La lignée des EUZET du mas d'Euzet de Saint-Gély-du-Fesc (34).
Les branches de Montferrier.
(T 44 suite 2)
La carte de Cassini montre, en haut à gauche, le mas de Coulondres (anciennement mas d'Euzet) de Saint-Gély-du-Fesc ; au milieu, la
rivière, le Lez, qui sert de démarcation entre Montferrier et Baillarguet ; en haut, à droite, Assas ; en bas à droite,
Clapiers.
Les seigneurs de Montferrier.
Un traité de paix au XIVe siècle (1380),
par Etienne DALVY,
"membre de plusieurs sociétés
savantes",
Paris, Imprimerie L. BAUDOIN, 2, rue Christine. (non daté)
En l'an de la naissance du Christ mil trois cent quatre-vingt et l'indiction troisième du pontificat du Seigneur
Clément, septième,
très-saint en Christ, par la divine providence de Dieu pape, en l'an troisième du règne du Seigneur Charles, par la grâce de
Dieu Roy de France, et en ce jour de Dimanche qui fut le vingt-troisième du mois de septembre, par le présent acte public qu'il appère
à tous et soit connu, que, comme un débat, différend et une querelle avaient été émus, et étaient
espérés s'émouvoir plus grands, par et entre nobles hommes Thomas de Montferrier d'une part et
Jacques de Manhania d'autre part,
Seigneurs suzerains du fief de Montferrier et de toutes ses dépendances et relevances, de et parce que, entre ces mêmes parties, diverses
questions avaient été suscitées et longtemps débattues sur la haute, moyenne et basse justice dudit fief de Montferrier et de
son territoire ainsi que sur plusieurs autres droits dudit fief et de ses dépendances, et que de ces débats beaucoup de dommages, combats,
malheurs, rébellions, blessures et morts de personnes s'étaient ensuivis.
Attendu encore que jadis entre lesdites parties de nombreux et différents traités de paix, sur lesdits débats et querelles par des
amis communs furent proposés et à peu d'effets amenés, en raison de quoi, furent les justices et tribunaux et officialités dudit
pays très troublés, et la justice due nullement administrée, d'où par ainsi beaucoup de délits et de crimes
demeurèrent impunis, et les sujets dudit fief tirèrent l'audace de délinquer.
C'est pourquoi lesdites parties et quiconque dans l'avenir, pour le bien de la paix et concorde, voulant les causes de procès, différends et
débats éviter, aux dépenses, frais, tumultes, rixes et combats obvier, la bienveillance, paix, amitié et tranquillité
à soi et à perpétuité, à ses successeurs ou à leurs ayants droit ou devant avoir droit, procurer, de plein
gré et de pleine science, ni induits ni séduits par aucun, ni par fraude circonvenus, tous dols et fraudes cessants, sur ces questions et
différends, transigèrent et convinrent comme suit :
Et d'abord convinrent, transigèrent et firent amicale composition que tous droits des fiefs, soit de hautes justices et hommages et suzerain pouvoir
et tous quelconques droits touchant la justice et suzeraineté, que jadis Brémond de Montferrier, chevalier, avait
et tenait du Seigneur Roy de Majorque, Seigneur de Montpellier, sur tout le pays de Montferrier, le territoire et les dépendances dudit lieu, tant
au delà qu'en deça la rive du Lez, soient, demeurent et doivent être communes et indivises entre lesdites parties, comme étant
égales pour lesdits droits de justice, fief et hommage, suivant la teneur de l'acte de participation et vente faicte par et entre
Aimon de Montferrier, jadis héritier testamentaire dudit Brémond, d'une part, et noble
Pierre de Gailhard, prédécesseur dudict de Manhania, d'autre part.
De même transigèrent, conclurent et convinrent que les deux dites parties et leurs successeurs, suivant qu'ils succéderont dans
l'avenir, tiennent et doivent tenir en fief du Seigneur de Montpellier et de ses successeurs, sous hommage, et serment de fidélité:, pour toute
juridiction qu'ils y ont et commune puissance, les droits de haute justice et desdits hommages et feront reconnaissance dudit fief audit Seigneur de
Montpellier, chacun présent ou l'un absent, et que pourra la reconnaissance de l'un à l'autre profiter.
Mais cepourtant si ledit Seigneur de Montpellier ou ses successeurs en ledit fief, révoquait ou disait vouloir révoquer, cassait ou faisait
vaine ladite donation faite à Brémond de Montferrier par le Seigneur Roy de Majorque, son prédécesseur, dans ce cas, ledit
Thomas, comme héritier et successeur d'Aimon de Montferrier, en aucune façon ne sera
tenu à l'éviction totale, ou de partie, ni à restitution du prix envers ledit noble Jacques de Manhania, en
raison du pariage et vente faits par ledit Aimon audit Pierre de Gailhard, prédécesseur
dudit de Manhania.
De même convinrent et firent amicale composition que, comme avant, les Baillis et Juges dans ladite Seigneurie soient placés par lesdictes
parties ou leurs successeurs, conjointement ou séparément, et soient créés et institués ceux qui exercent toute espèce
de justice civile et criminelle, communément par portions indivises et égales ; lequel Bailli et Juge feront serment aux deux parties ou
à l'une d'elles au nom des deux parties ; ils seront fidèles, suivront les choses utiles, éviteront les inutiles, et administreront,
au nom des deux parties, sans acception des personnes.
De même conclurent et convinrent que chacun des deux et leurs successeurs, soit conjointement, soit séparément, pourrait à
volonté, placer, créer, instituer des procureurs, notaires, servants, géôliers des prisons, héraults,
jurés-priseurs, banniers et autres officiers et les changer, suspendre, déposer, corriger, punir et faire d'eux justice, au nom des deux
parties par soi-même ou par le Juge et ledit Bailli ; lesquels officiers sont tenus de jurer qu'ils seront fidèles aux deux et se tiendront droit
dans leur office.
Si lesdits officiers sont placés conjointement, ils seront stipendiés sur frais communs par lesdites parties ou leurs successeurs. Mais s'ils
sont créés séparément, chacune sera tenue de stipendier les officiers par soi créés, placés,
institués, autant qu'il lui paraîtra meilleur ainsi.
De même ils convinrent que s'il arrivait, par quelque cas, qu'une personne eût commis un délit dans cedit pays ou territoire et ses
dépendances, à raison duquel délit elle devrait une amende de ses biens en entier ou pour part, lesdits biens du délinquant
doivent auxdites parties ou à leurs successeurs être appliqués en commun.
Si pourtant les biens de telle personne condamnée étaient tenus en emphythéose, ou en fief, ou de tout autre traité de censive,
par une desdites parties ou de leurs successeurs, dans ce cas et non autrement, tous lesdits biens seront appliqués à ladite partie ou à
ses successeurs qui ont ou dans le temps auront cens ou usage à raison de propriété directe ; et s'il arrive que ces biens, en tout
ou partie, reviennent audit Seigneur ou à ses successeurs, lesquels n'ont pas cens, usage, ou puissance directe sur ladite part, qui n'est pas de
propriété directe, il sera tenu de vendre et hors sa main placer lesdits biens, ou la part à soi revenant desdits biens, dans
l'année du jour de l'acquisition, toute fraude cessant, et sauf le droit de louage, de concessions (servitudes) et droit de prélèvement
sur ladite vente ; ce qui sera strictement observé si ces biens sont situés dans les lieux plus bas déterminés et dans un
article suivant mentionnés.
De même convinrent, transigèrent, conclurent que tout le territoire de Baillarguet et le château soit
et demeure audit noble Thomas de Montferrier et à ses successeurs, en propriété et droit direct, à
cause de l'acquisition faite dudit château par Brémond de Montferrier, des tuteurs de Guillaume
de Roquefeuil, héritier universel de Jehan de Roquefeuil ; et d'autre part, que le mas du
Pouget et le territoire du Puechroux soient et demeurent de plein droit audit Seigneur
Jacques de Manhania et à ses successeurs. En telle sorte que l'une desdites parties ou de ses successeurs ne pourra dans l'avenir, avoir droit
et propriété du cens, d'usage et de droit direct et puissance sur le territoire de l'autre, sans le consentement exprès, conseil et
mandement de cette dernière.
La Justice cependant, sur cesdits territoires, sera commune et indivise entre lesdites parties.
Pourtant si ledit Thomas voulait avoir seul et en entier la juridiction sur ledit château et territoire de Baillarguet, de
même ledit Manhania aura seul et entier la juridiction sur ledit mas du Pouget et le territoire
de Puechroux, ce qui est
laissé au jugement et choix dudit noble Thomas qui sera tenu de choisir et déclarer son intention dans un an à compter du jour de la
présente transaction, à savoir s'il veut communité desdits lieux et territoires ou séparation, ainsi qu'il est dit plus haut.
Le territoire de Puechroux est borné de long en long par la rive du Lez, de même que ledit territoire de
Baillarguet, et il est séparé dudit territoire de Baillarguet par la route par
laquelle on va du Portail dudit noble de Manhania lequel est appelé Portail Neuf de Montferrier, vers Montlaur, jusqu'au territoire d'Assas et de
Clapiers.
Ce qui est à droite vers Montpellier jusqu'au territoire de Castelnau, en descendant ladite rive du Lez, est du territoire de
Puechroux, lequel appartient audit de Manhania ; et ce qui est à gauche vers Montferrand, jusqu'au territoire de Prades, en remontant ladite rive du Lez, est de
Baillarguet, qui appartient audit Thomas de Montferrier.
Cependant le moulin de Pierre Sabatier, au nom de son épouse, qui est situé sur ladite rive du Lez, contenant avec la terre y contiguë,
quatre sétérées, ou à peu près, borné par ladite route et une autre route allant à Prades, étant du
côté gauche situé dans ledit lieu de Baillarguet, restera commun et indivis entre lesdites parties, quant au cens, usage et
propriété directe.
Le mas de Pouget est borné avec le pays et les frontières de la seigneurie dudit Montferrier, depuis le Portail Grand jusqu'audit Portail
Neuf, à l'orient ; à l'occident, par les terres de la paroisse de Saint Clément qui sont de la juridiction de Montferrier ; au midi,
il est borné par la route haute par laquelle on va du Portail Grand de Montferrier vers le mas de Colias et le mas de l'Olivier ; et au septentrion,
par une autre route qui va dudit Portail Neuf vers la rive du Lez et avec un chemin public par lequel on va de Montmal à la grange du Pin.
De même convinrent et transigèrent que ces mêmes grèves, rivages du Lez, îles y formées, mais non par la main faites,
et les arbres dans lesdites îles existants, soient et doivent être communs entre les parties et leurs successeurs.
De même qu'une partie puisse y pêcher, chasser, faire des moulins nouveaux, réparer les anciens, des biefs ériger,
égaliser, et l'eau amener en son fond propre de la rive et du fleuve au plus proche, librement, et sans opposition de l'autre, du moment qu'aucun
détriment ou inconvénient à l'autre partie n'est par cela apporté.
De même convinrent que sur la part restante de tout le territoire dudit lieu et de ses dépendances, ledit de Manhania
et ses successeurs aient la quarte partie en propriété ou droit direct, et ledit noble Thomas aura les
deux quarts qui font la moyenne part, en propriété ou droit direct ; la quarte restante du territoire, avec la huitième part de
juridiction moyenne et basse, sur toute l'île de Montferrier seulement, appartiendra à d'autres nobles coseigneurs dudit lieu, sous le fief et
hommage des deux dites parties.
Cependant les habitants dudit lieu ne seront pas tenus de rien payer à leurs nobles coseigneurs suzerains pour droit d'usage, si ce n'est trois
deniers tournois par chaque sétérée de terre, pour les possessions anciennes, à moins qu'autrement il soit trouvé un
écrit ou contrat de censalité.
Est excepté pourtant de cette convention le territoire de Valferie, le pré commun et le territoire de
l'ancien Montferrier, confronté avec Bernard de Antinhat, qui sont outre la rivière de Lironde, et sur
lesquels ledit Jacques de Manhania a puissance et toute juridiction seul et en entier, suivant donation naguère à
lui faite du même territoire par le Seigneur Roi de Navarre, Seigneur de Montpellier, laquelle donation aura effet sans aucune opposition dudit noble
Thomas et de ses successeurs ni des habitants dudit pays.
De même transigèrent, convinrent et conclurent que ledit noble Jacques de Manhania, seul et en entier, aura le four
banal et que, pour chauffer son four banal, il pourra prendre du bois sur tout le territoire et la juridiction dudit païs, sans nulle opposition,
pourvu qu'il ne prenne pas d'arbres fruitiers.
Ledit noble Thomas, d'autre côté, pourra avoir un four propre, et non banal, et s'il voulait faire cuire au four
banal, il ne sera tenu de rien donner pour chauffer, soit enfourner, si ce n'est un pain sur vingt-cinq, tandis que les autres habitants payent et sont
tenus de donner un pain sur vingt, outre la farine accoutumée, laquelle ne doit pas payer ledit noble Thomas ni ses
successeurs dans l'avenir.
De même convinrent que ledit Manhania et les successeurs d'iceluy et ses fourniers sont tenus de donner les tables
nécessaires à l'usage dudit four, sur lesquelles tables il sera permis aux hommes ou femmes dudit lieu et de son territoire d'y purifier et
lever leurs farines, et après avoir enlevé leurs pains ou provisions, de les nettoyer de la façon qui leur plaira, avec un plumeau ou
balai de plumes, ou de feuilles, ou de paon, pourvu qu'elles ne rayent pas ces tables et ne les nettoient pas avec le fer ou le bois.
Et de même ils convinrent que le fournier n'exigerait pas des tourtes à la fête de la naissance du Seigneur, et que les hommes ou femmes
en aucun temps ne seraient tenus de fournir de mauvais gré des galettes.
Et de même que ledit Manhania ou ses fourniers, ainsi que ses successeurs, soient tenus et doivent cuire, sans prestation
de fournage, sans recevoir aucune portion, les provisions de bouche, fromages, pains à cuire dans la cendre, fleurons et poteries du même
Thomas et de ses gens, et que pour l'usage propre d'eux seulement, et non pour vendre ou pour cause de vente, avec les autres
habitants, hommes ou femmes, ils soient tenus de donner un droit de fournage modéré.
De même que ledit Manhania ou ses fourniers et successeurs n'exigent pas aucun argent ou autre chose d'aucune mariée
ou fiancée, quand pour la première fois elle viendra et entrera dans ledit four, ni de même d'une dame ou d'une femme qui
relèverait de couches, comme ils avaient coutume de l'exiger auparavant.
De même que s'il arrivait qu'un autre four, ou d'autres fours ou petits fours fussent faits dans ledit lieu, district ou territoire de Montferrier,
par quelques-uns ou quelqu'un de ce lieu ou de cet ensemble de pays présents ou futurs, ils convinrent que ces four ou fours ou petits fours dans
ladite seigneurie dans une partie quelconque de son territoire et district, faits ou devant être faits à quelque temps que ce soit dans
l'avenir, par sa propre autorité, ou de celle de ses successeurs, par la force et la vertu de la présente convention, puissent être
en entier détruits par ledit de Manhania, ou ses successeurs ou leur famille, seulement par sa pleine et libre
volonté, et sans jugement d'aucune sorte, ou permission ou autorisation demandée ou obtenue ; et qu'il soit permis audit noble
de Manhania, à ses successeurs ou leur famille, de s'approprier et emporter de sa propre autorité les provisions
ou les pains qui devaient être faits par quelqu'un ou quelques-uns dans d'autres fours sur ce territoire, ou d'en recevoir librement de plein droit
l'estimation, et que lesdits fours n'en seraient pas moins détruits ; et comme peine, toutes les fois que cedit passe-droit sera commis ou fait par
le susnommé noble Thomas de Montferrier et ses successeurs, ou par les particuliers de tous ses biens et
dépendances, à l'encontre des conditions dites ou de l'une d'entre elles, que ce soit en partie ou en totalité à quelque
époque et en quelque nombre que ce soit, les vivres et les pains ou leur valeur ayant été enlevés et audit noble
de Manhania appliqués, ils seront tenus de payer au moins vingt sous Melgoriens immédiatement et par ce seul fait,
audit noble de Manhania et à ses successeurs dans l'avenir.
Montferrier, par Jean-Marie AMELIN
(Voyages pittoresques ... 1820-1849)
Commentaires
Etienne Dalvy a fait de ce traité une traduction mot à mot, ce qui donne parfois des phrases un peu curieuses mais qui offre l'avantage de
correspondre exactement au texte latin, sans extrapolations. Cependant, quelques réserves doivent être faites sur la traduction de certains
patronymes. Ainsi, dans la liste des habitants, il faut certainement comprendre "Gély" quand il écrit "Egide" (Egide, Egide le jeune,
Guillerme Egide), de même faut-il traduire "Prunet" quand il écrit "Prunier" (Jehan Prunier le vieux, Jehan Prunier le jeune) ; Pierre du
Mas est, certainement, Pierre Delmas, etc. Mêmes doutes dans la liste des témoins où le point-virgule entre "Colin" et "Bourgeois" doit, certainement,
être compris comme une virgule, ce qui donnerait : "Bertrand Colin, bourgeois de Montpellier". Pour toutes ces raisons, il faudrait pouvoir retrouver cet
acte, ou du moins sa copie, puisque Etienne Dalvy indique que l'original appartenait au marquis de Montferrier et qu'il n'a eu sous les yeux qu'une copie
(qui se trouve, peut-être encore aux AD 34).
Dans son introduction, Etienne Dalvy, donne le contexte et les raisons qui expliquent le pourquoi de ce traité : "Ce
Traité mettait fin à des dissenssions longues et sanglantes ; mais malgré la précision de ses termes, rien ne prouve qu'il ait
réussi à fermer à jamais l'ère des luttes, entre Seigneurs rivaux. Il est probable qu'elle fut longue, et que les embuscades,
les combats, les meurtres, les pilleries se succédèrent en grand nombre. L'origine du conflit fut dans la contestation de certains droits sur
une partie des terres relevant en fief de Montferrier.
Aimon II de Montferrier, fils de Brémond, en 1350, avait vendu à
Pierre de Gailhard une partie de ses droits. Jacques de Manhania,
ayant sans doute épousé la fille du Sire de Gailhard, se trouvait héritier de cette portion de suzeraineté
sur les terres de Montferrier. Thomas de Montferrier, fils d'Aimon, ne tarda pas à chercher querelle au
Seigneur de Manhania et tenta de lui enlever l'exercice de ces droits. De là le conflit qui aboutit aux extrêmes violences.
(...)
Ce fut un voleur, condamné par le Seigneur de Montferrier et sauvé par le Seigneur de Manhania, qui fut, non pas l'origine, mais la cause
immédiate de la conflagration. D'après un récit qui accompagne le traité, le Seigneur de Manhania ouvrit les hostilités.
Un matin que Thomas de Montferrier sortait de la chapelle de son château, avec deux des siens, Manhania se présenta, suivi de plusieurs hommes
d'armes vêtus en guerre, et l'accosta pour lui demander, d'une façon hautaine, de cesser ses poursuites à l'égard du voleur en
question, s'appuyant, pour ce faire, de ce qu'il avait droit de justice comme Montferrier lui-même. Celui-ci riposta que ce
voleur &eacutait un homme de la châtellenie de Baillarguet, dont il était seul Seigneur, et, pour appuyer sa réponse, il poussa rudement de
côté son interlocuteur. Ce fut la déclaration de guerre.
Manhania s'éloigna en proférant des menaces et descendit la montagne jusque dans la vallée. Quelques
instants après, on aperçut un tourbillon de fumée qui s'élevait d'un ferme appelée Mas du Pin. C'étaient
les gens de Manhania qui l'avaient incendiée. Aussitôt, Thomas de Montferrier réunit
les siens et un combat fut livré entre les deux partis. Par représailles, Thomas de Montferrier fit pendre douze des
gens de Manhania, qui furent pendus sur la plus haute tour de son château. Son cousin Pierre de Vidal, seigneur de la
Terrade, riche et puissant, dont la maison devait s'éteindre, six ans plus tard, dans celle de Montferrier, et son beau-frère, Guillaume du
Cayla, prirent parti pour lui et envoyèrent du renfort.
(...)
Disons tout de suite que les incidents de la lutte qui nous occupe n'ont point à être retracés par le menu et qu'ils comportèrent
les incendies, les pilleries, les embuscades et coups de main habituels. Cependant, les voisins ne tardèrent pas à être inquiets. Les
Seigneurs de Pignan, d'Atinat, d'Azémar, Jean de Roquefeuil, Seigneur de Montarnaud, crurent devoir intervenir et proposèrent leur
médiation. Elle fut acceptée. Mais bientôt les discussions ne tardèrent pas à se rallumer. Elles semblent avoir
duré plusieurs années, et à différentes reprises des efforts infructueux pour les faire cesser furent tentés par les
amis des intéressés. Ce fut Arnaud de Roquefeuil qui finit par amener la paix et provoqua le traité dont nous nous occupons.
(...)