La lignée des EUZET du mas d'Euzet de Saint-Gély-du-Fesc (34).

La branche de Saussines.
(T 57 suite 2)



Histoire.

"Ce qui est certain, c'est qu'on commence toujours trop tard ce genre de recherches (généalogiques) : on s'aperçoit trop tard que l'on aurait pu, que l'on aurait dû questionner nos parents avant qu'ils ne nous quittent. Ils auraient pu déjà nous en dire tant !" Extrait d'un éditorial du président du Centre d'études généalogiques Rhônes-Alpes, André-Marc CHEVALLIER, dans la revue du Centre : "Généalogie et Histoire", n° 127 de septembre 2006.


Histoire.


L'alliance de l'ancien et du moderne, à Saussines
(photo J.C.E., le 24.05.2010)



"Depuis quelque temps, le Maire avait annoncé l'arrivée de quelques réfugiés, venus de la région de Reims. Dans la rue montant vers la place, l'ancienne maison d'ARGELIÈS est vide, depuis quelque temps. M. ARGELIÈS était décédé depuis près d'un an, tuberculeux. Nous l'entendions, au passage, à la belle saison, quand la fenêtre était ouverte, tousser à s'époumonner, puis cracher longuement. Les premiers froids l'emportèrent à la tombe, mettant fin à son calvaire. Le service d'hygiène brûla toute sa literie, désinfecta la maison. La pauvre veuve qui avait lutté avec l'énergie du désespoir alla rejoindre ses deux enfants, depuis longtemps séparés du malade. On ne revit plus personne de la famille éprouvée, ruinée.

Pour accueillir une famille de réfugiés, le bâtiment fut à nouveau "sulfaté comme la vigne" mais avec du chlore. Aujourd'hui l'eau de javel a remplacé ce chlore, poudre blanche, contenue dans une boîte, faite avec une lamelle de bois roulée sur un fond circulaire ; un couvercle fabriqué de même, coiffait cette boîte, du diamètre et de la hauteur approximativement d'une tasse à café. Les lavandières faisaient tomber un peu de cette poudre dans un bac d'eau et y laissaient tremper le linge un instant. Attention ! trop de poudre, bain prolongé et le linge sortait brûlé, se déchirant comme la charpie.

On désinfecta donc à la poudre de javel. Il s'y installa un couple âgé, ayant à charge un adolescent aveugle. Les villageois leur ont fourni le nécessaire pour cuisiner, se coucher. Ils vivent discrètement, sans doute pauvrement, avec l'allocation nationale.

Le jeune garçon, par beau temps, passe la plus grande partie de la journée près de la fenêtre, comme le faisait feu ARGELIÈS. On n'aperçoit que sa tête et, là, seulement ses deux yeux - Mais quels yeux ? Deux globes blancs, caséeux, légèrement tintés de bleu, sans pupille, sans regard, sans expression ? Il rejette la tête légèrement en arrière, lève les deux boules vers le ciel, qu'il ne voit pas, comme pour l'implorer.

Au bruit des pas, il répète, comme une prière "Rouen, Rouen ! On a bombardé Rouen, on a bombardé Rouen, on a bombardé Rouen".

Lorsque vos pas sont assourdis, qu'il n'entend rien, il cesse sa rengaine d'enfant traumatisé, pour la reprendre à la moindre résonnance nouvelle.

Longtemps les gens du village entendirent cette litanie qui vous crevait le coeur.
"

Cet extrait intitulé "Les réfugiés" se trouve à la page 181, dans la partie consacrée à la première guerre mondiale, du livre de Joseph COUFFINHAL : "Mon village en ma mémoire". Sur la quatrième de couverture, l'auteur explique pourquoi il a écrit cet ouvrage sur le village de Saussines : "Enseignant retraité, j'ai vécu mon enfance à Saussines, enfance heureuse à plusieurs titres, surtout à cause de la liberté dont on jouissait dans ce bourg, et par-dessus tout à cause des libertés que je prenais, à mes risques et périls, bien sûr. Par la suite, j'ai en pensée, reconstitué l'environnement sous toutes ses formes, physique, social, humain, psychologique même. Toute cette atmosphère a disparu. Je me suis essayé à fixer ces scènes, ces portraits, ces tableaux, cette mémoire écrite ou parlée. Cet ouvrage fera-t-il référence ? Je le voudrais. (...)". En effet, plus qu'un livre sur l'histoire de Saussines, c'est un ouvrage sur les coutumes, les habitudes, les mentalités de ses habitants avant la grande guerre, ce qu'il résume dans l'avant-propos de la façon suivante : "Vivez avec cette histoire, cette ethnologie, semblable d'ailleurs dans les villages voisins. Vivez cette étape de civilisation qui va basculer avec la guerre". On s'en rend compte en citant les titres des différents tableaux qui constituent l'ouvrage : "La prime enfance, Les jeux, Les jeux de l'été, L'atelier des jours de congé, L'École de la rue, Agriculture, La Vigne, La vie associative, Le petit commerce, Les croyances, Hygiène, Types et gens, Animalier, Petits faits, La guerre, La chasse." On peut encore ajouter que l'auteur est toujours d'une grande précision dans ses descriptions pleines de vie, ce dont on se rend bien compte dans l'extrait sur les réfugiés. Le livre se trouve aux Éditions des Beaux Arts, L'oulette, 34700, à Soubès ; achevé d'imprimer le 24.12.1990 sur les presses de l'imprimerie des Beaux Arts à Lodève (34700).

Note : les noms propres sont ici en majuscules et les année en caractère gras, comme sur tout le site.


Couverture du livre sur Saussines
(par Joseph COUFFINHAL, en 1990)





sommaire

haut de page

Les lignées issues de l'Hérault

Saussines

Saussines (suite 1)