de guerre (...), elles sont d'ordre administratif et financier (...) Les mesures relatives au ravitaillement auront toute notre attention (...) Je ne prétends pas vous exposer aujourd'hui un programme d'action administratif et républicain (...) Le vote du budget s'impose dans le courant de décembre, et qu'il nous faudra créer d'importantes ressources, que nous ne pouvons demander qu'à l'impôt ; le conseil appréciera quel est le mode d'impôt qui s'adaptera le mieux aux circonstances actuelles, mais il faut que tout le monde sache dès aujourd'hui, que ces nouvelles charges sont inéluctables (...) Grâce au rendement de l'entrepot des douanes et à de louables économies, nos honorables prédécesseurs ont pu faire face jusqu'ici à ce surcroît de dépenses, mais cette recette s'est bien amoindrie cette année, et tout fait prévoir qu'elle diminuera encore (...) Il faudra donc en créer de nouvelles pour équilibrer le prochain budget. Simultanément, nous nous efforcerons de résoudre rapidement les conflits avec le gaz ; une prompte solution s'impose (...) Nous sommes convaincus que la République est un merveilleux instrument d'émancipation, et que sous un régime auquel nous devons la liberté de la presse et de la parole, les idées de justice sociale doivent un jour et toujours prévaloir (...)" (IME du 09.12.1919)
Discours du 2ème adjoint, le docteur CRÉMIEUX, s'adressant au nouveau maire : "Arrivé au crépuscule d'une vie si magnifiquement remplie, vous pouvez à présent, avec une fierté légitime et un juste sentiment d'orgueil, jetant un regard en arrière, considérer le chemin parcouru. Vous avez, en effet, appelé à la vie administrative plusieurs générations de vos concitoyens. Ah ! certes, dans la vie tourmentée du militant du Parti républicain que vous avez vécue, vous avez semé sur votre route bien des ingrats ; mais, du moins, vous pouvez avoir la très réelle satisfaction d'avoir su grouper autour de vous - malgré les heurts incessants et continuels inhérents à la vie politique - une phalange d'amis sincères et dévoués, dont la chaude affection vous a toujours consolé dans les moments de déboire et d'amertume qu'accompagnent les échecs injustifiés et l'irréalisation des succès les plus légitimement attendus. (...)" (IME du 09.12.1919)
C'est encore le même journal qui décrit ainsi le nouveau maire : "M. EUZET qui porte son âge avec toujours la même allure juvénile et la même irréprochable élégance, a lu son discours simplement, en renforçant un peu la voix aux passages essentiels." (IME du 09.12.1919)
"Nul n'ignore dans la bonne ville de Cette, le conflit surgi entre la Compagnie du gaz et ses employés, ni la réquisition, opérée par l'administration municipale, des usines et du personnel de ce service public." (MN du 21.12.1919). CRÉMIEUX explique que le problème vient des revendications salariales. Soit on augmente le prix du gaz consommé par la ville soit on augmente celui des consommateurs. En attendant, la ville exploite l'usine mais c'est empirique et passager, en attendant de trouver une solution. Autre problème avec les employés municipaux qui réclament une augmentation. Renvoi en commission (IME du 31.12.1919)
Le 02.05.1920, l'IME fait part du décès de Lucien ARCHÉ, secrétaire général de la mairie ; Honoré EUZET est dans le cortège, entouré de ses adjoints et des conseillers municipaux ; l'éloge est fait par l'adjoint Isidore CRÉMIEUX. Un autre article indique que le nouveau secrétaire général est Simon VAILLARD et le journal souligne que "le maire ne pouvait faire un meilleur choix" ; c'est un Sétois de vieille souche, employé de carrière, entré jeune à la mairie, il a 23 ans "de bons et loyaux services"
Le Radical (2, rue des Petits-Pères, Paris) du samedi 15.05.1920, article de Pierre DELMOULY, intitulé Au cours de la tourmente. Deux maires : "Il y a quelques jours, quand la crise battait son plein et que M. JOUHAUX, penché sur la carte syndicale de France, dictait ses ordres impérieux, sinon impériaux, pour déclancher un chômage général, le premier magistrat d'une commune de France, M. EUZET, maire du port de Cette, adressait cette humble supplique à la C.G.T. : Cette, 5141, 8, 8 H 50 - Afin d'éviter des conflits regrettables et dans la necessité absolue où se trouve la municipalité de Cette d'assurer le ravitaillement des départements de l'Aude, de l'Hérault et du Gard entièrement dépourvus de farine, vous demande instamment de vouloir bien autoriser dockers cettois à procéder dès aujourd'hui samedi au débarquement du vapeur Ingo portant 5000 tonnes de blé destinées au ravitaillement civil, remerciements. - Honoré EUZET, maire de Cette. M. JOUHAUD, bon prince quand on lui parle, sinon à la troisième personne, du moins avec humilité, répondait aussitôt : Honoré EUZET, maire de Cette. - Autorisons dockers procéder déchargement vapeur Ingo. - JOUHAUX. Vous voyez bien amis républicains, qu'il y a des grâces d'Etat. Le tout est de savoir les solliciter. Qui ne demande rien n'a rien. Il est vrai que tous les maires de France - heureusement pour eux et la dignité de leur charge - n'ont pas la mentalité, l'âme obséquieuse du maire collectiviste de Cette. (...)" Dans la suite de l'article, l'auteur mettait en regard l'attitude du maire de Nice qui devant le même problème avait fait appel à des travailleurs bénévoles protégés par la troupe (il s'agissait de décharger du charbon pour faire fonctionner l'usine à gaz). En conclusion, le journaliste se moquait d'Honoré EUZET, "plus quémandeur que débrouillard".
A la même date, dans L'Information Méridionale du 15.05.1920, un article en première page reprend ces critiques, en termes plus voilés : " (...) On est généralement étonné qu'un politique aussi avisé et aussi expérimenté que l'honorable Maire de Cette se soit laissé entraîner à une pareille démarche dont le résultat est d'ailleurs bien humiliant pour son amour propre. On est d'avis que le Maire de Cette n'aurait jamais dû songer à se mettre ainsi sous la protection de la C.G.T. (...) Voulant rester l'écho fidèle des opinions de notre Cité, nous avons tenu, malgré la déférence que nous professons à l'égard du Maire de Cette, à ne pas omettre de reproduire les appréciations que nous venons de résumer. Nous sommes d'ailleurs persuadés que le Maire de Cette saura réparer la grave erreur dans laquelle aux dires de beaucoup, il est tombé. Pour cela, il lui suffira de se concerter avec tous les milieux cettois interressés à la reprise du travail dans notre port. Mais il est temps d'y songer !... Le travail c'est la vie et la prospérité. La grève et l'inertie, c'est le désordre, la misère et la mort.
L'Information Méridionale du 12.08.1920 tient ses lecteurs au courant de la scission en cours chez les socialistes : "La scission est bien prêt d'être effective entre les socialistes extrémistes et les modérés du parti unifié. Un groupe important de ces derniers vient d'adresser à la commission administrative du Parti une lettre de protestation contre l'orientation donnée au Parti socialiste unifié par les extrémistes. Parmi les signataires, nous relevons : MM. BARTHE et FÉLIX, députés de l'Hérault ; ANDRÉ, conseiller général et directeur du Devoir Socialiste, organe du parti socialiste de notre département ; Charles CHABANON, ancien candidat sur la liste BARTHE, rédacteur en chef de l'Economiste Méridional ; ROM, adjoint au maire de Cette, secrétaire du Groupe Cettois du parti socialiste."
Au conseil municipal du 06.08.1920, en séance extraordinaire, le maire, Honoré EUZET, rappelle la situation : "Le 26 juillet dernier, dit-il, vous avez cru devoir repousser la subvention qui était accordée à la Compagnie de Tramways jusqu'au 31 juillet et pour laquelle une prorogation de deux mois avait été demandée. A la suite de cette décision du Conseil, la Compagnie s'est trouvée dans l'obligation de réduire de deux francs par jour le salaire de ses employés. Ces derniers ne pouvant accepter la réduction se sont mis en grève. Or, voici qu'ils viennent de m'adresser une lettre à la suite de laquelle j'ai cru devoir vous convoquer. Et M. le Maire donne lecture de la lettre dans laquelle les employés des Trams leur expriment leur triste situation et sollicitent son intervention pour prier le Conseil municipal de revenir sur sa première décision. La question est donc bien simple." (à compléter) (EC du 08.08.1920)
Le Publicateur de Béziers du 20.08.1920, à propos des difficultés de gestion des compagnies de tramways électriques, compare Béziers et Sète : "Béziers n'est pas la seule ville que préoccupe le service des tramways électriques, Marseille, Cette, etc. sont dans le même cas. Malgré l'activité du trafic de ces deux villes, les compagnies des tramways exploitent à perte leur monopole (...) A Cette, les diverses lignes qui sillonnent la cité de part en part, jusqu'à la Corniche d'un côté, et de l'autre vers les usines de soufre extra muros, les voitures et leurs remorques circulent à plein constamment. Et cependant la situation de la compagnie concessionnaire, tout comme celle de Béziers, exploite à perte, malgré l'augmentation de 100 à 120 % que les prix ont subis. Ce mois-ci, la compagnie a menacé de cesser le service si le conseil municipal ne lui continuait pas la subvention qu'il lui avait allouée précédemment. L'assemblée communale fut réunie par le Maire, M. EUZET". Par 10 voix contre 9 le secours fut refusé, malgré les efforts du Maire. Le lendemain les tramways cessaient leur service. De nouveau, le Maire convoqua son conseil et un débat passionné se produisit. C'est le groupe socialiste du conseil qui avait voté contre la subvention. M. le Maire donna lecture d'une lettre du Syndicat des Employés et ouvriers des tramways qui demandent au Conseil de voter la subvention. Sous prétexte que la Compagnie n'avait pas réintégré trois agents révoqués à la suite d'une grève, le groupe socialiste combat le principe de la subvention. Le Maire réplique et ramène la question au point de vue de l'intérêt de la ville. Il s'agit, dit-il, de voter un secours de 4000 francs pour les deux mois qui courent, soit 2000 francs par mois, pour permettre à la Compagnie de mener à bien des négociations susceptibles d'améliorer la situation. Le Maire ajoute que la Compagnie ne demande qu'à s'en aller, car l'exploitation lui laisse une perte de 200.000 francs par an. Le discours du Maire a rallié la majorité du Conseil qui a voté la subvention par 15 voix contre les 10 irréductibles de la précédente séance. (...)
Au conseil municipal du 25.02.1921, avant la clôture de la séance publique, le conseiller COLLOT demande au maire quelles mesures il compte prendre en vue de remédier au chômage. "M. EUZET répond qu'il avait envisagé diverses mesures de concert avec M. FRAYSSE, secrétaire de la Bourse du Travail. Il estime cependant qu'il n'y a pas lieu de pousser les choses au noir et, pour établir que la misère ne règne pas à Cette dans le vrai sens du mot, il fait part à ses collègues du résultat d'une enquête portant sur les facultés d'épargne de ses administrés. C'est ainsi qu'il a pu constater à la Caisse d'épargne un important excédent des versements sur les retraits de fonds pendant le mois de janvier dernier, c'est-à-dire en pleine crise du chômage. M. TUFFOU fait observer qu'il y aurait imprudence de la part des titulaires de livrets à retirer jusqu'au dernier sou de leurs épargnes dès le début de cette période difficile, et qu'on ne peut tirer argument de ce que ces économies sont intactes pour conclure que ces braves gens n'ont pas été obligés de se priver. Telle n'a pas été d'ailleurs la pensée de M. le maire, mais il estime qu'il n'y a pas lieu de pousser un cri d'alarme injustifié." (EC du 01.03.1921). Le début du compte rendu de cette même séance du conseil municipal montre la formation d'une opposition tenace (mais minoritaire) avec les conseillers BOUSQUET, TUFOU (parfois écrit TUFFOU) et COLLET, à l'occasion de la discussion hardue sur le bugget de l'année (EC du 28.02.1921)
Un moment démotion au Conseil municipal quand Honoré EUZET lit les noms de la 27ème liste des Sétois morts pour la France ; il adresse : "une pensée émue à la mémoire de ces héros et à leurs familles l'expression des plus vives condoléances." ; cette liste porte à 743 le chiffre total des Sétois "inscrits au Livre d'Or de la grande guerre". (EC du 04.06.1921)
EC rapporte la cérémonie patriotique qui a lieu au cimetière Le Py, autour du monument aux morts pour la Patrie. Le maire, Honoré EUZET, fait un discours. On peut noter, notamment, cette partie où il marque l'union spirituelle qui fut celle de ces soldats : "(...) Quel fut l'idéal de ces hommes ? Car tous eurent une croyance, une foi qui les incitèrent au suprême sacrifice : foi chrétienne, foi humaine, tous crurent à l'efficacité du devoir accompli, à cette vérité qui veut qu'on meure. (...)" (EC du 03.11.1921)
Notre Ecole Pratique : "D'une lettre de M. Gaston VIDAL, Sous-secrétaire d'Etat, reçue par M. EUZET, maire, il résulte que le Conseil supérieur a approuvé les plans et devis de l'Ecole Pratique ; la subvention de l'Etat sera répartie par moitié sur les exercices budgétaires 1923 et 1924. C'est une bonne nouvelle qu'apprendront avec plaisir tous ceux qu'intéresse l'avenir de notre Ecole Pratique" (EC du 23.10.1922)
Dans la même séance du conseil municipal, le conseiller BONY demande si on ne pourrait pas envisager le projet d'une nouvelle adduction d'eau. "Avant que les enquêtes soient terminées, répond M. EUZET, nos jeunes collègues auraient depuis longtemps les cheveux blancs" (EC du 24.11.1922). Remarque qui montre, à la fois, le réalisme administratif et politique du maire, son humour et, peut-être aussi, la fatigue due à son âge, l'empêchant d'envisager des projets à long terme.
Après avoir rappelé les épisodes les plus récents concernant le choix du tracé du projet de route entre Sète et Agde, Honoré EUZET conclut : "Vous apprécierez, mes chers collègues, les divers documents que nous vous soumettons ; si nous devons persister à réclamer la route côté Nord, ou bien, si tout en conservant vos préférences pour ce tracé, vous voulez bien accepter le tracé Sud, afin de solutionner un projet que nos intérêts réclament, et pour lequel vous n'avez cessé de lutter, allant même jusqu'à vous imposer une grosse dépense, tant vous en reconnaissez la nécessité. Comme en toutes choses, nous vous disons notre sentiment : c'est qu'il convient pour en finir d'accepter loyalement le tracé Sud. En vous donnant ce conseil, je sacrifie mes préférences, cependant bien justifiées, pour le côté Nord, et je n'ai qu'une préoccupation unique, obtenir promptement une solution, et faire cesser l'isolement de notre ville dont les intérêts souffrent depuis tant d'années."
Comme on le voit, M. EUZET ne voyant que les intérêts de la ville de Cette, et ne voulant pas qu'il soit apporté le moindre retard à l'exécution d'un projet qui ne peut que favoriser la prospérité de notre cité, se rallie à la création de la route, tracé Sud, sacrifiant ses préférences, bien justifiées, afin d'obtenir une prompte solution." (PM du 29.09.1923)
Après cet exposé, le conseil municipal accepte le tracé Sud de la route Sète-Agde, . Le texte de la délibération est le suivant : "Le conseil municipal, après délibération, accepte loyalement le tracé Sud de la route de Cette à Agde et prend l'engagement, à l'égard des communes d'Agde et de Marseillan, de fournir une contribution, basée sur la dépense à effectuer sur le tronçon de Cette au Quinzième. Le Conseil croit devoir formuler une demande. C'est qu'il sera présenté d'ici trois mois, un devis complet et définitif, ce devis étant indispensable pour établir le montant de la participation financière de la commune ; et que le projet soit exécuté dans un délai de deux années à partir du 1er janvier 1924. Il espère que le Conseil général, comme la commune de Cette, appréciera qu'il convient d'apporter la prompte solution que l'opinion publique réclame." (PM du 29.09.1923) Et le journal ajoute : "Nous ne pouvons qu'approuver M. le maire et son Conseil municipal pour leur sage détermination.".
Le 19.10.1923, le conseil municipal "accepte avec reconnaissance le don de 10.000 francs que M. Joseph EUZET, administrateur de l'Hospice Saint-Charles, offre à cet établissement. M. ROM, premier adjoint, prie M. le maire de bien vouloir exprimer à son frère M. Joseph EUZET, la gratitude du conseil municipal et de la commission administrative de l'Hospice pour ce bel acte de générosité en faveur des malheureux. M. le maire remercie au nom de M. Joseph EUZET qui sera, dit-il, sensible à cet hommage. La somme de 10.000 francs sera transformée en rentes sur l'Etat" (EC du 20.10.1923)
Le 03.12.1923, le PM publie la liste des délégués élus pour l'élection sénatoriale de l'Hérault. En ce qui concerne Sète et les socialistes, la liste est entièrement vérouillée par le conseil municipal car tous ces délégués sont des conseillers municipaux. Cependant, il y a, d'une part, les socialistes indépendants et, d'autre part, les socialistes unifiés. Les socialistes indépendants titulaires sont : EUZET (maire), CRÉMIEUX (adjoint), FOUILHÉ, VILLAC, BONNIOL, CALAME, BORNES et ENCONTRE ; Les socialistes indépendants suppléants sont : PAGÈS et SALENÇON ; les socialistes unifiés titulaires sont : ROM (adjoint), HÉBRARD (adjoint), BOUSQUET, DOUNET, BALZAC, VILLENEUVE et DIMEUR ; il y a un seul socialiste unifié suppléant : PAUMARET.
![]() |
![]() |
Honoré EUZET : son buste dans le jardin du château d'eau,
offert à la ville de Sète par
"Mme Veuve Joseph EUZET"
(photos Alfred ROMAIN, 08.07.2006.)
1925
L'élection municipale de 1925
Il est difficile d'étudier les élections municipales de 1925 car les seuls journaux en ligne, EC et PM, ne développent vraiment que la rubrique "Montpellier". De plus, les résultats sportifs ont pris la place des informations concernant les autres communes de l'Hérault. Il y a bien quelques articles mais ce sont surtout des communications qui sont reprises sans commentaires. C'est indirectement que l'on se rend compte que le journal IME paraît continuer l'observation de la politique locale à Sète mais aucun numéro n'est conservé dans les services d'archives.
1926
1927
La route de Cette à Agde
Le 23.08.1927, c'est l'inauguration officielle de la route de Sète à Agde, sous la présidence d'Honoré EUZET, maire de Sète. "Les autos ornées de drapeaux multicolores, transportant les officiels sont parties de la mairie un peu avant dix heures et, en cours de route, se sont arrêtées à la villa de M. BERTOUY, conseiller général, où un vin d'honneur a été servi (...)" Le groupe comprend, notamment, les trois adjoints du maire de Sète (ROM, CRÉMIEUX et HÉBRARD), les membres du conseil municipal, le conseiller général VÉZY, le conseiller d'arrondissement GARRIGUES, le commissaire central DON, le député GUILHAUMON, ... A leur arrivée à Agde, le groupe se rend à la mairie. " Il fut reçu par M. FÉLIX, député maire, qui lui souhaita la bienvenue et prononça une allocution à laquelle répondit M. H. EUZET. Les deux orateurs dirent combien ils se réjouissaient de voir la réalisation d'un projet ébauché depuis de longues années et qui servira de trait-d'union entre les deux villes amies (...)" (PM du 24.08.1927)La rue Honoré Euzet
Délibération du conseil municipal de Sète, le 27.08.1927 : "La parole est donnée au docteur CRÉMIEUX, qui, au nom de toute l'assemblée communale, fait la proposition suivante : Le conseil municipal et les adjoints au maire de la ville de Cette. Certains d'être les interprètes des sentiments de la population Cettoise. Désirant rendre un public et solennel hommage de reconnaissance au citoyen Honoré EUZET, maire de la ville, dont la vie est remplie par plus d'un demi-siècle de dévouement aux intérêts de la cité ; considérant les services nombreux et éminents rendus par lui sous les multiples fonctions électives qu'il a occupé (conseiller municipal - conseiller d'arrondissement - conseiller général - adjoint au maire - six fois maire de Cette) ; considérant son oeuvre administrative, adduction d'eaux - construction de routes - création d'écoles - érection de monuments - théâtre - collège - Hôtel des Postes - Ecole de Commerce et d'Industrie - ; considérant sa vie de lutte et de dévouement pour la Démocratie et la République ; demandent par la présente délibération de donner à la Route Nationale n° 108, dans la partie comprise entre le Pont National et le Pont de la Victoire, le nom de : rue Honoré EUZET.Cette veut devenir Sète
Délibération du conseil municipal de Sète, le 27.08.1927 : "M. le Maire reprenant la parole dit au Conseil : Puisque nous changeons le nom d'une rue, ne pourrions-nous pas élargir la question et modifier l'orthographe du nom de Cette, de façon à lui donner toute sa signification ? Le peuple qui vint s'établir sur notre territoire méditerannéen donna le nom de Settim au nom de Cette, parce qu'on l'aperçoit de loin dans la mer, couronné d'une forêt de pins. Plus tard, ce nom subit de fréquentes altérations et les latins en firent Setim, Setius, Sitius, Sita ; les cartes espagnoles indiquent Septa ; Puis on écrivit : Ceta, Seta, Sète, Sette et enfin Cette. J'estime qu'en donnant au nom de notre ville, l'orthographe étymologique "Sete", il se dégagera de cette appellation la signification que lui avaient donné les premiers qui vinrent s'établir sur le territoire méditerannéen, c'est-à-dire, celui du mont que l'on aperçoit de loin dans la mer. Je crois devoir ajouter que cette question a été plusieurs fois soulevée à l'époque et qu'il y a cent trente cinq ans, le conseil général de la ville avait délibéré (le 23 octobre 1793) pour solliciter de la Convention Nationale, que le nom de la Ville, qui n'a été connu de tous les dictionnaires historiques que sous le nom de Cette, équivoquant avec le pronom, serait celui de Sète, s'en référant pour son étymologie à STRABON, PTOLÉMÉE, qui avaient appelé le cap de Sète, sur lequel la ville a été bâtie, "Segius et Setius". Cette demande sombra comme beaucoup d'autres questions dans la grande tourmente révolutionnaire ; comme on le voit, les raisons qui militent en faveur de Sète sont largement exposées dans cette ancienne délibération. Je prie le Conseil de vouloir bien revenir à l'ancienne forme, qui aura l'avantage d'être plus logique, plus rationnelle, tout en rappelant l'origine et le passé de notre chère Cité.
Couverture de la brochure de Paul Louis BLANC
sur l'évolution du nom et des armoiries de Sète
1928
1929
1930
1931
Le "Gabès", bateau-école des mousses -
Le 31.01.1931, le secrétaire de mairie, VAILLARD, fait la visite du Gabès, la vieille canonnière désaffectée qui, depuis de nombreuses années, mouille à l'entrée du port. Elle sert d'asile à l'École professionnelle de marine Paul-Bousquet. L'article signé Jean LEBOUCHAIS fait ressortir l'intérêt de cette école fondée en 1842 ; c'est l'occasion de noter qu'elle est "de tout premier ordre" et qu'elle peut accueillir 30 enfants, de jeunes mousses de 13 à 15 ans. Un conseil d'administration est chargé de la surveillance. Dans ce conseil, présidé par le préfet de l'Hérault, on y trouve aussi Honoré EUZET, maire de Sète, président local, ainsi que Joseph EUZET, armateur (PM du 02.02.1931)
Le décès d'Honoré EUZET
Les obsèques
A l'Hôtel de Ville
Le cortège
Dans l'assistance
Au Cimetière marin
Les discours
Le congrès départemental des anciens combattants républicains a lieu à Sète, les 27 et 28.10.1928. Le congrès se clôture par un banquet à la Brasserie alsacienne où participent plus de 150 congressistes. Parmi les orateurs, ROM, le premier adjoint du maire, rappelle "que le vénéré citoyen qui préside aux destinées de la ville, Honoré EUZET est un combattant de 1870-1871, qui entoure de toute sa sympathie l'oeuvre poursuivie par les combattants républicains". L'orateur suivant est le citoyen ESCARGUEL, le futur maire de Sète, mais alors seulement président de la section de Sète des Jeunesses laïques et républicaines. (PM du 30.10.1928)
Le 21.12.1928, Honoré EUZET, maire de Sète, procède à l'installation des nouveaux docteurs de l'hôpital ; les membres du conseil d'administration de l'hôpital assistent (dont Joseph EUZET, le frère d'Honoré) ; "dans une improvisation charmante, empreinte de la plus grande courtoisie, M. le Maire adresse ses félicitations à M. le docteur SCHEYDT (qui est nommé médecin-chef honoraire) dont il rappelle tout le dévouement pendant son long séjour à l'hôpital où il a été comme interne et qu'il est heureux d'y retrouver aujourd'hui" ; les compliments vont aussi aux docteurs CADILHAC et RICARD ... (PM du 22.12.1928)
- La liste d'Union et de concentration républicaine et socialiste (dite aussi liste EUZET) comprend 17 conseillers sortants sur les 30 noms. Honoré EUZET obtient 2770 voix, Eugène ROM (adjoint sortant) 2716 voix, Isidore CRÉMIEUX (adjoint sortant) 2469 voix et Jérémy HÉBRARD (adjoint sortant) 2514 voix.
- La liste d' Union républicaine et d'action économique (10 noms seulement sont indiqués par le PM) voit sa tête de liste, Jacques LLAURENS, obtenir 1631 voix.
- La liste d'Union des gauches et de défense des intérêts de la ville et du port de Sète, avec 1336 voix pour son leader, Jacques Joseph AUGÉ, cependant que le meilleur résultat est celui de Léopold BORNES avec 1454 voix.
- La liste du bloc ouvrier et paysan dont le premier nom, Alexandre ALLIAS, fait 1231 voix.
- Le parti socialiste S.F.I.O. ne voit sa tête de liste, Victor MANDOUL, n'obtenir que 717 voix.
Le PM du 09.05.1929 résume ainsi ces résultats : "A Sète, la liste qui réunit toutes les tendances du Parti républicain, y compris les socialistes unifiés, arrive largement en tête."
Au second tour, toujours pour 9052 inscrits, les votants ne sont plus que 5970, les blancs ou nuls 230, soit 5740 suffrages exprimés, répartis sur 2 listes. Le PM du 13.05.1929 indique qu'une "effervescence beaucoup plus grande que celle de dimanche dernier n'a cessé de régner dans les salles de vote et si les abords de l'Hôtel de Ville offraient, au premier tour, peu d'animation, il n'en a pas été de même dans la soirée d'hier. La lutte paraissait devoir être très chaude entre la liste d'Union et de Concentration Républicaine et Socialiste (liste EUZET) et la liste du Bloc Ouvrier et Paysan. Aussi le public s'est rendu en grand nombre, aussitôt après dîner, à la mairie. Le dépouillement s'est poursuivi sans incident et, à minuit 30, le maire proclamait les résultats"
La liste EUZET est élue en entier. Tous les 30 noms de la liste font chacun plus de 3000 voix. EUZET en obtient 3569, ROM 3033, CRÉMIEUX 3233 et HÉBRARD 3195. Seuls deux membres de l'autre liste (celle du bloc ouvrier et paysan) obtiennent plus de 2000 voix (ALLIAS 2486, HACHACQ 2025).
(Note : ces chiffres donnés par le PM demandent à être vérifiés car il y a souvent des erreurs - du moins de quelques unités - dans les journaux)
PM du 20.02.1931 : "M. Honoré EUZET, maire de Sète est mort hier. Nous apprenons la mort, à l'âge de 85 ans, de M. Honoré EUZET, maire de Sète, officier de la Légion d'Honneur. Entré très jeune dans la politique, M. EUZET arriva au conseil municipal, pour la première fois, en 1878 ; une seconde fois en 1888. Après une interruption de quelques années, il fut élu maire le 3 mai 1896. Après l'élection de la liste MOLLE, M. EUZET reprit sa place, à la Mairie, le 18 juin 1908, jusqu'en 1912. Au renouvellement intégral du 30 novembre 1919, M. EUZET fut élu, avec sa liste, et remplit les fonctions de maire sans interruption jusqu'à ce jour." L'avis mortuaire paru dans ce même numéro précise que la maison mortuaire est au 17, quai Noël-Guignon.
MS du 20.02.1931 : "Sète, le 19 février. M. Honoré EUZET, maire de Sète, vient de mourir à l'âge de 86 ans. Maire de Sète depuis de longues années, M. EUZET a joué un rôle important dans la vie politique et municipale depuis plus de 60 ans. Il était socialiste indépendant."
"Avant que la dépouille mortelle de M. Honoré EUZET, maire de la ville de Sète et officier de la Légion d'honneur, soit mis au lieu du repos, je veux comme représentant du clergé et des institutions catholiques de Sète, rendre un dernier hommage à la mémoire de celui qui a été particulièrement un homme de liberté, de tolérance et de loyauté. Je ne parlerai pas de son rôle politique et de sa capacité administrative. D'autres l'ont fait avec éloquence, et je suis particulièrement incompétent sur des questions qui sont en dehors de mon ministère. Mais je relèverai chez M. Honoré EUZET, le sentiment de la liberté qui a inspiré toute sa vie. Il avait l'âme du combattant, et à un âge déjà très avancé, il affirmait que le combat pour soutenir et défendre ses opinions politiques et sociales, ne lui portait aucune peine. Mais il admettait puisque ce combat existait, la liberté d'autres idées et d'autres systèmes. Il avait l'intelligence et le sentiment de la liberté. Lorsque je fus obligé un jour, de descendre dans l'arène des discussions philosophiques, et de défendre l'idée de Dieu qui a inspiré toute ma vie de prêtre, il m'affirma son estime en me sisant : Vous êtes aussi un combatif ; vous défendez vos idées et vous les placez sous l'égide de la raison, en vous servant du bouclier de la liberté. Je vous félicite d'y mettre tout votre esprit et tout votre coeur. M. Honoré EUZET était aussi un homme de grande tolérance. Il comprenait le rôle de la religion dans la société. C'est à son large esprit que nous devons d'avoir conservé les Petites Soeurs de l'Assomption, qui ont adopté le pauvre et l'ouvrier comme de véritables mères, et la lettre qu'il écrivit pour les défendre et qui fit le tour de la France entière, est encore dans toutes les mémoires. Il a traité avec respect, avec bienveillance, les Filles de la Charité qui, dans notre ville, portent si haut le drapeau du dévouement et de l'abnégation. Lorsque Monseigneur l'évêque de Montpellier vint bénir la première pierre de la chapelle du Lazaret catholique, et un an après, la chapelle elle-même, M. EUZET vint s'associer à la joie du clergé et des religieuses de l'hôpital, montrant de plus, à notre évêque, ce qu'était un grand esprit doublé d'un grand coeur. Pour moi, je ne rappellerai pas sans émotion la part qu'il m'a donné dans les manifestations patriotiques qu'il avait organisé. C'est à lui que le curé-doyen qui vous parle, doit d'avoir représenté la ville, avec M. FOUILHÉ, le très aimé conseiller municipal, à Longuyon, lors de la remise de la croix de guerre à cette ville martyre ; d'avoir parlé dans les grandes circonstances de notre vie nationale et d'avoir entendu de ses lèvres : Vous êtes ici l'artisan de l'union sacrée, le prêtre ami du peuple et le défenseur de toutes les causes sacrées ! Je le remercie en ce moment, de m'avoir donné ce témoignage qui m'a valu de la part de vous tous, Messieurs et mes frères, une estime et une affection dont je sens plus que jamais le prix. M. Honoré EUZET, homme de liberté et de tolérance, a été aussi un homme de loyauté. Cela n'est pas étonnant. Il avait, dans sa nature, quelque chose d'autoritaire et d'indépendant. Esprit très cultivé, lisant non pas les petits livres ou les petits romans à la mode, mais des ouvrages de premier plan, les grandes revues, telles que la Revue des Deux-Mondes, rompu à toutes les nuances du droit administratif et des questions sociales, il se forgeait ses propres idées, sa propre conduite, et marchait dans les grands chemins du monde moderne avec une loyauté qui n'avait pas lieu de surprendre chez une âme aussi droite. Je l'entends encore au cimetière Le Py, au premier anniversaire de l'Armistice, devant le monument des morts : Je suis convaincu, et je vous le dis en toute franchise, de l'immortalité de l'âme. Certes, ajoutait-il, cette immortalité jaillit d'elle-même des tombes du cimetière ; mais elle s'affirme, lorsque nous parlons de nos héros. Non, ils ne se sont pas effondrés tout entier, dans les fleuves de sang ou dans les chemins de la mort à la frontière ; leurs âmes sont au-dessus de nous et nous parlent ! Il a regardé la mort en façe et a envisagé les mystères de la vie future avec la loyauté d'un PASCAL et la vision d'un BOSSUET ! J'ai eu ses dernières confidences. Je puis vous assurer que l'une des grandes consolations de ma vie est, à l'heure présente, d'avoir vu cette âme donner aux derniers moments de sa vie mortelle, les conclusions et les solutions pratiques qui sont dans le coeur et sur les lèvres des âmes loyales ! M. EUZET est mort aussi, en bon chrétien ; il a courbé sa belle tête sous la bénédiction du prêtre à qui il donnait et je suis fier de le dire, le nom d'ami. Mon amitié lui est acquise plus que jamais ! Quelle grande leçon il nous donne ! Messieurs et mes frères, ne l'oubliez jamais ! Ayez comme lui, le sentiment de la liberté ! Ayez la tolérance qui sait supporter les idées qui ne sont pas les vôtres ! Soyez des hommes de loyauté et de devoir, comme notre cher disparu. Notre société a besoin d'union, d'amour, d'amour surtout pour les pauvres, pour les ouvriers, pour le peuple. L'avenir de notre France, et surtout de notre chère ville de Sète sera beau, grand, magnifique, si nous savons nous aider et nous aimer, comme nous le dit notre regretté maire, du fond de son cercueil. Pour moi, Messieurs et mes frères, tant que j'aurai un souffle de vie, je garderai ces enseignements, et je confirmerai l'oeuvre de paix, de concorde et d'amour, qui a été l'oeuvre de M. Honoré EUZET et de ses collaborateurs dans l'administration de notre chère cité !"
La succession
Gaston ESCARGUEL, nouveau maire de Sète
(Le petit Méridional - 23.03.1931)
Honoré EUZET : Clin d'oeil final
Un clin d'oeil pour terminer : on sait que les pharaons de l'Égypte ancienne faisaient apposer leurs sceaux ou leurs noms sur les monuments élevés pendant leur règne et on sait aussi que leurs successeurs faisaient souvent marteler les cartouches comprenant leurs noms, de façon à ce que les gloires passées ne leur fassent pas de l'ombre. Toute proportion gardée, c'est probablement ce qui s'est passé pour notre maire de Sète qui avait fait inscrire son nom dans un écusson au plafond du foyer du théâtre. On s'en est aperçu lors de la restauration de l'édifice (octobre 2011-septembre 2013) : "Les restaurateurs ont fait ressurgir au plafond du foyer, sous un ancien badigeon, un écusson marqué du nom d'Honoré EUZET, Maire de Sète à l'origine de la construction du théâtre. Il a retrouvé une parfaite symétrie avec l'écusson d'Antoine GOUR, l'architecte du théâtre." (Thau Agglo)
D'une certaine manière, ce théâtre (à qui on a donné le nom de MOLIÈRE en 1983) est comme la pyramide de son règne. Il ne fallait pas que d'autres se lancent dans cette aventure alors qu'ils n'avaient pas de grands desseins. Il fallait que cette oeuvre soit grande, qu'elle soit belle, qu'elle soit unique (d'où son prix final, ce qui n'a pas manqué de lui être reproché). Bref, on a bien l'impression que ce théâtre est son oeuvre maîtresse. De fait, la postérité ne l'a pas démenti. L'édifice est classé à l'Inventaire des Monuments historiques depuis 2003. Cette même année, il est devenu patrimoine intercommunal, sous la responsabilité de Thau Agglo : "Vaisseau amiral de la culture du Bassin de Thau et fleuron architectural" lit-on sur le site de l'agglomération qui titre sur l'histoire du théâtre : "Un bien commun ... hors du commun". |
Notes